Déclaration de Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication, sur le patrimoine architectural de Le Corbusier, Paris le 30 janvier 2008.

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Circonstance : Signature du dossier de candidature à l'inscription sur la liste du patrimoine mondial de l'oeuvre architecturale et urbaine de Le Corbusier à Paris le 30 janvier 2008

Texte intégral

Je suis particulièrement heureuse d'être avec vous ce soir, et aussi très honorée et très fière d'être entourée des délégations officielles des cinq autres pays qui ont bien voulu répondre à l'invitation de la France pour inscrire l'oeuvre architecturale et urbaine de Le Corbusier sur la Liste du Patrimoine mondial.
L'Allemagne, l'Argentine, la Belgique, la France, l'Inde, le Japon et la Suisse - pays de naissance de Charles-Edouard Jeanneret - se sont mobilisés depuis de nombreuses années pour faire reconnaître la dimension internationale de l'oeuvre de Le Corbusier. Aujourd'hui, tous les partenaires, excepté l'Inde, vont signer ce dossier de candidature. Je m'en félicite et je remercie chaleureusement leurs représentants ici présents.
Je voudrais aussi saluer la Fondation Le Corbusier et son président, Jean-Pierre Duport, dont l'appui a été déterminant pour cette candidature.
Cela fait trente ans que la Liste du Patrimoine mondial a été créée et en trente ans, de très nombreux pays se sont mobilisés pour faire reconnaître la valeur universelle de leurs trésors, faisant évoluer la notion même de patrimoine mondial.
Nous sommes passés d'une liste d'«icônes», quasi mythiques, à une vision plus diverse des formes, vision qui désigne aussi des ensembles, des villes, des paysages culturels. Depuis plusieurs années également, on voit s'inscrire sur la Liste du Patrimoine mondial des biens trans-frontaliers ou trans-nationaux.
La mission que nous nous sommes donnés tous ensemble est originale et nouvelle. Ce n'est pas la première fois qu'une oeuvre d'un architecte du XXIe siècle est proposée pour cette liste, mais c'est la première fois qu'une même proposition réunit des oeuvres dispersées sur trois continents. Sans vouloir préjuger, bien sûr, de la décision qui sera prise par le Comité du Patrimoine mondial l'année prochaine, je crois que l'on peut dire qu'il s'agit de la première candidature qui soit « mondiale », je veux dire qui soit celle d'une oeuvre dont l'ambition et la réalisation ont été mondiales.
C'est tout le sens de l'hommage qu'André Malraux rendit à Le Corbusier à sa disparition, en saluant « l'homme qui a changé l'architecture en lui donnant un vocabulaire visuel universel ».
Oui, Le Corbusier a profondément changé l'architecture, en faisant du bien-être, du bonheur de l'homme l'une des clés de cet art. Il fut l'un des premiers architectes médiatiques, qui suscita de vastes débats, parfois violents, mais qui fut à l'origine d'une réflexion intense autour du cadre de vie moderne. C'était un véritable utopiste de la forme, mais cette utopie, il a toujours souhaité la défendre dans des termes clairs, dans un langage accessible à tous, pour mieux la partager. Il était un formidable passeur et je crois que c'est ce qui a fait le succès de ses théories et de son esthétique à travers le monde.
Le Corbusier fut en effet l'un des pionniers de l'internationalisation de l'architecture qui marqua la seconde moitié du XXe siècle. Malraux avait évoqué, en une saisissante énumération qui suivait la course du soleil, l'empreinte de son oeuvre sur le monde. La première oeuvre qu'il cita fut le musée des Beaux-Arts de l'Occident, à Tokyo, qui marque la profondeur des liens entre la France et le Japon.
L'oeuvre de Le Corbusier appartient à l'humanité, c'est ce que la coopération des six pays rassemblés ici ce soir manifeste et veut faire reconnaître. C'est une très belle aventure, inédite et véritablement enthousiasmante, et je suis très heureuse de la partager avec vous tous.
Je voudrais bien sûr remercier et féliciter les experts qui ont bâti ce dossier, et tout particulièrement ceux qui en ont été les artisans directs : Roger Aujame, ancien collaborateur de Le Corbusier, Gilles Ragot, Pierre-Antoine Gatier et son agence, Bénédicte Gandini, Michel Richard, Nelly Martin, Olivier Poisson, Isabelle Longuet, Bernard Artal, Marie-Noël Tournoux ; mais aussi Alberto de Paula, Jo Braecken, Friedemann Gschwind, Oliver Martin, Kiran Joshi et Yoshiyuki Yamana.
Je ne voudrais pas oublier les responsables et les élus des villes ou des territoires aujourd'hui dépositaires de cette oeuvre, qui ont été les indispensables soutiens de notre démarche.
Que tous ceux qui y ont contribué - le Centre du Patrimoine mondial de l'UNESCO et ses collaborateurs, en particulier - me pardonnent de ne pas citer leurs noms, je sais qu'ils ont été aussi nombreux qu'enthousiastes.
Merci à tous.

Source http://www.culture.gouv.fr, le 31 janvier 2008