Texte intégral
Q - Sur le GATT.
R - Dans toutes les affairesdans tous les problèmes que la nouvelle majorité a à régler, l'affaire de l'accord mondial sur le commerce est sans doute l'une des plus difficiles et l'une des plus importantes pour l'avenir. cela justifie qu'on en parle sans excès polémique, ce que vous avez fait, Monsieur le député, je vous en remercie, et avec sérénité. Quelle était notre idée de départ il y a six mois ? Notre idée de départ était de faire en sorte que notre pays adopte une diplomatie, une attitude de mouvement, de dynamisme et de propositions
C'est ce que nous avons fait grâce à deux mémorandums qui ont été élaborés en commun et je tiens à rendre hommage à l'action de tous les ministres qui ont pris une part déterminante : M. Juppé, M. Longuet, M Lamassoure et M. Puech.
Quelle était notre idée ? Elle est, me semble-t-il, incontestable. C'est que nous sommes partisans de la liberté, mais que pour nous la liberté signifie l'égalité des chances et l'égalité des conditions de la concurrence.
C'est sur cette base-là que nous avons poursuivi nos efforts pendant six mois. Moi-même, je vous le rappelle, je me suis rendu devant la Commission à Bruxelles. Je suis allé voir un certain nombre de nos partenaires, M. Kohl, M. Major et enfin le Président Clinton. Nous avons au cours de toutes ces discussions obtenu que l'on comprenne mieux la position de la France. Et non seulement nous avons obtenu qu'on la comprenne mieux, mais nous avons obtenu qu'un certain nombre de nos partenaires veuille bien reconnaître que cette position était justifiée.
Aujourd'hui, où en sommes-nous Il y a encore un certain nombre d'obstacles. Je vais les énumérer devant vous. Le premier tient à la notion même d'organisation mondiale du commerce. Y a-il ou n'y a-t-il pas d'organisation mondiale du commerce quand les uns ont un droit de sanction unilatérale et quand les autres ne l'ont pas ? C'est pour nous un problème essentiel. Faute de le résoudre, c'est la solidité et la durée de cet accord général qui serait remis en cause. Le deuxième problème c'est celui qu'il est convenu d'appeler "l'exception culturelle".
Nous ne pouvons pas accepter que tout ce qui tient aux valeurs fondamentales de notre tradition, de notre culture, de notre civilisation soit traité comme un bien de commerce ordinaire.
Le troisième tient à ce qu'il est convenu d'appeler "l'accès au marché", mot technique qui cache une réalité toute simple : c'est, lorsqu'on signe un accord général sur le commerce qui prévoit que chacun doit démanteler ses protections abusives, qu'il faut que tout le monde le fasse. Or aujourd'hui, 54 pays, c'est-à-dire à peu près la moitié des pays concernés, n'ont pas encore déposé leurs propositions d'accès au marché. Si nous acceptions que cette situation soit durable, cela voudrait dire que nous serions censés signer un accord général sur le commerce qui en fait éliminerait un certain nombre de pays ou plutôt dispenserait un certain nombre de pays des obligations normales et naturelles que comporte tout accord sur le commerce mondial.
Enfin, il y a un quatrième obstacle, et je devrais dire au pluriel, toute une série de domaines pour lesquels nous ne sommes pas encore parvenus à une position satisfaisante. Il s'agit de l'acier, de l'aéronautique, des transports et de l'agriculture. Sur l'agriculture, je ne dirai qu'un mot. La réforme de la politique agricole commune impose à l'agriculture européenne et à l'agriculture française des restrictions de production qui se traduisent par des jachères nouvelles et considérables. Nous n'avons cessé de répéter que le prétendu accord de Blair House imposait à l'agriculture européenne des contraintes supplémentaires et qu'il était donc dans une large mesure en contradiction avec la réforme de la politique agricole commune et notre ligne directrice est très claire : nous ne saurions accepter qu'au nom d'un accord sur le GATT, on impose à l'agriculture européenne un hectare de jachère supplémentaire alors que d'autres pays remettent en exploitation leurs jachères. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés où nous en sommes deux mois avant cette date du 15 décembre présentée par certains on se demande d'ailleurs pourquoi, comme étant la date fatidique et la date unique.
Alors de deux choses l'une, ou bien l'on arrive dans le délai de deux mois qui nous sépare de cette date à résoudre les problèmes que j'ai énumérés devant vous, et je n'hésite pas à dire que le problème de l'organisation mondiale du commerce et de l'égalité du traitement pour tous est à mes yeux, peut-être, le problème le plus fondamental de tous. Ou bien on y arrive, ou bien on n'y arrive pas. Alors dans cette
hypothèse là, la position de la France est la suivante : elle consiste à dire que si certains de nos partenaires veulent procéder à un constat d'étape, en quelque sorte, pour bien sérier les questions, pour bien marquer qu'il y
a des problèmes résolus, que d'autres ne le sont pas encore et qu'on peut continuer à discuter, si nos partenaires le souhaitent, nous serons prêts à l'accepter. stabilité du système monétaire inter.
Alors, je voudrais terminer en vous soumettant, Mesdames et Messieurs les députés, trois observations : la première, je demande que l'on en prenne bien conscience, c'est que la situation monétaire du monde fausse , toutes les discussions. Il y a une dizaine d'années, une douzaine d'années, le dollar valait 5 Francs, il y a 7 ou 8 ans le dollar valait 10 Francs. Aujourd'hui, il vaut entre 5 et 6 Francs. Comment voulez-vous organiser la stabilité du commerce mondial lorsque la monnaie qui est le pivot des échanges mondiaux connaît de pareilles variations ? Le progrès et la stabilité du monde ne dépend pas uniquement des accords commerciaux, il dépend aussi de la stabilité monétaire, première observation.
Deuxième observation on a pu constater lors des discussions qui ont conduit au prétendu accord de Blair House, que l'équilibre institutionnel voulu au sein de ce qu'on peut appeler la constitution de l'Europe n'était pas respecté je rappelle pour tous qu'au sein de l'Europe comme au sein de toute société démocratique et
l'Europe doit être une société démocratique, c'est l'autorité politique qui a le dernier mot et qui doit le conserver. C'est pourquoi, je souhaite qu'il y ait des réunions plus régulières du Conseil des ministres ou des Conseils des ministres des Affaires européennes de la Communauté, qui constitue l'instance de décision au sein de la Communauté européenne, afin que la Commission soit appelée à lui rendre des comptes plus fréquents et plus précis, et en tant que de besoin, écrits. Enfin, vous le voyez, Mesdames et Messieurs, nous avons voulu bien marquer notre ouverture d'esprit et notre attitude. C'est une attitude, je le répète, qui est fondée sur le désir d'aboutir à un accord, mais en même temps sur le désir que soient préservés les intérêts fondamentaux de l'Europe et de la France. Si certains de nos partenaires veulent procéder à un constat, si tout n'est pas réglé d'ici deux mois, nous serons d'accord pour ce constat. Enfin pour conclure, je voudrais vous dire que cette affaire est une grande affaire nationale, qu'en dépend pour de longues années la prospérité de notre pays, l'emploi dans notre pays, l'avenir de notre pays mais aussi l'avenir de l'Europe tel que nous le concevons, celle d'une Communauté démocratique et libre, traitée sur un pied d'égalité avec tous les autres ensembles politiques ou économiques dans le monde. J'aimerais bien qu'à tout le moins sur le sujet il y ait un minimum d'accord national pour que nous défendions ensemble les intérêts de notre pays.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 mai 2004)
R - Dans toutes les affairesdans tous les problèmes que la nouvelle majorité a à régler, l'affaire de l'accord mondial sur le commerce est sans doute l'une des plus difficiles et l'une des plus importantes pour l'avenir. cela justifie qu'on en parle sans excès polémique, ce que vous avez fait, Monsieur le député, je vous en remercie, et avec sérénité. Quelle était notre idée de départ il y a six mois ? Notre idée de départ était de faire en sorte que notre pays adopte une diplomatie, une attitude de mouvement, de dynamisme et de propositions
C'est ce que nous avons fait grâce à deux mémorandums qui ont été élaborés en commun et je tiens à rendre hommage à l'action de tous les ministres qui ont pris une part déterminante : M. Juppé, M. Longuet, M Lamassoure et M. Puech.
Quelle était notre idée ? Elle est, me semble-t-il, incontestable. C'est que nous sommes partisans de la liberté, mais que pour nous la liberté signifie l'égalité des chances et l'égalité des conditions de la concurrence.
C'est sur cette base-là que nous avons poursuivi nos efforts pendant six mois. Moi-même, je vous le rappelle, je me suis rendu devant la Commission à Bruxelles. Je suis allé voir un certain nombre de nos partenaires, M. Kohl, M. Major et enfin le Président Clinton. Nous avons au cours de toutes ces discussions obtenu que l'on comprenne mieux la position de la France. Et non seulement nous avons obtenu qu'on la comprenne mieux, mais nous avons obtenu qu'un certain nombre de nos partenaires veuille bien reconnaître que cette position était justifiée.
Aujourd'hui, où en sommes-nous Il y a encore un certain nombre d'obstacles. Je vais les énumérer devant vous. Le premier tient à la notion même d'organisation mondiale du commerce. Y a-il ou n'y a-t-il pas d'organisation mondiale du commerce quand les uns ont un droit de sanction unilatérale et quand les autres ne l'ont pas ? C'est pour nous un problème essentiel. Faute de le résoudre, c'est la solidité et la durée de cet accord général qui serait remis en cause. Le deuxième problème c'est celui qu'il est convenu d'appeler "l'exception culturelle".
Nous ne pouvons pas accepter que tout ce qui tient aux valeurs fondamentales de notre tradition, de notre culture, de notre civilisation soit traité comme un bien de commerce ordinaire.
Le troisième tient à ce qu'il est convenu d'appeler "l'accès au marché", mot technique qui cache une réalité toute simple : c'est, lorsqu'on signe un accord général sur le commerce qui prévoit que chacun doit démanteler ses protections abusives, qu'il faut que tout le monde le fasse. Or aujourd'hui, 54 pays, c'est-à-dire à peu près la moitié des pays concernés, n'ont pas encore déposé leurs propositions d'accès au marché. Si nous acceptions que cette situation soit durable, cela voudrait dire que nous serions censés signer un accord général sur le commerce qui en fait éliminerait un certain nombre de pays ou plutôt dispenserait un certain nombre de pays des obligations normales et naturelles que comporte tout accord sur le commerce mondial.
Enfin, il y a un quatrième obstacle, et je devrais dire au pluriel, toute une série de domaines pour lesquels nous ne sommes pas encore parvenus à une position satisfaisante. Il s'agit de l'acier, de l'aéronautique, des transports et de l'agriculture. Sur l'agriculture, je ne dirai qu'un mot. La réforme de la politique agricole commune impose à l'agriculture européenne et à l'agriculture française des restrictions de production qui se traduisent par des jachères nouvelles et considérables. Nous n'avons cessé de répéter que le prétendu accord de Blair House imposait à l'agriculture européenne des contraintes supplémentaires et qu'il était donc dans une large mesure en contradiction avec la réforme de la politique agricole commune et notre ligne directrice est très claire : nous ne saurions accepter qu'au nom d'un accord sur le GATT, on impose à l'agriculture européenne un hectare de jachère supplémentaire alors que d'autres pays remettent en exploitation leurs jachères. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés où nous en sommes deux mois avant cette date du 15 décembre présentée par certains on se demande d'ailleurs pourquoi, comme étant la date fatidique et la date unique.
Alors de deux choses l'une, ou bien l'on arrive dans le délai de deux mois qui nous sépare de cette date à résoudre les problèmes que j'ai énumérés devant vous, et je n'hésite pas à dire que le problème de l'organisation mondiale du commerce et de l'égalité du traitement pour tous est à mes yeux, peut-être, le problème le plus fondamental de tous. Ou bien on y arrive, ou bien on n'y arrive pas. Alors dans cette
hypothèse là, la position de la France est la suivante : elle consiste à dire que si certains de nos partenaires veulent procéder à un constat d'étape, en quelque sorte, pour bien sérier les questions, pour bien marquer qu'il y
a des problèmes résolus, que d'autres ne le sont pas encore et qu'on peut continuer à discuter, si nos partenaires le souhaitent, nous serons prêts à l'accepter. stabilité du système monétaire inter.
Alors, je voudrais terminer en vous soumettant, Mesdames et Messieurs les députés, trois observations : la première, je demande que l'on en prenne bien conscience, c'est que la situation monétaire du monde fausse , toutes les discussions. Il y a une dizaine d'années, une douzaine d'années, le dollar valait 5 Francs, il y a 7 ou 8 ans le dollar valait 10 Francs. Aujourd'hui, il vaut entre 5 et 6 Francs. Comment voulez-vous organiser la stabilité du commerce mondial lorsque la monnaie qui est le pivot des échanges mondiaux connaît de pareilles variations ? Le progrès et la stabilité du monde ne dépend pas uniquement des accords commerciaux, il dépend aussi de la stabilité monétaire, première observation.
Deuxième observation on a pu constater lors des discussions qui ont conduit au prétendu accord de Blair House, que l'équilibre institutionnel voulu au sein de ce qu'on peut appeler la constitution de l'Europe n'était pas respecté je rappelle pour tous qu'au sein de l'Europe comme au sein de toute société démocratique et
l'Europe doit être une société démocratique, c'est l'autorité politique qui a le dernier mot et qui doit le conserver. C'est pourquoi, je souhaite qu'il y ait des réunions plus régulières du Conseil des ministres ou des Conseils des ministres des Affaires européennes de la Communauté, qui constitue l'instance de décision au sein de la Communauté européenne, afin que la Commission soit appelée à lui rendre des comptes plus fréquents et plus précis, et en tant que de besoin, écrits. Enfin, vous le voyez, Mesdames et Messieurs, nous avons voulu bien marquer notre ouverture d'esprit et notre attitude. C'est une attitude, je le répète, qui est fondée sur le désir d'aboutir à un accord, mais en même temps sur le désir que soient préservés les intérêts fondamentaux de l'Europe et de la France. Si certains de nos partenaires veulent procéder à un constat, si tout n'est pas réglé d'ici deux mois, nous serons d'accord pour ce constat. Enfin pour conclure, je voudrais vous dire que cette affaire est une grande affaire nationale, qu'en dépend pour de longues années la prospérité de notre pays, l'emploi dans notre pays, l'avenir de notre pays mais aussi l'avenir de l'Europe tel que nous le concevons, celle d'une Communauté démocratique et libre, traitée sur un pied d'égalité avec tous les autres ensembles politiques ou économiques dans le monde. J'aimerais bien qu'à tout le moins sur le sujet il y ait un minimum d'accord national pour que nous défendions ensemble les intérêts de notre pays.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 mai 2004)