Déclaration de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie, sur la place de la mode dans le cadre de la mobilisation en faveur du développement durable, Paris le 11 octobre 2007.

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Circonstance : Ouverture du "Ethical Fashion show" à Paris le 11 octobre 2007

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
On dit souvent que la mode c'est la frivolité. Une frivolité qui ne s'accorde pas facilement avec le sérieux des discours de mobilisation en faveur du développement durable, lesquels mettent l'accent sur l'urgence qu'il y a de nous mettre tous ensemble au travail pour préserver notre environnement. Aussi vous pourriez très légitimement vous étonner de ma présence à un salon consacré à la mode, même à la mode éthique. Pourtant, je suis prête à prendre le risque de ce paradoxe.
Ce n'est pas en présentant le développement durable comme une contrainte, comme une obligation ou comme un effort que la société devrait faire sur elle-même que l'on contribuera à faire avancer sa cause. Car on peut se faire plaisir en consommant éthique. Car on peut trouver son compte dans le choix du commerce équitable. Ethique et esthétique ne sont pas incompatibles. C'est pourquoi je suis particulièrement heureuse d'apporter mon soutien à des initiatives telles que l'Ethical Fashion Show.
La mode donc, royaume par excellence de l'éphémère, qui évolue à travers des cycles courts et saisonniers, pourrait bien s'accorder avec le durable et le respect d'un certain nombre de règles économiques, environnementales ou sociales. La mode équitable, qui met l'accent sur l'équilibre des relations Nord-Sud et la nécessité de préserver les marchés locaux et régionaux contre le risque du « tout à l'exportation », ou la mode éthique, qui insiste sur le respect d'un certain nombre de règles sur le lieu de travail, en sont le meilleur exemple. Certes, on pourra m'objecter que, rapportée à la totalité du chiffre d'affaire de l'industrie française de la mode, la mode éthique ne représente que 1%, ce qui n'est pas beaucoup. Mais c'est toujours mieux que la part du commerce équitable dans les échanges mondiaux, 0.03%. Par ailleurs, cela illustre que le commerce éthique, en pleine expansion, est capable d'aller au-delà des achats « militants » qui se limitent trop souvent à quelques produits de base tels que le café ou le chocolat, pour répondre également aux attentes des consommateurs les plus exigeants.
La conversion du monde de la mode à des réflexes éthiques montre également qu'il est toujours possible de faire mieux en la matière, et que c'est souvent faute d'une information suffisante que l'on ne consomme pas conformément aux convictions que l'on a. Le grand public sait-il seulement que la fabrication de certains vêtements en coton nécessite un important recours au drainage, aux engrais et autres pesticides, dont les excès ont pu conduire dans le passé à la quasi-disparition de la mer d'Aral en ex-Union soviétique ? Un tel salon, c'est bien l'occasion ou jamais de dire certaines choses. Ce n'est pas d'ailleurs que les autres acteurs de la mode, et en particulier les entreprises du luxe, ne soient pas sensibles à ces questions. Le luxe utilise déjà souvent des textiles en coton bio, conformément à certaines valeurs qui sont celles des créateurs. Mais il ne communique pas suffisamment sur ces formes d'engagement, trop convaincu qu'il est que cela n'apporterait rien à son image.
Ici, nous voyons tous que les réflexes éthiques ne sont pas incompatibles avec la beauté et la qualité des créations. Je vous dirai même que je suis frappée par la diversité des oeuvres qui nous sont présentées. Car établir des relations commerciales plus respectueuses de ses partenaires du Sud, c'est aussi respecter la différence des artisans locaux, auxquels il faut bien se garder de chercher à imposer notre propre vision de la mode. C'est ainsi que l'on reste créatif. C'est ainsi que la diversité culturelle peut trouver toute sa place dans le développement durable.
Soyons curieux, soyons respectueux. C'est comme cela aussi que, tous ensemble, nous pourrons livrer à nos enfants une terre dont nous n'aurons pas à rougir.Source http://www.ecologie.gouv.fr, le 19 octobre 2007