Déclaration de Mme Fadela Amara, secrétaire d'Etat chargée de la politique de la ville, sur les mesures éducatives mises en place dans le cadre d'"Espoir banlieues" en faveur du rapprochement entre parents et écoles, Paris le 30 mai 2008.

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Circonstance : Colloque ACEPP (Association des collectifs enfants parents professionnels), à Paris le 30 mai 2008

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Je vous remercie, Monsieur le Président, pour ces mots de bienvenue.
Avant toute chose, je veux vous dire combien je suis heureuse d'être ici parmi vous. Je suis heureuse de participer à cette journée consacrée à l'accompagnement des parents,
- Parce que les parents tiennent une place centrale dans nos quartiers populaires et dans « Espoir banlieues », la nouvelle dynamique que nous sommes en train de lancer en faveur de ces quartiers.
- Parce que je me reconnais dans la démarche que vous avez choisie d'organiser des Universités Populaires de Parents. Cela veut dire : donner la parole aux parents, leur permettre d'être acteurs, créer des espaces d'échanges, croiser des savoirs.
Cette démarche correspond à ma conception du débat démocratique et à ma conception de notre République métissée.
La parentalité n'est pas qu'un sujet d'experts. Chacun doit s'approprier ce débat. Et rien ne se peut se faire sans les parents. J'en profite pour saluer et dire notre fierté à tous les parents, ici présents, qui se sont engagés dans ce projet, malgré peut-être parfois quelques appréhensions ou hésitations.
Je vais être directe : j'en ai marre des discours stigmatisants, notamment envers les parents de nos quartiers populaires. J'en ai marre de ces discours culpabilisants qui sont dangereux pour la cohésion de notre pays.
Non, les parents ne sont pas des coupables qu'il faut sanctionner.
Non, les parents ne sont pas responsables de tous les problèmes sociaux de notre pays.
A l'inverse, je pense que les parents sont les vecteurs du lien social de nos quartiers. D'ailleurs, ce sont eux, et notamment les mamans qui, en novembre 2005, ont apaisé et calmé les esprits.
Les parents sont porteurs de citoyenneté dans nos quartiers. Les parents sont et restent les premiers éducateurs de l'enfant. Faisons leur confiance ! Et respectons-les ! Ce respect est une condition essentielle au bien-être et au développement de leurs enfants, de nos enfants.
Ces convictions, elles ont été confortées lors des rencontres territoriales que j'ai engagées dès ma prise de fonctions.
Dès le mois d'août 2007, j'ai entrepris un tour de France des banlieues. Je suis allée à l'écoute des habitants, des parents, des jeunes, qui vivent la cité avec beaucoup de passion, de bonheur, de frustration et de douleur aussi.
J'ai écouté, participé. Plus de 300 rencontres territoriales. Plus de 100.000 contributions. Constructives. Interrogatives. Autant de manifestations d'appartenance, dont une partie de notre élite avait fini par douter. Les fortes attentes de ces habitants se sont exprimées. Loin des clichés, des étiquettes, de l'isolement, ils ont retrouvé une lueur d'espoir. Cet espoir m'engage.
Le 8 février 2008, au terme de plus de six mois de concertation et de mobilisation générale dans tout le pays en faveur des quartiers prioritaires, le Président de la République a décliné les axes de son projet pour les banlieues. La dynamique qu'il a impulsée, en mettant l'évaluation et la mobilisation de tous les Ministres au coeur de cette démarche, est une véritable rupture avec plus de trente ans de politique de la ville. La politique de la ville n'est plus celle d'un seul Ministre, celle qui se substitue à un droit commun trop dilué. Elle est celle d'un Gouvernement tout entier. Chaque Ministre ciblera désormais ses actions, en mobilisant ses moyens et son administration, en direction des quartiers prioritaires.
Elles seront annoncées très officiellement par le Premier Ministre, entouré des membres du Gouvernement, au cours d'un Comité Interministériel des Villes qui se tiendra le 16 juin prochain à Meaux, en Seine-et-Marne.
Le CIV ne s'est pas réuni depuis le mois de mars 2006. Désormais, il se réunira deux fois par an et chaque fois au plus près du terrain, pour examiner l'état de santé des quartiers les plus problématiques et pour décider, lorsqu'il le faut, de mettre le paquet dans tel ou tel domaine.
Ce que nous voulons faire, avec le Président de la République et le Premier Ministre, c'est tirer, une fois pour toutes, les enseignements de trente ans de politique de la ville. Nous voulons rompre avec une politique de la ville qui dilue tout et qui ne règle rien.
Par cette nouvelle politique je veux traduire dans les faits l'ambition que j'ai pour notre République et pour le vivre ensemble :
. Je veux réduire les inégalités entre les territoires.
. Je veux assurer le développement humain et économique à ces 5 millions de personnes qui vivent dans les quartiers difficiles.
. Je veux faire de nos quartiers populaires le vivier des compétences et des élites de la France de demain, au service d'une République métissée.
. Je veux rompre avec la logique des catalogues de mesures qui s'imposent par le haut.
. Je veux une politique sur-mesure qui colle aux réalités de terrain. Une politique de la ville qui s'appuie sur l'expertise locale. Une politique de la ville qui répond aux besoins des individus et des familles.
Une des priorités d'Espoir banlieues est la réussite éducative et l'excellence de nos enfants.
- Parce que tous les enfants des cités méritent d'avoir les mêmes chances que d'autres d'accéder à l'élite.
- Parce que, justement, à terme, une partie de notre élite viendra de ces cités.
- Parce que nos enfants des quartiers construisent la France de demain.
Plus d'une dizaine de dispositifs est prévue dans ce domaine par Xavier DARCOS, qui s'est beaucoup impliqué dans la démarche.
A la rentrée prochaine, trente lycées d'excellence situés dans les quartiers prioritaires accueilleront leurs élèves. Dans ces établissements labellisés, il y aura des filières d'excellence, des spécialisations en langues étrangères, en nouvelles technologies ou dans des filières artistiques et culturelles. Il y aura des enseignants plus spécialisés et mieux formés. Les élèves issus de la cité élargiront ainsi leurs perspectives d'avenir. Quant aux autres jeunes, ceux des autres quartiers, s'ils veulent accéder à ces filières, il leur faudra y venir.
C'est également à la prochaine rentrée scolaire que l'accompagnement éducatif pour les élèves d'écoles primaires sera effectif : Deux heures par jour consacrées à des cours de soutien gratuits, ou des activités culturelles et sportives.
Ce n'est pas parce que l'on n'a pas les moyens, que l'on habite à cinq dans un T2, ou que ses parents ne maîtrisent pas la langue de Molière, que l'on est destiné à l'échec. Certains peuvent s'offrir les services de prestataires privés. Ceux des quartiers y auront également droit, avec une plus forte implication de l'éducation nationale, qui donne là encore plus de noblesse à sa mission de service public.
Egalement à la rentrée prochaine, nous expérimenterons le « busing » dans 50 communes volontaires. Un principe simple, qui consiste à délocaliser des classes d'écoles de quartiers difficiles dans des quartiers plus prospères, pour ouvrir les horizons des enfants. Leur permettre d'avoir d'autres amis, de rencontrer d'autres univers. Pour que les enfants des beaux quartiers s'ouvrent aussi à la diversité. Tout cela, sans aucun impact sur les habitudes de vous, parents, qui continuerez à emmener vos enfants devant l'école habituelle - avec quelques minutes d'avance pour qu'ils puissent prendre le bus - et les reprendrez le soir au même endroit, comme si de rien n'était. Voilà la meilleure réponse aux dérives possibles de la suppression de la carte scolaire.
J'ai voulu mettre en place, aussi, des banques de stages dans toutes les académies. Des espaces neutres, où la demande et l'offre se rencontreront sur la base d'un seul critère : la compétence et le profil, parce que trop d'enfants sans réseau ni piston sont confrontés, dès leur plus jeune âge, aux méfaits de la discrimination. Enfin, nous avons ouvert les classes préparatoires aux jeunes bacheliers des quartiers prioritaires.
Je ne serais pas complète si je ne parlais pas de l'ambition présidentielle en matière de seconde chance. L'enjeu est énorme. On estime entre 120.000 et 150.000 le nombre de jeunes qui sortent du système scolaire sans diplôme ni qualification. Nous avons le devoir de les repérer, de les suivre et de les réorienter vers les filières qui leur correspondent. C'est cela aussi, le sur-mesure.
C'est pourquoi nous soutiendrons un programme ambitieux de développement des écoles de la deuxième chance.
Toutes ces mesures éducatives n'ont de sens que si elles sont construites localement avec les parents. Le rapprochement entre les parents et l'école est un sujet qui me tient particulièrement à coeur.
Parce que l'implication des parents dans le parcours éducatif de son enfant est essentielle pour sa réussite.
Dans toutes les instructions que nous avons données aux recteurs et aux préfets, nous avons été particulièrement exigeants sur ce point : vous devez être associés le plus tôt possible aux projets qui concernent vos enfants et leur avenir.
Mais, je veux aller plus loin.
C'est le travail que nous allons mener avec Nadine MORANO, la secrétaire d'Etat chargée de la famille.
. Je veux promouvoir la place des parents dans nos quartiers et soutenir les dynamiques locales.
. Surtout, je veux favoriser la diversité des lieux d'accueil des enfants.
. Je veux développer les modes de garde qui correspondent aux besoins des parents de nos quartiers populaires.
. Je veux développer des lieux d'accueil pour les enfants dont les parents ont des horaires décalés.
Il faut une offre de garde d'enfant adaptée : Une offre qui corresponde aux besoins des familles monoparentales. Une offre qui corresponde au rythme de vie des enfants : par exemple, si les parents achèvent leur journée de travail à 22 ou 23 heures, les enfants doivent pouvoir terminer tranquillement leur nuit à la crèche. C'est de la construction de notre avenir commun qu'il s'agit. Je m'implique totalement dans la réussite de cette ambition.
Je vous engage, vous tous, vous parents, acteurs de la vie de nos quartiers, à y prendre toute votre part. Je vous remercie.
Source http://www.acepp.asso.fr, le 6 août 2008