Entretien de M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, avec France 2 le 5 avril 2008, sur la position de la France concernant la participation de Nicolas Sarkozy à la cérémonie d'ouverture des jeux olympiques de Pékin et la mission humanitaire en Colombie.

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Média : France 2

Texte intégral

Q - Bonsoir Bernard Kouchner, est-ce que lorsque Rama Yade avance son point de vue lors d'une interview au journal "Le Monde", il s'agit de la position du gouvernement ou d'un point de vue personnel ?
R - La position du gouvernement, la position de la France vient d'être énoncée par le président de la République. En fonction de l'évolution de la situation, le président décidera. L'évolution doit être suivie mais toutes les possibilités sont ouvertes. C'est très simple, tout est ouvert. La position n'est pas encore arrêtée, l'évolution nous importe et notamment celle des trois éléments que vous avez cités : la fin des violences, l'ouverture du Tibet, qui déjà a été un peu ouvert à deux groupes de diplomates et de journalistes, mais l'ouverture aux journalistes tout de suite, maintenant, et puis bien entendu le dialogue, le dialogue avec l'homme qui personnifie et qui a toujours de notre point de vue prôné la non-violence, l'autonomie du Tibet et non pas l'indépendance. Ce sont les deux conditions, la fin de la violence et l'autonomie du Tibet qui sont les mêmes des deux côtés. Et si la France peut jouer un rôle tant du côté des Chinois que du côté du Dalaï-Lama, nous le ferons et c'est ce que nous essayons de faire. Notre ambassadeur aux Droits de l'Homme va partir et tout cela est vraiment très clair, nous suivons l'évolution. Vous savez, le rôle d'un ministre des Affaires étrangères, puisque vous ne me posez pas la question, est d'essayer de rapprocher les deux points de vue : nous parlons avec les Chinois, avec le ministre chinois des Affaires étrangères, le plus souvent possible, avec l'ambassadeur chinois, et nous parlons aussi au Dalaï-Lama que j'ai au téléphone deux à trois fois par semaine.
Q - Bernard Kouchner, cela veut dire clairement que vous être tout à fait d'accord avec les propos de Rama Yade tenus dans "Le Monde" aujourd'hui ?
R - Non, pardonnez-moi, la position de la France, ce ne sont pas les conditions. Il n'y pas de condition dans la position de la France. Ce serait vraiment torpiller une éventuelle participation au dialogue que de poser des conditions. Il n'y a pas de condition et d'ailleurs Mme Rama Yade a démenti ce mot.
Q - Cela veut dire que toutes les options restent ouvertes quant à la participation du président de la République à cette cérémonie ?
R - Je crois l'avoir fait comprendre et en tout cas le président de la République l'a fait très bien. Sur toutes ces questions et il s'agissait, je vous le rappelle, de la cérémonie d'ouverture, il n'y a pas de boycott à propos des Jeux Olympiques, on ne met pas tout dans le même panier. Je crois vraiment que tout le monde est attentif à la fin des violences, au dialogue qui devrait se renouer. Nous serions très heureux évidemment aussi si on peut participer à ce que l'on éclaire la situation, à ce qu'on sache vraiment ce qui s'est passé.
Q - Une dernière question, on vient de parler de la mission humanitaire française. Tout simplement, va-t-elle rester sur place ou rentrer dans les heures qui viennent ?
R - Elle va rester sur place. Sur les affaires de Droits de l'Homme en général et de ces affaires en particulier : les otages et Ingrid Betancourt, le Tibet, nous sommes déterminés. Qu'est-ce qui se passe ? Nous avions reçu des informations très inquiétantes sur l'état de santé d'Ingrid Betancourt et d'autres otages aussi, alors nous avons fait flèche de tout bois, nous avions, le président de la République lui-même, téléphoné à tous les présidents latino-américains qui maintenant s'en occupent. Il fallait agir, nous sommes prêts, nous sommes sur place et nous sommes déterminés à continuer. Maintenant, nous attendons des nouvelles des FARC. Nous avons remis dans la boucle, ensemble, le président Uribe de Colombie et le président Chavez du Venezuela et nous sommes là en alerte. On nous aurait quand même reproché de ne pas le faire. Alors ce n'est pas fini, nous espérons que ce ne sera pas fini, que nous réussirons et nous nous obstinons. C'est ce qu'il faut faire.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 avril 2008