Texte intégral
Q - Le président de la République a tiré le bilan de sa première année en tant que chef de l'Etat, jeudi soir lors d'une émission télévisée. J'imagine que vous l'avez regardée. Quel bilan en tirez-vous ? Vous l'homme d'ouverture, avec le coeur qui penche à gauche et la raison qui penche à droite...
R - Le premier bilan que je tire est le fait que la France soit revenue en Europe. C'est ce qui me paraît être l'évènement le plus significatif, cette année, dans les fonctions que j'occupe. Nous avons un Traité simplifié qui a été signé au mois de décembre dernier. Et grâce aux réformes qui sont mises en oeuvre, dans le domaine économique et social, la France se rapproche du standard européen. Mais il reste encore beaucoup à faire.
Q - Vous nous dites que le bilan est plutôt positif de votre point de vue, de votre feuille de route à vous ? Lorsque le président reconnaît qu'il y a eu des erreurs, est-ce que vous aussi vous estimez qu'il y a eu des erreurs de "communication totales" - je cite - comme sur le paquet fiscal ?
R - Oui, cela est incontestable. S'il y avait un "prix citron" de la communication, il est certain que cette loi, que nous appelons paquet fiscal, l'aurait eu. C'est la plus mauvaise communication qu'il y ait eu.
Q - Mauvaise communication, donc problème de forme. Est-ce que vous, l'homme de gauche, vous estimez qu'il y a problème de fond ? Que le paquet fiscal n'était pas forcément utile et qu'il privilégie surtout les riches et donc est facteur d'inégalité ?
R - Non, car lorsque vous regardez l'essentiel de ces dispositions, elles permettent d'avoir un impact sur la croissance de 0.2 à 0.3 points supplémentaires, ce qui est utile aujourd'hui dans une période de ralentissement généralisé. Premier point, l'essentiel de cette loi du mois de juillet a trait au renforcement de l'activité et à l'encouragement de la réalisation d'heures supplémentaires. Second point, pour des catégories moyennes, il y a l'élargissement de la déductibilité des intérêts d'emprunt. Troisièmement, il n'y a qu'une partie infime qui reste, en ce qui concerne le plafonnement du poids fiscal, par rapport aux revenus que vous appelez le bouclier fiscal à 50 %. Personnellement, venu de la gauche j'ai toujours été favorable à des dispositifs qui permettent, comme dans d'autres pays européens, de plafonner le poids de la fiscalité par rapport aux revenus. Je rappelle que la France est l'un des pays où les prélèvements obligatoires sont parmi les plus élevés d'Europe et que c'est le seul pays européen où il y a un impôt sur la fortune. Cela n'existe plus dans les autres pays européens, quelle que soit leur sensibilité. L'Espagne socialiste de M. Zapatero, dirigeant efficace qui vient d'être réélu, a supprimé l'impôt sur la fortune dans son pays.
Q - Si je vous écoute, M. Jouyet, on aurait pu aller un peu plus loin et supprimer l'impôt sur la fortune.
R - Non, pas du tout, ce n'est pas ce que je veux dire. Mais lorsqu'on dit que c'est un ensemble de mesures qui a favorisé les riches, il faut savoir regarder ce qui se passe par rapport aux autres pays européens. Moi, je compare, de par mes fonctions, ce qui se fait en France et ce qui se fait au niveau européen. Vous avez en France les dépenses publiques sociales qui sont les plus élevées, non seulement de l'Union européenne, mais aussi de l'OCDE. Cela représente 28 % du PIB. Vous avez les prélèvements les plus élevés et vous avez les dépenses publiques les plus élevées par rapport à la richesse nationale. On dit qu'il y a un effort pour limiter la pression fiscale pour un certain nombre de revenus qui, sinon, seraient délocalisés. Vous le savez, nous vivons dans une Europe qui est ouverte, il faut en tenir compte. Il est préférable que la richesse et ces personnes restent chez nous plutôt que d'aller dans des paradis fiscaux.
Q - Lorsque vous écoutez les critiques de vos amis de gauche qui parlent des facteurs qui accentuent l'inégalité, vous sentez-vous très à l'aise dans ce gouvernement ?
R - Il y a des mesures avec lesquelles je suis plus ou moins à l'aise. Lorsque je n'étais pas à l'aise sur les tests ADN, je l'ai souligné. Lorsqu'on parle de respect strict des quotas en matière d'immigration, je l'ai souligné aussi. Je suis, sur certaines mesures touchant aux valeurs, moins à l'aise. Mais alors, dans les domaines économique et social, je n'ai pas d'état d'âme en tant que social démocrate. Parce que vous avez des réformes visant à encourager l'activité, visant à encourager la création de richesses et visant à stimuler la croissance, à un moment où celle-ci se ralentit qui me paraissent être des mesures nécessaires. Ce qui est vrai, c'est que lorsque vous avez ces réformes et que vous modernisez un pays, il est important que vous fassiez attention aux plus défavorisés et aux plus démunis. C'est tout cela qui est en jeu dans le cadre du revenu de solidarité active proposé par M. Hirsch et que je soutiens.
Q - Réformes avec les RGPP, ce sigle barbare. Il y a quand même diminution des fonctionnaires, notamment dans l'éducation nationale. Vous qui avez des enfants, pensez-vous que c'est important de réduire le nombre d'enseignants ? Que c'est nécessaire ?
R - J'ai eu, comme vous le savez des responsabilités antérieures dans le cadre de la fonction publique, notamment au ministère de l'Economie et des Finances. De ce que j'ai lu, de ce que j'ai vu et de ce que j'ai fait comme études en ce qui concerne l'éducation nationale, quantité et qualité n'ont rien à voir. Il faut qu'il y ait des taux d'encadrement par élève qui restent suffisamment denses, notamment dans les zones les plus difficiles, c'est-à-dire dans les banlieues ou dans certaines communes rurales. Mais nous avons, dans le secondaire et dans le primaire, des taux d'encadrement qui restent très en ligne avec ce qui se fait à l'étranger.
Q - Donc l'effort demandé est acceptable pour vous sur la qualité ?
R - L'effort demandé ne met pas en cause la qualité de notre enseignement. Ce sont des réformes sur l'orientation pédagogique, sur le retour aux fondamentaux, qui permettront de relever la qualité de notre enseignement, au niveau du secondaire ou de l'enseignement supérieur. C'est au niveau de l'enseignement supérieur que les efforts budgétaires doivent être faits. Ils le sont avec la loi sur l'autonomie des universités qui s'accompagne d'un plan de modernisation de 5 milliards d'euros. Vous avez un véritable effort à accomplir. Vous savez que j'avais réalisé avec Maurice Levy un rapport sur l'immatériel. Nous avions dit que la priorité des priorités était de consacrer un effort budgétaire au renouvellement de l'enseignement supérieur et à sa modernisation. Je crois que c'est ce qui se fait et c'est une bonne chose. Quant à la RGPP dont vous parlez, cela n'a rien à voir avec de la rigueur...
Q - S'il n'y avait pas un problème de rigueur et de déficit public, il n'y aurait pas de RGPP ?
R - C'est un problème de modernisation de l'administration publique. Vous devez vous interroger, que ce soit au niveau national ou européen, sur le bilan "coût-avantage" de chacune des politiques, pour voir si les moyens dans chacun des secteurs sont correctement utilisés. Je vais prendre un exemple politiquement incorrect : dans le domaine social ou dans le domaine de l'agriculture, est-ce que vous trouvez normal que les effectifs de l'administration centrale se soient accrus ces quinze dernières années alors que le pays s'est davantage décentralisé ?
Q - Donc il faut poursuivre cette RGPP ?
R - Tout à fait.
Q - Question d'internaute - Monsieur Jouyet est ce que vous n'avez pas le sentiment d'être le seul ministre d'ouverture qui a réussi dans ce gouvernement ?
R - Non, ce serait bien présomptueux de le dire. J'ai une mission qui est de servir la France dans le cadre européen, de faire en sorte que la France retrouve sa place en Europe et que l'Europe soit mieux comprise par nos concitoyens. Je m'en acquitte le mieux possible avec un souci d'indépendance et sans penser à l'avenir.
Q - Est-ce que la politique que vous menez à la tête de la diplomatie européenne avec M. Kouchner qui s'occupe de la diplomatie étrangère, serait la même si vous étiez dans un gouvernement de gauche ?
R - Sur le plan européen, la politique ne diffère pas beaucoup. Il y a une politique européenne de la France, je crois que nous nous y tenons. Ce qui était important, c'est qu'après le référendum de 2005, où certain plus que d'autres ont eu leur responsabilité dans les appels à voter non, la France puisse retrouver son crédit. Je voudrais préciser une chose, c'est qu'avec Bernard Kouchner nous travaillons très bien. C'est pour moi un grand plaisir que de travailler avec Bernard Kouchner qui est un homme courageux qui s'implique beaucoup dans toute l'activité internationale et européenne. Je crois que là-dessus nous n'avons pas d'états d'âme et que si nous étions dans un gouvernement social démocrate, de gauche, nous travaillerions dans le même sens en ce qui concerne la politique européenne.
Q - Le président de la République a indiqué la seule mesure concrète, la généralisation du RSA, le revenu de Solidarité active dont vous parliez et si cher à Martin Hirsch. Est-ce que vous avez le sentiment que, si jamais le RSA n'était pas généralisé, pour M. Hirsch cela justifierait qu'il quitte le gouvernement ? Est-ce qu'en tant que ministre d'ouverture, il n'était pas question pour lui de rester si le RSA n'était pas généralisé ?
R - Je crois qu'avec M. Hirsch, nous avons un point commun, c'est que nous sommes au gouvernement pour remplir une mission. Si pour la mission que nous remplissons, nous n'avions pas la confiance ou les moyens de la remplir, il serait normal que l'on s'interroge sur la pertinence de notre présence au gouvernement. J'ai soutenu Martin Hirsh. Le fait que le RSA soit pleinement appliqué est important pour M. Hirsh mais aussi pour moi et pour les sociaux démocrates qui participent à ce gouvernement. C'est une question fondamentale.
Q - Cela vous aurait posé un problème si le RSA n'avait pas été généralisé en 2009 ?
R - Oui. Clairement oui. Comme je vous l'ai dit, je pense que vous devez avoir des nouveaux outils favorisant l'insertion et l'activité des plus démunis. Les solutions qui sont trouvées en terme de financement me paraissent correctes.
Q - Un milliard et demi. Est-ce que la France a les moyens, vu l'étendue des déficits publics, de dépenser un milliard et demi supplémentaire ?
R - A partir du moment où vous faites des économies sur d'autres types de politique ou d'autres prestations, je pense à la prime pour l'emploi... Je l'ai bien étudiée dans mes fonctions antérieures au ministère de l'économie et des finances. Elle est touchée par 8 millions de personnes...
Q - Elle ne fonctionne pas la prime pour l'emploi ?
R - Elle a bien fonctionné au départ mais ses modifications ont fait qu'elle a touché des publics qui n'avait pas à en être forcément bénéficiaires. C'est pour cela que vous pouvez faire des économies de l'ordre de 400 à 500 millions d'euros. Il n'est pas normal que cette prime pour l'emploi bénéficie pour partie à 50 % des ménages qui ont des revenus supérieurs à la moyenne nationale. Il n'est pas normal, non plus, que cette prime ne soit pas touchée par des personnes qui en ont besoin. C'est un dispositif qui ne fonctionne pas. Il faut rationaliser cette politique de prime pour l'emploi qui, au gré des réformes, s'est compliquée et n'a pas été attribuée dans des conditions de justice et d'équité. J'en suis absolument convaincu.
Q - Le parti socialiste a adopté une déclaration de principe. Il se dit être un parti européen. Peut-être êtes-vous encore socialiste, est-ce quelque chose que vous auriez pu voter, cette charte de principe du PS ?
R - Vous comprendrez que je ne suis pas le mieux placé pour répondre à ce type de question. C'est vrai que l'évolution va dans le bon sens. François Hollande a mené avec courage une oeuvre de rénovation. Il faut sans doute aller plus loin, mais je suis très content, par rapport aux débats qui ont pu exister, que la question européenne ne fasse plus débat au sein du parti socialiste. C'est un progrès pour le parti socialiste et pour la démocratie en France.
Q - La Chine a entrouvert la porte vis-à-vis des négociations avec le Dalaï-Lama. Est-ce que vous estimez que la France a eu la politique qu'il fallait ? C'est-à-dire, après le passage catastrophique de la flamme à Paris, avoir envoyé des émissaires, est-ce que vous pensez qu'il fallait aller jusque-là ? Certain ont dit que c'était une sorte de génuflexion de la France devant la Chine ?
R - Vous devez avoir un dialogue avec la Chine. Vous ne pouvez pas vous passer d'un dialogue avec ce pays qui est membre du Conseil de sécurité et qui est important pour la stabilité internationale. Les violences au Tibet doivent être condamnées avec fermeté. Certains pensaient que notre action était vaine. Ce que je vois, c'est que les efforts qui ont été faits par le président de la République, par son conseiller diplomatique, Jean-David Levitte, et par Bernard Kouchner conduisent à une solution qui répond davantage à nos préoccupations.
Q - Pour vous, c'est une vraie ouverture lorsque le quotidien du peuple parle de la "clique du Dalaï-Lama" ? Est-ce que vous pensez qu'effectivement un dialogue va débuter ?
R - Nous l'espérons. Nous allons juger sur les actes et voir dans quelles conditions va s'engager ce dialogue. Mais connaissant la politique chinoise et ses symboles, le fait que cette décision ait été prise dans le contexte actuel, avec le passage difficile de la flamme olympique dans plusieurs villes, Londres, Tokyo et Paris...
Q - Cela a été mal géré ?
R - Ce n'est pas à moi de me prononcer mais au Comité Olympique.
Q - Est-ce qu'il y aura une position officielle de l'Union européenne lorsque la France présidera ?
R - Il serait souhaitable qu'il y ait une position de l'Union européenne, de façon à ce que le Président en exercice de l'Union européenne, qui sera le président de la République, puisse se déterminer quant à sa présence à la cérémonie d'ouverture.
Q - Dans deux mois, la France prendra la Présidence de l'Union européenne. Un moment très important pour vous, évidemment, et pour le chef de l'Etat. Les conditions du succès vous paraissent-elles réunies ?
R - La Présidence est correctement préparée, sur le plan logistique et matériel. Nous sommes parfaitement organisés. Les priorités ont été clairement annoncées : lutte contre le réchauffement climatique, énergie, politique alimentaire et agricole, politique de défense et politique de gestion des flux migratoire au niveau européen.
Q - Question d'internaute. La France va endosser la Présidence de l'Union européenne : selon vous, qu'attendent nos voisins de la France et quel rôle va-t-elle jouer ?
R - Ce qu'attendent nos voisins de la France, c'est, d'une part, de faire en sorte que le Traité de Lisbonne, signé le 13 décembre dernier, entre en vigueur. D'autre part, qu'il y ait un certain nombre de politiques concrètes qui soient mises en oeuvre, par exemple, dans le domaine de la lutte contre le réchauffement climatique. On attend que la France trouve des accords politiques sur des enjeux extrêmement importants, qu'elle joue collectif et qu'elle fasse progresser l'Europe dans un contexte économique et social de ralentissement de croissance qui ne sera pas facile.
Q - Il y a un plan B si jamais l'Irlande ne signe pas le Traité ?
R - Non, il n'y a aucun plan B.
Q - Qu'est ce qu'il se passerait alors? C'est de nouveau l'impasse ?
R - Ou il y a une nouvelle consultation en Irlande ou nous nous retrouvons bloqués. Il faut le savoir, ce serait un retour à la case départ, qui serait dramatique compte tenu du fait que nous sommes enfermés depuis cinq ans dans les querelles institutionnelles. On a un traité équilibré. L'Irlande est l'un des pays qui bénéficie le plus de l'Europe. Il est, certes, à la fin d'un cycle de croissance forte. Le Traité lui garantit deux choses fondamentales. La première est sa neutralité, les Irlandais sont très attachés à la neutralité. Le Traité ne la remet pas en cause. La seconde chose, c'est que toutes les décisions qui touchent à la fiscalité sont prises à l'unanimité. Il n'est pas question de remettre en cause la politique fiscale conduite par nos amis irlandais.
Q - Lors de son intervention, le président de la République a dit "zéro déficit, comme je m'y suis engagé, en 2012". Il n'a donné aucun calendrier. Le déficit français est passé de 1.7 % à 2 % pour 2009. On a envie de savoir comment, en trois ans, on peut passer à zéro déficit ? Vous avez des idées ? Vous y croyez toujours ?
R - Oui, il faut arriver à l'équilibre des comptes publics en 2012. On y arrive, premièrement, en réduisant les dépenses publiques - nous en avons parlé tout à l'heure - dans certains domaines comme la fonction publique en modernisant nos administrations. C'est l'essentiel. Deuxièmement, en faisant en sorte que dans notre système de protection sociale nous puissions avoir les meilleurs dispositifs de gestion. Troisièmement, vous devez, dans certain cas, vous interroger sur les contributions des entreprises. Je pense à ce qui est envisagé en matière de participation, qui me paraît être une bonne chose. Le dernier point, c'est que le déficit dépend également de la situation économique et de la croissance. Mais vous avez des engagements dans le cadre du pacte européen et vous devez faire en sorte de réduire d'un demi-point chaque année votre déficit.
Q - Question d'internaute - Il y a quelque mois, Nicolas Sarkozy a affiché des positions très claires à l'encontre de celles de Jean-Claude Trichet, président de la BCE. J'aurais donc voulu savoir quels seront les rapports entre Jean-Claude Trichet et Nicolas Sarkozy durant la Présidence française de l'Union européenne ? Et si Nicolas Sarkozy pourra faire valoir ses positions économiques sur les taux d'intérêt sur la parité euro/dollar et sur toutes ses autres positions touchant à la compétitivité internationale de nos entreprises ?
R - Il est évident que Nicolas Sarkozy maintiendra ses points de vue. D'autant plus qu'étant isolé au départ, il est de plus en plus rejoint sur ses positions, notamment en ce qui concerne les taux de change. Aujourd'hui, il n'y a plus aucune dissension en Europe pour considérer que nous avons des appréciations trop rapides de l'euro, qu'il convient d'y faire attention et qu'il faut renforcer la coopération internationale. Même si une monnaie forte permet de réduire l'inflation car la hausse des prix pénalise les plus défavorisés, et l'inflation, c'est un impôt sur les pauvres. Lorsque vous avez une monnaie forte, vous contribuez à maintenir le pouvoir d'achat et à réduire la facture des produits importés. Sur le taux d'intérêt, c'est une décision qui dépend de la Banque centrale européenne et c'est à elle d'arbitrer entre la croissance et l'inflation. J'ai ma petite idée là-dessus...
Q - C'est quoi votre idée ?
R - Il faut également tenir compte des éléments qui existeront sur la croissance et des estimations qui seront faites dans la zone euro.
Q - La croissance se traîne en Europe ? Mauvaise croissance à venir ?
R - La croissance ralentit. Nous verrons demain quelles seront les prévisions de croissance de la Commission européenne. Cela risque d'être en-deçà de ce qui était prévu pour la moyenne de la zone euro. J'ajoute que cela ne concerne pas seulement la zone euro. Un certain nombre de personnes voudrait faire croire que l'appartenance à l'euro constitue une faiblesse sur le plan de la croissance. Ce n'est pas vrai. L'euro est une protection dans la situation actuelle. Je remarque que les diminutions ont touché assez sensiblement des pays comme le Royaume-Uni, qui n'est pas dans la zone euro. Et comme vous le savez, la situation budgétaire du Royaume-Uni est plutôt en dégradation.
Q - Jean-Claude Trichet vous répondra qu'il faut certes soutenir la croissance, mais veiller également à l'inflation, qui rogne à l'heure actuelle le pouvoir d'achat.
R - Il a raison. C'est pour cela qu'il appartient à la BCE de trouver le bon équilibre, sans dogmatisme. Il est vrai qu'il faut avoir une politique qui repose sur une monnaie suffisamment solide qui permet de combattre l'inflation. L'inflation monte et comme je l'ai dit, c'est un impôt sur les pauvres. Donc tout le combat contre l'inflation sur le monétaire, avec plus d'activités ou avec beaucoup plus de concurrence est positif.
Q - C'est un peu la quadrature du cercle, lutter contre l'inflation et en même temps soutenir la croissance.
R - Il faut voir que vous ne pouvez pas avoir un moment de croissance très inflationniste durablement. L'inflation finit par tuer la croissance. Donc lorsque vous luttez contre l'inflation, vous luttez aussi pour plus de croissance.
Q - L'un des objectifs de la Présidence européenne, vous l'avez dit tout à l'heure, c'est la lutte contre l'immigration clandestine. Est-ce qu'on va arriver en Europe à se mettre d'accord sur des principes concernant l'immigration qui respecte l'humanisme dont l'Europe se veut porteuse ?
R - C'est un débat extrêmement important. Depuis que je suis dans ces fonctions, je me rends compte qu'il est porté de manière très idéologique dans notre pays et de manière beaucoup plus pragmatique dans l'ensemble des autres pays européens, quelle que soit leur sensibilité politique. Des pays comme l'Italie avec M. Prodi, comme l'Espagne avec M. Zapatero ou le Portugal avec M. Socrates ont mis fin à des politiques de régulation massive car ils se sont rendus compte qu'ils se retrouvaient avec des problèmes d'intégration importants.
Q - Vous avez dit tout à l'heure que vous n'étiez pas à l'aise avec les quotas.
R - Non, parce qu'au niveau européen, il faudrait voir jusqu'où l'on va. Je ne suis pas certain qu'il y ait consensus entre les différents Etats européens pour mettre en oeuvre des politiques de quotas. La convergence au niveau européen existe sur le fait que la situation démographique de l'Europe, par rapport à tous les autres continents, est défavorable et que vous devez ajuster vos flux en fonction de la situation économique européenne. Vous aurez 25 millions d'actifs en moins entre 2010 et 2030. Il faut le savoir. Par ailleurs, tout le monde est d'accord pour que les politiques de contrôle aux frontières soient renforcées, en distinguant bien l'immigration légale de l'immigration illégale. Enfin, tout le monde est aussi d'accord pour faire en sorte qu'il y ait des politiques visant à assurer aux immigrés le plus possible de travail en Europe, dès lors qu'il y a des potentialités, des possibilités qui s'ouvrent.
Q - Même s'ils sont Africains ?
R - Bien sûr !
Q - Je vous pose la question, car la loi française réserve pour l'instant les métiers qui nécessitent peu de qualifications aux ressortissants des nouveaux membres européens de l'Union européenne plutôt qu'aux Africains.
R - Parce que c'est une approche européenne. Lorsque nous avons signé les traité d'adhésion de ces nouveaux Etats membres, une ouverture progressive a été effectuée à leur égard. Ces pays souhaitent que d'ici 2009 les barrières qui existent actuellement soient levées, ce que j'espère d'ailleurs.
Vous avez parlé d'humanisme et vous avez totalement raison. Il ne peut pas y avoir de politique de gestion des flux migratoires au niveau européen sans politique d'intégration réussie. Il doit y avoir, dans le cadre du pacte européen sur ces questions d'immigration et de droit d'asile, des composantes d'intégration et bien évidemment des aspects de formation et de développement dans les pays d'origine de l'immigration.
Q - Le président s'est exprimé jeudi soir sur la question des sans-papiers titulaires d'un contrat de travail qui demandent leur régularisation. Le Président de la République a dit ce n'est pas parce qu'on a un contrat de travail que l'on peut être naturalisé. La question n'est pas celle de la naturalisation mais celle de la régularisation. Ma question est simple, lorsqu'on a un contrat de travail et qu'on cotise depuis 5 ans, 10 ans et qu'on paye des impôts doit-on être régularisé ?
R - Il faut appliquer la loi telle qu'elle existe. J'ai tendance à penser que lorsque vous travaillez depuis un certain temps - il y a eu un certain concours d'hypocrisie en ce domaine - que vous payez vos cotisations et vos impôts, si c'est en accord avec la loi, vous devez être régularisé.
Q - Même si cela fait du nombre ?
R - Il faut voir cela au cas par cas.
Q - Même si au cas par cas vous arrivez à 100 000 régularisations.
R - Non, vous ne pouvez pas arriver à des régularisations massives. On a vu par le passé ce que cela a donné.
Q - Si le cas par cas vous donne une régularisation importante ?
R - Il faut toujours en rester au traitement au cas par cas et rester à ce que sont les obligations légales. C'est ce que font nos partenaires européens.
Q - Attendez, je ne comprends pas. Si par exemple au bout de trente mille régularisations on dit "Monsieur, certes vous devriez être régularisé mais vous êtes le trente et un millième ça ne va plus ?
R - Non, c'est pour cela que je dis que sur les quotas il faut faire très attention. Parce que si vous êtes dans une situation qui fait que vous pouvez être régularisé mais, que pour des raisons de quotas, on ne vous accorde pas les papiers, cela ne va pas. Lorsque cela porte sur un nombre limité, vous devez vous en tenir à ce que prévoit le loi. Dans cette situation, je crois que c'est limité. Nous allons bien voir. En tout cas, ce sera examiné dossier par dossier. Pas de régularisation globale et massive.
Q - Il y a une crise alimentaire dans le monde qui frappe l'Afrique mais pas seulement. Face à cette crise alimentaire, que doit faire l'Europe ? Est-ce qu'elle doit produire d'avantage pour exporter vers ces pays là ou bien est-ce qu'elle doit aider ces pays là à produire eux-mêmes leurs propres ressources.
R - L'Europe doit faire les deux. Elle doit d'une part faire en sorte que la production agricole européenne reste importante. On s'aperçoit aujourd'hui avec les problèmes alimentaires que connaissent un certain nombre de pays, notamment les pays les moins développés, qu'il existe un déséquilibre très important entre l'offre et la demande alimentaire. Pendant très longtemps, on a pensé que les Français disaient cela uniquement pour sauver leur agriculture. Non, il y a besoin d'une production agricole forte en Europe pour satisfaire des besoins alimentaires mondiaux qui sont croissants. D'autre part, dans le même temps, vous devez aider les pays les moins développés à faire en sorte que leur agriculture et que l'agriculture vivrière se développent. C'est tout le but de l'action que conduit Bernard Kouchner, qui veut renforcer le Fonds alimentaire mondial. Un bon moyen de le faire serait d'associer les fonds souverains de manière intelligente. On parlait de la Chine tout à l'heure. Il faudrait que d'autres pays soient associés au Fonds alimentaire mondial et à la gestion des stocks alimentaires au niveau international.
Q - L'OMC dit "dans ces conditions, la meilleure formule c'est l'abaissement de toutes les taxes douanières qui permettrait une meilleure circulation des produits agricoles". C'est ce que dit votre ami Pascal Lamy, directeur général de l'OMC, c'est ce que disent également nos nouveaux amis britanniques.
R - Oui, nos amis britanniques l'ont toujours dit. Mais je ne crois pas que dans ce domaine, le marché puisse régner en maître. Il faut de la régulation, c'est le premier point. Je demande donc à voir ce que font nos partenaires, parce que le problème de l'abaissement des droits de douane se pose entre les pays qui sont les plus producteurs en matière agricole. C'est à dire entre l'Europe, les Etats-Unis, les grands émergents, les Néo-zélandais, les Australiens et les Japonais. A partir du moment où tout le monde fait les mêmes efforts et que les abaissements sont contrôlés, pourquoi pas ? Mais à l'égard des pays les plus pauvres, vous n'avez déjà plus de droits de douane, grâce à Pascal Lamy qui, lorsqu'il était Commissaire européen, a pris cette initiative. Le problème ne se pose donc pas de ce point de vue. Il est faux de dire, par idéologie, que c'est un accord de libre échange dans le cadre de l'OMC qui va mettre un terme à la crise alimentaire mondiale. Cette crise vient de déséquilibres qui justement nécessitent une nouvelle régulation.
Q - Question d'internaute - Je pense que l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne doit être conditionnée à sa reconnaissance de la République de Chypre, quelle est votre opinion sur la question ?
R - Ma réponse est très claire. Effectivement, tant qu'il n'y a pas de reconnaissance de la république de Chypre par la Turquie, il ne peut y avoir d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.
Q - Etes-vous déçu de ce qu'a dit Nicola Sarkozy jeudi soir ? Parce qu'il vous a donné raison sur un point, il a retiré le référendum obligatoire, pour une nouvelle adhésion, de la Constitution française. C'est un projet en tous cas.
R - J'y étais très attaché, c'est une exception française. On me demandait tout à l'heure ce qu'attendaient les partenaires européens de la France. C'est qu'elle mette fin à un certain nombre d'exceptions qui n'étaient pas particulièrement européennes.
Q - Mais il a dit sur la Turquie, si je suis encore président au moment où la question se pose, alors j'organiserai un référendum.
R - Sur la Turquie pour qu'il y ait un référendum, je note que cela signifie que l'on se place dans une perspective d'adhésion. Pour qu'il y ait référendum, il faut qu'il y ait un objet.
Q - Vous l'avez écouté, il a dit "il faudra vraiment se forcer pour me convaincre que la Turquie est en Europe".
R - Oui, j'ai écouté l'ensemble du raisonnement du président de la République. Sa position est connue : la Turquie n'a pas vocation à adhérer dans l'Union européenne et dans le même temps il a dit : "si cela se produit lorsque je ne serai plus président de la République, je serai favorable à la tenue d'un référendum". Nous nous situons dans une perspective très éloignée qui se situe dans 10 ans. La position de la France est claire. Vous poursuivez les négociations avec la Turquie tant que celles ci respectent à la fois la voie de l'adhésion et celle du partenariat privilégié. Ce qui est important, c'est que nos amis turcs doivent faire de la pédagogie et doivent donner un certain nombre de preuves sur le plan de la démocratie, des réformes et du respect des Droits de la femme et de l'homme en Turquie. La-dessus, nous ne transigerons pas à l'égard d'un grand pays comme la Turquie, avec lequel nous avons des partenariats importants en ce qui concerne la défense, l'économie, l'énergie de demain. Il est important de laisser le temps à la pédagogie de faire son oeuvre en France.
Q - Il faudra que vous soyez pédagogue à l'égard de M. Sarkozy ?
R - Il faudra être pédagogue à l'égard de tout le monde. Nous sommes également élus pour être pédagogues et prendre nos responsabilités. Je connais la position du président de la République, nous pouvons avec Bernard Kouchner avoir des sensibilités personnelles. L'ouverture, cela sert également à cela, à ce qu'il y ait des échanges et que les sensibilités ne soient pas toujours les mêmes. Mais il y a une seule position de la France, c'est celle qui est définie par le Président de la République.
Q - L'Union pour la Méditerranée a changé de nom puisqu'elle s'appelait l'Union méditerranéenne, puis Mme Merkel a dit qu'elle n'était pas satisfaite, qu'elle se sentait exclue. Alors on a appelé cela l'Union pour la Méditerranée. On a l'impression que c'est un grand projet qui s'est bien rabougri au fil du temps.
R - Non, c'est un vrai succès. Cela reste un grand projet. L'Union pour la méditerranée, c'est peut-être le plus beau projet que porte le président de la République et, pour l'Europe, l'un de ses principaux projets. Tout ce qui se joue en Méditerranée, c'est la stabilité politique, la gestion des flux migratoires, nos coopérations et le dialogue culturel avec les pays de l'autre rive. C'est un projet fantastique. Ce qui a été accepté lors du dernier Conseil européen, c'est la reconnaissance que nous devions aller au-delà de ce qui existe aujourd'hui, c'est à dire le processus de Barcelone. Que va changer l'Union pour la Méditerranée ? Elle va changer deux éléments fondamentaux. Le premier est que vous aurez une relation égale entre les pays du sud de la Méditerranée et les pays du nord. Ce ne sera pas comme avant, vous ne viendrez pas avec des projets en disant "J'ai un projet, c'est à prendre ou à laisser" et puis les pays du sud n'ont plus qu'à se taire ou à prendre le projet. Le deuxième aspect, c'est que l'Union pour la Méditerranée va être fondée sur des projets. C'est une Union concrète qui évitera que vous ayez uniquement de l'aide budgétaire ou macroéconomique. Vous aurez des projets sur la dépollution de la Méditerranée, sur la coopération énergétique, sur le dialogue culturel ou sur la création d'un Erasmus méditerranéen. C'est un très beau projet .Et de le faire à 27, avec les autres pays de la Méditerranée, qu'une quarantaine de pays décident le 13 juillet de fonder ensemble une nouvelle Union pour la Méditerranée, est un projet fondateur de civilisation.
Q - Nicolas Sarkozy a dit qu'il y aurait des progrès à l'association de la France à l'Alliance atlantique s'il y avait des progrès sur la défense européenne. Qu'elles sont les exigences dans ce domaine pour qu'il y ait un rapprochement avec l'Alliance atlantique.
R - Vous avez parfaitement bien posé les termes de la question. C'est une question à laquelle, en tant que membre de l'ouverture, nous sommes très sensibles. Première priorité c'est de construire la défense européenne. L'Europe est un continent de 500 millions d'habitants, c'est un continent qui malgré les aléas...
Q - Qu'est ce que ça veut dire ?
R - La défense européenne, cela veut dire avoir une stratégie européenne en terme de défense et de sécurité. Il faut la revisiter. Puisqu'elle date de 2003, elle mérite d'être un peu actualisée. C'est avoir des capacités opérationnelles et de programmation d'opérations. Je pense au Tchad, au Darfour. Il n'est pas normal aujourd'hui, que pour des opérations humanitaires, militaires ou de maintien de la paix comme dans les Balkans, vous soyez obligés de quémander un hélicoptère par-ci, un hôpital de campagne par-là, ce n'est pas digne de l'Europe. Si l'Europe veut être un acteur global, elle doit se doter de ces moyens de planification et de capacité opérationnelle. Il faut également avoir une agence de l'armement qui dispose de moyens importants.
Q - Question concrète, cette défense européenne existe au sein de l'Alliance atlantique, est-ce que la France aurait pu dire " non, nous ne participons pas à l'expédition en Irak" ?
R - La défense européenne n'existe pas dans l'Alliance atlantique. Je vous réponds très clairement parce que c'est le noeud du débat. Vous devez avoir une défense européenne qui travaille en bonne intelligence avec l'Alliance Atlantique mais vous ne pouvez pas avoir une défense européenne fondue dans l'Alliance Atlantique, pour les raisons que vous avez évoquées. La deuxième considération concerne la France et non l'Europe, une fois cette clarification opérée. Vous avez une défense européenne qui existe en tant que telle et qui travaille en relation avec l'Alliance atlantique. Vous devez avoir, si vous êtes dans le commandement intégré, les moyens de décider des responsabilités opérationnelles et le pouvoir de dire si vous êtes d'accord avec telle ou telle opération. En tout cas c'est comme cela que je vois les choses.
Q - Tout à l'heure, vous avez dit que l'ouverture cela sert à avoir des débats au sein du gouvernement, je vais vous proposer d'écouter une déclaration qui circule sur le net. C'est de quelqu'un que vous connaissez bien qui s'appelle Henri Guaino, le conseiller du président de la République : "J'ai voté non à Maastricht, j'ai voté non à la Constitution européenne. Maastricht près de la moitié des Français ont fait la même chose que moi, est-ce qu'ils doivent se cacher ? Avoir honte ? Non, eh bien moi non plus. 55 % des Français ont voté non à la Constitution européenne, est-ce qu'il doivent se cacher, se couvrir la tête de cendre ? Non, moi non plus. J'assume tout à fait et je ne regrette rien. On a fait avec l'ouverture rentrer dans le gouvernement des gens qui viennent de la gauche ou du centre, des gens qui sont laïques ou des gens qui sont chrétiens, des gens qui sont sociaux, d'autres qui sont plus financiers. Alors la seule ouverture qu'on ne pourrait pas faire c'est celle vis-à-vis des gens qui ne pensent pas tout à fait comme la technostructure de Bruxelles. Ce serait quand même un comble, non ? Je rappelle quand même que quand la technostructure a le pouvoir, la démocratie ne l'a plus".
Cela doit être chaud quand même dans les réunions ?
R - Nous avons des explications franches, comme on le dit, avec Henri Guaino. Que l'on n'ait pas la même sensibilité avec Henri Guaino, cela est clair.
Q - Ce n'est pas le mariage de la carpe et du lapin ? Qu'est-ce que vous faites ensemble ?
R - Je crois qu'on l'a montré sur l'Union pour la Méditerranée, je constate qu'il y a une ligne, celle du président de la République, qui est une ligne européenne. Il y a le Traité simplifié, il y a une action de modernisation de la France qui vise à faire en sorte que la France soit davantage au coeur de l'Europe. Je vous signale que nous sommes tous d'accord sur un point, c'est qu'il nous faut une Europe plus politique.
Q - Un mot juste pour finir, vous avez parlé tout à l'heure du climat comme étant une des grandes priorités de la Présidence de l'Union européenne. On arrivera à se mettre d'accord sur des mesures chiffrées sur des émissions de gaz ? On essayera de convaincre les Américains et les pays émergents ?
R - Très bonne question. J'ai participé il y a une semaine, à une réunion avec les Américains et les pays émergents.
Cela n'a pas été un échec dans la mesure où nous nous sommes rendu compte de la nécessité d'avoir des objectifs chiffrés à long terme. L'Europe veut réduire ses émissions par quatre d'ici à 2050. Elle souhaite les réduire significativement d'ici 2020. Nous demandons aux Etats-Unis et aux pays émergents, chacun en fonction de leurs capacités, de faire le même effort. Ce sera l'enjeu de la conférence de Copenhague en 2009 et de celle de Postdam à la fin de l'année.
Q - Avec une position européenne ?
R - Il y aura une position européenne et elle sera chiffrée.
Merci.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 mai 2008
R - Le premier bilan que je tire est le fait que la France soit revenue en Europe. C'est ce qui me paraît être l'évènement le plus significatif, cette année, dans les fonctions que j'occupe. Nous avons un Traité simplifié qui a été signé au mois de décembre dernier. Et grâce aux réformes qui sont mises en oeuvre, dans le domaine économique et social, la France se rapproche du standard européen. Mais il reste encore beaucoup à faire.
Q - Vous nous dites que le bilan est plutôt positif de votre point de vue, de votre feuille de route à vous ? Lorsque le président reconnaît qu'il y a eu des erreurs, est-ce que vous aussi vous estimez qu'il y a eu des erreurs de "communication totales" - je cite - comme sur le paquet fiscal ?
R - Oui, cela est incontestable. S'il y avait un "prix citron" de la communication, il est certain que cette loi, que nous appelons paquet fiscal, l'aurait eu. C'est la plus mauvaise communication qu'il y ait eu.
Q - Mauvaise communication, donc problème de forme. Est-ce que vous, l'homme de gauche, vous estimez qu'il y a problème de fond ? Que le paquet fiscal n'était pas forcément utile et qu'il privilégie surtout les riches et donc est facteur d'inégalité ?
R - Non, car lorsque vous regardez l'essentiel de ces dispositions, elles permettent d'avoir un impact sur la croissance de 0.2 à 0.3 points supplémentaires, ce qui est utile aujourd'hui dans une période de ralentissement généralisé. Premier point, l'essentiel de cette loi du mois de juillet a trait au renforcement de l'activité et à l'encouragement de la réalisation d'heures supplémentaires. Second point, pour des catégories moyennes, il y a l'élargissement de la déductibilité des intérêts d'emprunt. Troisièmement, il n'y a qu'une partie infime qui reste, en ce qui concerne le plafonnement du poids fiscal, par rapport aux revenus que vous appelez le bouclier fiscal à 50 %. Personnellement, venu de la gauche j'ai toujours été favorable à des dispositifs qui permettent, comme dans d'autres pays européens, de plafonner le poids de la fiscalité par rapport aux revenus. Je rappelle que la France est l'un des pays où les prélèvements obligatoires sont parmi les plus élevés d'Europe et que c'est le seul pays européen où il y a un impôt sur la fortune. Cela n'existe plus dans les autres pays européens, quelle que soit leur sensibilité. L'Espagne socialiste de M. Zapatero, dirigeant efficace qui vient d'être réélu, a supprimé l'impôt sur la fortune dans son pays.
Q - Si je vous écoute, M. Jouyet, on aurait pu aller un peu plus loin et supprimer l'impôt sur la fortune.
R - Non, pas du tout, ce n'est pas ce que je veux dire. Mais lorsqu'on dit que c'est un ensemble de mesures qui a favorisé les riches, il faut savoir regarder ce qui se passe par rapport aux autres pays européens. Moi, je compare, de par mes fonctions, ce qui se fait en France et ce qui se fait au niveau européen. Vous avez en France les dépenses publiques sociales qui sont les plus élevées, non seulement de l'Union européenne, mais aussi de l'OCDE. Cela représente 28 % du PIB. Vous avez les prélèvements les plus élevés et vous avez les dépenses publiques les plus élevées par rapport à la richesse nationale. On dit qu'il y a un effort pour limiter la pression fiscale pour un certain nombre de revenus qui, sinon, seraient délocalisés. Vous le savez, nous vivons dans une Europe qui est ouverte, il faut en tenir compte. Il est préférable que la richesse et ces personnes restent chez nous plutôt que d'aller dans des paradis fiscaux.
Q - Lorsque vous écoutez les critiques de vos amis de gauche qui parlent des facteurs qui accentuent l'inégalité, vous sentez-vous très à l'aise dans ce gouvernement ?
R - Il y a des mesures avec lesquelles je suis plus ou moins à l'aise. Lorsque je n'étais pas à l'aise sur les tests ADN, je l'ai souligné. Lorsqu'on parle de respect strict des quotas en matière d'immigration, je l'ai souligné aussi. Je suis, sur certaines mesures touchant aux valeurs, moins à l'aise. Mais alors, dans les domaines économique et social, je n'ai pas d'état d'âme en tant que social démocrate. Parce que vous avez des réformes visant à encourager l'activité, visant à encourager la création de richesses et visant à stimuler la croissance, à un moment où celle-ci se ralentit qui me paraissent être des mesures nécessaires. Ce qui est vrai, c'est que lorsque vous avez ces réformes et que vous modernisez un pays, il est important que vous fassiez attention aux plus défavorisés et aux plus démunis. C'est tout cela qui est en jeu dans le cadre du revenu de solidarité active proposé par M. Hirsch et que je soutiens.
Q - Réformes avec les RGPP, ce sigle barbare. Il y a quand même diminution des fonctionnaires, notamment dans l'éducation nationale. Vous qui avez des enfants, pensez-vous que c'est important de réduire le nombre d'enseignants ? Que c'est nécessaire ?
R - J'ai eu, comme vous le savez des responsabilités antérieures dans le cadre de la fonction publique, notamment au ministère de l'Economie et des Finances. De ce que j'ai lu, de ce que j'ai vu et de ce que j'ai fait comme études en ce qui concerne l'éducation nationale, quantité et qualité n'ont rien à voir. Il faut qu'il y ait des taux d'encadrement par élève qui restent suffisamment denses, notamment dans les zones les plus difficiles, c'est-à-dire dans les banlieues ou dans certaines communes rurales. Mais nous avons, dans le secondaire et dans le primaire, des taux d'encadrement qui restent très en ligne avec ce qui se fait à l'étranger.
Q - Donc l'effort demandé est acceptable pour vous sur la qualité ?
R - L'effort demandé ne met pas en cause la qualité de notre enseignement. Ce sont des réformes sur l'orientation pédagogique, sur le retour aux fondamentaux, qui permettront de relever la qualité de notre enseignement, au niveau du secondaire ou de l'enseignement supérieur. C'est au niveau de l'enseignement supérieur que les efforts budgétaires doivent être faits. Ils le sont avec la loi sur l'autonomie des universités qui s'accompagne d'un plan de modernisation de 5 milliards d'euros. Vous avez un véritable effort à accomplir. Vous savez que j'avais réalisé avec Maurice Levy un rapport sur l'immatériel. Nous avions dit que la priorité des priorités était de consacrer un effort budgétaire au renouvellement de l'enseignement supérieur et à sa modernisation. Je crois que c'est ce qui se fait et c'est une bonne chose. Quant à la RGPP dont vous parlez, cela n'a rien à voir avec de la rigueur...
Q - S'il n'y avait pas un problème de rigueur et de déficit public, il n'y aurait pas de RGPP ?
R - C'est un problème de modernisation de l'administration publique. Vous devez vous interroger, que ce soit au niveau national ou européen, sur le bilan "coût-avantage" de chacune des politiques, pour voir si les moyens dans chacun des secteurs sont correctement utilisés. Je vais prendre un exemple politiquement incorrect : dans le domaine social ou dans le domaine de l'agriculture, est-ce que vous trouvez normal que les effectifs de l'administration centrale se soient accrus ces quinze dernières années alors que le pays s'est davantage décentralisé ?
Q - Donc il faut poursuivre cette RGPP ?
R - Tout à fait.
Q - Question d'internaute - Monsieur Jouyet est ce que vous n'avez pas le sentiment d'être le seul ministre d'ouverture qui a réussi dans ce gouvernement ?
R - Non, ce serait bien présomptueux de le dire. J'ai une mission qui est de servir la France dans le cadre européen, de faire en sorte que la France retrouve sa place en Europe et que l'Europe soit mieux comprise par nos concitoyens. Je m'en acquitte le mieux possible avec un souci d'indépendance et sans penser à l'avenir.
Q - Est-ce que la politique que vous menez à la tête de la diplomatie européenne avec M. Kouchner qui s'occupe de la diplomatie étrangère, serait la même si vous étiez dans un gouvernement de gauche ?
R - Sur le plan européen, la politique ne diffère pas beaucoup. Il y a une politique européenne de la France, je crois que nous nous y tenons. Ce qui était important, c'est qu'après le référendum de 2005, où certain plus que d'autres ont eu leur responsabilité dans les appels à voter non, la France puisse retrouver son crédit. Je voudrais préciser une chose, c'est qu'avec Bernard Kouchner nous travaillons très bien. C'est pour moi un grand plaisir que de travailler avec Bernard Kouchner qui est un homme courageux qui s'implique beaucoup dans toute l'activité internationale et européenne. Je crois que là-dessus nous n'avons pas d'états d'âme et que si nous étions dans un gouvernement social démocrate, de gauche, nous travaillerions dans le même sens en ce qui concerne la politique européenne.
Q - Le président de la République a indiqué la seule mesure concrète, la généralisation du RSA, le revenu de Solidarité active dont vous parliez et si cher à Martin Hirsch. Est-ce que vous avez le sentiment que, si jamais le RSA n'était pas généralisé, pour M. Hirsch cela justifierait qu'il quitte le gouvernement ? Est-ce qu'en tant que ministre d'ouverture, il n'était pas question pour lui de rester si le RSA n'était pas généralisé ?
R - Je crois qu'avec M. Hirsch, nous avons un point commun, c'est que nous sommes au gouvernement pour remplir une mission. Si pour la mission que nous remplissons, nous n'avions pas la confiance ou les moyens de la remplir, il serait normal que l'on s'interroge sur la pertinence de notre présence au gouvernement. J'ai soutenu Martin Hirsh. Le fait que le RSA soit pleinement appliqué est important pour M. Hirsh mais aussi pour moi et pour les sociaux démocrates qui participent à ce gouvernement. C'est une question fondamentale.
Q - Cela vous aurait posé un problème si le RSA n'avait pas été généralisé en 2009 ?
R - Oui. Clairement oui. Comme je vous l'ai dit, je pense que vous devez avoir des nouveaux outils favorisant l'insertion et l'activité des plus démunis. Les solutions qui sont trouvées en terme de financement me paraissent correctes.
Q - Un milliard et demi. Est-ce que la France a les moyens, vu l'étendue des déficits publics, de dépenser un milliard et demi supplémentaire ?
R - A partir du moment où vous faites des économies sur d'autres types de politique ou d'autres prestations, je pense à la prime pour l'emploi... Je l'ai bien étudiée dans mes fonctions antérieures au ministère de l'économie et des finances. Elle est touchée par 8 millions de personnes...
Q - Elle ne fonctionne pas la prime pour l'emploi ?
R - Elle a bien fonctionné au départ mais ses modifications ont fait qu'elle a touché des publics qui n'avait pas à en être forcément bénéficiaires. C'est pour cela que vous pouvez faire des économies de l'ordre de 400 à 500 millions d'euros. Il n'est pas normal que cette prime pour l'emploi bénéficie pour partie à 50 % des ménages qui ont des revenus supérieurs à la moyenne nationale. Il n'est pas normal, non plus, que cette prime ne soit pas touchée par des personnes qui en ont besoin. C'est un dispositif qui ne fonctionne pas. Il faut rationaliser cette politique de prime pour l'emploi qui, au gré des réformes, s'est compliquée et n'a pas été attribuée dans des conditions de justice et d'équité. J'en suis absolument convaincu.
Q - Le parti socialiste a adopté une déclaration de principe. Il se dit être un parti européen. Peut-être êtes-vous encore socialiste, est-ce quelque chose que vous auriez pu voter, cette charte de principe du PS ?
R - Vous comprendrez que je ne suis pas le mieux placé pour répondre à ce type de question. C'est vrai que l'évolution va dans le bon sens. François Hollande a mené avec courage une oeuvre de rénovation. Il faut sans doute aller plus loin, mais je suis très content, par rapport aux débats qui ont pu exister, que la question européenne ne fasse plus débat au sein du parti socialiste. C'est un progrès pour le parti socialiste et pour la démocratie en France.
Q - La Chine a entrouvert la porte vis-à-vis des négociations avec le Dalaï-Lama. Est-ce que vous estimez que la France a eu la politique qu'il fallait ? C'est-à-dire, après le passage catastrophique de la flamme à Paris, avoir envoyé des émissaires, est-ce que vous pensez qu'il fallait aller jusque-là ? Certain ont dit que c'était une sorte de génuflexion de la France devant la Chine ?
R - Vous devez avoir un dialogue avec la Chine. Vous ne pouvez pas vous passer d'un dialogue avec ce pays qui est membre du Conseil de sécurité et qui est important pour la stabilité internationale. Les violences au Tibet doivent être condamnées avec fermeté. Certains pensaient que notre action était vaine. Ce que je vois, c'est que les efforts qui ont été faits par le président de la République, par son conseiller diplomatique, Jean-David Levitte, et par Bernard Kouchner conduisent à une solution qui répond davantage à nos préoccupations.
Q - Pour vous, c'est une vraie ouverture lorsque le quotidien du peuple parle de la "clique du Dalaï-Lama" ? Est-ce que vous pensez qu'effectivement un dialogue va débuter ?
R - Nous l'espérons. Nous allons juger sur les actes et voir dans quelles conditions va s'engager ce dialogue. Mais connaissant la politique chinoise et ses symboles, le fait que cette décision ait été prise dans le contexte actuel, avec le passage difficile de la flamme olympique dans plusieurs villes, Londres, Tokyo et Paris...
Q - Cela a été mal géré ?
R - Ce n'est pas à moi de me prononcer mais au Comité Olympique.
Q - Est-ce qu'il y aura une position officielle de l'Union européenne lorsque la France présidera ?
R - Il serait souhaitable qu'il y ait une position de l'Union européenne, de façon à ce que le Président en exercice de l'Union européenne, qui sera le président de la République, puisse se déterminer quant à sa présence à la cérémonie d'ouverture.
Q - Dans deux mois, la France prendra la Présidence de l'Union européenne. Un moment très important pour vous, évidemment, et pour le chef de l'Etat. Les conditions du succès vous paraissent-elles réunies ?
R - La Présidence est correctement préparée, sur le plan logistique et matériel. Nous sommes parfaitement organisés. Les priorités ont été clairement annoncées : lutte contre le réchauffement climatique, énergie, politique alimentaire et agricole, politique de défense et politique de gestion des flux migratoire au niveau européen.
Q - Question d'internaute. La France va endosser la Présidence de l'Union européenne : selon vous, qu'attendent nos voisins de la France et quel rôle va-t-elle jouer ?
R - Ce qu'attendent nos voisins de la France, c'est, d'une part, de faire en sorte que le Traité de Lisbonne, signé le 13 décembre dernier, entre en vigueur. D'autre part, qu'il y ait un certain nombre de politiques concrètes qui soient mises en oeuvre, par exemple, dans le domaine de la lutte contre le réchauffement climatique. On attend que la France trouve des accords politiques sur des enjeux extrêmement importants, qu'elle joue collectif et qu'elle fasse progresser l'Europe dans un contexte économique et social de ralentissement de croissance qui ne sera pas facile.
Q - Il y a un plan B si jamais l'Irlande ne signe pas le Traité ?
R - Non, il n'y a aucun plan B.
Q - Qu'est ce qu'il se passerait alors? C'est de nouveau l'impasse ?
R - Ou il y a une nouvelle consultation en Irlande ou nous nous retrouvons bloqués. Il faut le savoir, ce serait un retour à la case départ, qui serait dramatique compte tenu du fait que nous sommes enfermés depuis cinq ans dans les querelles institutionnelles. On a un traité équilibré. L'Irlande est l'un des pays qui bénéficie le plus de l'Europe. Il est, certes, à la fin d'un cycle de croissance forte. Le Traité lui garantit deux choses fondamentales. La première est sa neutralité, les Irlandais sont très attachés à la neutralité. Le Traité ne la remet pas en cause. La seconde chose, c'est que toutes les décisions qui touchent à la fiscalité sont prises à l'unanimité. Il n'est pas question de remettre en cause la politique fiscale conduite par nos amis irlandais.
Q - Lors de son intervention, le président de la République a dit "zéro déficit, comme je m'y suis engagé, en 2012". Il n'a donné aucun calendrier. Le déficit français est passé de 1.7 % à 2 % pour 2009. On a envie de savoir comment, en trois ans, on peut passer à zéro déficit ? Vous avez des idées ? Vous y croyez toujours ?
R - Oui, il faut arriver à l'équilibre des comptes publics en 2012. On y arrive, premièrement, en réduisant les dépenses publiques - nous en avons parlé tout à l'heure - dans certains domaines comme la fonction publique en modernisant nos administrations. C'est l'essentiel. Deuxièmement, en faisant en sorte que dans notre système de protection sociale nous puissions avoir les meilleurs dispositifs de gestion. Troisièmement, vous devez, dans certain cas, vous interroger sur les contributions des entreprises. Je pense à ce qui est envisagé en matière de participation, qui me paraît être une bonne chose. Le dernier point, c'est que le déficit dépend également de la situation économique et de la croissance. Mais vous avez des engagements dans le cadre du pacte européen et vous devez faire en sorte de réduire d'un demi-point chaque année votre déficit.
Q - Question d'internaute - Il y a quelque mois, Nicolas Sarkozy a affiché des positions très claires à l'encontre de celles de Jean-Claude Trichet, président de la BCE. J'aurais donc voulu savoir quels seront les rapports entre Jean-Claude Trichet et Nicolas Sarkozy durant la Présidence française de l'Union européenne ? Et si Nicolas Sarkozy pourra faire valoir ses positions économiques sur les taux d'intérêt sur la parité euro/dollar et sur toutes ses autres positions touchant à la compétitivité internationale de nos entreprises ?
R - Il est évident que Nicolas Sarkozy maintiendra ses points de vue. D'autant plus qu'étant isolé au départ, il est de plus en plus rejoint sur ses positions, notamment en ce qui concerne les taux de change. Aujourd'hui, il n'y a plus aucune dissension en Europe pour considérer que nous avons des appréciations trop rapides de l'euro, qu'il convient d'y faire attention et qu'il faut renforcer la coopération internationale. Même si une monnaie forte permet de réduire l'inflation car la hausse des prix pénalise les plus défavorisés, et l'inflation, c'est un impôt sur les pauvres. Lorsque vous avez une monnaie forte, vous contribuez à maintenir le pouvoir d'achat et à réduire la facture des produits importés. Sur le taux d'intérêt, c'est une décision qui dépend de la Banque centrale européenne et c'est à elle d'arbitrer entre la croissance et l'inflation. J'ai ma petite idée là-dessus...
Q - C'est quoi votre idée ?
R - Il faut également tenir compte des éléments qui existeront sur la croissance et des estimations qui seront faites dans la zone euro.
Q - La croissance se traîne en Europe ? Mauvaise croissance à venir ?
R - La croissance ralentit. Nous verrons demain quelles seront les prévisions de croissance de la Commission européenne. Cela risque d'être en-deçà de ce qui était prévu pour la moyenne de la zone euro. J'ajoute que cela ne concerne pas seulement la zone euro. Un certain nombre de personnes voudrait faire croire que l'appartenance à l'euro constitue une faiblesse sur le plan de la croissance. Ce n'est pas vrai. L'euro est une protection dans la situation actuelle. Je remarque que les diminutions ont touché assez sensiblement des pays comme le Royaume-Uni, qui n'est pas dans la zone euro. Et comme vous le savez, la situation budgétaire du Royaume-Uni est plutôt en dégradation.
Q - Jean-Claude Trichet vous répondra qu'il faut certes soutenir la croissance, mais veiller également à l'inflation, qui rogne à l'heure actuelle le pouvoir d'achat.
R - Il a raison. C'est pour cela qu'il appartient à la BCE de trouver le bon équilibre, sans dogmatisme. Il est vrai qu'il faut avoir une politique qui repose sur une monnaie suffisamment solide qui permet de combattre l'inflation. L'inflation monte et comme je l'ai dit, c'est un impôt sur les pauvres. Donc tout le combat contre l'inflation sur le monétaire, avec plus d'activités ou avec beaucoup plus de concurrence est positif.
Q - C'est un peu la quadrature du cercle, lutter contre l'inflation et en même temps soutenir la croissance.
R - Il faut voir que vous ne pouvez pas avoir un moment de croissance très inflationniste durablement. L'inflation finit par tuer la croissance. Donc lorsque vous luttez contre l'inflation, vous luttez aussi pour plus de croissance.
Q - L'un des objectifs de la Présidence européenne, vous l'avez dit tout à l'heure, c'est la lutte contre l'immigration clandestine. Est-ce qu'on va arriver en Europe à se mettre d'accord sur des principes concernant l'immigration qui respecte l'humanisme dont l'Europe se veut porteuse ?
R - C'est un débat extrêmement important. Depuis que je suis dans ces fonctions, je me rends compte qu'il est porté de manière très idéologique dans notre pays et de manière beaucoup plus pragmatique dans l'ensemble des autres pays européens, quelle que soit leur sensibilité politique. Des pays comme l'Italie avec M. Prodi, comme l'Espagne avec M. Zapatero ou le Portugal avec M. Socrates ont mis fin à des politiques de régulation massive car ils se sont rendus compte qu'ils se retrouvaient avec des problèmes d'intégration importants.
Q - Vous avez dit tout à l'heure que vous n'étiez pas à l'aise avec les quotas.
R - Non, parce qu'au niveau européen, il faudrait voir jusqu'où l'on va. Je ne suis pas certain qu'il y ait consensus entre les différents Etats européens pour mettre en oeuvre des politiques de quotas. La convergence au niveau européen existe sur le fait que la situation démographique de l'Europe, par rapport à tous les autres continents, est défavorable et que vous devez ajuster vos flux en fonction de la situation économique européenne. Vous aurez 25 millions d'actifs en moins entre 2010 et 2030. Il faut le savoir. Par ailleurs, tout le monde est d'accord pour que les politiques de contrôle aux frontières soient renforcées, en distinguant bien l'immigration légale de l'immigration illégale. Enfin, tout le monde est aussi d'accord pour faire en sorte qu'il y ait des politiques visant à assurer aux immigrés le plus possible de travail en Europe, dès lors qu'il y a des potentialités, des possibilités qui s'ouvrent.
Q - Même s'ils sont Africains ?
R - Bien sûr !
Q - Je vous pose la question, car la loi française réserve pour l'instant les métiers qui nécessitent peu de qualifications aux ressortissants des nouveaux membres européens de l'Union européenne plutôt qu'aux Africains.
R - Parce que c'est une approche européenne. Lorsque nous avons signé les traité d'adhésion de ces nouveaux Etats membres, une ouverture progressive a été effectuée à leur égard. Ces pays souhaitent que d'ici 2009 les barrières qui existent actuellement soient levées, ce que j'espère d'ailleurs.
Vous avez parlé d'humanisme et vous avez totalement raison. Il ne peut pas y avoir de politique de gestion des flux migratoires au niveau européen sans politique d'intégration réussie. Il doit y avoir, dans le cadre du pacte européen sur ces questions d'immigration et de droit d'asile, des composantes d'intégration et bien évidemment des aspects de formation et de développement dans les pays d'origine de l'immigration.
Q - Le président s'est exprimé jeudi soir sur la question des sans-papiers titulaires d'un contrat de travail qui demandent leur régularisation. Le Président de la République a dit ce n'est pas parce qu'on a un contrat de travail que l'on peut être naturalisé. La question n'est pas celle de la naturalisation mais celle de la régularisation. Ma question est simple, lorsqu'on a un contrat de travail et qu'on cotise depuis 5 ans, 10 ans et qu'on paye des impôts doit-on être régularisé ?
R - Il faut appliquer la loi telle qu'elle existe. J'ai tendance à penser que lorsque vous travaillez depuis un certain temps - il y a eu un certain concours d'hypocrisie en ce domaine - que vous payez vos cotisations et vos impôts, si c'est en accord avec la loi, vous devez être régularisé.
Q - Même si cela fait du nombre ?
R - Il faut voir cela au cas par cas.
Q - Même si au cas par cas vous arrivez à 100 000 régularisations.
R - Non, vous ne pouvez pas arriver à des régularisations massives. On a vu par le passé ce que cela a donné.
Q - Si le cas par cas vous donne une régularisation importante ?
R - Il faut toujours en rester au traitement au cas par cas et rester à ce que sont les obligations légales. C'est ce que font nos partenaires européens.
Q - Attendez, je ne comprends pas. Si par exemple au bout de trente mille régularisations on dit "Monsieur, certes vous devriez être régularisé mais vous êtes le trente et un millième ça ne va plus ?
R - Non, c'est pour cela que je dis que sur les quotas il faut faire très attention. Parce que si vous êtes dans une situation qui fait que vous pouvez être régularisé mais, que pour des raisons de quotas, on ne vous accorde pas les papiers, cela ne va pas. Lorsque cela porte sur un nombre limité, vous devez vous en tenir à ce que prévoit le loi. Dans cette situation, je crois que c'est limité. Nous allons bien voir. En tout cas, ce sera examiné dossier par dossier. Pas de régularisation globale et massive.
Q - Il y a une crise alimentaire dans le monde qui frappe l'Afrique mais pas seulement. Face à cette crise alimentaire, que doit faire l'Europe ? Est-ce qu'elle doit produire d'avantage pour exporter vers ces pays là ou bien est-ce qu'elle doit aider ces pays là à produire eux-mêmes leurs propres ressources.
R - L'Europe doit faire les deux. Elle doit d'une part faire en sorte que la production agricole européenne reste importante. On s'aperçoit aujourd'hui avec les problèmes alimentaires que connaissent un certain nombre de pays, notamment les pays les moins développés, qu'il existe un déséquilibre très important entre l'offre et la demande alimentaire. Pendant très longtemps, on a pensé que les Français disaient cela uniquement pour sauver leur agriculture. Non, il y a besoin d'une production agricole forte en Europe pour satisfaire des besoins alimentaires mondiaux qui sont croissants. D'autre part, dans le même temps, vous devez aider les pays les moins développés à faire en sorte que leur agriculture et que l'agriculture vivrière se développent. C'est tout le but de l'action que conduit Bernard Kouchner, qui veut renforcer le Fonds alimentaire mondial. Un bon moyen de le faire serait d'associer les fonds souverains de manière intelligente. On parlait de la Chine tout à l'heure. Il faudrait que d'autres pays soient associés au Fonds alimentaire mondial et à la gestion des stocks alimentaires au niveau international.
Q - L'OMC dit "dans ces conditions, la meilleure formule c'est l'abaissement de toutes les taxes douanières qui permettrait une meilleure circulation des produits agricoles". C'est ce que dit votre ami Pascal Lamy, directeur général de l'OMC, c'est ce que disent également nos nouveaux amis britanniques.
R - Oui, nos amis britanniques l'ont toujours dit. Mais je ne crois pas que dans ce domaine, le marché puisse régner en maître. Il faut de la régulation, c'est le premier point. Je demande donc à voir ce que font nos partenaires, parce que le problème de l'abaissement des droits de douane se pose entre les pays qui sont les plus producteurs en matière agricole. C'est à dire entre l'Europe, les Etats-Unis, les grands émergents, les Néo-zélandais, les Australiens et les Japonais. A partir du moment où tout le monde fait les mêmes efforts et que les abaissements sont contrôlés, pourquoi pas ? Mais à l'égard des pays les plus pauvres, vous n'avez déjà plus de droits de douane, grâce à Pascal Lamy qui, lorsqu'il était Commissaire européen, a pris cette initiative. Le problème ne se pose donc pas de ce point de vue. Il est faux de dire, par idéologie, que c'est un accord de libre échange dans le cadre de l'OMC qui va mettre un terme à la crise alimentaire mondiale. Cette crise vient de déséquilibres qui justement nécessitent une nouvelle régulation.
Q - Question d'internaute - Je pense que l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne doit être conditionnée à sa reconnaissance de la République de Chypre, quelle est votre opinion sur la question ?
R - Ma réponse est très claire. Effectivement, tant qu'il n'y a pas de reconnaissance de la république de Chypre par la Turquie, il ne peut y avoir d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.
Q - Etes-vous déçu de ce qu'a dit Nicola Sarkozy jeudi soir ? Parce qu'il vous a donné raison sur un point, il a retiré le référendum obligatoire, pour une nouvelle adhésion, de la Constitution française. C'est un projet en tous cas.
R - J'y étais très attaché, c'est une exception française. On me demandait tout à l'heure ce qu'attendaient les partenaires européens de la France. C'est qu'elle mette fin à un certain nombre d'exceptions qui n'étaient pas particulièrement européennes.
Q - Mais il a dit sur la Turquie, si je suis encore président au moment où la question se pose, alors j'organiserai un référendum.
R - Sur la Turquie pour qu'il y ait un référendum, je note que cela signifie que l'on se place dans une perspective d'adhésion. Pour qu'il y ait référendum, il faut qu'il y ait un objet.
Q - Vous l'avez écouté, il a dit "il faudra vraiment se forcer pour me convaincre que la Turquie est en Europe".
R - Oui, j'ai écouté l'ensemble du raisonnement du président de la République. Sa position est connue : la Turquie n'a pas vocation à adhérer dans l'Union européenne et dans le même temps il a dit : "si cela se produit lorsque je ne serai plus président de la République, je serai favorable à la tenue d'un référendum". Nous nous situons dans une perspective très éloignée qui se situe dans 10 ans. La position de la France est claire. Vous poursuivez les négociations avec la Turquie tant que celles ci respectent à la fois la voie de l'adhésion et celle du partenariat privilégié. Ce qui est important, c'est que nos amis turcs doivent faire de la pédagogie et doivent donner un certain nombre de preuves sur le plan de la démocratie, des réformes et du respect des Droits de la femme et de l'homme en Turquie. La-dessus, nous ne transigerons pas à l'égard d'un grand pays comme la Turquie, avec lequel nous avons des partenariats importants en ce qui concerne la défense, l'économie, l'énergie de demain. Il est important de laisser le temps à la pédagogie de faire son oeuvre en France.
Q - Il faudra que vous soyez pédagogue à l'égard de M. Sarkozy ?
R - Il faudra être pédagogue à l'égard de tout le monde. Nous sommes également élus pour être pédagogues et prendre nos responsabilités. Je connais la position du président de la République, nous pouvons avec Bernard Kouchner avoir des sensibilités personnelles. L'ouverture, cela sert également à cela, à ce qu'il y ait des échanges et que les sensibilités ne soient pas toujours les mêmes. Mais il y a une seule position de la France, c'est celle qui est définie par le Président de la République.
Q - L'Union pour la Méditerranée a changé de nom puisqu'elle s'appelait l'Union méditerranéenne, puis Mme Merkel a dit qu'elle n'était pas satisfaite, qu'elle se sentait exclue. Alors on a appelé cela l'Union pour la Méditerranée. On a l'impression que c'est un grand projet qui s'est bien rabougri au fil du temps.
R - Non, c'est un vrai succès. Cela reste un grand projet. L'Union pour la méditerranée, c'est peut-être le plus beau projet que porte le président de la République et, pour l'Europe, l'un de ses principaux projets. Tout ce qui se joue en Méditerranée, c'est la stabilité politique, la gestion des flux migratoires, nos coopérations et le dialogue culturel avec les pays de l'autre rive. C'est un projet fantastique. Ce qui a été accepté lors du dernier Conseil européen, c'est la reconnaissance que nous devions aller au-delà de ce qui existe aujourd'hui, c'est à dire le processus de Barcelone. Que va changer l'Union pour la Méditerranée ? Elle va changer deux éléments fondamentaux. Le premier est que vous aurez une relation égale entre les pays du sud de la Méditerranée et les pays du nord. Ce ne sera pas comme avant, vous ne viendrez pas avec des projets en disant "J'ai un projet, c'est à prendre ou à laisser" et puis les pays du sud n'ont plus qu'à se taire ou à prendre le projet. Le deuxième aspect, c'est que l'Union pour la Méditerranée va être fondée sur des projets. C'est une Union concrète qui évitera que vous ayez uniquement de l'aide budgétaire ou macroéconomique. Vous aurez des projets sur la dépollution de la Méditerranée, sur la coopération énergétique, sur le dialogue culturel ou sur la création d'un Erasmus méditerranéen. C'est un très beau projet .Et de le faire à 27, avec les autres pays de la Méditerranée, qu'une quarantaine de pays décident le 13 juillet de fonder ensemble une nouvelle Union pour la Méditerranée, est un projet fondateur de civilisation.
Q - Nicolas Sarkozy a dit qu'il y aurait des progrès à l'association de la France à l'Alliance atlantique s'il y avait des progrès sur la défense européenne. Qu'elles sont les exigences dans ce domaine pour qu'il y ait un rapprochement avec l'Alliance atlantique.
R - Vous avez parfaitement bien posé les termes de la question. C'est une question à laquelle, en tant que membre de l'ouverture, nous sommes très sensibles. Première priorité c'est de construire la défense européenne. L'Europe est un continent de 500 millions d'habitants, c'est un continent qui malgré les aléas...
Q - Qu'est ce que ça veut dire ?
R - La défense européenne, cela veut dire avoir une stratégie européenne en terme de défense et de sécurité. Il faut la revisiter. Puisqu'elle date de 2003, elle mérite d'être un peu actualisée. C'est avoir des capacités opérationnelles et de programmation d'opérations. Je pense au Tchad, au Darfour. Il n'est pas normal aujourd'hui, que pour des opérations humanitaires, militaires ou de maintien de la paix comme dans les Balkans, vous soyez obligés de quémander un hélicoptère par-ci, un hôpital de campagne par-là, ce n'est pas digne de l'Europe. Si l'Europe veut être un acteur global, elle doit se doter de ces moyens de planification et de capacité opérationnelle. Il faut également avoir une agence de l'armement qui dispose de moyens importants.
Q - Question concrète, cette défense européenne existe au sein de l'Alliance atlantique, est-ce que la France aurait pu dire " non, nous ne participons pas à l'expédition en Irak" ?
R - La défense européenne n'existe pas dans l'Alliance atlantique. Je vous réponds très clairement parce que c'est le noeud du débat. Vous devez avoir une défense européenne qui travaille en bonne intelligence avec l'Alliance Atlantique mais vous ne pouvez pas avoir une défense européenne fondue dans l'Alliance Atlantique, pour les raisons que vous avez évoquées. La deuxième considération concerne la France et non l'Europe, une fois cette clarification opérée. Vous avez une défense européenne qui existe en tant que telle et qui travaille en relation avec l'Alliance atlantique. Vous devez avoir, si vous êtes dans le commandement intégré, les moyens de décider des responsabilités opérationnelles et le pouvoir de dire si vous êtes d'accord avec telle ou telle opération. En tout cas c'est comme cela que je vois les choses.
Q - Tout à l'heure, vous avez dit que l'ouverture cela sert à avoir des débats au sein du gouvernement, je vais vous proposer d'écouter une déclaration qui circule sur le net. C'est de quelqu'un que vous connaissez bien qui s'appelle Henri Guaino, le conseiller du président de la République : "J'ai voté non à Maastricht, j'ai voté non à la Constitution européenne. Maastricht près de la moitié des Français ont fait la même chose que moi, est-ce qu'ils doivent se cacher ? Avoir honte ? Non, eh bien moi non plus. 55 % des Français ont voté non à la Constitution européenne, est-ce qu'il doivent se cacher, se couvrir la tête de cendre ? Non, moi non plus. J'assume tout à fait et je ne regrette rien. On a fait avec l'ouverture rentrer dans le gouvernement des gens qui viennent de la gauche ou du centre, des gens qui sont laïques ou des gens qui sont chrétiens, des gens qui sont sociaux, d'autres qui sont plus financiers. Alors la seule ouverture qu'on ne pourrait pas faire c'est celle vis-à-vis des gens qui ne pensent pas tout à fait comme la technostructure de Bruxelles. Ce serait quand même un comble, non ? Je rappelle quand même que quand la technostructure a le pouvoir, la démocratie ne l'a plus".
Cela doit être chaud quand même dans les réunions ?
R - Nous avons des explications franches, comme on le dit, avec Henri Guaino. Que l'on n'ait pas la même sensibilité avec Henri Guaino, cela est clair.
Q - Ce n'est pas le mariage de la carpe et du lapin ? Qu'est-ce que vous faites ensemble ?
R - Je crois qu'on l'a montré sur l'Union pour la Méditerranée, je constate qu'il y a une ligne, celle du président de la République, qui est une ligne européenne. Il y a le Traité simplifié, il y a une action de modernisation de la France qui vise à faire en sorte que la France soit davantage au coeur de l'Europe. Je vous signale que nous sommes tous d'accord sur un point, c'est qu'il nous faut une Europe plus politique.
Q - Un mot juste pour finir, vous avez parlé tout à l'heure du climat comme étant une des grandes priorités de la Présidence de l'Union européenne. On arrivera à se mettre d'accord sur des mesures chiffrées sur des émissions de gaz ? On essayera de convaincre les Américains et les pays émergents ?
R - Très bonne question. J'ai participé il y a une semaine, à une réunion avec les Américains et les pays émergents.
Cela n'a pas été un échec dans la mesure où nous nous sommes rendu compte de la nécessité d'avoir des objectifs chiffrés à long terme. L'Europe veut réduire ses émissions par quatre d'ici à 2050. Elle souhaite les réduire significativement d'ici 2020. Nous demandons aux Etats-Unis et aux pays émergents, chacun en fonction de leurs capacités, de faire le même effort. Ce sera l'enjeu de la conférence de Copenhague en 2009 et de celle de Postdam à la fin de l'année.
Q - Avec une position européenne ?
R - Il y aura une position européenne et elle sera chiffrée.
Merci.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 mai 2008