Déclaration de M. Luc Chatel, secrétaire d'Etat chargé de la consommation et du tourisme, sur les mesures locales d'aide au commerce et à l'artisanat, notamment la réforme des relations commerciales avec le projet de loi concernant les marges arrières, et leur impact sur le développement du tourisme, Périgueux le 10 décembre 2007.

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Circonstance : Rencontres de l'artisanat et du commerce, à Périgueux le 10 décembre 2007

Texte intégral

Monsieur le Ministre, Cher Xavier,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais vous dire à quel point je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui. Les raisons de me réjouir sont multiples. Tout d'abord parce que cette invitation est celle d'un ami, Monsieur le Ministre, cher Xavier. Ensuite parce que la visite de votre belle ville de Périgueux est pour moi le prolongement concret et logique du décret que j'ai signé en octobre dernier et qui a érigé Périgueux en station classée de tourisme. Enfin, parce que les thèmes développés au cours de cette rencontre font parfaitement le lien entre les deux missions dont j'ai la charge, en tant que Secrétaire d'Etat chargé à la fois de la consommation et du tourisme.

Tourisme et consommation ! Les deux domaines sont intimement liés. A titre d'exemple, permettez-moi de rappeler les deux chiffres qui me serviront de fil rouge au cours de ma mission au gouvernement. Le chiffre 1 tout d'abord : la France est la première destination touristique mondiale pour le nombre de visiteurs accueillis, avec 79 millions de touristes. Et le chiffre 3 : la France n'est que la troisième destination « en valeur » c'est-à-dire pour les recettes touristiques enregistrées.

Pour qu'à l'avenir nous n'ayons plus qu'un chiffre à retenir, le chiffre 1, nous devons faire en sorte que les flux importants de visiteurs se traduisent davantage en dépenses touristiques, et donc en une consommation accrue de nos biens et services.

Mon ambition, à l'échelle nationale, est la même que celle que vous avez pour votre ville et votre région : fidéliser les visiteurs, les retenir, leur donner envie de prolonger leur séjour et de ne pas se limiter aux seuls charmes de Paris, du Mont St Michel ou de la Provence.

Le patrimoine Français est immense. Une vie entière ne suffirait d'ailleurs pas à en faire le tour. A raison d'une visite par jour, il faudrait 110 ans pour visiter les 40 000 sites culturels répertoriés en France !

Mais exploitons-nous vraiment cette richesse ?
Le tourisme reste trop concentré sur un nombre restreint de sites emblématiques. Un chiffre résume à lui seul ce constat : 4 sites enregistrent à eux-seuls 80 % des visites de musées nationaux. 20 millions de personnes visitent ainsi tous les ans le musée du Louvre, le centre Georges Pompidou, la cité des sciences de la Villette et le musée d'Orsay : on ne peut que s'en réjouir !

Mais ce constat appelle une évidence : pour atteindre nos objectifs, nous devrons mieux valoriser l'ensemble de notre patrimoine. Pour se faire, il ne faut pas seulement le préserver et l'entretenir, il faut le rendre vivant !

Nous devons développer un tourisme culturel moins élitiste et plus accessible, afin de le rendre abordable au public étranger et de ne pas se cantonner à un public au niveau socio-culturel élevé. Il faut également privilégier un tourisme moins figé et plus dynamique, plus ludique, qui offre des parcours interactifs et propose des mises en scène innovantes et conviviales.
Il faut enfin instaurer un dialogue permanent entre d'une côté notre patrimoine historique et culturel et de l'autre les arts contemporains et le savoir-faire de nos meilleurs professionnels.

Le musée Vésunna, que j'ai découvert ce matin, est une illustration vivante de tous ces principes. La touche de modernité et de créativité apportée par Jean Nouvel a permis de valoriser un patrimoine riche ; le mariage entre les matériaux modernes et les structures anciennes est ainsi particulièrement réussi. Les parcours de découvertes, les maquettes et les reconstitutions permettre de placer l'histoire à la portée de tous. Je sais à quel point vous avez compté, Monsieur le Ministre dans la réalisation de ce site : vous pouvez en être fier, comme tous les Pétrocoriens.

Le mélange des genres ne me choque pas, bien au contraire ! Lorsqu'il s'opère avec goût et discernement, il devient même un facteur d'attractivité supplémentaire. La recomposition urbaine de la place Francheville est ainsi un autre exemple de mariage réussi entre la préservation du patrimoine et le développement d'activités nouvelles, avec notamment l'installation d'un cinéma multiplexe et de plusieurs restaurants.
Ce matin, en visitant les sites remarquables de Périgueux et en marchant dans ses jolies rues du centre-ville, j'ai pu constater de mes propres yeux la beauté de votre ville et mesurer son potentiel touristique. C'est pourquoi je ne peux que me réjouir d'avoir signé le décret érigeant la commune de Périgueux en station classée de tourisme.
Ce classement facilitera le développement de la ville par des travaux d'équipements et d'entretien - conservation des monuments et des sites, embellissement, amélioration des conditions d'accès, d'habitation et de circulation.
Le classement apporte, en outre, des avantages financiers spécifiques grâce au surclassement démographique qui offrira à Périgueux des opportunités en matière d'équipements publics. De quoi s'agit-il ? L'idée, c'est qu'une ville touristique reçoit une population saisonnière qui s'ajoute à sa population ; elle a en conséquence des besoins en termes d'équipements supérieurs à une ville de même taille qui n'a pas de vocation touristique.

La désignation comme station classée de tourisme a enfin pour vertu de valoriser l'image de la ville. Elle est en soi un efficace argument de promotion commerciale, qui doit permettre de générer des flux de touristes supplémentaires.

L'attractivité de la Dordogne n'est plus à démontrer : avec 2 millions de visiteurs annuels, le département se classe dans les zones touristiques françaises les plus visitées. Sarlat à elle seule attire un millions de visiteurs par an. Une étude récente de la CCI a montré que la Dordogne est le département français le plus attractif pour les Britanniques. Avec l'ouverture de nombreuses lignes aériennes (Londres, Southampton, Bristol, Birmingham, Liverpool, Nottingham, Exeter et Leeds) le nombre de passagers a été multiplié par 17 en seulement six ans ! L'impact économique de ce nouveau phénomène est d'autant plus positif que les britanniques achètent surtout du moyen et haut de gamme.
L'ambition de tous les acteurs que j'ai rencontrés aujourd'hui est de faire de Périgueux une véritable étape dans la découverte de la région, et non un simple point de passage. Pour cela, il faut que l'excellence de vos structures d'accueil s'accorde le plus possible avec l'excellence de vos atouts culturels et historiques. La récente installation d'un hôtel Mercure trois étoiles va dans ce sens.

Elle rejoint mes objectifs pour le tourisme français : celui d'une montée en gamme globale et progressive de notre offre, notamment en matière d'hôtellerie. Cela passera par la réforme du classement des hébergements, que j'ai initiée dès juillet dernier avec les professionnels du secteur.

Vous le savez sans doute, notre système d'étoiles est dépassé, et d'ailleurs bien souvent illisible pour les étrangers. Il est axé sur des critères uniquement « physiques », souvent obsolètes. Un exemple vaut mieux que de longs discours : dans le classement actuel, il est exigé pour un hôtel une étoile d'avoir une cabine téléphonique fermée, accessible au public.

En revanche, pas un mot sur l'accessibilité à internet, y compris pour les 4 étoiles !
Dès 2008, je proposerai donc un nouveau mode de classement, tenant compte davantage des critères d'accueil, de qualité de service, d'hygiène et aussi d'excellence environnementale.

Je crois que votre table-ronde de ce matin a bien mis en lumière les interactions qui existent au niveau local entre commerce et développement du tourisme.
Si ces interactions sont le plus souvent « naturelles », elles méritent pourtant d'être stimulées. Les relations entre professionnels du tourisme et commerçants doivent être encouragées et systématisées :
- d'une part, les commerçants et les artisans doivent devenir pour tous leurs clients des prescripteurs de l'offre touristique de leur ville et de leur région. Quel que soit leur domaine d'activité, ils sont aux yeux des visiteurs des ambassadeurs de leur région.
- d'autre part, il est important que les professionnels du tourisme fassent du commerce et de l'artisanat un argument de valorisation de la ville aux yeux des visiteurs.

Je sais, Monsieur le Ministre, cher Xavier, que la préservation du commerce de centre-ville est une question qui vous est chère. Cette préoccupation est, j'imagine, partagée par tous dans cette salle. C'est pourquoi, en enfilant cette fois-ci ma casquette de Secrétaire d'Etat chargé de la consommation, je tiens non seulement à vous rassurer mais aussi et surtout à vous inciter à l'optimisme.

Les très petites entreprises (TPE) occupent une place majeure dans l'économie locale de la Dordogne. L'artisanat représente à lui seul 26 000 emplois, le commerce 14 000 et le tourisme 3 400 emplois. Ce qui veut dire que vous tous, ici présents, représentez un tiers de l'activité économique du département !
Depuis dix ans, le nombre de salariés dans le commerce a augmenté de 5 %. Dans la même période, l'emploi dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration, a cru de 31 % !
Enfin, On constate depuis 2003 une forte augmentation des créations d'entreprises.
Cette croissance globale pose cependant deux questions :
- d'abord la question de la main d'oeuvre : si l'emploi s'est développé dans l'artisanat au cours des dernières années, on constate un déficit de main d'oeuvre en particulier dans les secteurs du bâtiment et de l'alimentation.
- ensuite la question de l'équilibre entre commerce de détail et grandes surfaces. Il ne faut pas seulement nous satisfaire de l'évolution positive de l'emploi global dans le commerce, il s'agit aussi de concilier le développement de la grande distribution et celui des commerces de centre-ville. Ceux-ci sont indispensables pour la vie de la cité, pour la qualité de vie des habitants et plus simplement encore pour l'emploi et la pérennité des entreprises concernées.
En tant que Secrétaire d'Etat chargé de la consommation, mon rôle est d'assurer un équilibre optimal entre la défense du pouvoir d'achat des Français, le renforcement de la concurrence entre les grandes surfaces et le développement des petits commerces.
Ce rôle va être particulièrement accentué dans les semaines et les mois à venir car nous sommes à l'aube de grandes réformes dans le domaine des relations commerciales et de la distribution.
Vous le savez sans doute, le projet de loi que je défends et qui est en cours d'examen au Parlement permettra aux distributeurs de réintégrer intégralement dans les prix en magasin les avantages commerciaux accordés par leurs fournisseurs, les fameuses marges arrières.

L'effet de la mesure sera sensible pour nos concitoyens, puisqu'elle permettra une économie moyenne de 200 euros pour chaque famille française.

Ce projet de loi est la deuxième étape de la réforme de la loi Galland. La première étape avait été initiée par Nicolas Sarkozy, alors Ministre de l'Economie et des Finances et s'était concrétisée par la loi Dutreil en 2005. Le but était de renforcer la concurrence entre les distributeurs, au profit du pouvoir d'achat des consommateurs finaux. Je me souviens encore des prévisions alarmistes de certains, qui nous promettaient la mort du petit commerce et la disparition de nos rayons des articles produits par des PME. Deux ans plus tard, les faits nous montrent clairement que ces craintes n'étaient pas justifiées : au niveau national, le commerce de détail a créé 20 000 emplois depuis 2005, et le poids des produits de PME dans le chiffres d'affaires des grandes et moyennes s'est renforcé, passant de 56,2 % à 57,3 %.

Faut-il pour autant aller plus loin dans la réforme des relations commerciales ? Beaucoup auraient aimé que nous allions plus vite, en permettant la négociabilité entre distributeurs et fournisseurs, ce qui favoriserait une concurrence accrue entre les grandes enseignes. Sur ce point ma position est claire : si nous devons résolument nous engager dans cette voie, il est hors de question que cela se fasse au détriment du petit commerce, et notamment du commerce de centre-ville, qui n'aurait pas les moyens de résister à une guerre des prix. Il faut donc travailler en amont avec tous les représentants des acteurs concernés - PME fournisseurs, commerçants, grands distributeurs- pour mettre en oeuvre les actions d'accompagnement les plus efficaces et faire en sorte que personne ne soit le perdant des réformes à venir.

2008 sera une année d'action très forte en faveur de l'artisanat et du commerce. Mon collègue Hervé Novelli a annoncé récemment les pistes prioritaires pour le gouvernement :
1. Première piste, la simplification du cadre légal, fiscal et administratif auquel vous êtes soumis. Les priorités dans le domaine seront la mise en place d'un rescrit fiscal plus large, de la réduction des effets de seuil liés à des contraintes réglementaires et la mise en place du statut de l'entrepreneur indépendant.

2. Deuxième piste, la transmission d'entreprise. A titre d'exemple, 40 % des boucheries-charcuteries françaises et un tiers des entreprises du secteur de la coiffure seront à céder dans les 10 ans à venir. Le gouvernement présentera donc en 2008 des mesures en matière d'harmonisation et de simplification des droits de mutation.

3. Troisième piste, la montée en puissance des FISAC (fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce) qui devront d'une part être recentrés sur les métiers du commerce et de l'artisanat, et d'autre part être financièrement renforcés. C'est un enjeu important pour votre région, puisque globalement l'Aquitaine est la 4ème région française bénéficiaire du FISAC en montant cumulé sur les quinze dernières années.

Vous le voyez, le gouvernement forme de grandes ambitions pour le tourisme et la consommation, ainsi que pour la promotion de l'artisanat et du commerce. Cette ambition se concrétisera par des actions concrètes, dont Périgueux profitera à plein.

Je vous remercie à nouveau de votre invitation, je suis heureux d'avoir pu découvrir votre ville en la compagnie d'un guide aussi prestigieux, cher Xavier, et je vous souhaite à tous la réussite dans vos projets d'entreprise et dans le développement de votre ville.
Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 21 janvier 2008