Texte intégral
C. Barbier.- La commission des lois du Sénat a supprimé hier le test ADN pour le regroupement familial, ainsi que le test de maîtrise du français. Les députés UMP, que vous réunissez aujourd'hui en Journées parlementaires, attachés à ces mesures, vont-ils les rétablir en commission mixte paritaire de manière ferme ?
R.- D'abord, cela prouve que c'est un débat. Et c'est un débat difficile. D'ailleurs, nous, nous avons eu un débat difficile sur ce sujet la semaine dernière. Il y a eu des sous-amendements proposés par le Gouvernement qui, me semble-t-il, ont permis d'avoir un texte équilibré, et je rappelle que c'est le volontariat, c'est pour faciliter les procédures pour ceux qui sont candidats au regroupement familial, et qui souhaitent plus facilement prouver leur filiation.
Q.- Donc vous voudriez revenir à ce texte équilibré ?
R.- Nous, on est plutôt dans l'idée de revenir à ce texte équilibré, je l'ai dit à plusieurs reprises, il y aura donc commission mixte paritaire, et puis ensuite on verra comment tout cela se termine. Mais c'est vrai que nous sommes plutôt partisans de la solution que nous avons adoptée à l'Assemblée.
Q.- Le budget 2008 a été présenté hier, il soulève scepticisme et critiques, à droite comme à gauche. "La réalité dépasse la fiction", déplore F. Bayrou ; est-ce un budget de faillite ?
R.- C'est surtout un budget qui correspond à ce qu'on veut faire. En gros...
Q.- Ce n'est plus vraiment, la rupture...
R.- Attendez, allons dans l'essentiel. Cela veut dire quoi ? Regardez les dépenses publiques telles que le Gouvernement les oriente. Vous avez, premièrement, on dépense plus là où on sait que cela va créer de la croissance, donc on baisse les impôts, notamment sur les heures supplémentaires...
R.- Cela va créer de la croissance, vous êtes sûr ? On donne de l'argent, est-ce que cela revient ?
Q.- Si quand on baisse les impôts cela ne crée pas de croissance, alors je ne sais pas à quel moment on en crée ! Je sais que, quand on baisse de l'impôt, que se passe-t-il ? On rend de l'argent aux gens et avec cela, ils consomment, ils investissent, ils embauchent. Quand vous défiscalisez les heures supplémentaires, vous êtes en plein dedans. Donc, de manière générale, les dépenses supplémentaires que vous voyez dans ce budget, c'est celles qui vont vers le fait de chercher de la croissance. C'est valable aussi d'ailleurs quand on investit plus dans la recherche, dans l'université, ou qu'on améliore le fonctionnement du service public pour plus de crédit dans la justice. Et dans le même temps, on traque la dépense inutile. Globalement, je trouve que c'est plutôt un budget qui va dans le bon sens.
R.- On nous dit 22.900 postes de fonctionnaires de moins, quand on regarde en équivalent temps plein, c'est 17.900. Il a de la rouerie dans cette mesure !
Q.- Non, pas du tout, c'est un bel effort. Et je peux en parler en connaissance de cause, j'ai été ministre du Budget pendant près de trois ans. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que de ce point de vue, la prise de conscience qu'il faut baisser le déficit de l'Etat est ancienne. La dernière année Jospin, 2002, on avait 49 milliards de déficit de l'Etat ; la dernière année de mon budget, on a été à 36 milliards, donc 13 milliards de moins. On poursuit l'effort, et je crois que c'est un élément important. La deuxième chose, il ne faut pas se tromper, là où l'on doit maintenant se concentrer, ce que d'ailleurs F. Fillon comme N. Sarkozy ont rappelé, c'est sur le déficit de la Sécurité sociale, la dérive est très préoccupante. Cela, c'est une priorité absolue. Pour ce qui concerne l'Etat, il faut continuer à traquer la dépense inutile.
R.- Les députés UMP pourront traquer la dépense inutile ? Par exemple, 3 milliards d'euros d'économies : on a gardé un peu d'argent pour un second porte-avions. Renonçons au second porte-avions, faisons l'OTAN ou la défense européenne, et passons-nous de ces 3 milliards !
Q.- Je n'ai pas le même avis que vous sur le sujet. Tout ce qui est de l'investissement, qui permet d'assurer les fonctions régaliennes de l'Etat, il faut évidemment les développer. Traquer la dépense inutile, c'est quoi ? C'est continuer de faire ce que j'avais lancé, par exemple les fameux audits. On a radiographié l'Etat ; on a trouvé des gains de productivité à tous les étages. Quand vous refaites la politique immobilière de l'Etat, vous vendez des immeubles que vous occupez inutilement, vous ramenez de l'argent ; avec cela, vous financez de l'investissement utile pour l'Etat. Quand vous faites un audit sur la politique d'achat, vous faites des économies, là encore, dans tous les ministères. On peut multiplier les exemples. Quand on réorganise des examens à l'Education nationale, on gagne 500 postes, etc. Ces audits permettent de traquer la dépense inutile.
R.- Diriez-vous le mot "rigueur" pour ces audits, comme l'avait dit C. Lagarde, "plan de rigueur" pour contrôler l'Etat ?
Q.- Je vais vous dire : on est des fanas des batailles de mots dans notre pays ! Moi, je n'en sais rien, ce qui compte en réalité, c'est que cela se fasse, c'est-à-dire qu'on soit discipliné dans la manière de gérer l'Etat. Quand une dépense sert la croissance, sert le pouvoir d'achat, on y va. Quand, en revanche, on peut traquer les dépenses de l'Etat inutiles, il faut le faire.
Q.- Alors, justement, croissance, 2,25 %, c'est l'hypothèse du Gouvernement. Donnez-moi un argument qui justifie cet optimisme, 2,25 % pour 2008 ?
R.- Tout simplement, qu'on va faire en sorte d'aller la croissance avec les dents, en travaillant plus.
Q.- Les dents ne rapportent pas de croissance malheureusement... Qu'est-ce qui peut vous faire croire que l'économie mondiale va nous donner cette croissance ?
R.- Bien sûr qu'il y a un contexte mondial qui est celui que l'on sait. Mais enfin, dans un contexte mondial qu'on connaît, vous avez des pays d'Europe qui ont plus ou moins de croissance donc cela prouve qu'on peut, qu'on a des marges de manoeuvre. Je pense, comme beaucoup de mes amis, que N. Sarkozy a tout à fait raison de dire que notre première priorité c'est de travailler plus. Et toutes les mesures que le Gouvernement est en train de préparer pour assouplir les 35 heures iront dans ce sens, à commencer par la défiscalisation des heures supplémentaires.
Q.- Espagne, Pays-Bas, bientôt Allemagne, d'autres pays sont à l'équilibre pour leurs comptes publics. Ne faut-il pas, vous, groupe UMP, décréter que c'est 2010 le rendez-vous du zéro déficit et pas 2012, comme le Gouvernement le laisse entendre ?
R.- Je vais vous dire : le plus tôt sera le mieux ! Mais en même temps, il faut financer nos politiques publiques. Mais encore une fois, je voudrais vous dire quelque chose à quoi je crois profondément : aujourd'hui, le grand débat qu'on doit avoir avec les Français, c'est sur la question du travail. Nous avons depuis trop d'années - et les 35 heures ont nuit à cela -, un rapport qui n'est pas tout à fait cohérent avec la question du travail, à condition que le travail, effectivement, rapporte plus, et c'est le débat qu'on a aujourd'hui. C'est vrai que Beaucoup de Français pensent que travailler plus, si ce n'est pas pour gagner plus, cela ne sert à rien, ils ont raison. Mais je pense qu'il faut revoir l'organisation de notre société en conséquence. C'est un rendez-vous avec l'avenir.
Q.- Alors justement, on réorganise la société pour travailler plus, plus longtemps, c'est la réforme des retraites. F. Fillon a fâché la CFDT en renonçant aux avantages donnés aux longues carrières et en expliquant que très vite on cotiserait plus longtemps sans passer par le Conseil d'orientation des retraites, sans passer le débat. A-t-il gaffé ?
R.- Non, d'abord, je crois qu'il n'a pas dit cela comme ça. Je n'étais pas présent, mais je ne crois pas qu'il ait dit cela comme ça. Tout le monde est clair sur le fait qu'il doit y avoir débat et discussions, y compris d'ailleurs à l'Assemblée nationale, et j'ai dit à plusieurs reprises que j'y étais très attaché...
Q.- Vous ne voulez pas de décret sur les régimes spéciaux ? Vous voulez une loi pour pouvoir débattre ?
R.- Non, mais cela c'est un autre sujet. J'ai par principe de respecter la Constitution. Les textes qui doivent passer par des lois, on fait des lois, quand c'est par des décrets, on passe par des décrets.
Q.- On a le choix, que faut-il faire ?
R.- Non, on n'a pas le choix. En réalité, on n'a jamais le choix. Soit on fait un décret, si la Constitution le prévoit, soit on fait une loi. Mais par contre, ce qui est sûr, c'est que si cela doit être un décret, ce que je peux comprendre, à ce moment-là, il faut que nous ayons en tout état de cause un débat approfondi à l'Assemblée nationale entre la majorité et l'opposition. Je veux, sur ce point, que nous assumions nos convictions, que l'on prenne nos responsabilités, que la gauche le fasse aussi. Que la gauche nous explique pourquoi il ne faut pas réformer les retraites, que la gauche nous explique pourquoi elle trouve sympathique que l'obstruction, à elle seule, suffise à être un projet pour la société française !
Q.- Pour les régimes spéciaux de retraites, vous vous engagez à ce que les parlementaires réforment aussi leur régime spécial ?
R.- Ecoutez, là-dessus, je me permets de vous le dire, cela a déjà été largement fait. En 2003, quand il y a eu la grande réforme Fillon sur les retraites, les parlementaires ont réformé eux aussi leur régime de retraite. Je vous rappelle que désormais, ils cotisent comme le droit commun jusqu'à 60 ans, que c'est 40 annuités, et donc, en l'occurrence, sur ce point, l'essentiel a été fait.
Q.- Et ils peuvent cotiser double toujours pour aller plus vite ?
R.- Oui, mais cela, c'est un autre sujet, c'est par rapport au fait qu'on doit distinguer un métier et un mandat, un salaire et une indemnité. La durée moyenne de mandat d'un député, vous savez, c'est, je crois, une dizaine d'années maximum, même peut-être un peu moins, je crois que c'est sept-huit ans. Donc c'est vous dire qu'on n'est pas tout à fait dans le même cas de figure que celui d'un métier.
Q.- Distinguer un métier et un mandat ; vous voulez être avocat à temps partiel en plus de vos mandats d'élu, cela soulève la polémique. Etes-vous prêt à démissionner de votre cabinet d'avocat pour faire taire cette polémique ?
R.- Encore une fois, il y a deux points. Le premier c'est la déontologie, j'y suis évidemment tout à fait attaché. D'abord, c'est légal d'avoir une activité libérale, il y a une centaine de parlementaires qui a d'autres activités professionnelles - médecins, avocats, pharmaciens, etc., dans de nombreux domaines. Mais ce qui est important, c'est de respecter la déontologie. Et donc, j'ai indiqué clairement que je ne traiterai aucune affaire qui concerne mes anciennes fonctions ministérielles, ou même qui concernent l'Etat, c'est la moindre des choses. Et puis, il y a un deuxième sujet, qui est un sujet plus général, du rapport du député avec la vie réelle tout court, la vie économique. Beaucoup de Français disent : "nos hommes politiques n'ont pas toujours les pieds sur terre" ; moi, je pense qu'effectivement, parfois, on peut être en cohérence par rapport à cela, et choisir - c'est ce que j'ai fait -, d'avoir à temps partiel une activité professionnelle qui vous permet aussi d'avoir un lien avec la vie économique. C'est le choix que j'ai fait.
Q.- J. Lang ou même P. Devedjian, veulent limiter ce genre de cumul. Ont-ils tort par rapport à cette [inaud.] dans la société ?
R.- D'abord, P. Devedjian, je m'en suis expliqué avec lui. Il a été - d'ailleurs, il me l'a dit lui-même -, très longtemps, il a exercé la profession d'avocat tout en étant député, et je crois qu'il en garde un excellent souvenir.
Q.- Un mauvais coup qu'il vous fait alors ?
R.- Non, pas du tout. On en a parlé librement, nous avons des relations très amicales avec Patrick. Et quant à J. Lang, je n'ai pas tout à fait compris ce qu'il voulait dire, mais je me suis demandé si ce n'était pas l'hôpital qui se moquait de la charité.
Q.- Vous prônez plus de contrôle parlementaire. Accepteriez-vous que l'Assemblée contrôle, justement, que votre dossier d'avocat ne soit pas en train d'empiéter sur vos anciennes fonctions ?
R.- De toute façon, vous savez, ce n'est pas seulement l'Assemblée nationale, toute personne est en situation de pouvoir le voir lorsque un avocat prend en charge tel ou tel dossier. Mais c'est surtout qu'en ce qui me concerne, cela ne se produira jamais. D'abord, parce que je l'ai clairement dit, et j'ai pour habitude d'être en cohérence entre ce que je dis et ce que je fais.
Q.- Le Gouvernement envisage, paraît-il de supprimer le référendum obligatoire chaque fois qu'un nouveau pays entrera dans l'Union européenne. Nous avons mis cela dans notre Constitution, on envisagerait de le retirer ; les députés UMP ne sont pas très contents, paraît-il, c'est vrai ?
R.- En tout cas, il y a un débat là-dessus. Je crois que ce débat n'est pas totalement formalisé, on aura l'occasion d'en parler vendredi après-midi dans nos Journées parlementaires, parce qu'on a réorganisé un peu nos Journées parlementaires. Vendredi, les députés, les sénateurs de l'UMP vont se retrouver dans des forums, un peu comme des émissions de télé, il va y avoir un débat entre les députés et un panel de Français sur le pouvoir d'achat, sur l'école et sur l'Europe. Donc, ce sera certainement une question qui sera évoquée. Il y aura sans doute d'autres occasions aussi de le faire. C'est vrai qu'aujourd'hui, nous n'avons pas encore parlé de cela dans le détail. Ce sera un des sujets du mois d'octobre.
Q.- Vous êtes, à titre personnel, pour maintenir ce référendum ?
R.- Je crois que beaucoup de choses ont été dites là-dessus. A titre personnel, je pense que c'est intéressant de rester dans cette démarche. Mais encore une fois, je pense qu'il faut être pragmatique et que tout cela doit être vu avec la sérénité qui s'impose, parce que sur ces sujets qui sont graves et importants et qui engagent l'avenir de l'Europe, et qui sont des sujets importants, il faut qu'on se dise les choses tranquillement.
Q.- "Grenelle de l'environnement", on propose déjà des taxes sur les automobiles ; est-ce une mauvaise voie ?
R.- Je ne sais pas. Je pense qu'en tout cas il ne faut pas réduire la démarche sur l'environnement à la seule question de faire payer plus les gens. Je pense que les taxes, parfois, c'est utile, mais je pense qu'il faut aller plus loin. Le vrai sujet, le vrai débat qu'il faut avoir avec les Français sur la question de l'environnement, c'est l'expression de responsabilité. Est-ce qu'on est prêts à changer nos habitudes de vie pour économiser ? Je vais prendre un exemple concret : je pense que la manière dont on conçois notre habitat aujourd'hui, peut tenir compte des économies d'énergie. Des progrès technologiques fabuleux ont été réalisés, tout ce qui permettra d'encourager l'investissement écologique pour nos maisons, nos logements, ira dans le bon sens, et c'est vrai aussi pour les gestes du quotidien avec la gestion des déchets.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 27 septembre 2007
R.- D'abord, cela prouve que c'est un débat. Et c'est un débat difficile. D'ailleurs, nous, nous avons eu un débat difficile sur ce sujet la semaine dernière. Il y a eu des sous-amendements proposés par le Gouvernement qui, me semble-t-il, ont permis d'avoir un texte équilibré, et je rappelle que c'est le volontariat, c'est pour faciliter les procédures pour ceux qui sont candidats au regroupement familial, et qui souhaitent plus facilement prouver leur filiation.
Q.- Donc vous voudriez revenir à ce texte équilibré ?
R.- Nous, on est plutôt dans l'idée de revenir à ce texte équilibré, je l'ai dit à plusieurs reprises, il y aura donc commission mixte paritaire, et puis ensuite on verra comment tout cela se termine. Mais c'est vrai que nous sommes plutôt partisans de la solution que nous avons adoptée à l'Assemblée.
Q.- Le budget 2008 a été présenté hier, il soulève scepticisme et critiques, à droite comme à gauche. "La réalité dépasse la fiction", déplore F. Bayrou ; est-ce un budget de faillite ?
R.- C'est surtout un budget qui correspond à ce qu'on veut faire. En gros...
Q.- Ce n'est plus vraiment, la rupture...
R.- Attendez, allons dans l'essentiel. Cela veut dire quoi ? Regardez les dépenses publiques telles que le Gouvernement les oriente. Vous avez, premièrement, on dépense plus là où on sait que cela va créer de la croissance, donc on baisse les impôts, notamment sur les heures supplémentaires...
R.- Cela va créer de la croissance, vous êtes sûr ? On donne de l'argent, est-ce que cela revient ?
Q.- Si quand on baisse les impôts cela ne crée pas de croissance, alors je ne sais pas à quel moment on en crée ! Je sais que, quand on baisse de l'impôt, que se passe-t-il ? On rend de l'argent aux gens et avec cela, ils consomment, ils investissent, ils embauchent. Quand vous défiscalisez les heures supplémentaires, vous êtes en plein dedans. Donc, de manière générale, les dépenses supplémentaires que vous voyez dans ce budget, c'est celles qui vont vers le fait de chercher de la croissance. C'est valable aussi d'ailleurs quand on investit plus dans la recherche, dans l'université, ou qu'on améliore le fonctionnement du service public pour plus de crédit dans la justice. Et dans le même temps, on traque la dépense inutile. Globalement, je trouve que c'est plutôt un budget qui va dans le bon sens.
R.- On nous dit 22.900 postes de fonctionnaires de moins, quand on regarde en équivalent temps plein, c'est 17.900. Il a de la rouerie dans cette mesure !
Q.- Non, pas du tout, c'est un bel effort. Et je peux en parler en connaissance de cause, j'ai été ministre du Budget pendant près de trois ans. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que de ce point de vue, la prise de conscience qu'il faut baisser le déficit de l'Etat est ancienne. La dernière année Jospin, 2002, on avait 49 milliards de déficit de l'Etat ; la dernière année de mon budget, on a été à 36 milliards, donc 13 milliards de moins. On poursuit l'effort, et je crois que c'est un élément important. La deuxième chose, il ne faut pas se tromper, là où l'on doit maintenant se concentrer, ce que d'ailleurs F. Fillon comme N. Sarkozy ont rappelé, c'est sur le déficit de la Sécurité sociale, la dérive est très préoccupante. Cela, c'est une priorité absolue. Pour ce qui concerne l'Etat, il faut continuer à traquer la dépense inutile.
R.- Les députés UMP pourront traquer la dépense inutile ? Par exemple, 3 milliards d'euros d'économies : on a gardé un peu d'argent pour un second porte-avions. Renonçons au second porte-avions, faisons l'OTAN ou la défense européenne, et passons-nous de ces 3 milliards !
Q.- Je n'ai pas le même avis que vous sur le sujet. Tout ce qui est de l'investissement, qui permet d'assurer les fonctions régaliennes de l'Etat, il faut évidemment les développer. Traquer la dépense inutile, c'est quoi ? C'est continuer de faire ce que j'avais lancé, par exemple les fameux audits. On a radiographié l'Etat ; on a trouvé des gains de productivité à tous les étages. Quand vous refaites la politique immobilière de l'Etat, vous vendez des immeubles que vous occupez inutilement, vous ramenez de l'argent ; avec cela, vous financez de l'investissement utile pour l'Etat. Quand vous faites un audit sur la politique d'achat, vous faites des économies, là encore, dans tous les ministères. On peut multiplier les exemples. Quand on réorganise des examens à l'Education nationale, on gagne 500 postes, etc. Ces audits permettent de traquer la dépense inutile.
R.- Diriez-vous le mot "rigueur" pour ces audits, comme l'avait dit C. Lagarde, "plan de rigueur" pour contrôler l'Etat ?
Q.- Je vais vous dire : on est des fanas des batailles de mots dans notre pays ! Moi, je n'en sais rien, ce qui compte en réalité, c'est que cela se fasse, c'est-à-dire qu'on soit discipliné dans la manière de gérer l'Etat. Quand une dépense sert la croissance, sert le pouvoir d'achat, on y va. Quand, en revanche, on peut traquer les dépenses de l'Etat inutiles, il faut le faire.
Q.- Alors, justement, croissance, 2,25 %, c'est l'hypothèse du Gouvernement. Donnez-moi un argument qui justifie cet optimisme, 2,25 % pour 2008 ?
R.- Tout simplement, qu'on va faire en sorte d'aller la croissance avec les dents, en travaillant plus.
Q.- Les dents ne rapportent pas de croissance malheureusement... Qu'est-ce qui peut vous faire croire que l'économie mondiale va nous donner cette croissance ?
R.- Bien sûr qu'il y a un contexte mondial qui est celui que l'on sait. Mais enfin, dans un contexte mondial qu'on connaît, vous avez des pays d'Europe qui ont plus ou moins de croissance donc cela prouve qu'on peut, qu'on a des marges de manoeuvre. Je pense, comme beaucoup de mes amis, que N. Sarkozy a tout à fait raison de dire que notre première priorité c'est de travailler plus. Et toutes les mesures que le Gouvernement est en train de préparer pour assouplir les 35 heures iront dans ce sens, à commencer par la défiscalisation des heures supplémentaires.
Q.- Espagne, Pays-Bas, bientôt Allemagne, d'autres pays sont à l'équilibre pour leurs comptes publics. Ne faut-il pas, vous, groupe UMP, décréter que c'est 2010 le rendez-vous du zéro déficit et pas 2012, comme le Gouvernement le laisse entendre ?
R.- Je vais vous dire : le plus tôt sera le mieux ! Mais en même temps, il faut financer nos politiques publiques. Mais encore une fois, je voudrais vous dire quelque chose à quoi je crois profondément : aujourd'hui, le grand débat qu'on doit avoir avec les Français, c'est sur la question du travail. Nous avons depuis trop d'années - et les 35 heures ont nuit à cela -, un rapport qui n'est pas tout à fait cohérent avec la question du travail, à condition que le travail, effectivement, rapporte plus, et c'est le débat qu'on a aujourd'hui. C'est vrai que Beaucoup de Français pensent que travailler plus, si ce n'est pas pour gagner plus, cela ne sert à rien, ils ont raison. Mais je pense qu'il faut revoir l'organisation de notre société en conséquence. C'est un rendez-vous avec l'avenir.
Q.- Alors justement, on réorganise la société pour travailler plus, plus longtemps, c'est la réforme des retraites. F. Fillon a fâché la CFDT en renonçant aux avantages donnés aux longues carrières et en expliquant que très vite on cotiserait plus longtemps sans passer par le Conseil d'orientation des retraites, sans passer le débat. A-t-il gaffé ?
R.- Non, d'abord, je crois qu'il n'a pas dit cela comme ça. Je n'étais pas présent, mais je ne crois pas qu'il ait dit cela comme ça. Tout le monde est clair sur le fait qu'il doit y avoir débat et discussions, y compris d'ailleurs à l'Assemblée nationale, et j'ai dit à plusieurs reprises que j'y étais très attaché...
Q.- Vous ne voulez pas de décret sur les régimes spéciaux ? Vous voulez une loi pour pouvoir débattre ?
R.- Non, mais cela c'est un autre sujet. J'ai par principe de respecter la Constitution. Les textes qui doivent passer par des lois, on fait des lois, quand c'est par des décrets, on passe par des décrets.
Q.- On a le choix, que faut-il faire ?
R.- Non, on n'a pas le choix. En réalité, on n'a jamais le choix. Soit on fait un décret, si la Constitution le prévoit, soit on fait une loi. Mais par contre, ce qui est sûr, c'est que si cela doit être un décret, ce que je peux comprendre, à ce moment-là, il faut que nous ayons en tout état de cause un débat approfondi à l'Assemblée nationale entre la majorité et l'opposition. Je veux, sur ce point, que nous assumions nos convictions, que l'on prenne nos responsabilités, que la gauche le fasse aussi. Que la gauche nous explique pourquoi il ne faut pas réformer les retraites, que la gauche nous explique pourquoi elle trouve sympathique que l'obstruction, à elle seule, suffise à être un projet pour la société française !
Q.- Pour les régimes spéciaux de retraites, vous vous engagez à ce que les parlementaires réforment aussi leur régime spécial ?
R.- Ecoutez, là-dessus, je me permets de vous le dire, cela a déjà été largement fait. En 2003, quand il y a eu la grande réforme Fillon sur les retraites, les parlementaires ont réformé eux aussi leur régime de retraite. Je vous rappelle que désormais, ils cotisent comme le droit commun jusqu'à 60 ans, que c'est 40 annuités, et donc, en l'occurrence, sur ce point, l'essentiel a été fait.
Q.- Et ils peuvent cotiser double toujours pour aller plus vite ?
R.- Oui, mais cela, c'est un autre sujet, c'est par rapport au fait qu'on doit distinguer un métier et un mandat, un salaire et une indemnité. La durée moyenne de mandat d'un député, vous savez, c'est, je crois, une dizaine d'années maximum, même peut-être un peu moins, je crois que c'est sept-huit ans. Donc c'est vous dire qu'on n'est pas tout à fait dans le même cas de figure que celui d'un métier.
Q.- Distinguer un métier et un mandat ; vous voulez être avocat à temps partiel en plus de vos mandats d'élu, cela soulève la polémique. Etes-vous prêt à démissionner de votre cabinet d'avocat pour faire taire cette polémique ?
R.- Encore une fois, il y a deux points. Le premier c'est la déontologie, j'y suis évidemment tout à fait attaché. D'abord, c'est légal d'avoir une activité libérale, il y a une centaine de parlementaires qui a d'autres activités professionnelles - médecins, avocats, pharmaciens, etc., dans de nombreux domaines. Mais ce qui est important, c'est de respecter la déontologie. Et donc, j'ai indiqué clairement que je ne traiterai aucune affaire qui concerne mes anciennes fonctions ministérielles, ou même qui concernent l'Etat, c'est la moindre des choses. Et puis, il y a un deuxième sujet, qui est un sujet plus général, du rapport du député avec la vie réelle tout court, la vie économique. Beaucoup de Français disent : "nos hommes politiques n'ont pas toujours les pieds sur terre" ; moi, je pense qu'effectivement, parfois, on peut être en cohérence par rapport à cela, et choisir - c'est ce que j'ai fait -, d'avoir à temps partiel une activité professionnelle qui vous permet aussi d'avoir un lien avec la vie économique. C'est le choix que j'ai fait.
Q.- J. Lang ou même P. Devedjian, veulent limiter ce genre de cumul. Ont-ils tort par rapport à cette [inaud.] dans la société ?
R.- D'abord, P. Devedjian, je m'en suis expliqué avec lui. Il a été - d'ailleurs, il me l'a dit lui-même -, très longtemps, il a exercé la profession d'avocat tout en étant député, et je crois qu'il en garde un excellent souvenir.
Q.- Un mauvais coup qu'il vous fait alors ?
R.- Non, pas du tout. On en a parlé librement, nous avons des relations très amicales avec Patrick. Et quant à J. Lang, je n'ai pas tout à fait compris ce qu'il voulait dire, mais je me suis demandé si ce n'était pas l'hôpital qui se moquait de la charité.
Q.- Vous prônez plus de contrôle parlementaire. Accepteriez-vous que l'Assemblée contrôle, justement, que votre dossier d'avocat ne soit pas en train d'empiéter sur vos anciennes fonctions ?
R.- De toute façon, vous savez, ce n'est pas seulement l'Assemblée nationale, toute personne est en situation de pouvoir le voir lorsque un avocat prend en charge tel ou tel dossier. Mais c'est surtout qu'en ce qui me concerne, cela ne se produira jamais. D'abord, parce que je l'ai clairement dit, et j'ai pour habitude d'être en cohérence entre ce que je dis et ce que je fais.
Q.- Le Gouvernement envisage, paraît-il de supprimer le référendum obligatoire chaque fois qu'un nouveau pays entrera dans l'Union européenne. Nous avons mis cela dans notre Constitution, on envisagerait de le retirer ; les députés UMP ne sont pas très contents, paraît-il, c'est vrai ?
R.- En tout cas, il y a un débat là-dessus. Je crois que ce débat n'est pas totalement formalisé, on aura l'occasion d'en parler vendredi après-midi dans nos Journées parlementaires, parce qu'on a réorganisé un peu nos Journées parlementaires. Vendredi, les députés, les sénateurs de l'UMP vont se retrouver dans des forums, un peu comme des émissions de télé, il va y avoir un débat entre les députés et un panel de Français sur le pouvoir d'achat, sur l'école et sur l'Europe. Donc, ce sera certainement une question qui sera évoquée. Il y aura sans doute d'autres occasions aussi de le faire. C'est vrai qu'aujourd'hui, nous n'avons pas encore parlé de cela dans le détail. Ce sera un des sujets du mois d'octobre.
Q.- Vous êtes, à titre personnel, pour maintenir ce référendum ?
R.- Je crois que beaucoup de choses ont été dites là-dessus. A titre personnel, je pense que c'est intéressant de rester dans cette démarche. Mais encore une fois, je pense qu'il faut être pragmatique et que tout cela doit être vu avec la sérénité qui s'impose, parce que sur ces sujets qui sont graves et importants et qui engagent l'avenir de l'Europe, et qui sont des sujets importants, il faut qu'on se dise les choses tranquillement.
Q.- "Grenelle de l'environnement", on propose déjà des taxes sur les automobiles ; est-ce une mauvaise voie ?
R.- Je ne sais pas. Je pense qu'en tout cas il ne faut pas réduire la démarche sur l'environnement à la seule question de faire payer plus les gens. Je pense que les taxes, parfois, c'est utile, mais je pense qu'il faut aller plus loin. Le vrai sujet, le vrai débat qu'il faut avoir avec les Français sur la question de l'environnement, c'est l'expression de responsabilité. Est-ce qu'on est prêts à changer nos habitudes de vie pour économiser ? Je vais prendre un exemple concret : je pense que la manière dont on conçois notre habitat aujourd'hui, peut tenir compte des économies d'énergie. Des progrès technologiques fabuleux ont été réalisés, tout ce qui permettra d'encourager l'investissement écologique pour nos maisons, nos logements, ira dans le bon sens, et c'est vrai aussi pour les gestes du quotidien avec la gestion des déchets.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 27 septembre 2007