Déclaration de M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur la mise en oeuvre du plan d'aide français pour la pêche durable et responsable, et notamment l'attribution d'une aide sociale aux marins pêcheurs, Paris le 21 mai 2008.

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Circonstance : Comité de suivi du plan pour la pêche, à Paris le 21 mai 2008

Texte intégral


Les professionnels de la pêche et le gouvernement travaillent depuis plusieurs mois pour donner au secteur de la pêche maritime des perspectives de développement durable dans un contexte économique et environnemental très difficile.
Le secteur de la pêche, 22 000 marins pêcheurs et 5000 navires est en effet une composante essentielle de notre identité et de l'économie de nos départements côtiers.
Je connais les efforts des marins pêcheurs qui exercent leur métier dans des conditions pénibles et dangereuses et avec une rémunération de plus en plus faible.
A la demande du président de la république, j'ai élaboré un plan pour une pêche durable et responsable qui vous a été présenté le 16 janvier dernier à l'Elysée.
Il s'agit d'un effort sans précédent à la fois par son montant (310 millions d'euros sur 3 ans), par son ambition et par sa volonté de traiter l'ensemble des enjeux de la pêche française (recherche, sécurité, économie, ressource).
La Commission européenne vient d'approuver le Plan
Un échange de lettres entre le commissaire Borg et moi même a permis ce mardi 20 mai de formaliser l'accord de la commission pour la mise en oeuvre de l'ensemble des mesures du Plan, y compris celles à vocation économique.
Ce plan avait été déjà engagé pour un certain nombre de ses mesures (36 millions ont été engagés et 30 millions ont été payés depuis le début de l'année 2008).
Cette approbation permet désormais de concrétiser pleinement et de manière sure le Plan pour une pêche durable et responsable. Je tiens à remercier les professionnels et le commissaire Borg pour l'esprit dans lequel nous avons travaillé depuis maintenant 5 mois.
La hausse continue du gazole qui atteint le prix de 0,70euros/litre crée une situation nouvelle et grave.
Au moment où nous nous retrouvons, il n'y a pas d'autres choix que de respecter le cadre communautaire. Le gouvernement propose d'accélérer, d'intensifier et de compléter les mesures du plan.
La politique des pêches est une politique communautaire. Elle ne peut évoluer qu'à l'initiative de la Commission et avec l'accord d'une majorité qualifiée d'états membres.
Dans ce cadre, je veux prendre des mesures immédiates de soutien à la profession mais également des mesures de modernisation de la profession afin d'engager avec elle un certain nombre de chantiers
Pour faire face à la gravité de la situation, le plan sera donc réalisé en deux ans au lieu de trois. Cela représente un effort national et européen de 150 millions d'euros par an.
I) Six mesures immédiates pour répondre aux difficultés nouvelles
Le Gouvernement apporte six réponses nouvelles à la situation
a) Les marins pêcheurs ont un salaire directement diminué par les hausses du prix du gazole. Au delà d'un prix du gazole de 40 centimes d'euros par litre, le sentiment général est que la situation sociale n'est plus supportable dans notre pays pour les marins pêcheurs français. Pour cette raison, le Premier ministre et le Gouvernement décident l'attribution d'une aide sociale pour soutenir le revenu des marins pêcheurs.
Ces crédits de soutien s'élèveront à 40 Meuros et seront versés dans le courant du mois de juin pour une période de six mois.
b) S'agissant des entreprises de pêche et au-delà du soutien évoqué à l'instant en faveur des marins pêcheurs, il est nécessaire de renforcer pour les six prochains mois les aides à la viabilité économique de l'ensemble des pêcheries. Cette aide sera nécessairement plafonnée par le système des aides « de minimis » afin de respecter les règles communautaires.
J'ai décidé de renforcer ces aides d'urgence à hauteur de 22 Meuros pour garantir le doublement de l'acompte versé en février dernier aux entreprises bénéficiaires. L'ensemble des autres entreprises recevra ce qui n'avait pas été le cas en février, une aide exceptionnelle qui s'élèvera, pour ces catégories de navires, à 14 millions d'euros pour les six prochains mois.
c) Durant cette période de six mois, le Gouvernement français engagera des démarches avec le Conseil et la Commission européenne pour que soient pris en compte les problèmes spécifiques de la dépendance économique de la pêche européenne par rapport au prix du gazole.
d) Je vous confirme également que nous organiserons dans les quinze jours une réunion rassemblant les responsables de la production, du mareyage, de la distribution avec l'appui de l'OFIMER. Cela permettra d'examiner la formation des prix dans la filière et de faire toute la transparence sur les marges et des prix.
e) J'ai demandé à Mme LAGARDE, Ministre de l'Economie et des Finances, d'organiser une réunion avec le Président de TOTAL, M. de MARGERIE toutes les pistes d'amélioration dans un souci de transparence sur le prix du gazole vendu aux navires de pêche
f) J'ai demandé à mes services de mettre en oeuvre le mécanisme des arrêts temporaires pour des pêcheries connaissant des problèmes de ressources.
Une enveloppe de 15 millions d'euros sera consacrée à cette mesure.
II) Trois mesures structurelles du plan sont amplifiées
a) Les plans de sortie de flotte ne constituent pas une réponse systématique pour la profession. Répondant à des démarches volontaires des professionnels, 8,8 millions d'euros supplémentaires sont dégagés pour traiter les 45 dossiers présentés au plan de sortie de flotte mais qui n'avait pas pu être retenu pour des questions budgétaires
b) Conformément à notre engagement et avec l'approbation de la Commission, les contrats bleus démarreront le 1er juin.
Ce démarrage des contrats bleus concrétise un élément nouveau du plan auquel nous avons travaillé ensemble. Il s'agit d'un instrument innovant pour une pêche durable et responsable proposé par les acteurs locaux. 15 millions d'euros sont d'ores et déjà mobilisés au titre de cette mesure.
Une répartition des crédits disponibles sera effectuée entre les différentes régions afin d'assurer un équilibre dans la réalisation des contrats bleus sur l'ensemble du littoral.
c) Concernant les contrats de préparation des navires de pêche à l'exécution de missions d'intérêt public (contrats gris), 2,5 millions d'euros sont disponibles pour la mise en oeuvre de ces mesures. Le contrat entre le comité national des pêches et le SGMER sera signé dans les prochains jours.
III) Les mesures d'avenir pour préserver une pêche française
a) Au-delà des mesures d'urgence et de solidarité, des mesures que nous amplifions, nous devons également nous préoccuper de l'avenir, relever la ligne d'horizon et construire un modèle économique viable. Cela passe par la modernisation et la restructuration de la flotte française.
Il nous faut préparer ensemble une adaptation de l'outil de production au marché des produits de la mer et aux évolutions du cours du gazole.
Dans cette démarche, la situation de chaque entreprise individuelle sera examinée dans le cadre du plan de sauvetage et de restructuration (PSR) et les Préfets de Régions recevront dans les tout prochains jours la circulaire d'application.
Chaque navire fera l'objet d'un audit technique, énergétique et financier intégralement pris en charge par l'Etat à concurrence de 7500 euros.
Au terme de ces audits, des solutions adaptées seront proposées au cas par cas (motorisation, nouvelles techniques de pêche...)
b) Le gouvernement souhaite alléger les charges portuaires qui pèsent sur les navires et étudie dans cet objectif, la création d'un service d'intérêt économique général portuaire.
c) La sécurité des marins pêcheurs est une priorité. Cette sécurité passe en partie par le renouvellement de la flotte qui n'est pas aujourd'hui soutenu financièrement.
Sur la base du rapport de Georges TOURRET, j'engagerai les négociations avec la Commission sur ce point.
Par ailleurs, une expérimentation de la balise individuelle dont le Plan pour une pêche durable va doter chaque marin pêcheur débutera au mois de juin.
Je sais les difficultés qui sont les vôtres pour convaincre et pour expliquer les mesures de ce plan aux marins mais nous devons nous investir pleinement dans ce travail d'explication car l'avenir de la profession en dépend.
Il me parait également important de procéder sans plus attendre aux élections professionnelles.
L'ensemble de ces mesures exige à la fois un suivi au plus près du littoral sur le plan humain, économique et technique et une mise en oeuvre rapide.
Les préfets de régions et les directeurs régionaux des affaires maritimes me rendront compte tous les 15 jours de l'avancement de leur mise en oeuvre.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 23 mai 2008