Texte intégral
ouverture
(Souhaits de bienvenue)
Ce que nous célébrons aujourd'hui, au travers de cette assemblée, c'est d'abord l'histoire de 40 ans de travail et d'efforts au service des agriculteurs, de l'agriculture et de la construction européenne.
Nous voulons aussi par cette assemblée rendre hommage à l'importante contribution des agriculteurs et de l'agriculture à la société tout entière et à leur apport à l'Europe.
Nous ne voulons pas seulement regarder le passé. Nous voulons surtout nous pencher vers l'avenir, car c'est l'avenir qui importe.
Notre démarche d'aujourd'hui est une démarche d'ouverture vers tous les secteurs de la société européenne, une démarche d'ouverture vers tous les partenaires de l'agriculture et des agriculteurs : consommateurs, chaîne alimentaire, protecteurs de l'environnement et acteurs du monde rural.
Notre démarche de communication ne se limite pas à l'Europe. C'est pourquoi nous avons invité aujourd'hui des représentants étrangers et notamment des Etats-Unis.
Nous voulons dialoguer aujourd'hui avec vous sur l'avenir de l'agriculture européenne, sur l'avenir de notre modèle européen d'agriculture.
Pour nous ce modèle d'agriculture constitue un élément essentiel de la construction globale de l'Europe. C'est pourquoi nous avons accueilli avec satisfaction l'engagement pris par les chefs d'Etat et de Gouvernement en faveur du modèle européen d'agriculture. Ils doivent le développer à l'avenir et le défendre dans les instances internationales et notamment à l'OMC.
L'avenir de ce modèle dépend de tous les Européens et non pas seulement des agriculteurs. Même si cette idée de l'avenir de l'agriculture européenne est acceptée au niveau le plus élevé, nous comprenons qu'il faut la faire partager par toutes les couches de la société européenne.
C'est pourquoi nous les agriculteurs nous attendons beaucoup des contributions à la discussion, des critiques éventuelles et des suggestions de tous ceux qui sont concernés par l'avenir de l'agriculture, du monde rural et de l'Europe.
La question que nous nous posons est simple. C'est celle de savoir ce que vous pensez de notre conception du modèle européen d'agriculture. Nous voulons connaître vos idées sur l'avenir de notre agriculture. Nous voulons essayer de dégager une conception commune rassemblant nos diverses opinions, quant à l'avenir de l'Europe et à celui de l'agriculture européenne.
Ces dialogues internes à l'Europe ont lieu dans un monde qui change rapidement. Il y a seulement un an, presque tout le monde pensait que l'avenir était dans le libéralisme, sinon l'ultra libéralisme, pour tous les secteurs économiques. La Commission européenne a adopté cette stratégie avec l'Agenda 2000 dans sa volonté de calquer l'évolution de la politique agricole commune sur les Etats-Unis.
Les crises asiatique et russe et l'incertitude récente sur les marchés mondiaux montrent les dangers d'une telle conception ultra libérale pour l'agriculture. Elles montrent l'importance des mécanismes de la PAC qui permettent de maintenir la stabilité au profit à la fois des producteurs et des consommateurs.
Ces mécanismes ne peuvent être ni supprimés ni rendus inefficaces, ce qui serait le cas avec les propositions de la Commission de l'Agenda 2000 dans plusieurs secteurs. Dans ce contexte il faut souligner que même les Etats-Unis ont été obligés de revoir leur propre réforme de politique agricole de 1996.
Nous venons d'arrêter au niveau du COPA un plan global et des propositions spécifiques sur la façon de réviser le volet agricole de l'Agenda 2000. Nous considérons que nos propositions de révision des propositions de la Commission permettront une réforme durable de la PAC.
Cette réforme doit assurer dans toutes les régions d'Europe, la survie et le développement des exploitations agricoles de type familial, moteur de l'agriculture européenne - ainsi que la participation de l'Europe à l'alimentation des populations qui souffrent de faim. Ce n'est que de cette façon que l'agriculture européenne sera en mesure de remplir son rôle multifonctionnel - la fonction de production, la fonction territoriale et la fonction sociale - d'une manière satisfaisant au mieux les attentes des citoyens, des consommateurs et des agriculteurs.
Dans l'Europe actuelle qui tente d'améliorer la situation de l'emploi, il devrait être hors de question que des centaines de milliers de familles et des régions rurales économiquement les plus faibles puissent perdre leur emploi et disparaître en raison d'une politique de baisse de prix systématique et généralisée non compensée intégralement ou du manque de développement de véritables politiques agrirurale et agristructurelle.
Nous sommes également inquiets quant à l'impact des propositions de la Commission sur l'emploi dans d'autres secteurs de la chaîne alimentaire, et notamment les coopératives qui revêtent une importance cruciale pour l'emploi dans l'Europe entière.
Les agriculteurs, européens ardents, s'opposent à tout ce qui porte en germe la renationalisation de la PAC. Le cofinancement des aides est un poison mortel pour la PAC et pour l'Europe, car il conduirait à des distorsions de concurrence, à la fin de la solidarité financière et à l'effondrement du marché agricole unique.
C'est la raison pour laquelle le COPA souhaite que soit préservé le financement de la politique agricole commune et fait du maintien de la ligne directrice agricole telle qu'elle a été définie lors du Sommet d'Edimbourg, un préalable à toute réforme de la PAC.
La réforme durable de la PAC que le COPA propose, revêt une importance capitale non seulement pour les agriculteurs et leurs coopératives mais encore pour tous les citoyens européens. Dès lors, le 40ème anniversaire du COPA que nous célébrons aujourd'hui, est pour nous l'occasion d'inviter tous les Européens à un dialogue sur ce qui est notre intérêt commun, à savoir le modèle européen d'agriculture.
L'agriculture multifonctionnelle que nous défendons ne concerne pas seulement les agriculteurs mais aussi les consommateurs, les citoyens et la société tout entière. Nous les agriculteurs, nous voulons répondre à cet appel. Mais nous ne pourrons le faire seuls et nous vous invitons tous au dialogue. C'est l'avenir de l'agriculture et des agriculteurs, mais aussi celui de la société, de l'Europe, de l'humanité, qui est en jeu.
clôture
Notre journée de débat a été tournée vers l'avenir et placée sous le signe du dialogue et de l'ouverture.
Ouverture puisque les agriculteurs européens ont souhaité associer à leurs travaux, à l'occasion de ce 40ème anniversaire du COPA, leurs partenaires de la transformation, de la distribution, ainsi que des représentants des associations de consommateurs et de défense de l'environnement. En effet, c'est tous ensemble que nous construirons l'avenir d'une agriculture européenne qui réponde à la demande de nos consommateurs et à l'attente de nos citoyens.
Dialogue puisque nos échanges ont montré que nous nous retrouvons sur l'idée d'un modèle agricole européen, d'une identité européenne.
A l'issue de ces échanges, c'est maintenant vers tous les chefs d'Etat et de Gouvernement en Europe que je voudrais me tourner.
[Les agriculteurs au service de l'Europe]
C'est la volonté d'établir la paix entre les nations, et la prospérité des populations, qui est à l'origine de la construction européenne.
De tout temps, les agriculteurs se sont mis au service de cette paix et de cette prospérité, en nourrissant les hommes.
En 40 ans, nous avons permis à l'Europe d'assurer son indépendance alimentaire et de s'affirmer ainsi sur la scène mondiale. Nous avons bâti une grande puissance agricole et nous l'avons mise au service des hommes en Europe.
En 40 ans, avec la mise en place d'une politique agricole commune, l'agriculture a permis à l'Europe d'avancer. L'agriculture a été la tête de pont de l'Europe. L'agriculture a été le moteur et le ciment de la construction européenne. Elle veut le rester !
Les agriculteurs se sont pleinement engagés dans la construction de la politique agricole commune. C'est pourquoi les agriculteurs sont aujourd'hui des européens convaincus !
C'est un symbole : les 40 ans du COPA coïncident, à un an près, avec les 40 ans du Traité de Rome. Soyons fiers du chemin parcouru, mais rappelons-nous aussi les grands principes qui nous ont guidés : la solidarité financière, la stabilité des marchés, des revenus équitables. Ces grands principes n'ont pas pris une ride : ils doivent orienter l'avenir de l'Europe agricole !
[Une Europe qui doit évolueravec l'agriculture !]
Mais l'Europe dont nous parlons se construit de jour en jour. L'Europe a 6 est devenue l'Europe des 9, puis des 10, des 12 et des 15et le cercle va s'élargir encore à 20 membres et plus. L'intégration des pays d'Europe centrale et orientale, le développement d'une aire euro méditerranéenne, dessinent les contours des nouvelles frontières de l'Europe.
De même que nous avons su nous adapter et maîtriser ces changements, le COPA veut continuer ces évolutions avec les PECO. C'est pour ça que nous avons organisé une réunion à Bruxelles avec les candidats à l'Union Européenne, un colloque Euroméditerranée à Montpellier. C'est dans ce cadre là que nous travaillons dans le programme FARRE.
Oui, le COPA est favorable à l'élargissement, à condition qu'il soit maîtrisé, progressif et global, en intégrant tous les secteurs, pas seulement l'agriculture !
Face à cette dynamique, face à cette évolution géopolitique, l'Europe n'échappera pas à une véritable réforme de ses institutions. C'est un préalable à l'élargissement.
Nous, les agriculteurs, nous sommes bien placés pour le savoir, nous qui vivons au quotidien les décisions de Bruxelles. Il faut réformer les institutions, pour éviter que l'élargissement ne conduise au blocage et à la paralysie de la décision en Europe.
Les agriculteurs veulent continuer à aller de l'avant, pour l'Europe, et pour l'agriculture, alors, n'ayons pas peur d'adapter nos institutions !
L'Europe en marche aujourd'hui, c'est aussi l'Europe des transports, des réseaux, de l'énergie, mais aussi l'Europe sociale et bien sûr, l'Europe monétaire. Les Européens convaincus que nous sommes s'en réjouissent.
L'agriculture a trop souffert dans le passé des distorsions monétaires, pour ne pas se réjouir de l'avènement de la monnaie unique. Nous pourrons enfin exporter dans notre propre monnaie, sans coût ni risque de change. L'euro devrait apporter une plus grande stabilité, au bénéfice de tous en Europe. Alors, l'euro, les agriculteurs y ont toujours cru. Nous nous y préparons et nous avons intégré l'euro dans notre politique. Et nous souhaitons que l'Euro à 11 devienne bientôt l'euro à 15 !
Alors, dans cette marche en avant, les agriculteurs ne pourraient pas comprendre que dans le même temps, on liquide la politique agricole commune !
Nous avons besoin de maintenir une véritable politique agricole commune. C'est nécessaire, c'est indispensable, pour l'agriculture, pour l'Europe !
La PAC doit être préservée, ce qui suppose des choix politiques clairs, et un budget à la hauteur des enjeux. Sait-on que les dépenses agricoles représentent moins de 0,6% du PIB européen ? Si c'est tout le prix à payer pour avoir des aliments sains, de qualité et en quantité suffisante, alors l'agriculture est un bon placement !
Ce d'autant plus que notre agriculture n'est pas seulement tournée vers la production et l'approvisionnement des marchés locaux, nationaux, européens et mondiaux. Elle a aussi pour mission d'aménager l'espace et d'occuper tous les territoires, de préserver l'environnement et les ressources naturelles, de former et d'employer les hommes. C'est tout cela que les citoyens attendent maintenant de leur agriculture. Les agriculteurs sont prêts à y répondre, mais ils ne pourront pas le faire seuls, il faudra les y aider !
Et le jeu en vaut la chandelle !
[Quelle PAC pour quelle agriculture : préserver notre modèle agricole européen, un modèle d'avenir]
Nous sommes attachés à la multifonctionnalité de notre agriculture. Elle commence à être reconnue en Europe, et c'est tant mieux.
Mais la production doit rester au premier plan. C'est la clé de voûte de notre agriculture. C'est de notre métier qu'il s'agit : les agriculteurs veulent demeurer des chefs d'entreprise. Pour cela les agriculteurs doivent pouvoir équilibrer leurs comptes d'exploitation. Les agriculteurs veulent vivre de leur métier d'agriculteur !
C'est pourquoi la baisse généralisée et systématique des prix ne peut pas être une fin en soi ! Les prix doivent rester rémunérateurs.
Nous défendons en Europe une agriculture riche de sa diversité. Une agriculture faite de nombreuses exploitations à taille humaine, dirigées par des exploitants responsables de leur outil de travail.
Pour préserver ce modèle européen, nous avons besoin d'une certaine sécurité par rapport aux fluctuations du marché et aux aléas climatiques. Les organisations communes de marché restent indispensables pour assurer le maintien et le développement du type d'exploitation à taille humaine que nous défendons. Une préférence communautaire rénovée est nécessaire pour protéger nos normes sociales, sanitaires, environnementales. Ne nous alignons pas sur le moins disant mondial !
Ne faisons pas non plus du budget européen l'instrument du démantèlement de la PAC!
La renationalisation rampante, par les enveloppes nationales ou par le cofinancement, ne correspond ni à la PAC, car elle entraînerait des distorsions de concurrence fatales, ni à l'Europe car elle détruirait la solidarité financière qui réunit les Etats membres.
Détruire ainsi la politique agricole commune, première véritable politique européenne, c'est travailler contre l'Europe.
Alors, que nos chefs d'Etat et de gouvernement ne confondent pas subsidiarité et renationalisation! L'agriculture, et avec elle, l'Europe, méritent beaucoup mieux !
A l'échelle de la planète, l'Europe doit s'affirmer comme un acteur incontournable de l'équilibre alimentaire mondial. Il en va de son statut de grande puissance économique, comme de son rang dans le monde ! C'est un enjeu géostratégique et géopolitique.
Il passe par l'agriculture : ce qui grandira l'agriculture grandira l'Europe !
Pour être à la hauteur de cette ambition collective tout en préservant notre modèle agricole européen, nos politiques en Europe devront concerner tous les hommes, tous les produits et tous les territoires. La réforme de la PAC ne devra pas aboutir à mettre de côté certains produits ou certaines régions. L'équilibre socio-structurel doit être assuré.
Notre choix pour un certain type d'agriculture, que nous exprimons dans le modèle agricole européen, nous devons le défendre et le promouvoir dans les négociations internationales.
Il ne s'agit pas d'imposer ce modèle européen à tous nos partenaires dans le monde. Mais nous devons prendre l'initiative. Il s'agit de montrer que nous avons nos spécificités et que n'avons pas à calquer notre politique sur celle des autres. L'Europe, ce n'est ni les Etats-Unis, ni l'Asie !
Notre modèle agricole européen est un véritable choix de société, basé sur l'équilibre entre les hommes, les produits et les territoires :
- des hommes acteurs et responsables,
- des produits sains, de qualités, bien identifiés,
- des territoires équilibrés, accueillants et durables
[Le COPA, fer de lance européen]
Pour y parvenir, les Européens, plus que jamais, auront besoin d'être unis !
Nous, les professionnels agricoles, nous avons montré la voie avec le COPA !
Bien sûr, parler d'une seule voix, et bientôt avec nos partenaires des PECO, cela ne va pas de soi. Mais c'est un effort indispensable, pour l'agriculture, et pour l'Europe !
Au sein du COPA, les agriculteurs l'ont bien compris. Ils ont démontré qu'il était possible de parler d'une seule voix en Europe. Ils montrent qu'il est possible, au-delà des différences de régions, de pays, de productions, de se retrouver pour promouvoir, ensemble, un type d'agriculture qui préserve l'équilibre, l'identité, l'âme de l'Europe.
Alors j'invite les chefs d'Etat et de gouvernement à emprunter le même chemin, à se réunir autour du modèle agricole européen, qu'il faut défendre en Europe et hors d'Europe !
Le COPA est de plus en plus reconnu et respecté comme interlocuteur en Europe. Pour le rester, il devra continuer à être une force de proposition, et travailler en concertation avec les institutions européennes : Commission, Conseil, Parlement, Comité économique et social ou Comité des Régions.
Pour faire partager à tous nos convictions sur la place de l'agriculture dans l'économie et la société, le COPA devra être :
- ouvert aux autres catégories professionnelles, aux consommateurs et aux citoyens, à la société en général - et les débats de ce matin l'ont bien montré !
- partenaire de tous les acteurs de l'agriculture, de l'alimentation, du monde rural et de la société, comme des pouvoirs publics.
Le syndicalisme agricole ne peut se concevoir qu'à travers un lien étroit avec l'économique : l'action commune du COPA et du COGECA le démontre largement !
C'est ainsi que nous pourrons défendre notre projet agricole pour l'Europe : une agriculture durable, économiquement viable et transmissible. Une agriculture qui donne envie aux jeunes de s'installer. Une agriculture proche des consommateurs et des citoyens.
C'est ainsi que le COPA pourra devenir ce corps intermédiaire indispensable pour orienter la politique agricole commune. Un corps social agricole gage de démocratie et de progrès économique et social en Europe. Car la démocratie, c'est aussi la reconnaissance et le développement du dialogue social. Un corps social au service d'un projet de société basé sur la responsabilité individuelle de chacun et la solidarité de tous. En conjuguant tradition et modernité.
Voici le grand chantier que nous voulons mener à bien. Et si nous ne sommes pas suffisamment entendus , nous sommes prêts à passer à l'action syndicale. Alors, à nous de défendre ce projet européen, à vous, chefs d'Etat et de gouvernement, de le construire, partout dans nos pays d'Europe et tous ensemble dans les grandes échéances européennes et mondiales qui arrivent.
Je vous remercie.
(source http://www.fnsea.fr, le 13 février 2002)
(Souhaits de bienvenue)
Ce que nous célébrons aujourd'hui, au travers de cette assemblée, c'est d'abord l'histoire de 40 ans de travail et d'efforts au service des agriculteurs, de l'agriculture et de la construction européenne.
Nous voulons aussi par cette assemblée rendre hommage à l'importante contribution des agriculteurs et de l'agriculture à la société tout entière et à leur apport à l'Europe.
Nous ne voulons pas seulement regarder le passé. Nous voulons surtout nous pencher vers l'avenir, car c'est l'avenir qui importe.
Notre démarche d'aujourd'hui est une démarche d'ouverture vers tous les secteurs de la société européenne, une démarche d'ouverture vers tous les partenaires de l'agriculture et des agriculteurs : consommateurs, chaîne alimentaire, protecteurs de l'environnement et acteurs du monde rural.
Notre démarche de communication ne se limite pas à l'Europe. C'est pourquoi nous avons invité aujourd'hui des représentants étrangers et notamment des Etats-Unis.
Nous voulons dialoguer aujourd'hui avec vous sur l'avenir de l'agriculture européenne, sur l'avenir de notre modèle européen d'agriculture.
Pour nous ce modèle d'agriculture constitue un élément essentiel de la construction globale de l'Europe. C'est pourquoi nous avons accueilli avec satisfaction l'engagement pris par les chefs d'Etat et de Gouvernement en faveur du modèle européen d'agriculture. Ils doivent le développer à l'avenir et le défendre dans les instances internationales et notamment à l'OMC.
L'avenir de ce modèle dépend de tous les Européens et non pas seulement des agriculteurs. Même si cette idée de l'avenir de l'agriculture européenne est acceptée au niveau le plus élevé, nous comprenons qu'il faut la faire partager par toutes les couches de la société européenne.
C'est pourquoi nous les agriculteurs nous attendons beaucoup des contributions à la discussion, des critiques éventuelles et des suggestions de tous ceux qui sont concernés par l'avenir de l'agriculture, du monde rural et de l'Europe.
La question que nous nous posons est simple. C'est celle de savoir ce que vous pensez de notre conception du modèle européen d'agriculture. Nous voulons connaître vos idées sur l'avenir de notre agriculture. Nous voulons essayer de dégager une conception commune rassemblant nos diverses opinions, quant à l'avenir de l'Europe et à celui de l'agriculture européenne.
Ces dialogues internes à l'Europe ont lieu dans un monde qui change rapidement. Il y a seulement un an, presque tout le monde pensait que l'avenir était dans le libéralisme, sinon l'ultra libéralisme, pour tous les secteurs économiques. La Commission européenne a adopté cette stratégie avec l'Agenda 2000 dans sa volonté de calquer l'évolution de la politique agricole commune sur les Etats-Unis.
Les crises asiatique et russe et l'incertitude récente sur les marchés mondiaux montrent les dangers d'une telle conception ultra libérale pour l'agriculture. Elles montrent l'importance des mécanismes de la PAC qui permettent de maintenir la stabilité au profit à la fois des producteurs et des consommateurs.
Ces mécanismes ne peuvent être ni supprimés ni rendus inefficaces, ce qui serait le cas avec les propositions de la Commission de l'Agenda 2000 dans plusieurs secteurs. Dans ce contexte il faut souligner que même les Etats-Unis ont été obligés de revoir leur propre réforme de politique agricole de 1996.
Nous venons d'arrêter au niveau du COPA un plan global et des propositions spécifiques sur la façon de réviser le volet agricole de l'Agenda 2000. Nous considérons que nos propositions de révision des propositions de la Commission permettront une réforme durable de la PAC.
Cette réforme doit assurer dans toutes les régions d'Europe, la survie et le développement des exploitations agricoles de type familial, moteur de l'agriculture européenne - ainsi que la participation de l'Europe à l'alimentation des populations qui souffrent de faim. Ce n'est que de cette façon que l'agriculture européenne sera en mesure de remplir son rôle multifonctionnel - la fonction de production, la fonction territoriale et la fonction sociale - d'une manière satisfaisant au mieux les attentes des citoyens, des consommateurs et des agriculteurs.
Dans l'Europe actuelle qui tente d'améliorer la situation de l'emploi, il devrait être hors de question que des centaines de milliers de familles et des régions rurales économiquement les plus faibles puissent perdre leur emploi et disparaître en raison d'une politique de baisse de prix systématique et généralisée non compensée intégralement ou du manque de développement de véritables politiques agrirurale et agristructurelle.
Nous sommes également inquiets quant à l'impact des propositions de la Commission sur l'emploi dans d'autres secteurs de la chaîne alimentaire, et notamment les coopératives qui revêtent une importance cruciale pour l'emploi dans l'Europe entière.
Les agriculteurs, européens ardents, s'opposent à tout ce qui porte en germe la renationalisation de la PAC. Le cofinancement des aides est un poison mortel pour la PAC et pour l'Europe, car il conduirait à des distorsions de concurrence, à la fin de la solidarité financière et à l'effondrement du marché agricole unique.
C'est la raison pour laquelle le COPA souhaite que soit préservé le financement de la politique agricole commune et fait du maintien de la ligne directrice agricole telle qu'elle a été définie lors du Sommet d'Edimbourg, un préalable à toute réforme de la PAC.
La réforme durable de la PAC que le COPA propose, revêt une importance capitale non seulement pour les agriculteurs et leurs coopératives mais encore pour tous les citoyens européens. Dès lors, le 40ème anniversaire du COPA que nous célébrons aujourd'hui, est pour nous l'occasion d'inviter tous les Européens à un dialogue sur ce qui est notre intérêt commun, à savoir le modèle européen d'agriculture.
L'agriculture multifonctionnelle que nous défendons ne concerne pas seulement les agriculteurs mais aussi les consommateurs, les citoyens et la société tout entière. Nous les agriculteurs, nous voulons répondre à cet appel. Mais nous ne pourrons le faire seuls et nous vous invitons tous au dialogue. C'est l'avenir de l'agriculture et des agriculteurs, mais aussi celui de la société, de l'Europe, de l'humanité, qui est en jeu.
clôture
Notre journée de débat a été tournée vers l'avenir et placée sous le signe du dialogue et de l'ouverture.
Ouverture puisque les agriculteurs européens ont souhaité associer à leurs travaux, à l'occasion de ce 40ème anniversaire du COPA, leurs partenaires de la transformation, de la distribution, ainsi que des représentants des associations de consommateurs et de défense de l'environnement. En effet, c'est tous ensemble que nous construirons l'avenir d'une agriculture européenne qui réponde à la demande de nos consommateurs et à l'attente de nos citoyens.
Dialogue puisque nos échanges ont montré que nous nous retrouvons sur l'idée d'un modèle agricole européen, d'une identité européenne.
A l'issue de ces échanges, c'est maintenant vers tous les chefs d'Etat et de Gouvernement en Europe que je voudrais me tourner.
[Les agriculteurs au service de l'Europe]
C'est la volonté d'établir la paix entre les nations, et la prospérité des populations, qui est à l'origine de la construction européenne.
De tout temps, les agriculteurs se sont mis au service de cette paix et de cette prospérité, en nourrissant les hommes.
En 40 ans, nous avons permis à l'Europe d'assurer son indépendance alimentaire et de s'affirmer ainsi sur la scène mondiale. Nous avons bâti une grande puissance agricole et nous l'avons mise au service des hommes en Europe.
En 40 ans, avec la mise en place d'une politique agricole commune, l'agriculture a permis à l'Europe d'avancer. L'agriculture a été la tête de pont de l'Europe. L'agriculture a été le moteur et le ciment de la construction européenne. Elle veut le rester !
Les agriculteurs se sont pleinement engagés dans la construction de la politique agricole commune. C'est pourquoi les agriculteurs sont aujourd'hui des européens convaincus !
C'est un symbole : les 40 ans du COPA coïncident, à un an près, avec les 40 ans du Traité de Rome. Soyons fiers du chemin parcouru, mais rappelons-nous aussi les grands principes qui nous ont guidés : la solidarité financière, la stabilité des marchés, des revenus équitables. Ces grands principes n'ont pas pris une ride : ils doivent orienter l'avenir de l'Europe agricole !
[Une Europe qui doit évolueravec l'agriculture !]
Mais l'Europe dont nous parlons se construit de jour en jour. L'Europe a 6 est devenue l'Europe des 9, puis des 10, des 12 et des 15et le cercle va s'élargir encore à 20 membres et plus. L'intégration des pays d'Europe centrale et orientale, le développement d'une aire euro méditerranéenne, dessinent les contours des nouvelles frontières de l'Europe.
De même que nous avons su nous adapter et maîtriser ces changements, le COPA veut continuer ces évolutions avec les PECO. C'est pour ça que nous avons organisé une réunion à Bruxelles avec les candidats à l'Union Européenne, un colloque Euroméditerranée à Montpellier. C'est dans ce cadre là que nous travaillons dans le programme FARRE.
Oui, le COPA est favorable à l'élargissement, à condition qu'il soit maîtrisé, progressif et global, en intégrant tous les secteurs, pas seulement l'agriculture !
Face à cette dynamique, face à cette évolution géopolitique, l'Europe n'échappera pas à une véritable réforme de ses institutions. C'est un préalable à l'élargissement.
Nous, les agriculteurs, nous sommes bien placés pour le savoir, nous qui vivons au quotidien les décisions de Bruxelles. Il faut réformer les institutions, pour éviter que l'élargissement ne conduise au blocage et à la paralysie de la décision en Europe.
Les agriculteurs veulent continuer à aller de l'avant, pour l'Europe, et pour l'agriculture, alors, n'ayons pas peur d'adapter nos institutions !
L'Europe en marche aujourd'hui, c'est aussi l'Europe des transports, des réseaux, de l'énergie, mais aussi l'Europe sociale et bien sûr, l'Europe monétaire. Les Européens convaincus que nous sommes s'en réjouissent.
L'agriculture a trop souffert dans le passé des distorsions monétaires, pour ne pas se réjouir de l'avènement de la monnaie unique. Nous pourrons enfin exporter dans notre propre monnaie, sans coût ni risque de change. L'euro devrait apporter une plus grande stabilité, au bénéfice de tous en Europe. Alors, l'euro, les agriculteurs y ont toujours cru. Nous nous y préparons et nous avons intégré l'euro dans notre politique. Et nous souhaitons que l'Euro à 11 devienne bientôt l'euro à 15 !
Alors, dans cette marche en avant, les agriculteurs ne pourraient pas comprendre que dans le même temps, on liquide la politique agricole commune !
Nous avons besoin de maintenir une véritable politique agricole commune. C'est nécessaire, c'est indispensable, pour l'agriculture, pour l'Europe !
La PAC doit être préservée, ce qui suppose des choix politiques clairs, et un budget à la hauteur des enjeux. Sait-on que les dépenses agricoles représentent moins de 0,6% du PIB européen ? Si c'est tout le prix à payer pour avoir des aliments sains, de qualité et en quantité suffisante, alors l'agriculture est un bon placement !
Ce d'autant plus que notre agriculture n'est pas seulement tournée vers la production et l'approvisionnement des marchés locaux, nationaux, européens et mondiaux. Elle a aussi pour mission d'aménager l'espace et d'occuper tous les territoires, de préserver l'environnement et les ressources naturelles, de former et d'employer les hommes. C'est tout cela que les citoyens attendent maintenant de leur agriculture. Les agriculteurs sont prêts à y répondre, mais ils ne pourront pas le faire seuls, il faudra les y aider !
Et le jeu en vaut la chandelle !
[Quelle PAC pour quelle agriculture : préserver notre modèle agricole européen, un modèle d'avenir]
Nous sommes attachés à la multifonctionnalité de notre agriculture. Elle commence à être reconnue en Europe, et c'est tant mieux.
Mais la production doit rester au premier plan. C'est la clé de voûte de notre agriculture. C'est de notre métier qu'il s'agit : les agriculteurs veulent demeurer des chefs d'entreprise. Pour cela les agriculteurs doivent pouvoir équilibrer leurs comptes d'exploitation. Les agriculteurs veulent vivre de leur métier d'agriculteur !
C'est pourquoi la baisse généralisée et systématique des prix ne peut pas être une fin en soi ! Les prix doivent rester rémunérateurs.
Nous défendons en Europe une agriculture riche de sa diversité. Une agriculture faite de nombreuses exploitations à taille humaine, dirigées par des exploitants responsables de leur outil de travail.
Pour préserver ce modèle européen, nous avons besoin d'une certaine sécurité par rapport aux fluctuations du marché et aux aléas climatiques. Les organisations communes de marché restent indispensables pour assurer le maintien et le développement du type d'exploitation à taille humaine que nous défendons. Une préférence communautaire rénovée est nécessaire pour protéger nos normes sociales, sanitaires, environnementales. Ne nous alignons pas sur le moins disant mondial !
Ne faisons pas non plus du budget européen l'instrument du démantèlement de la PAC!
La renationalisation rampante, par les enveloppes nationales ou par le cofinancement, ne correspond ni à la PAC, car elle entraînerait des distorsions de concurrence fatales, ni à l'Europe car elle détruirait la solidarité financière qui réunit les Etats membres.
Détruire ainsi la politique agricole commune, première véritable politique européenne, c'est travailler contre l'Europe.
Alors, que nos chefs d'Etat et de gouvernement ne confondent pas subsidiarité et renationalisation! L'agriculture, et avec elle, l'Europe, méritent beaucoup mieux !
A l'échelle de la planète, l'Europe doit s'affirmer comme un acteur incontournable de l'équilibre alimentaire mondial. Il en va de son statut de grande puissance économique, comme de son rang dans le monde ! C'est un enjeu géostratégique et géopolitique.
Il passe par l'agriculture : ce qui grandira l'agriculture grandira l'Europe !
Pour être à la hauteur de cette ambition collective tout en préservant notre modèle agricole européen, nos politiques en Europe devront concerner tous les hommes, tous les produits et tous les territoires. La réforme de la PAC ne devra pas aboutir à mettre de côté certains produits ou certaines régions. L'équilibre socio-structurel doit être assuré.
Notre choix pour un certain type d'agriculture, que nous exprimons dans le modèle agricole européen, nous devons le défendre et le promouvoir dans les négociations internationales.
Il ne s'agit pas d'imposer ce modèle européen à tous nos partenaires dans le monde. Mais nous devons prendre l'initiative. Il s'agit de montrer que nous avons nos spécificités et que n'avons pas à calquer notre politique sur celle des autres. L'Europe, ce n'est ni les Etats-Unis, ni l'Asie !
Notre modèle agricole européen est un véritable choix de société, basé sur l'équilibre entre les hommes, les produits et les territoires :
- des hommes acteurs et responsables,
- des produits sains, de qualités, bien identifiés,
- des territoires équilibrés, accueillants et durables
[Le COPA, fer de lance européen]
Pour y parvenir, les Européens, plus que jamais, auront besoin d'être unis !
Nous, les professionnels agricoles, nous avons montré la voie avec le COPA !
Bien sûr, parler d'une seule voix, et bientôt avec nos partenaires des PECO, cela ne va pas de soi. Mais c'est un effort indispensable, pour l'agriculture, et pour l'Europe !
Au sein du COPA, les agriculteurs l'ont bien compris. Ils ont démontré qu'il était possible de parler d'une seule voix en Europe. Ils montrent qu'il est possible, au-delà des différences de régions, de pays, de productions, de se retrouver pour promouvoir, ensemble, un type d'agriculture qui préserve l'équilibre, l'identité, l'âme de l'Europe.
Alors j'invite les chefs d'Etat et de gouvernement à emprunter le même chemin, à se réunir autour du modèle agricole européen, qu'il faut défendre en Europe et hors d'Europe !
Le COPA est de plus en plus reconnu et respecté comme interlocuteur en Europe. Pour le rester, il devra continuer à être une force de proposition, et travailler en concertation avec les institutions européennes : Commission, Conseil, Parlement, Comité économique et social ou Comité des Régions.
Pour faire partager à tous nos convictions sur la place de l'agriculture dans l'économie et la société, le COPA devra être :
- ouvert aux autres catégories professionnelles, aux consommateurs et aux citoyens, à la société en général - et les débats de ce matin l'ont bien montré !
- partenaire de tous les acteurs de l'agriculture, de l'alimentation, du monde rural et de la société, comme des pouvoirs publics.
Le syndicalisme agricole ne peut se concevoir qu'à travers un lien étroit avec l'économique : l'action commune du COPA et du COGECA le démontre largement !
C'est ainsi que nous pourrons défendre notre projet agricole pour l'Europe : une agriculture durable, économiquement viable et transmissible. Une agriculture qui donne envie aux jeunes de s'installer. Une agriculture proche des consommateurs et des citoyens.
C'est ainsi que le COPA pourra devenir ce corps intermédiaire indispensable pour orienter la politique agricole commune. Un corps social agricole gage de démocratie et de progrès économique et social en Europe. Car la démocratie, c'est aussi la reconnaissance et le développement du dialogue social. Un corps social au service d'un projet de société basé sur la responsabilité individuelle de chacun et la solidarité de tous. En conjuguant tradition et modernité.
Voici le grand chantier que nous voulons mener à bien. Et si nous ne sommes pas suffisamment entendus , nous sommes prêts à passer à l'action syndicale. Alors, à nous de défendre ce projet européen, à vous, chefs d'Etat et de gouvernement, de le construire, partout dans nos pays d'Europe et tous ensemble dans les grandes échéances européennes et mondiales qui arrivent.
Je vous remercie.
(source http://www.fnsea.fr, le 13 février 2002)