Interview de M. Jean-Pierre Raffarin, vice-président de l'UMP, à France 2 le 10 mars 2008, sur les résultats du premier tour des élections municipales et cantonales et la conception d'un "pluralisme territorial" ouvert au centre.

Prononcé le

Média : France 2

Texte intégral

F. Laborde.-  Bonjour à tous. Oui, avec J.-P. Raffarin, ce matin, nous allons  tenter de tirer d'abord un bilan un peu global, de ce scrutin.  Bonjour J.-P. Raffarin, merci d'être avec nous ce matin. Votre  analyse, d'abord, de ce qui s'est passé dimanche, hier, partout en  France. 
 
R.- Eh bien écoutez, bonjour d'abord, F. Laborde, merci de m'accueillir.  Au fond, ces élections, je l'avais dit, je crois avoir été le premier, sont  des élections municipales, ce ne sont donc pas des élections nationales,  donc il ne faut pas retenir un message national d'élections locales : le  message de Bordeaux est exactement l'inverse du message de Rouen ;  ce sont donc des élections locales. Il y a des satisfactions, de  nombreuses - ici je vous parle de Poitiers, dans la commune, à  Chasseneuil, au premier tour, 57 %, c'est un score très important ; un  député socialiste, monsieur Clément, soutien de madame Royal, a été  battu aux cantonales. Donc il y a des bonnes nouvelles et puis il y en a  des plus mauvaises. Dans le fond, c'est des résultats qui correspondent  à des élections locales, des résultats diversifiés, contrastés. 
 
Q.- Donc, à Chasseneuil, la mairie ne change pas. 
 
R.- Absolument, et c'est un premier tour très important, avec 57 % et,  d'une manière générale, dans beaucoup de petites villes, on voit que des  équipes de l'UMP, mais de l'UMP ouvertes, ouvertes notamment au  centre, ont obtenu un certain nombre de bons résultats. Alors, je note  bien évidemment qu'il y a des villes qui sont passées à gauche, il faut  être objectif, il faut surtout être prudent parce qu'il faut penser au  second tour. On a vu que dans cette période, les électeurs sont très  attentifs, et comme on se souvient, aux élections législatives, entre les  deux tours, il peut y avoir des changements de tendances. Donc, moi je  suis très prudent et j'appelle surtout les électeurs à choisir, je dirais le  pluralisme territorial. Si vous habitez un territoire où la région est aux  mains du Parti socialiste, où le chef, lui, est aux mains du Parti  socialiste, votez pour le pluralisme, votez pour un département du  centre, de droite. Au fond, dans les régions rouges, le pluralisme, c'est  des départements bleus. 
 
Q.- Mais, J.-P. Raffarin, est-ce que, au fond, ces élections ne sont pas,  d'une certaine façon, entre guillemets, mais en tout cas le  « triomphe » de ceux qui ont dit « je veux m'implanter localement,  je fais passer ma gestion municipale avant tout le reste » et au fond  c'est ce qui a " réussi " à A. Juppé à Bordeaux, comme ça a réussi à  G. Collomb à Lyon. 
 
R.- Absolument. Je pense que c'est en effet des projets locaux. Vous savez,  quand j'ai dit au mois de novembre : « ne politisons pas à l'extrême les  élections municipales », tout le monde a dit que je n'avais pas à dire  cela. Au fond, c'est clair, les élections locales donnent des messages  locaux, différents, dans chacune des villes. Il faut cependant noter que  ceux qui ont gagné, sont souvent ceux qui avaient le centre avec eux et  donc je veux vraiment lancer un appel aux électeurs du centre, et je le  dis notamment avec la situation de Pau, dont on vient d'entendre parler  à l'instant : on voit bien qu'à Pau, F. Bayrou est l'adversaire du Parti  socialiste. On voit bien qu'il a soutenu, à Bordeaux, A. Juppé, contre le  Parti socialiste. Alors, moi, moi je suis prêt à soutenir F. Bayrou pour  bien montrer qu'au fond, l'allié naturel du centre dans ce pays, c'est  l'UMP et sa stratégie d'ouverture. C'est notre stratégie d'ouverture qui  nous permet aujourd'hui de dire aux électeurs du centre qu'avec nous,  ils peuvent participer au pluralisme territorial. 
 
Q.- Ça veut dire, J.-P. Raffarin, que vous trouvez que la stratégie du  MoDem, avec une alliance à gauche ici, une alliance à droite là, est  trop confuse ? 
 
R.- Puisque nous sommes aux « 4 vérités », la vérité de ce scrutin, c'est  qu'à Pau, à Pau, l'adversaire de F. Bayrou, c'est le Parti socialiste,  comme à Bordeaux, l'adversaire du MoDem c'était le Parti socialiste.  Donc, il est clair que le MoDem doit s'engager à fond pour offrir ce  pluralisme territorial. Beaucoup de régions sont aujourd'hui à gauche,  on a vu qu'un certain nombre de villes étaient passées à gauche,  aujourd'hui, pour le second tour, pour les grandes villes, tout comme  les départements, et j'insiste beaucoup pour les élections cantonales, je  crois que pour les électeurs du centre, les électeurs de droite, les  électeurs indépendants, doivent se rassembler, pour ne pas donner  toutes les collectivités territoriales au même parti, le Parti socialiste. N.  Sarkozy, pour la politique de changement, pour la politique de réforme,  a besoin que les collectivités territoriales représentent ce pluralisme et  ne constituent pas une sorte de mur hostile à la réforme, de mur de  l'immobilisme, de mur de la fiscalité locale, qui freinerait la mutation  nécessaire de la France. 
 
Q.- A Paris, la situation est quand même nettement plus contrastée. On  a entendu hier M. de Sarnez dire que, ma foi, notamment dans le  14ème arrondissement, elle pourrait suivre le candidat le mieux  placé qui semble en effet être P. Castagnou. On voit bien, là, que la  stratégie est différente, quand même. 
 
R.- Oh, je crains qu'il y ait un peu de confusion, en effet, dans la situation  parisienne, où il y avait beaucoup de listes, beaucoup de dissidents. Ce  qui me paraît très important, c'est que monsieur Delanoë a marqué hier  soir un point important contre madame Royal dans sa stratégie de  conquête du Parti socialiste. Aujourd'hui, le socialiste qui a eu une  performance politique parmi les postulants à la direction du Parti  socialiste, c'est monsieur Delanoë qui, de ce point de vue là, prend de  l'avance sur madame Royal. 
 
Q.- Donc, c'est une pierre dans le jardin de S. Royal, que vous ne  portez pas dans votre coeur, on peut le rappeler. 
 
R.- Ecoutez, je vois ce qu'elle fait, elle a beaucoup augmenté les impôts en  Poitou-Charentes, je vois qu'il y a des effets très négatifs de sa  politique, mais je regarde en tant qu'observateur, le Parti socialiste, je  regarde ça de l'extérieur, et que je vois, que finalement il y a un certain  nombre de maires à gauche qui sont hostiles à madame Royal et qui  finalement se sont bien comportés dans ces élections. Il semblerait que  le socialisme municipal soit plus fort aujourd'hui à l'intérieur du PS que  le socialisme régional. Mais nous verrons bien, chacun ses problèmes,  je les laisse au Parti socialiste le soin de traiter ses propres problèmes. 
 
Q.- Merci beaucoup, J.-P. Raffarin, d'avoir été avec nous ce matin. Je  rappelle que vous étiez donc en direct de Poitiers. Très bonne  journée à vous, très bonne journée à tous. 
 
R.- Bonne journée. 
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 10 mars 2008