Interview de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports, à RTL le 17 septembre 2007, sur le congrès mondial de la route, la préparation du "Grenelle de l'environnement", les tarifs du TGV et la réforme des régimes spéciaux de retraite.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

J.-M. Aphatie.- Bonjour, D. Bussereau.
 
R.- Bonjour, J.-M. Aphatie.
 
Q.- Une manifestation mal connue du grand public débute, aujourd'hui, à Paris. Il s'agit du Congrès mondial de la route qui réunit 70 délégations ministérielles. C'est quoi le Congrès mondial de la route ?
 
R.- C'est tous les responsables routiers du monde entier : les ministres, les entreprises, les administrations. Cette année, c'est intéressant : 1) parce que ça se passe à Paris, c'est une bonne chose. Et 2) parce qu'on va parler du développement durable, donc on va sortir de la route pour aller sur des thèmes plus importants.
 
Q.- Il faut construire les routes, c'est encore le mot d'ordre. Donc, il faut continuer à polluer ?
 
R.- Ecoutez, il faut toujours construire des routes parce que, d'abord, il y a beaucoup de pays dans le monde qui voudraient bien avoir un réseau routier pour accéder à un minimum de développement économique. Et puis, dans des pays comme le nôtre, il faut finir un peu notre réseau autoroutier, le rendre plus sûr, plus sécurisé, tenir compte naturellement des pollutions. Ca, ça fera partie des grands débats du "Grenelle de l'Environnement". Et c'est la question, ce matin, sur laquelle j'ai entendue que réagissaient vos auditeurs.
 
Q.- Oui, parce que G. Coche, journaliste à RTL, raconte que les associations font état d'un quasi consensus dans la préparation de ce fameux "Grenelle de l'Environnement". La vitesse pourrait être réduite à 120 kilomètres sur les autoroutes.
 
R.- Alors, concernant la vitesse, il y a deux manières de lire les choses. Il y a la manière Sécurité routière. Donc, là, on a des règles dans notre pays. Le souhait du Gouvernement, nous en avons reparlé avec F. Fillon, la semaine dernière, c'est de ne pas changer tout le temps les règles pour que les gens les comprennent bien, se les assimilent et pas changer sans arrêt les limites. Donc, nous allons faire plus de radars, nous allons augmenter encore la lutte contre l'alcool et le Premier ministre nous a demandés de réfléchir à une réforme du permis de conduire avec J.-L. Borloo. Ce qui est très important.
 
Q.- Ah ! Juste deux mots...
 
R.- La réforme du permis de conduire, c'est-à-dire essayer de lutter contre l'injustice actuelle qui fait que le permis de conduire est cher, qu'il y a certaines familles où il y a plein d'enfants, vous n'avez pas trop de moyens. Certains ne peuvent pas passer le permis de conduire. Donc, essayer de faire en sorte que le permis de conduire soit mieux ouvert à toutes les Françaises et à tous les Français. Il y a beaucoup d'expériences à Suresnes, à Carcassonne et ailleurs. Et puis, peut-être voir également la formation tout au long de la vie parce qu'une fois qu'on a passé son permis, il y a peut-être des étapes dans lesquelles on peut se retrouver pour voir si tout va bien.
 
Q.- Mais on ne change pas le système de points, 12 points, tout çà ?
 
R.- Non, non, mais essayer de démocratiser le permis de conduire.
 
Q.- Alors, 120 kilomètres sur les autoroutes ?
 
R.- Alors, je disais, la vitesse c'est d'abord la sécurité. Et ensuite, c'est la lutte contre l'effet de serre. Donc, c'est vrai que si on va moins vite, il y a moins d'émissions, etc. Cela fait partie des centaines de propositions que J.-L. Borloo et N. Kociusko-Morizet sont en train de réunir dans le cadre du "Grenelle de l'Environnement". Donc, elle sera examinée parmi les autres. Le Gouvernement fera un choix après le "Grenelle de l'Environnement", d'une dizaine ou d'une quinzaine de propositions qui seront soumises au président de la République. Pour l'instant, nous n'en sommes pas là. Donc, on ne touche pas aux règles...
 
Q.- C'est une mesure. C'est une mesure parmi d'autres ?
 
R.- C'est une mesure parmi d'autres...
 
Q.- Et vous n'y êtes pas très favorable. On le sent bien, ce matin, D. Bussereau ?
 
R.- Si vous voulez, je trouve qu'il ne faut pas sans arrêt changer les règles. C'est déjà difficile de dire aux gens : c'est 50 en ville, c'est parfois 30, c'est 70, parfois 90. 110 sur les quatre voies, 130 sur les autoroutes. Bon. Il faut essayer de simplifier les choses. Ceci étant, s'il y a un consensus et si le Gouvernement dans son ensemble décide qu'il faut appliquer cette mesure, voilà.
 
Q.- Vous serez un bon soldat. Vous l'appliquerez mais vous n'en avez pas très envie !
 
R.- Si vous voulez, il faut laisser faire le Grenelle de l'Environnement parce que si on commence à dire avant la réunion du Grenelle de l'Environnement, voilà ce qu'on va faire après, les participants vont se demander ce qu'ils font dans les débats.
 
Q.- Alors, une réponse pour lutter contre la pollution, ça pourrait être le train. La SNCF vient de changer ses tarifs notamment pour le TGV. Beaucoup de Français jugent que le TGV est trop cher, aujourd'hui, qu'est-ce que vous dites de cela ?
 
R.- La SNCF est en situation de concurrence. Quand on veut aller à Lyon, à Marseille, on peut prendre l'avion surtout pour Marseille, l'autoroute. les autoroutes, il y a plusieurs itinéraires possibles... ou le train. Si la SNCF fait des tarifs qui ne sont pas dans le marché, elle se fera prendre ses parts de marché. Bon. Donc, c'est à elle dans son autonomie, ce n'est pas au Gouvernement de fixer les tarifs de la SNCF, c'est à Mme Idrac et à son équipe, à G. Pépy, de dire : "Voilà, je fais tel ou tel tarif !" Qu'est-ce que fait la SNCF grosse modo...
 
Q.- C'est étonnant comme réponse parce qu'on aurait cru comprendre que la SNCF était une entreprise publique, et après tout, l'Etat qui peut prendre en compte plusieurs considérations...
 
R.- Attendez !
 
Q.-... pourrait faire en sorte que le TGV soit moins cher ?
 
R.- Oui, J.-M. Aphatie, il y a plusieurs titres de transport. Il y a le transport de proximité quand on est en région Ile-de-France, c'est le Syndicat des transports d'Ile-de-France, présidé par J.-P. Huchon qui organise l'offre et les tarifs. Quand on est dans les régions, ce sont les régions et avec les TER, qui organisent leur offre, et qui peuvent jouer également sur les tarifs. Quand on est au niveau de déplacements nationaux, on a le choix entre plusieurs modes de transport. On est dans la concurrence, donc il appartient à la SNCF de trouver les bons équilibres. Naturellement, si elle faisait des tarifs invraisemblables, l'Etat le dirait. On ne peut pas demander à la SNCF de gagner de l'argent, de ne plus en perdre, alors que c'est une entreprise publique, et en même temps d'empêcher de gérer de manière autonome ses tarifs.
 
Q.- C'était "Le Parisien" l'autre jour, qui rapportait ceci...
 
R.- Oui, absolument. ...
 
Q.- Quand je vais à Chartres, disait une utilisatrice dans un témoignage recueilli par Le Parisien, cela me coûte 40 euros en TGV et 20 euros en voiture. Alors, imaginez ce qu'elle pratique comme mode de transport !
 
R.-... Oui, mais je signale d'abord que pour aller à Chartres, il n'y a pas de TGV pour aller à Chartres.
 
Q.- Ah bon, ça disait n'importe quoi ?
 
R.-... C'est des TER qui partent de la gare Montparnasse et c'est des tarifs réglementés. Il y a une forte offre. Il y a une offre sociale sur les TER. On n'est pas dans le cadre des Grandes Lignes et du TGV.
 
Q.- Allez, on va citer F. Fillon sur les régimes spéciaux de retraites. "Cette réforme est prête car elle est très simple à faire. Il suffit d'aligner les régimes spéciaux de retraites sur celui de la Fonction publique". On imagine qu'à la SNCF, ça ne doit pas arranger le climat social, ça, non ?
 
R.- Nous sommes lundi...
 
Q.- Oui, ça ne vous a pas échappé.
 
R.- C'est une information, mais je veux dire : la veille de mardi, ça ne vous a pas échappé non plus ! Et c'est le jour où s'exprimera le président de la République au Sénat. Bon, il y a une vraie détermination de notre Gouvernement de mener à bien la réforme des services spéciaux (sic), de le faire avant la réforme générale, et je crois que c'est clair. Il y aura une place très forte pour la négociation d'entreprise. Rien n'est ficelé. Et il y aura naturellement des différences entre les entreprises. La situation d'un cheminot conducteur n'est pas celle d'un conducteur de la RATP, n'est pas celle d'un marin, d'un gazier, clerc de notaire, etc. Voilà, donc je crois qu'il y a une grande ouverture et en même temps, une grande fermeté sur l'objectif.
 
Q.- Ca, c'est une réponse qui ne nous avancera pas beaucoup. Vous savez, on fait de la radio, mais on est filmé D. Bussereau sur le Net. Et alors là, on peut voir que vous avez lu attentivement, parce que çà, c'est de la diplomatie. Il ne faut pas qu'il y ait un mot qui dépasse, là.
 
R.- J'étais sûr que vous remarqueriez que je lisais parce qu'en effet, les mots ont leur importance parce que c'est le président de la République qui s'exprimera et ce n'est pas au ministre de dire des choses qui seraient fausses ou inexactes par rapport à l'esprit qui me paraît être celui du président de la République. Et c'est lui, demain, qui dira les choses.
 
Q.- Alors, sans aller plus vite que la musique, on peut dire aux cheminots que c'est fini les régimes spéciaux ?
 
R.- Ecoutez, les régimes spéciaux...
 
Q.- Aux cheminots. On parle aux cheminots, là.
 
R.- Si vous prenez l'exemple des cheminots, les conducteurs de train - on parlait du TGV ou du TER tout à l'heure - prennent leur retraite à 50 ans. Je connais, c'est un métier pénible. On a évoqué la pénibilité du travail, J.-C. Mailly l'a évoquée hier soir sur d'autres antennes.
 
Q.- Conduire un TGV, c'est pénible ?
 
R.- Il faut tenir compte, aujourd'hui, que les conditions du conducteur de TGV ne sont pas les mêmes que celles du conducteur de locomotive à vapeur qui chargeait au charbon, toujours pour aller à Chartres, mais aussi qu'il y a un stress du conducteur... Donc, il faut tenir compte de tout cela. Il faut aussi tenir du compte du fait qu'un conducteur qui a 50 ans, qui a des enfants qui n'ont pas fini leurs études, qui n'a pas forcément fini de payer sa maison, lui aussi peut-être a envie, dans certains cas, de continuer à travailler. Ca fait partie également du débat.
 
Q.- Quand on vous a entendu dans la totalité de votre réponse, on ne sait plus si elles vont les garder ou pas les régimes spéciaux ?
 
R.- Il y aura débat et le président de la République dira la ligne de ce débat.
 
Q.- Vous redoutez un conflit à la SNCF, D. Bussereau ?
 
R.- Ecoutez, je crois que la SNCF est une très belle entreprise. On souhaite qu'elle regagne des parts de marché dans le frêt...
 
Q.- Non, non, est-ce que vous redoutez un conflit ? C'était ça ma question ?
 
R.- Non, je ne redoute pas un conflit. Simplement, il faut qu'il y ait débats et dialogue. Et le président de la République le dira. Il le souhaite et c'est ce que nous ferons.
 
Q.- D. Bussereau, qui a pesé chacun de ses mots ce matin, était l'invité de RTL. Bonne journée.
 
 
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 17 septembre 2007