Interview de M. Alain Olive, secrétaire général de l'UNSA, dans "Les Echos" du 31 janvier 2008, sur la réforme de la représentativité syndicale.

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Texte intégral

Q - La réforme de la représentativité syndicale est lancée. Vous voici enfin entendu ?
R - Il était temps. Nous posons le problème depuis la création de l'UNSA, en 1993. Le système institué dans les années cinquante et soixante a abouti à un véritable désastre. De 20 à 22% il y a quarante ans, le taux de syndicalisation est descendu à 8% aujourd'hui, et même 5% dans le secteur privé. A force de vouloir surprotéger les organisations syndicales existantes [la CGT, la CFDT, FO, la CFTC et la CGC, ndlr], on les a affaiblies au travers notamment de la présomption irréfragable de représentativité qui leur permet de nommer un délégué syndical dans une entreprise même sans adhérents.
Q - Ni vous ni Solidaires n'êtes associés à la négociation entre le patronat et, justement, les cinq confédérations représentatives ...
R - Cela vous étonne ? J'espère toutefois que quel que soit le résultat de cette négociation, le pouvoir politique aura son mot à dire car c'est comme si les organisateurs d'une tombola l'organisaient pour eux-mêmes. C'est pourtant notre émergence qui a posé la question de la représentativité. Ca me fait sourire quand je vois des leaders syndicaux affirmer qu'ils posent le problème depuis plus de 10 ans. Je les soupçonne de ne chercher qu'à obtenir une recomposition du paysage syndical en leur faveur plutôt que de favoriser un syndicalisme d'adhésion beaucoup moins idéologique. Pour cela, il faut partir des entreprises donc supprimer la présomption irréfragable de représentativité, permettre à tout syndicat légalement constitué de se présenter au premier tour des élections professionnelles et que les délégués syndicaux soient élus.
Q - Vous attaquez sans les nommer la CGT et la CFDT qui se sont mises d'accord sur des propositions communes. Pourquoi ?
R - Il faudrait que les plus grosses organisations s'interrogent sur leur incapacité à être des pôles de rassemblement. Quand on voit qu'elles n'ont que deux fois plus d'adhérents que nous...
Q - Mais vous êtes surtout implantés dans la fonction publique quand elles séduisent chacune plus d'un électeur sur cinq dans le privé. N'est-ce pas d'ailleurs votre faible implantation dans les entreprises qui vous conduit à préférer les élections prud'homales pour mesurer la représentativité ?
R - Pensez-vous que l'on puisse présenter 12.000 candidats aux élections prud'homales de décembre 2008, comme l'UNSA va le faire, sans avoir des adhérents dans les entreprises ? De plus, ces élections sont le seul scrutin où tous les salariés, y compris ceux de toutes petites entreprises peuvent voter. Aujourd'hui, le premier tour des élections professionnelles dans les entreprises n'est ouvert de fait qu'aux cinq confédérations présumées représentatives. Je n'aime pas les gens qui cachent leurs intérêts de boutique derrière de grands principes.
Q - Vous en voulez décidément à la CGT et à la CFDT. Vous pensez que FO, la CFTC et la CGC ne défendent pas leurs " intérêts de boutique " ?
R - Force ouvrière a le mérite de la franchise : elle ne veut pas changer un système qui lui profite. La position de la CFTC est intéressante. Au Conseil économique et social, elle était très réservée sur le fait de faire de l'audience un critère de représentativité. Mais aujourd'hui, elle dit qu'il est difficile de trouver d'autres critères et se montre désormais favorable aux élections prud'homales.
Q - Lors de la réforme des régimes spéciaux, le A pour autonome de l'UNSA a rimé avec cacophonie. Etes-vous vraiment mûrs pour entrer dans le club des confédérations nationales ?
R - L'autonomie peut être parfois un handicap, mais est souvent un formidable atout. J'assume la difficulté que nous avons rencontrée dans ce conflit à assurer une cohérence parfaite entre la ligne confédérale et celle notamment de nos cheminots. Cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de cohérence dans d'autres domaines. Et puis, nous n'avons pas été les seuls... Le secrétaire général d'une autre confédération a appelé à la reprise du travail, ses cheminots ne l'ont pas suivi.Source http://www.unsa.org, le 1er février 2008