Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs les Députés,
La Guyane française est un territoire d'outre-mer qui présente des singularités que nous ne pouvons ignorer, et qui nous amènent à la présentation de cet accord aujourd'hui.
Tout d'abord, ouverte sur 450 kilomètres sur le front atlantique, la Guyane possède 1 250 kilomètres de frontières, dont 520 avec le Suriname. Les échanges frontaliers sont donc nombreux avec ce pays.
Par ailleurs, bénéficiant du niveau de vie le plus élevé du continent, la Guyane exerce un pouvoir d'attraction important pour les populations du continent sud-américain.
Enfin, composée de nombreux fleuves, forêts et côtes, le territoire de la Guyane est particulièrement perméable et propice à une immigration clandestine d'envergure ainsi qu'aux trafics les plus divers - orpaillage illégal, trafics d'espèces protégées, transferts de valeurs, trafics d'armes et de stupéfiants, prostitution.
Dans ces conditions, une délinquance importante s'est développée en Guyane mettant en cause notamment, mais non exclusivement, des ressortissants du Suriname. Ce pays est en effet une plaque tournante pour des flux migratoires, essentiellement en provenance du Guyana, d'Haïti, de République dominicaine, du Brésil et de Chine, avec pour destination finale les Etats-Unis, l'Europe et la Guyane.
La mise en oeuvre d'une coopération régionale transfrontalière dans les collectivités d'outre-mer est donc plus que nécessaire. C'est précisément ce que prévoit l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Suriname relatif à la coopération transfrontalière en matière policière, que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui.
L'inscription en 1999 du Suriname dans notre zone de solidarité prioritaire avait déjà permis de développer une coopération dans le domaine de la sécurité intérieure. L'ouverture d'une délégation du service de coopération technique internationale policière en octobre 2006 a encore renforcé notre dispositif. Mais, pour répondre aux besoins exprimés par les autorités du Suriname comme dans notre propre intérêt, il était nécessaire de recentrer nos efforts sur les problématiques transfrontalières. C'est tout le sens de l'accord franco-surinamien relatif à la coopération transfrontalière en matière policière, signé à Saint-Laurent-du-Maroni, le 29 juin 2006.
Cet accord organise la coopération policière transfrontalière sous forme de patrouilles conjointes, de détachements d'agents de liaison et de mise en oeuvre d'une coopération directe. En revanche, et dans la mesure où le Suriname ne dispose pas d'une législation suffisamment protectrice s'agissant des données personnelles, il ne prévoit pas de modalités d'échanges d'informations nominatives.
Le domaine d'application du présent accord comprend le fleuve Maroni ainsi qu'une bande de deux kilomètres sur chaque rive du fleuve. Son objectif est de développer une coopération policière visant à prévenir les faits punissables et à faciliter la lutte contre la criminalité et la délinquance transfrontalière, notamment la coordination de mesures conjointes de surveillance sur la zone frontalière et sur le fleuve. Il vise également la préparation et l'exécution d'opérations de remise d'étrangers en situation irrégulière prévues par l'accord franco-surinamien de réadmission de personnes en situation irrégulière signé à Paris le 30 novembre 2004.
Ces objectifs seront mis en oeuvre par des patrouilles conjointes, des détachements d'agents et une coopération directe des chefs d'unités concernés. Cette coopération directe visera l'échange de données statistiques et de données non personnelles, ainsi que l'élaboration de modes communs d'interventions opérationnelles complétés par des échanges de savoir-faire.
La mise en oeuvre de cet accord conférera une base juridique indispensable au renforcement d'une coopération transfrontalière essentielle à la sécurité intérieure de la Guyane.
Telles sont, Monsieur le Président, Monsieur le Rapporteur, Mesdames, Messieurs les Députés, les principales observations qu'appelle l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Suriname relatif à la coopération transfrontalière en matière policière qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
(...)
Je vais d'abord répondre à propos de la condescendance, Madame Taubira. Vous imaginez bien que nous n'en éprouvons pas. Nous avons beaucoup de respect pour le Suriname ; le travail de collaboration que nous menons d'égal à égal, d'Etat à Etat, en est la preuve.
S'agissant des orpailleurs clandestins, les actions de lutte contre l'orpaillage menées par la gendarmerie, les opérations Anaconda, démontrent notre volonté de lutter fermement contre ce type d'infractions. C'est d'ailleurs pour améliorer le dispositif actuel, en étroite collaboration avec nos voisins, que nous souhaitons que soit ratifié l'accord de coopération policière transfrontalière de juin 2006, qui prévoit notamment la mise en place de patrouilles conjointes dans la zone frontalière.
Quant aux litiges frontaliers, ils sont de plusieurs natures : maritime, terrestre ou fluviale ; je vais répondre en référence à la question que vous aviez posée à Bernard Kouchner. Depuis 1978, la France a fait des propositions au Suriname, tout juste indépendant depuis 1975, en vue de régler ce dossier. Sans résultat, il est vrai. Néanmoins, cet Etat a exprimé récemment des inquiétudes devant les actions de vive force que nous avons été contraints de conduire pour mettre fin à des activités d'orpaillage illégal. Nous avons décidé de mettre à profit cette réaction surinamienne pour relancer le dialogue relatif à la frontière. Notre ambassadeur à Paramaribo, actuellement à Paris, a reçu pour instruction de reprendre dès son retour au Suriname l'attache des autorités locales afin de leur proposer d'organiser à la date qui leur conviendrait une réunion de travail visant à régler la question de notre frontière maritime. A cette occasion, les aspects terrestres du dossier pourraient être évoqués, étant entendu que nous rejetons la mise en cause de notre souveraineté sur la portion du territoire concernée par le litige terrestre.
Ce dialogue doit nous aider à mieux prendre en compte, au-delà des seuls aspects techniques et juridiques, la réalité des liens humains et socio-économiques entre la Guyane et le Suriname. Nous sommes donc particulièrement attachés à la préservation de ces liens. C'est dans cet esprit constructif que nous souhaitons voir le Suriname ratifier les accords que nous avons signés en matière de réadmission et de coopération policière transfrontalière.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 janvier 2008
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs les Députés,
La Guyane française est un territoire d'outre-mer qui présente des singularités que nous ne pouvons ignorer, et qui nous amènent à la présentation de cet accord aujourd'hui.
Tout d'abord, ouverte sur 450 kilomètres sur le front atlantique, la Guyane possède 1 250 kilomètres de frontières, dont 520 avec le Suriname. Les échanges frontaliers sont donc nombreux avec ce pays.
Par ailleurs, bénéficiant du niveau de vie le plus élevé du continent, la Guyane exerce un pouvoir d'attraction important pour les populations du continent sud-américain.
Enfin, composée de nombreux fleuves, forêts et côtes, le territoire de la Guyane est particulièrement perméable et propice à une immigration clandestine d'envergure ainsi qu'aux trafics les plus divers - orpaillage illégal, trafics d'espèces protégées, transferts de valeurs, trafics d'armes et de stupéfiants, prostitution.
Dans ces conditions, une délinquance importante s'est développée en Guyane mettant en cause notamment, mais non exclusivement, des ressortissants du Suriname. Ce pays est en effet une plaque tournante pour des flux migratoires, essentiellement en provenance du Guyana, d'Haïti, de République dominicaine, du Brésil et de Chine, avec pour destination finale les Etats-Unis, l'Europe et la Guyane.
La mise en oeuvre d'une coopération régionale transfrontalière dans les collectivités d'outre-mer est donc plus que nécessaire. C'est précisément ce que prévoit l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Suriname relatif à la coopération transfrontalière en matière policière, que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui.
L'inscription en 1999 du Suriname dans notre zone de solidarité prioritaire avait déjà permis de développer une coopération dans le domaine de la sécurité intérieure. L'ouverture d'une délégation du service de coopération technique internationale policière en octobre 2006 a encore renforcé notre dispositif. Mais, pour répondre aux besoins exprimés par les autorités du Suriname comme dans notre propre intérêt, il était nécessaire de recentrer nos efforts sur les problématiques transfrontalières. C'est tout le sens de l'accord franco-surinamien relatif à la coopération transfrontalière en matière policière, signé à Saint-Laurent-du-Maroni, le 29 juin 2006.
Cet accord organise la coopération policière transfrontalière sous forme de patrouilles conjointes, de détachements d'agents de liaison et de mise en oeuvre d'une coopération directe. En revanche, et dans la mesure où le Suriname ne dispose pas d'une législation suffisamment protectrice s'agissant des données personnelles, il ne prévoit pas de modalités d'échanges d'informations nominatives.
Le domaine d'application du présent accord comprend le fleuve Maroni ainsi qu'une bande de deux kilomètres sur chaque rive du fleuve. Son objectif est de développer une coopération policière visant à prévenir les faits punissables et à faciliter la lutte contre la criminalité et la délinquance transfrontalière, notamment la coordination de mesures conjointes de surveillance sur la zone frontalière et sur le fleuve. Il vise également la préparation et l'exécution d'opérations de remise d'étrangers en situation irrégulière prévues par l'accord franco-surinamien de réadmission de personnes en situation irrégulière signé à Paris le 30 novembre 2004.
Ces objectifs seront mis en oeuvre par des patrouilles conjointes, des détachements d'agents et une coopération directe des chefs d'unités concernés. Cette coopération directe visera l'échange de données statistiques et de données non personnelles, ainsi que l'élaboration de modes communs d'interventions opérationnelles complétés par des échanges de savoir-faire.
La mise en oeuvre de cet accord conférera une base juridique indispensable au renforcement d'une coopération transfrontalière essentielle à la sécurité intérieure de la Guyane.
Telles sont, Monsieur le Président, Monsieur le Rapporteur, Mesdames, Messieurs les Députés, les principales observations qu'appelle l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Suriname relatif à la coopération transfrontalière en matière policière qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
(...)
Je vais d'abord répondre à propos de la condescendance, Madame Taubira. Vous imaginez bien que nous n'en éprouvons pas. Nous avons beaucoup de respect pour le Suriname ; le travail de collaboration que nous menons d'égal à égal, d'Etat à Etat, en est la preuve.
S'agissant des orpailleurs clandestins, les actions de lutte contre l'orpaillage menées par la gendarmerie, les opérations Anaconda, démontrent notre volonté de lutter fermement contre ce type d'infractions. C'est d'ailleurs pour améliorer le dispositif actuel, en étroite collaboration avec nos voisins, que nous souhaitons que soit ratifié l'accord de coopération policière transfrontalière de juin 2006, qui prévoit notamment la mise en place de patrouilles conjointes dans la zone frontalière.
Quant aux litiges frontaliers, ils sont de plusieurs natures : maritime, terrestre ou fluviale ; je vais répondre en référence à la question que vous aviez posée à Bernard Kouchner. Depuis 1978, la France a fait des propositions au Suriname, tout juste indépendant depuis 1975, en vue de régler ce dossier. Sans résultat, il est vrai. Néanmoins, cet Etat a exprimé récemment des inquiétudes devant les actions de vive force que nous avons été contraints de conduire pour mettre fin à des activités d'orpaillage illégal. Nous avons décidé de mettre à profit cette réaction surinamienne pour relancer le dialogue relatif à la frontière. Notre ambassadeur à Paramaribo, actuellement à Paris, a reçu pour instruction de reprendre dès son retour au Suriname l'attache des autorités locales afin de leur proposer d'organiser à la date qui leur conviendrait une réunion de travail visant à régler la question de notre frontière maritime. A cette occasion, les aspects terrestres du dossier pourraient être évoqués, étant entendu que nous rejetons la mise en cause de notre souveraineté sur la portion du territoire concernée par le litige terrestre.
Ce dialogue doit nous aider à mieux prendre en compte, au-delà des seuls aspects techniques et juridiques, la réalité des liens humains et socio-économiques entre la Guyane et le Suriname. Nous sommes donc particulièrement attachés à la préservation de ces liens. C'est dans cet esprit constructif que nous souhaitons voir le Suriname ratifier les accords que nous avons signés en matière de réadmission et de coopération policière transfrontalière.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 janvier 2008