Interview de M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, de l'énergie, de l'environnement et de l'aménagemenet du territoire, à France 2 le 30 juillet 2008, sur la sécurité maritime et la sécurité routière, la lutte contre la pollution en Méditerrannée et le développement de l'équipement en TGV.

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Média : France 2

Texte intégral

A. Kara.- En l'absence de F. Fillon, c'est un peu vous qui tenez la Maison France en ce moment. Alors, d'abord une première réaction sur l'actualité. On a appris hier que le Gouvernement avait l'intention d'augmenter de 1 % les cotisations retraites d'ici 2011. Et le Medef dénonce déjà une nouvelle hausse des prélèvements obligatoires.
 
Le président de la République est en France, il se repose dans le Var, et je vais d'ailleurs y aller pour une opération en mer. Bon, ben voilà, il y a le problème de l'évolution du financement des retraites, pour l'instant, c'est une piste qui est étudiée, tout ceci sera vu à la rentrée.
 
Mais est-ce que vous n'avez pas le sentiment que de toute façon, on ira vers... à terme, il ne faudra pas augmenter l'âge du départ à la retraite ?
 
Il y a un problème d'équilibre, si, Dieu merci, l'allongement de la durée de vie se poursuit, c'est un trimestre par an, votre espérance de vie gagne un trimestre par an. Ça posera probablement à terme un problème général d'équilibre. Enfin, cela dit, le retour vers ce que j'espère être le plein emploi contribuera au financement des retraites.
 
Cette nuit, on l'a vu, nouvel échec pour l'Organisation mondiale du commerce, alors, c'est quoi, c'est la victoire des égoïsmes nationaux ou plutôt, c'était juste un mauvais accord ?
 
Très difficile, très difficile à apprécier, il faut être vraiment dans le coeur de la négociation. Moi, ce qui m'inquiète le plus, c'est que... enfin, ce qui m'inquiète aussi, c'est qu'on a une grande négociation mondiale sur le climat, sur le réchauffement climatique, entre le Paquet climat-énergie européen et la négociation de Copenhague, qui prépare l'après-Kyoto, et si on ne trouve pas des moyens de dialogue extrêmement approfondis, en tenant compte des contraintes des uns et des autres, on risquerait l'échec. Et ça, c'est irréversible pour la planète.
 
Vous n'êtes pas encore en vacances, mais vous vous occupez des Français en vacances. Cet après-midi, vous serez dans le Var, un déplacement sur la sécurité nautique. Qu'est-ce que c'est exactement et ça concerne qui ?
 
Plus exactement, la sécurité nautique pour voir nos moyens de sécurité civile, pour venir en aide aux Français, mais plus généralement, la sécurité des personnes, c'est-à-dire le nombre d'accidents qu'il y a en mer pour des raisons de négligence et qu'on doit pouvoir éviter, il y a près de 7.000 opérations en trois mois de sauvetage en mer, 60 morts dans la période de l'été l'année dernière, et en même temps, le respect de la Méditerranée. C'est-à-dire que c'est quand même l'humain, par sa négligence, qui est le premier pollueur de la Méditerranée qui, je le rappelle, est une mer fermée, 300 millions de tonnes de déchets. L'Union pour la Méditerranée prévoit la dépollution, la tentative de dépollution de cette mer. Mais la meilleure dépollution, c'est de ne pas polluer. Vous savez, il y a un rapport très, très fort entre l'éco-geste, le respect de la nature, de soi et l'accident, c'est vrai en matière automobile, quand La Poste fait l'éco-conduite, c'est 50 % d'accidents en moins, 8% de consommation en moins, eh bien, en mer, c'est pareil. On fait une grande campagne avec un million de documents, avec un site Internet sur les différents gestes, sur tout ce qu'il faut faire. La mer, c'est un élément qui peut être dangereux, le temps peut changer extrêmement vite, il y a des problèmes de jets de produits irrespectueux pour l'environnement. Il faut des centaines d'années pour qu'un certain nombre de produits soient détruits. Donc j'appelle les Français, pour leurs enfants, pour eux, à être très, très prudents, de prendre la météo, d'avoir des moyens de communication, avoir un gilet de sauvetage, être à moins de cinq noeuds quand ils sont à moins de 300 mètres des plages, faire attention aux matériels, ne pas jeter quand on prend de l'essence à une pompe à essence dans un port, enfin éviter que ça déborde, ne pas jeter n'importe quel produit en mer, ne pas utiliser les toilettes marines. Enfin, au fond, tout ce que tout amoureux de la mer, mais j'allais dire de soi et de sa famille, doit respecter. Il faut absolument qu'on réduise le nombre de morts.
 
Cet après-midi, vous allez mettre votre gilet de sauvetage, mais le week-end prochain, ça sera plutôt le bâton de gendarme, puisqu'il y a le grand chassé-croisé des routes. Alors, qu'est-ce que vous allez faire ? Vous avez prévu des mesures pour éviter les accidents ? C'est un des week-ends les plus meurtriers de l'année.
 
Oui, celui du 14 juillet et celui-là, c'est les deux gros week-ends. Alors, M. Alliot-Marie renforce les moyens de contrôle, bien entendu. Mais enfin, moi, j'en appelle essentiellement aux Français : vous savez, conduire un peu moins vite, c'est beaucoup moins de CO2 et c'est beaucoup moins d'essence ou de diesel qu'on consomme, pour gagner un quart d'heure sur un Paris-Côte d'Azur, ou du moins, "perdre un quart d'heure", entre guillemets, c'est réduire de 30 % le risque d'accidents. C'est gonfler ses pneus, c'est s'arrêter toutes les deux heures pour se détendre, parce qu'il y a un endormissement qui se fait au volant, c'est boire deux litres d'eau quand on est en voiture, faire attention à la façon dont les bagages sont attachés, faire attention que les enfants à l'arrière aient leur ceinture. Il y a de moins en moins d'accidents mais il y en a encore beaucoup trop. Alors franchement, la route des vacances, elle ne doit pas forcément passer par l'hôpital.
 
Plus généralement, J.-L. Borloo, il y a déjà neuf mois, le Grenelle de l'Environnement était une réussite en terme d'affichage, et puis, on a l'impression maintenant que ça patine un peu, on n'a pas l'impression de voir les mesures se mettre en place.
 
Vous savez, une transition aussi invraisemblable qu'on veut faire de l'économie française - réduire de près de 40 % nos moyens énergétiques dans les bâtiments, transformer ce pays pour qu'il y ait des TGV à peu près partout, des tramways dans toutes les villes, protéger la biodiversité -, ça ne se fait pas comme ça. On a fait la feuille de route ensemble. J'étais hier en Bretagne, on a lancé le TGV Paris-Rennes, et puis ensuite avec des moyens rapides jusqu'au bout de la Bretagne ; c'est un programme de près de 4 milliards. Il y a quinze jours, c'était Montpellier, pour faire la liaison Espagne-Italie. Ça ne se fait pas comme ça, je veux dire, ça prend un peu de temps. J'espère qu'on va se mettre d'accord cet après-midi, en fin d'après-midi, pour une signature en septembre sur le Paris-Bordeaux-Toulouse-l'Espagne. Voilà, ce sont des mutations extrêmement lourdes qui demandent des points de travail précis, opérationnels. Il ne faut absolument pas tomber dans l'affichage, donc ça demande des mesures concrètes.
 
Est-ce qu'il y aura une suite au Grenelle de l'Environnement ?
 
Le Grenelle de l'Environnement, c'est une démarche éternelle. La mutation...
 
Je veux dire, est-ce qu'il y aura un deuxième volet ?
 
Il va donc y avoir le texte de base... Mais en fait, il y en a déjà, le bonus-malus, il a été voté, la responsabilité environnementale, vous savez, la fameuse règle pollueur/payeur, ça a été voté...
 
D'accord, mais je veux dire, est-ce qu'il y aura une nouvelle réunion pour de nouvelles mesures ?
 
Non, il va y avoir un suivi permanent. Et puis, il va y avoir tout de suite après ce texte le texte d'application. On a réussi à compacter les deux de façon à ce que le texte de principe, la feuille de route commune de la société et les modalités d'application soient votés à peu près en même temps. Et puis, quelques semaines après, la loi de finances, où toute la fiscalité écologique, la réforme de la fiscalité pour qu'elle soit écologique, sera mise en place. Donc on a deux mois très importants.
 
Merci J.-L. Borloo, et puis, bonnes vacances, je crois que c'est bientôt...
 
Merci.
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 31 juillet 2008