Texte intégral
J.-J. Bourdin.- Avec nous le ministre de la Défense, H. Morin. Bonjour, merci d'être avec nous. Avant de parler des problèmes spécifiques de la défense et de la réforme que vous avez engagée, H. Morin, je voudrais que nous regardions en face l'actualité. Vous êtes responsable politique. Je vous pose la question directement : est-ce que cela vous gêne que l'exécutif nomme le président de France Télévisions ?
Ça m'aurait gêné si l'exécutif avait nommé seul le président de France Télévisions. Mais il le nomme avec l'avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Vous voyez le président du CSA aller contre l'avis du président de la République ?
Ce n'est pas le président du CSA, c'est un organe indépendant. Et c'est un organe qui sera d'autant plus indépendant que les conditions de nomination vont changer avec la révision constitutionnelle et avec l'avis conforme, avec la capacité pour le Parlement aussi de s'opposer à cette nomination. Et donc la majorité qualifiée du Parlement, l'avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel, ça donne à la nomination, ça empêche que la nomination soit...
La majorité UMP du Parlement pourrait s'opposer à une décision prise par le chef de l'Etat ?
On vous parle d'une majorité qualifiée. C'est-à-dire que la majorité qualifiée, elle fait en sorte qu'il faille dépasser l'horizon qui est le vôtre. Et le CSA n'est pas UMP.
Autre question claire : est-ce que nous vivons dans une économie libérale ? Est-ce que vous pensez que nous vivons dans une économie libérale en France, je vous pose la question franchement ?
C'est une économie dans laquelle il y a beaucoup de verrous, dans laquelle il y a encore beaucoup d'éléments qui empêchent à l'économie française de pouvoir fonctionner comme il le faudrait.
Vous savez qu'au cours des dernières semaines, vous avez créé, vous le Gouvernement, une taxe sur le poisson, une taxe sur les voitures polluantes, une taxe pour financer la représentativité des syndicats...
Là, ce n'est pas une économie libérale.
Vous êtes à deux taxes...
Une économie libérale c'est une économie...
C'est quoi ? Taxe sur le chiffre d'affaires des opérateurs Télécom et des fournisseurs d'accès, c'est libéral ou pas ?
Ce n'est pas le sens de l'économie libérale. Le sens de l'économie libérale c'est de faire en sorte que l'offre et la demande puissent s'exprimer le plus librement possible. Qu'ensuite, il y ait éventuellement un certain nombre d'impôts, de taxes qui soit mis en oeuvre pour réguler le marché, c'est autre chose. L'économie libérale c'est la capacité à chacun de pouvoir en quelque sorte développer son activité dans les conditions les plus libres possibles et que le marché, la loi de la concurrence puisse faire en sorte que le consommateur s'y retrouve et qu'on ne soit pas dans des oligopoles ou des monopoles qui fixent les prix. Cela c'est ça. Qu'en revanche, on décide de créer une taxe, comme par exemple la taxe sur le chiffre d'affaires pour prendre le financement de France Télévision, le chiffre d'affaires sur les opérateurs du Net et les opérateurs... Qu'on le fasse pour permettre à un secteur de pouvoir bénéficier, pourquoi pas !
Vous n'avez rien à redire sur ce...
Qu'on décide de financer une...
H. Morin, rien ?
Non.
J'ai entendu votre groupe protester quand même.
Mon groupe a le droit de faire ce qu'il veut et moi j'ai le droit aussi...
Oui, tout à fait. Non, non, vous n'avez rien à redire donc ?
Je ne suis pas...
Cela va nous coûter 12 %, 12 euros de plus par an, pour ceux qui sont abonnés à Internet ou à téléphonie mobile. C'est aussi une autre façon d'augmenter la redevance, non, H. Morin ?
Non, mais taxer le chiffre d'affaires des opérateurs d'accès sur Internet ou des opérateurs mobiles ou la publicité - les entreprises qui font de la pub -, elles le prennent aussi sur leur chiffre d'affaires. Et ce chiffre d'affaires il est fait à travers les ventes que les entreprises peuvent faire. Donc, j'allais dire on reste toujours dans le même mécanisme.
Oui, le même mécanisme : c'est le consommateur qui paie. Le même mécanisme on le connaît : nous les consommateurs.
Oui, bien sûr.
Vous êtes consommateur, H. Morin ?
Oui, bien sûr, je suis consommateur tous les jours.
Mais pourquoi est-ce qu'on crée sans cesse des taxes ?
Les quelques taxes dont vous parlez, ce sont...
Les quelques ! J'en ai quelques unes mais je pourrais vous en... Tiens, on veut taxer les niches sociales encore, on veut taxer...Vous savez la taxe c'est...tous les jours, moi j'annonce une taxe, le matin en arrivant. Presque tous les jours.
Moi je sais aussi que nos compatriotes demandent un certain nombre de mécanismes de précaution et de protection. Je sais que nos compatriotes souhaitent que dans tel ou tel secteur, on puisse mettre en place des systèmes de régulation, qu'on puisse mettre en place des systèmes qui amortissent les effets de tel ou tel mécanisme mondial. Et par cela il faut bien trouver ces...
[Inaudible]
Non, mais ça veut dire que quand on veut mettre en place tel ou tel mécanisme de régulation du marché, il faut bien trouver un système et financer ce système.
La réforme de la défense. J'ai vu la grogne des généraux. Est-il vrai que vous cherchiez à savoir qui sont ces généraux qui protestent ? Oui ou non, est-ce que vous chercher à savoir ?
Par nature, à chaque fois qu'il y a un dysfonctionnement dans un ministère, je fais mener une enquête.
Mais les généraux oui...
Je vais vous donner un exemple. Lorsqu"il y a deux mois, une information confidentielle liée à un télégramme diplomatique est apparue, j'ai fait mener une enquête. On a trouvé l'auteur. Eh bien, il est rentré chez lui.
Là, vous chercher les noms de ces généraux ?
Quand au mois de février, alors que nous commencions seulement le travail, les premières cartes des restructurations militaires...
Ils regrettent l'affaiblissement de l'effort de l'Etat ?
Non, non, non, je parle de... par exemple, en février, lorsque les premiers textes de restructuration militaire sont sorties, qui étaient comme si cela allait nous faire reculer, comme si c'était pour rendre service aux armées, j'ai fait mener immédiatement une enquête. Il y a un statut militaire, c'est une loi d'ailleurs qui a été votée à l'unanimité par le Parlement en 2005, il y a une obligation de réserve qui s'impose à tous les fonctionnaires, une obligation de loyauté qui s'impose à tous les fonctionnaires, et il y a le statut militaire.
Donc, on n'a pas à exprimer d'avis ?
Jamais. La loi est la loi.
On va regarder cette réforme de la défense. C'est vrai qu'elle est souvent nécessaire cette réforme de la défense, on va en parler. Mais je voudrais vous poser une question sur l'OTAN, est-ce que nous allons réintégrer le commandement militaire de l'Otan ? Oui ou non ?
Cela ne se passe pas en oui ou non.
A oui ou non. Vous avez un choix : c'est oui ou non ?
Nous avons indiqué clairement, et le président de la République a clairement indiqué, la piste. La piste elle est extrêmement simple : nous avons décidé de faire de l'Europe de la défense une priorité de la présidence française. J'ai fait le tour des capitales européennes. Je constate qu'il y a un énorme consensus sur les propositions proposées par la France, que comme le disaient la semaine dernière les membres de la commission des affaires étrangères du Parlement européen, que je recevais, nos propositions sont ambitieuses. C'est un vrai élan et nous considérons qu'il y a ...
L'Europe de la défense ?
Oui.
Elle avance lentement quand même...
Elle avance lentement, mais...
Très lentement même !
Mais il faudrait que vous repreniez les lectures d'il y a 15 ans. On oublie que l'Europe de la défense était un mot que l'on ne prononçait pas en 1995. On parlait de la sécurité commune européenne et avec un instrument et on disait : l'Union, l'UEO bras armé de la politique européenne de sécurité. C'est dire qu'on ... un organisme dont plus personne ne sait qu'il a existé. Et donc depuis 98 et l'accord de Saint- Malo, accord entre les Français et les Britanniques permettant la création de l'Agence européenne de défense, etc. on a fait des pas importants 17 opérations européennes ont été menées à travers le monde. Nous avons les embryons...
Est-ce que les conditions sont réunies aujourd'hui ?
Nous avons les embryons d'une Europe de la défense. Nous avons à mettre en oeuvre un certain nombre de professions. Je vais vous donner des exemples. Ce que nous voulons, par exemple, c'est faire en sorte qu'il y ait un Erasmus militaire.
Cela on est bien d'accord...
Nous voulons...
...Mais je voudrais savoir est-ce que les conditions sont remplies aujourd'hui pour qu'on intègre le commandement militaire de l'OTAN ?
Ce que nous disons c'est que dès lors que l'Europe de la défense évolue, nous examinerons le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN, dont je vous rappelle que nous sommes membres...
Vous examinerez quand ce retour ? Pendant la présidence française ?
La présidence française va à Nice, met sur la table toute une série de propositions. Nous verrons à la fin de la présidence française si ces propositions sont reprises et si elles avancent. Et, en même temps, nous examinons ce que représente la rénovation de l'alliance Atlantique dont je vous rappelle que nous sommes membres depuis 1949, dont je vous rappelle que nous participons à toutes les opérations militaires depuis 1989. Je vous rappelle qu'à l'heure actuelle l'opération de l'alliance Atlantique au Kosovo est menée par un commandant français. Et je vous rappelle enfin que l'OTAN d'aujourd'hui n'a rien à voir avec l'OTAN du général de Gaulle. Le pacte de Varsovie s'est effondré et l'alliance Atlantique est un système dans lequel les décisions se prennent à l'unanimité, où cela ne remet absolument pas en cause l'indépendance de la France. Nous décidons d'envoyer ou non des troupes. Cela n'a aucune conséquence sur l'organisation de nos forces. Cela n'a aucune conséquence politiquement de nos forces.
Donc, les remarques d'A. Juppé sont mal venus, si j'ai bien compris ?
Oui mais A. Juppé lui-même Premier ministre discutant de la réintégration de l'alliance Atlantique en 1987.
Cela vous a énervé.
Non.
Je le sens au passage. Tiens ! Un mot, au passage : ce fameux porte-avions, alors ? Oui ou non ? Vous m'aviez promis. Nous sommes le 26.
Je me permets de vous signaler que nous avions même pris un pari. Et que ce pari vous l'avez perdu.
Pourquoi ?
Parce que vous m'aviez dit : de toute façon on ne le construira jamais.
Et alors, on va le construire ?
Je me permets de vous signaler que la décision du président de la République est celle de nous laisser le temps d'absorber...
Aujourd'hui, non ?
Aujourd'hui non. Une décision prise au moment où...
Vous reportez la décision ?
En 2011, c'est-à-dire 2011-2012, c'est-à-dire au moment où nous aurons avalé ce qu'on appelle la bosse budgétaire, c'est-à-dire les besoins de crédits...
Quand on aura les moyens, quoi !
Les besoins de crédits très importants que nous avons. Nous avons besoin de 3 milliards d'euros de crédits exceptionnels pour financer la livraison d'équipements nouveaux dont nous avons absolument besoin, je pense aux hélicoptères, je pense aux Transall remplacés par la 400M, aux Puma qui doivent être remplacés par le 9-90, au nouveau véhicule blindé qui s'appelle le VBCI. Ces équipements sont majeurs. Ils doivent arriver dans nos forces et vous verrez au moment du financement...
Eh bien, vous voyez, je n'ai pas perdu mon pari. J'aurai perdu mon pari le jour où on commencera la construction du porte-avions.
Non, parce qu'avant cela, il y a une loi de programmation militaire.
Alors je verrai...
Et dans la loi de programmation militaire, lorsqu'elle sera présentée au Parlement, vous constaterez s'il y a des crédits ou non pour ce porte-avions. Mais je me permets de vous signaler... vous m'avez dit que nous renoncerions au porte-avions...
Pour l'instant, nous renonçons. Nous reportons la décision.
Il n'aurait pas été raisonnable de lancer à l'heure actuelle le porte-avions compte tenu des besoins budgétaires que nous avons, parce qu'il faut examiner les choses...
Oui, on a compris : on n'a pas les moyens de ce porte-avions.
Il faut examiner les choses dans le cadre d'une réflexion militaire globale, de nos capacités militaires globales.
On pourrait le construire avec d'autres, dans le cadre de la politique européenne de défense, par exemple ?
Non. Vous voyez, ce qu'on pourrait plutôt faire - et c'est une des propositions que la France a mise sur la table dans le cadre de la présidence française - c'est que le porte-avions, quand les Britanniques auront construit les leurs, l'entourage du porte-avions, la flotte qui entoure un porte-avions, puisque vous savez, une frégate sous-marine, une frégate anti-aérienne, un sous-marin, un pétrolier ravitailleur, eh bien que cette flotte qui accompagne le porte-avions soit une flotte européenne. [...]
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 26 juin 2008
Ça m'aurait gêné si l'exécutif avait nommé seul le président de France Télévisions. Mais il le nomme avec l'avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Vous voyez le président du CSA aller contre l'avis du président de la République ?
Ce n'est pas le président du CSA, c'est un organe indépendant. Et c'est un organe qui sera d'autant plus indépendant que les conditions de nomination vont changer avec la révision constitutionnelle et avec l'avis conforme, avec la capacité pour le Parlement aussi de s'opposer à cette nomination. Et donc la majorité qualifiée du Parlement, l'avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel, ça donne à la nomination, ça empêche que la nomination soit...
La majorité UMP du Parlement pourrait s'opposer à une décision prise par le chef de l'Etat ?
On vous parle d'une majorité qualifiée. C'est-à-dire que la majorité qualifiée, elle fait en sorte qu'il faille dépasser l'horizon qui est le vôtre. Et le CSA n'est pas UMP.
Autre question claire : est-ce que nous vivons dans une économie libérale ? Est-ce que vous pensez que nous vivons dans une économie libérale en France, je vous pose la question franchement ?
C'est une économie dans laquelle il y a beaucoup de verrous, dans laquelle il y a encore beaucoup d'éléments qui empêchent à l'économie française de pouvoir fonctionner comme il le faudrait.
Vous savez qu'au cours des dernières semaines, vous avez créé, vous le Gouvernement, une taxe sur le poisson, une taxe sur les voitures polluantes, une taxe pour financer la représentativité des syndicats...
Là, ce n'est pas une économie libérale.
Vous êtes à deux taxes...
Une économie libérale c'est une économie...
C'est quoi ? Taxe sur le chiffre d'affaires des opérateurs Télécom et des fournisseurs d'accès, c'est libéral ou pas ?
Ce n'est pas le sens de l'économie libérale. Le sens de l'économie libérale c'est de faire en sorte que l'offre et la demande puissent s'exprimer le plus librement possible. Qu'ensuite, il y ait éventuellement un certain nombre d'impôts, de taxes qui soit mis en oeuvre pour réguler le marché, c'est autre chose. L'économie libérale c'est la capacité à chacun de pouvoir en quelque sorte développer son activité dans les conditions les plus libres possibles et que le marché, la loi de la concurrence puisse faire en sorte que le consommateur s'y retrouve et qu'on ne soit pas dans des oligopoles ou des monopoles qui fixent les prix. Cela c'est ça. Qu'en revanche, on décide de créer une taxe, comme par exemple la taxe sur le chiffre d'affaires pour prendre le financement de France Télévision, le chiffre d'affaires sur les opérateurs du Net et les opérateurs... Qu'on le fasse pour permettre à un secteur de pouvoir bénéficier, pourquoi pas !
Vous n'avez rien à redire sur ce...
Qu'on décide de financer une...
H. Morin, rien ?
Non.
J'ai entendu votre groupe protester quand même.
Mon groupe a le droit de faire ce qu'il veut et moi j'ai le droit aussi...
Oui, tout à fait. Non, non, vous n'avez rien à redire donc ?
Je ne suis pas...
Cela va nous coûter 12 %, 12 euros de plus par an, pour ceux qui sont abonnés à Internet ou à téléphonie mobile. C'est aussi une autre façon d'augmenter la redevance, non, H. Morin ?
Non, mais taxer le chiffre d'affaires des opérateurs d'accès sur Internet ou des opérateurs mobiles ou la publicité - les entreprises qui font de la pub -, elles le prennent aussi sur leur chiffre d'affaires. Et ce chiffre d'affaires il est fait à travers les ventes que les entreprises peuvent faire. Donc, j'allais dire on reste toujours dans le même mécanisme.
Oui, le même mécanisme : c'est le consommateur qui paie. Le même mécanisme on le connaît : nous les consommateurs.
Oui, bien sûr.
Vous êtes consommateur, H. Morin ?
Oui, bien sûr, je suis consommateur tous les jours.
Mais pourquoi est-ce qu'on crée sans cesse des taxes ?
Les quelques taxes dont vous parlez, ce sont...
Les quelques ! J'en ai quelques unes mais je pourrais vous en... Tiens, on veut taxer les niches sociales encore, on veut taxer...Vous savez la taxe c'est...tous les jours, moi j'annonce une taxe, le matin en arrivant. Presque tous les jours.
Moi je sais aussi que nos compatriotes demandent un certain nombre de mécanismes de précaution et de protection. Je sais que nos compatriotes souhaitent que dans tel ou tel secteur, on puisse mettre en place des systèmes de régulation, qu'on puisse mettre en place des systèmes qui amortissent les effets de tel ou tel mécanisme mondial. Et par cela il faut bien trouver ces...
[Inaudible]
Non, mais ça veut dire que quand on veut mettre en place tel ou tel mécanisme de régulation du marché, il faut bien trouver un système et financer ce système.
La réforme de la défense. J'ai vu la grogne des généraux. Est-il vrai que vous cherchiez à savoir qui sont ces généraux qui protestent ? Oui ou non, est-ce que vous chercher à savoir ?
Par nature, à chaque fois qu'il y a un dysfonctionnement dans un ministère, je fais mener une enquête.
Mais les généraux oui...
Je vais vous donner un exemple. Lorsqu"il y a deux mois, une information confidentielle liée à un télégramme diplomatique est apparue, j'ai fait mener une enquête. On a trouvé l'auteur. Eh bien, il est rentré chez lui.
Là, vous chercher les noms de ces généraux ?
Quand au mois de février, alors que nous commencions seulement le travail, les premières cartes des restructurations militaires...
Ils regrettent l'affaiblissement de l'effort de l'Etat ?
Non, non, non, je parle de... par exemple, en février, lorsque les premiers textes de restructuration militaire sont sorties, qui étaient comme si cela allait nous faire reculer, comme si c'était pour rendre service aux armées, j'ai fait mener immédiatement une enquête. Il y a un statut militaire, c'est une loi d'ailleurs qui a été votée à l'unanimité par le Parlement en 2005, il y a une obligation de réserve qui s'impose à tous les fonctionnaires, une obligation de loyauté qui s'impose à tous les fonctionnaires, et il y a le statut militaire.
Donc, on n'a pas à exprimer d'avis ?
Jamais. La loi est la loi.
On va regarder cette réforme de la défense. C'est vrai qu'elle est souvent nécessaire cette réforme de la défense, on va en parler. Mais je voudrais vous poser une question sur l'OTAN, est-ce que nous allons réintégrer le commandement militaire de l'Otan ? Oui ou non ?
Cela ne se passe pas en oui ou non.
A oui ou non. Vous avez un choix : c'est oui ou non ?
Nous avons indiqué clairement, et le président de la République a clairement indiqué, la piste. La piste elle est extrêmement simple : nous avons décidé de faire de l'Europe de la défense une priorité de la présidence française. J'ai fait le tour des capitales européennes. Je constate qu'il y a un énorme consensus sur les propositions proposées par la France, que comme le disaient la semaine dernière les membres de la commission des affaires étrangères du Parlement européen, que je recevais, nos propositions sont ambitieuses. C'est un vrai élan et nous considérons qu'il y a ...
L'Europe de la défense ?
Oui.
Elle avance lentement quand même...
Elle avance lentement, mais...
Très lentement même !
Mais il faudrait que vous repreniez les lectures d'il y a 15 ans. On oublie que l'Europe de la défense était un mot que l'on ne prononçait pas en 1995. On parlait de la sécurité commune européenne et avec un instrument et on disait : l'Union, l'UEO bras armé de la politique européenne de sécurité. C'est dire qu'on ... un organisme dont plus personne ne sait qu'il a existé. Et donc depuis 98 et l'accord de Saint- Malo, accord entre les Français et les Britanniques permettant la création de l'Agence européenne de défense, etc. on a fait des pas importants 17 opérations européennes ont été menées à travers le monde. Nous avons les embryons...
Est-ce que les conditions sont réunies aujourd'hui ?
Nous avons les embryons d'une Europe de la défense. Nous avons à mettre en oeuvre un certain nombre de professions. Je vais vous donner des exemples. Ce que nous voulons, par exemple, c'est faire en sorte qu'il y ait un Erasmus militaire.
Cela on est bien d'accord...
Nous voulons...
...Mais je voudrais savoir est-ce que les conditions sont remplies aujourd'hui pour qu'on intègre le commandement militaire de l'OTAN ?
Ce que nous disons c'est que dès lors que l'Europe de la défense évolue, nous examinerons le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN, dont je vous rappelle que nous sommes membres...
Vous examinerez quand ce retour ? Pendant la présidence française ?
La présidence française va à Nice, met sur la table toute une série de propositions. Nous verrons à la fin de la présidence française si ces propositions sont reprises et si elles avancent. Et, en même temps, nous examinons ce que représente la rénovation de l'alliance Atlantique dont je vous rappelle que nous sommes membres depuis 1949, dont je vous rappelle que nous participons à toutes les opérations militaires depuis 1989. Je vous rappelle qu'à l'heure actuelle l'opération de l'alliance Atlantique au Kosovo est menée par un commandant français. Et je vous rappelle enfin que l'OTAN d'aujourd'hui n'a rien à voir avec l'OTAN du général de Gaulle. Le pacte de Varsovie s'est effondré et l'alliance Atlantique est un système dans lequel les décisions se prennent à l'unanimité, où cela ne remet absolument pas en cause l'indépendance de la France. Nous décidons d'envoyer ou non des troupes. Cela n'a aucune conséquence sur l'organisation de nos forces. Cela n'a aucune conséquence politiquement de nos forces.
Donc, les remarques d'A. Juppé sont mal venus, si j'ai bien compris ?
Oui mais A. Juppé lui-même Premier ministre discutant de la réintégration de l'alliance Atlantique en 1987.
Cela vous a énervé.
Non.
Je le sens au passage. Tiens ! Un mot, au passage : ce fameux porte-avions, alors ? Oui ou non ? Vous m'aviez promis. Nous sommes le 26.
Je me permets de vous signaler que nous avions même pris un pari. Et que ce pari vous l'avez perdu.
Pourquoi ?
Parce que vous m'aviez dit : de toute façon on ne le construira jamais.
Et alors, on va le construire ?
Je me permets de vous signaler que la décision du président de la République est celle de nous laisser le temps d'absorber...
Aujourd'hui, non ?
Aujourd'hui non. Une décision prise au moment où...
Vous reportez la décision ?
En 2011, c'est-à-dire 2011-2012, c'est-à-dire au moment où nous aurons avalé ce qu'on appelle la bosse budgétaire, c'est-à-dire les besoins de crédits...
Quand on aura les moyens, quoi !
Les besoins de crédits très importants que nous avons. Nous avons besoin de 3 milliards d'euros de crédits exceptionnels pour financer la livraison d'équipements nouveaux dont nous avons absolument besoin, je pense aux hélicoptères, je pense aux Transall remplacés par la 400M, aux Puma qui doivent être remplacés par le 9-90, au nouveau véhicule blindé qui s'appelle le VBCI. Ces équipements sont majeurs. Ils doivent arriver dans nos forces et vous verrez au moment du financement...
Eh bien, vous voyez, je n'ai pas perdu mon pari. J'aurai perdu mon pari le jour où on commencera la construction du porte-avions.
Non, parce qu'avant cela, il y a une loi de programmation militaire.
Alors je verrai...
Et dans la loi de programmation militaire, lorsqu'elle sera présentée au Parlement, vous constaterez s'il y a des crédits ou non pour ce porte-avions. Mais je me permets de vous signaler... vous m'avez dit que nous renoncerions au porte-avions...
Pour l'instant, nous renonçons. Nous reportons la décision.
Il n'aurait pas été raisonnable de lancer à l'heure actuelle le porte-avions compte tenu des besoins budgétaires que nous avons, parce qu'il faut examiner les choses...
Oui, on a compris : on n'a pas les moyens de ce porte-avions.
Il faut examiner les choses dans le cadre d'une réflexion militaire globale, de nos capacités militaires globales.
On pourrait le construire avec d'autres, dans le cadre de la politique européenne de défense, par exemple ?
Non. Vous voyez, ce qu'on pourrait plutôt faire - et c'est une des propositions que la France a mise sur la table dans le cadre de la présidence française - c'est que le porte-avions, quand les Britanniques auront construit les leurs, l'entourage du porte-avions, la flotte qui entoure un porte-avions, puisque vous savez, une frégate sous-marine, une frégate anti-aérienne, un sous-marin, un pétrolier ravitailleur, eh bien que cette flotte qui accompagne le porte-avions soit une flotte européenne. [...]
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 26 juin 2008