Interview de M. Jean-François Lemétayer, président de la FNSEA, sur le site internet de la FNSEA, sur le grenelle de l'environnement, la hausse des produits agricoles, la baisse du nombre d'agriculteurs et la PAC.

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1) Le " Grenelle de l'environnement " est, un mois après sa célébration, entré dans sa phase active, qu'en attendez-vous ?
R - La FNSEA a participé activement au " Grenelle ". C'était une façon de contribuer à la lutte pour la protection de l'environnement mais aussi de faire comprendre et de faire partager les réalités agricoles. Aujourd'hui, l'urgence est à faire voter une loi sur les biotechnologies dont les OGM, avant la fin de la session parlementaire c'est-à-dire le 9 février. Les députés doivent décider de l'avenir du génétiquement modifié en France, c'est primordial. Il faut des règles. La création de la haute autorité sur les OGM est prévue avant Noël, c'est une bonne chose.
2) La hausse des prix des matières premières agricoles peut-elle influer sur le pouvoir d'achat des Français ?
R - Je ferai une réponse de Normand, Oui et Non. Oui car il y a un lien direct entre les matières premières agricoles et les prix de certains produits peu transformés ou dont le coût de production dépend directement du prix d'autres matières agricoles. La hausse du prix des céréales a ainsi une répercussion immédiate sur le coût de revient pour les éleveurs. Non, si les transformateurs et les distributeurs restent raisonnables et acceptent de revoir leurs marges ! Je rappelle que ces hausses de prix interviennent après de trop longues années de baisse de revenus pour les paysans français, toutes catégories et productions confondues. Ces baisses, les consommateurs n'en voient pas souvent la couleur ! Dans notre cas c'est un juste retour des choses !
3) Loi Chatel, qu'en dites-vous ?
R - Réaffirmons ensemble que les produits agricoles ne sont pas des produits comme les autres. Regardons, ensemble, les mécanismes de négociations commerciales dans une volonté de gagnant-gagnant. Enfin, réalisons, ensemble, ce qui ne fût pas possible depuis des décennies, c'est-à-dire la clarification des responsabilités et devoirs des uns et des autres dans le cadre de partenariats efficaces. Voilà la bonne solution équitable et respectable, donc à terme respectée.
4) Le nombre d'agriculteurs ne cesse de baisser, que préconisez-vous ?
R - Tout d'abord de la lisibilité ; ensuite de la fierté ! Lisibilité car l'agriculteur est un investisseur et un producteur, il a besoin de repères et d'un cadre pour pouvoir développer son entreprise. Le métier ne peut pas être attractif si l'on en change, en permanence, les règles... Fierté car c'est la clé psychologique de la confiance en l'avenir et de la reconnaissance de la société. C'est essentiel. Trop longtemps on a montré notre profession du doigt en l'accusant de tous les maux, et nous n'avions pas les mots pour répondre...
Il nous faut une visibilité à long terme de la politique agricole souhaitée par l'Europe. Il faut briser cette image d'Epinal que veut faire croire que les paysans sont des assistés. Il nous faut retrouver la confiance de la population en ses paysans, lui faire comprendre que l'agriculture est résolument engagée dans une démarche d'avenir. Ce n'est qu'à ces conditions que nous pourrons renouveler les générations d'agriculteurs.
5) Mariann Fischer Boel vient de faire des " préconisations " pour le bilan de santé de la PAC, qu'en pensez-vous ?
R - La logique de ces " propositions " ne nous convient pas. Il aurait fallu faire le bilan de la réforme de 2003 avant de s'engouffrer, plus encore, dans le " tout marché ". Sans rentrer dans le détail, il faut revenir aux fondamentaux c'est-à-dire définir une politique, arrêter des objectifs pour l'Europe et acter des budgets y afférent. L'inverse n'est ni visionnaire ni bâtisseur, c'est-à-dire voter un budget et décider de ce qu'on peut en faire... Et puis il faut décider impérativement de ce que l'Europe veut réaliser dans le cadre du principe de " souveraineté alimentaire et d'indépendance " qui est au final économique, social, diplomatique et politique. Tout ça !
6) Après Chirac, Sarkozy... ?
R - Nicolas Sarkozy n'avait pas naturellement la fibre agricole. Pour la première fois les français ont élu un président qui n'avait pas de racines, à proprement parler, rurales. Et pourtant le bon sens paysan juge aux actes... Et là, nous voyons un président actif pour défendre les intérêts agricoles de notre pays. Il sera observé et apprécié sur ses initiatives et son action. Remarquons qu'il est aujourd'hui plutôt populaire dans les campagnes.
7) Après Bussereau, Lagarde puis Barnier ?
R - Nous pouvons être fiers de constater que le ministère de l'Agriculture attire des personnalités politiques fortes et compétentes. Pour le reste, là aussi, nous jugerons sur les actes. Le monde paysan a besoin de ministres qui entendent les messages de la terre.
8) Marcel Bruel est décédé, c'est la fin d'une époque ?
R - Oui si l'on considère la mort comme la fin de toutes les fins. Non si l'on considère que ce que Marcel Bruel a initié, créé et développé est dans toutes les têtes et dans notre quotidien, la fierté d'être paysan et le fait de ne jamais renoncer. Un sacré bonhomme nous a quitté.
9) Bientôt les élections municipales, en quoi cela peut-il intéresser la FNSEA ?
R - Que ce soit pour la défense professionnelle ou pour la gestion d'une commune, accepter une charge d'élu témoigne avant tout d'une volonté de faire avancer les choses, d'oeuvrer pour améliorer les conditions de vie et de travail de ses pairs. Il apparaît alors normal que les hommes et femmes engagés dans le syndicalisme agricole puissent avoir envie d'aller encore plus loin, à l'échelon local et se lancer dans l'aventure municipale. Et les agriculteurs ont leur pierre à apporter à l'édifice communal, ils le font déjà naturellement lorsqu'il est question de la gestion du foncier ou de la gestion des boues. Pouvoir compter sur un élu agricole dans un conseil municipal ou à la tête d'une commune est un atout indéniable, tant pour les administrés que pour la profession agricole. C'est un choix de stratégie où tout le monde y gagne. A l'heure où on parle de plus en plus de ruralité, n'oublions pas que l'agriculture reste la colonne vertébrale de ce monde rural. Source http://www.fnsea.fr, le 7 décembre 2007