Texte intégral
J.-J. Bourdin - En Seine-et-Marne hier, des écoliers se sont regroupés et se sont mis à chanter la Marseillaise devant les caméras. C'était une petite opération locale... C'est la loi qui impose d'apprendre la Marseillaise dans toutes les écoles, la loi l'impose mais ce n'est pas fait partout en France, dans toutes les écoles ; vous le regrettez ?
Oui, d'ailleurs, quand vous me présentez, vous dites que je suis ministre de l'Intégration et de l'Immigration ; je suis aussi ministre de l'Identité nationale et aussi du Développement solidaire, c'est-à-dire les partenariats avec les pays d'origine, terres d'immigration. La Marseillaise, c'est quelque chose d'extraordinairement symbolique. On n'insulte pas les symboles dans notre pays, ce doit être la règle. Ensuite, il faut certainement faire de la pédagogie, la Marseillaise, ce n'est pas simplement un chant, c'est une histoire, c'est une conquête, c'est une Révolution, et donc ce sont des valeurs qu'il faut enseigner, qu'il faut partager. C'est valable pour l'ensemble de la communauté nationale, peut-être faut-il faire un effort supplémentaire pour ceux qui rejoignent la communauté nationale, peut-être notamment lors des cérémonies de remise de décret de naturalisation. Vous savez, ce sont des cérémonies, dans les préfectures, où l'on remet un titre, un courrier que d'ailleurs je signe, avec des documents qui disent "bienvenu dans la citoyenneté française". Peut-être qu'il faut aller plus loin.
Qu'est-ce qu'on peut faire ?
Peut-être expliquer quelle est l'origine de ce chant parce que dire que la Marseillaise c'est notre hymne national, c'est un point, mais expliquer quelle est son origine, expliquer comment il l'est devenu, expliquer quel a été le prix des conquêtes révolutionnaires, expliquer comment cela symbolise aujourd'hui la démocratie, c'est certainement quelque chose sur lequel on peut aller plus loin, plus vite et plus fort.
Il y a huit jours, la Marseillaise était sifflée au Stade de France. On va écouter la réaction de B. Laporte [passage-antenne de B. Laporte, document d'archive]. "On aura un public sain" :c'est une dérive raciste, xénophobe ou imbécile ?
D'abord, c'était des actes stupides commis par des imbéciles, premier élément. Mais au-delà du constat, il faut certainement aller plus loin. J'écoutais B. Laporte, B. Laporte est un ami, c'est non seulement un collègue au Gouvernement mais c'est un ami, je le connaissais avant qu'il soit au Gouvernement. Je suis en réalité en désaccord avec lui, parce que si on prend son raisonnement, cela signifie en réalité une renonciation, une abdication. Et la République, elle ne doit pas abdiquer, elle ne doit pas renoncer à ses valeurs et aux symboles de ses valeurs. L'idée de B. Laporte est une idée qui était intellectuellement défendable mais qui, pratiquement, on ne peut pas l'appliquer. Et donc, c'est pour cela que je pense qu'il faut faire davantage de pédagogie et puis de l'éducation et s'en tenir aux propositions qui ont été formulées par le Premier ministre, qui étaient des propositions de bon sens, à juste titre exprimées.
L'actualité de la nuit : le Sénat adopte le projet de loi sur le logement, mais les sénateurs UMP, pas qu'eux d'ailleurs, les centristes, les socialistes, les communistes, ont rejeté l'un des articles qui assouplissait le pourcentage de 20 % de logements sociaux imposé à chaque municipalité. Est-ce qu'il faut réintroduire cette disposition à l'Assemblée nationale ?
D'abord, il y a un principe, c'est que le Parlement doit servir à quelque chose. On ne peut pas dire "nous avons des parlementaires dont la seule mission serait d'hocher la tête s'ils sont dans la majorité, et de la secouer négativement s'ils sont dans l'opposition". Le président de la République a voulu qu'on ait un Parlement qui vive. Donc, premier élément, le Parlement a naturellement le droit, a la vocation de s'exprimer, de faire partager son opinion. Deuxième élément, je pense que la mesure qui a été rejetée était pourtant une bonne mesure. D'abord, c'était une mesure sur laquelle on avait fait campagne autour de N. Sarkozy. Donc le mieux, lorsqu'on prend des engagements de campagne, c'est de les tenir. Donc c'est un engagement, je pense, qui devrait être tenu. Il faut donc laisser se dérouler...
Le Gouvernement pourrait réintroduire cet article ?
Je pense que la position du Gouvernement est une position équilibrée. Donc le Gouvernement va réintroduire cet article. Il y a plusieurs possibilités ; techniquement...
Vous êtes favorable à la réintroduction de cet article ?
Je suis favorable à la position initiale du Gouvernement.
C'est-à-dire qu'on réintroduise cet article ?
C'est-à-dire, le respect des engagements qui ont été pris pendant la campagne électorale.
Voilà.
...Encore une fois, je pense que l'honnêteté et la clarté, c'est mieux que l'opacité et peut-être des positions qui étaient difficilement explicables, et sur lesquelles on doit revenir en tout cas.
Parlons du Pacte européen sur l'immigration, dont on a beaucoup parlé la semaine dernière, mais je voudrais qu'on apporte quelques précisions. Alors, que dit ce Pacte : "donner la priorité à l'immigration professionnelle sur l'immigration familiale". C'est l'un des axes principaux ?
Non, mais d'abord sur le contexte du Pacte, si vous permettez, parce que c'est ça l'élément important. On est 27 pays...
Les 27 se mettent-ils d'accord ?
Les 27 se mettent d'accord, ça signifie quoi ? Ça signifie que, quelle que soit la situation géographique, que ce soit l'Europe du Sud, Malte, Chypre, la Grèce, que ça soit l'Europe du Nord, l'Europe de l'Ouest, les pays d'Europe Centrale, Slovénie, la République tchèque, et ainsi de suite, quelle soit la situation géographique, ils ont dit : c'est une bonne idée qu'on se mette d'accord sur une politique européenne. Il y a un deuxième élément, et vous y êtes vous-même attentif, qui est d'essayer de dépasser les clivages partisans. Il y a un deuxième élément très fort, c'est que, quelle soit la sensibilité politique des gouvernements, on s'est mis là aussi d'accord. Et vous savez, l'Europe c'est très divers. Vous avez des ministres communistes à Chypre ; vous avez un gouvernement qui est certainement le plus à gauche d'Europe, qui est l'Espagne ; vous avez des sociaux-démocrates, comme en Grande-Bretagne, ou des coalitions, comme en Allemagne ; des gouvernements de centre-droit, comme en France ; des gouvernements un peu plus à droite, comme en Italie. Tout le monde s'est mis d'accord. Cela signifie plusieurs choses. Premier élément : ça signifie que l'Europe doit devenir une Europe concrète, et ça, je pense que vous y êtes attentif et que aussi nos auditeurs et nos téléspectateurs le sont. L'Europe pour l'instant, c'est souvent les questions institutionnelles, les grands sujets un peu théoriques. Là, on aborde enfin des questions de société. Et la question des migrations, c'est un défi de société. Cela ne pouvait plus continuer comme avant. Avant, c'était quoi ? Chacun faisait exactement ce qu'il voulait : régularisait, ne régularisait pas, ouvrait, fermait, ainsi de suite, sans se préoccuper des autres. Là, avec cette mesure, ça a nécessité du temps, ça a nécessité du travail, ça a nécessité de la persuasion. Je suis arrivé, à la demande du président Sarkozy, à ce qu'il y ait un accord pour les 27 pays, encore une fois, quelle que soit la situation géographique, quelle que soit la signification politique. Alors, sur la question...
Alors, donner la priorité à l'immigration professionnelle sur l'immigration familiale ?
Oui, pourquoi ? D'abord, l'immigration familiale, qu'est-ce que ça veut dire ? Ce sont des gens qui arrivent sur les territoires, qui n'ont pas de travail, qui n'ont pas de revenus, qui ne savent pas où ils vont loger, qui ne savent pas ce qu'ils vont faire. C'est...Vous savez, la fausse générosité en trompe-l'oeil, ça suffit ! Il faut que l'on soit responsable ! Quand on accueille sur le territoire, il faut qu'on sache comment accueillir ces populations étrangères. Et remonter l'immigration économique. Je vous dis une chose très simple : aujourd'hui, l'immigration est... enfin, hier plus exactement, il y a deux ans, l'immigration économique en France, l'immigration professionnelle c'était 7 %, et l'immigration familiale c'était quasiment tout le reste. Il faut rééquilibrer les deux, c'est à la fois plus juste pour ceux qui viennent, et plus utile à nos pays.
Donc, priorité à "l'immigration professionnelle", mais parallèlement, développement du partenariat avec les pays sources d'immigration. Là, je ne comprends pas très bien, qu'on veut développer le partenariat mais on attire chez nous les meilleurs éléments de ces pays qu'on va aider ! Alors là ! C'est paradoxal, non ?
Qu'est-ce que ça veut dire le partenariat ? C'est-à-dire que l'on a rompu avec ce qui se passait précédemment, et c'est ce qu'on fait en France, et c'est ce que l'Europe approuve. Qu'est-ce qui se passait auparavant ? En réalité, les pays qui avaient besoin de main-d'oeuvre ne se préoccupaient pas des législations et autres, c'était les entreprises qui faisaient leur marché sans rien demander à personne. Ça a été utile. Est-ce que c'était juste ? C'est une autre histoire. Mais ça a été utile. Ensuite, il y a eu un deuxième temps, c'était le choc pétrolier des années 70. Tout le monde disait : oh là, là, mon Dieu, mon Dieu, il y a beaucoup d'étrangers qui viennent travailler, il n'y a plus de travail pour eux ! Et alors tout à coup, on a ouvert les vannes sur l'immigration familiale.
On s'est d'abord développés sur le dos de ces pays-là, et ensuite, on a dit : oh là, là !
Ensuite, il y a eu l'immigration familiale... Et donc aujourd'hui, le grand changement, le vrai changement, c'est que l'on discute. J'ai signé six accords avec les pays terres d'émigration. Il faut savoir que deux immigrés sur trois qui arrivent en France proviennent du continent africain. Et j'ai pris mon bâton de pèlerin, je suis allé voir les pays africains, et je leur ai dit : il faut qu'on se mette d'accord ! C'est l'immigration choisie, choisie et concertée. Cela veut dire qu'on ne ferme pas les portes ; le Pacte européen ce n'est pas une Europe bunker, ce n'est pas une Europe forteresse, mais ce n'est plus une Europe passoire. Et comme on a la préoccupation de la circulation des compétences mais pas le pillage des cerveaux, on a mis en place un certain nombre de dispositifs, notamment en France, la carte compétence et talent, on accueille des jeunes professionnels, on les forme, on les qualifie, et au bout d'un certain nombre d'années, pour l'essentiel six ans, on les encourage à repartir dans leur pays pour que ces pays se développent. On pourra élever toutes les barrières de la terre, ça ne servira à rien s'il n'y a pas un développent sur place dans les pays d'origine. Et c'est la cohérence, tout se tient : on organise la migration légale, on désorganise l'immigration illégale avec les scandales de ces pirates qui rackettent, vous savez, au travers de filières, des chiffres astronomiques, vous devriez creuser le sujet, c'est un sujet passionnant !
On l'a fait, on l'a fait, on a creusé et...
Continuez à creuser ! Mais c'est invraisemblable ce que l'on trouve, c'est scandaleux ce que l'on découvre. Et puis, le troisième point, on discute avec les pays d'origine. Voyez, c'est (...), c'est juste, c'est équilibré, c'est articulé.
Et on expulse les étrangers qui sont en situation irrégulière. Combien d'expulsions depuis le début de l'année ? Nous sommes le 22 octobre. Je ne parle pas moi d'expulsions, je parle de reconduites.
Bon, de reconduites.
Mais attendez ! Pourquoi, qu'est-ce que ça veut dire, qu'est-ce que c'est "en situation irrégulière" ? Il s'agit de personnes qui sont venues sur le territoire européen ou sur le territoire français en ne disant pas la vérité ou en passant par les filières. Ne "disant pas la vérité", c'est-à-dire : "voilà, je viens pour un visa touristique de trois mois, et je demande donc un visa touristique, et puis je repartirai". Et puis, pas du tout, on ne repart pas, on reste, on reste dans la clandestinité, on reste dans l'indignité...
Ils sont coupables ? Ce sont des coupables ?
C'est une infraction en tout cas à la législation, c'est-à-dire on ne respecte pas les lois de notre pays. D'ailleurs, quand je dis qu'on ne respecte pas les lois de notre pays, c'est la même chose dans tous les pays du monde : pour venir, il faut y être autorisé. J'ai dit une chose simple, les principes de notre politique sont... encore une fois, il n'y a rien à cacher, rien à masquer, c'est totalement clair, c'est : un, notre pays a le droit de choisir qui il veut et qui il peut accueillir sur son territoire ; deux, un étranger qui est en situation légale, c'est-à-dire qui respecte notre législation, qui respecte nos règles, qui partage nos valeurs, doit avoir pour l'essentiel les mêmes droits économiques et sociaux que les Français ; troisième élément, effectivement, quand on est en situation irrégulière, on a vocation à être reconduit dans son pays d'origine. Et le grand changement, puisque vous m'interrogez sur les chiffres, le grand, grand changement, c'est qu'il y a encore deux ans, il y avait 93 % de reconduites contraintes, et simplement 7 % de reconduites volontaires. Et par la politique que l'on mène, par la politique d'incitation, par des moyens financiers, par la pédagogie, et en ayant enfin une ligne claire et compréhensible, eh bien le nombre de reconduits volontaires augmente considérablement, je pense que nous terminerons avec un gros tiers de reconduites volontaires. 7 % il y a deux ans, un gros tiers aujourd'hui. C'est...
Combien de reconduites cette année ?
L'objectif que j'avais indiqué c'était autour de 25.000, ça sera certainement autour de cela, voire un peu plus.
30.000 ?
Mais non, je n'en sais rien, ça sera...
Vous en êtes à combien, là ?
Je ne peux pas donner de chiffres à ce stade précis. Je donnerai le chiffre détaillé à la fin de l'année.
On parle de 20.000, déjà ?
Ce sera certainement dans ces ordres-là, mais ce n'est pas le sujet. On dit 20.000, donc on sera à 30.0000 à la fin de l'année ?
Non, mais la question...
Vous respectez le quota ?
Non, mais attendez ! La question c'est pourquoi ce chiffre ? C'est ça la question aujourd'hui, c'est ça qui peut interroger... Ce matin, il y en a qui se disent : mais pourquoi il faut ces chiffres ?
Pourquoi 30. 000 ?
La raison est très simple, c'est que si à votre micro je vous disais : "attention, ceux qui n'ont pas respecté nos règles, il faut qu'ils soient très prudents, parce qu'ils risquent d'être reconduits chez eux", c'est un message qui est inaudible. Si je dis : "quand on ne respecte pas nos règles, on a vocation à être reconduit dans son pays d'origine", et je le dis, ce ne sont pas des mots, ce ne sont pas des slogans, ce ne sont pas des images, c'est une réalité, il y a en aura 25.000, je vous le dis, pour lesquels ça sera le cas, eh bien c'est un message qui passe non seulement ici, mais qui passe aussi dans les pays terres d'origine, qui comprennent chaque jour davantage qu'on ne vient pas en France, si on n'y est pas autorisé !Source Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 23 octobre 2008
Oui, d'ailleurs, quand vous me présentez, vous dites que je suis ministre de l'Intégration et de l'Immigration ; je suis aussi ministre de l'Identité nationale et aussi du Développement solidaire, c'est-à-dire les partenariats avec les pays d'origine, terres d'immigration. La Marseillaise, c'est quelque chose d'extraordinairement symbolique. On n'insulte pas les symboles dans notre pays, ce doit être la règle. Ensuite, il faut certainement faire de la pédagogie, la Marseillaise, ce n'est pas simplement un chant, c'est une histoire, c'est une conquête, c'est une Révolution, et donc ce sont des valeurs qu'il faut enseigner, qu'il faut partager. C'est valable pour l'ensemble de la communauté nationale, peut-être faut-il faire un effort supplémentaire pour ceux qui rejoignent la communauté nationale, peut-être notamment lors des cérémonies de remise de décret de naturalisation. Vous savez, ce sont des cérémonies, dans les préfectures, où l'on remet un titre, un courrier que d'ailleurs je signe, avec des documents qui disent "bienvenu dans la citoyenneté française". Peut-être qu'il faut aller plus loin.
Qu'est-ce qu'on peut faire ?
Peut-être expliquer quelle est l'origine de ce chant parce que dire que la Marseillaise c'est notre hymne national, c'est un point, mais expliquer quelle est son origine, expliquer comment il l'est devenu, expliquer quel a été le prix des conquêtes révolutionnaires, expliquer comment cela symbolise aujourd'hui la démocratie, c'est certainement quelque chose sur lequel on peut aller plus loin, plus vite et plus fort.
Il y a huit jours, la Marseillaise était sifflée au Stade de France. On va écouter la réaction de B. Laporte [passage-antenne de B. Laporte, document d'archive]. "On aura un public sain" :c'est une dérive raciste, xénophobe ou imbécile ?
D'abord, c'était des actes stupides commis par des imbéciles, premier élément. Mais au-delà du constat, il faut certainement aller plus loin. J'écoutais B. Laporte, B. Laporte est un ami, c'est non seulement un collègue au Gouvernement mais c'est un ami, je le connaissais avant qu'il soit au Gouvernement. Je suis en réalité en désaccord avec lui, parce que si on prend son raisonnement, cela signifie en réalité une renonciation, une abdication. Et la République, elle ne doit pas abdiquer, elle ne doit pas renoncer à ses valeurs et aux symboles de ses valeurs. L'idée de B. Laporte est une idée qui était intellectuellement défendable mais qui, pratiquement, on ne peut pas l'appliquer. Et donc, c'est pour cela que je pense qu'il faut faire davantage de pédagogie et puis de l'éducation et s'en tenir aux propositions qui ont été formulées par le Premier ministre, qui étaient des propositions de bon sens, à juste titre exprimées.
L'actualité de la nuit : le Sénat adopte le projet de loi sur le logement, mais les sénateurs UMP, pas qu'eux d'ailleurs, les centristes, les socialistes, les communistes, ont rejeté l'un des articles qui assouplissait le pourcentage de 20 % de logements sociaux imposé à chaque municipalité. Est-ce qu'il faut réintroduire cette disposition à l'Assemblée nationale ?
D'abord, il y a un principe, c'est que le Parlement doit servir à quelque chose. On ne peut pas dire "nous avons des parlementaires dont la seule mission serait d'hocher la tête s'ils sont dans la majorité, et de la secouer négativement s'ils sont dans l'opposition". Le président de la République a voulu qu'on ait un Parlement qui vive. Donc, premier élément, le Parlement a naturellement le droit, a la vocation de s'exprimer, de faire partager son opinion. Deuxième élément, je pense que la mesure qui a été rejetée était pourtant une bonne mesure. D'abord, c'était une mesure sur laquelle on avait fait campagne autour de N. Sarkozy. Donc le mieux, lorsqu'on prend des engagements de campagne, c'est de les tenir. Donc c'est un engagement, je pense, qui devrait être tenu. Il faut donc laisser se dérouler...
Le Gouvernement pourrait réintroduire cet article ?
Je pense que la position du Gouvernement est une position équilibrée. Donc le Gouvernement va réintroduire cet article. Il y a plusieurs possibilités ; techniquement...
Vous êtes favorable à la réintroduction de cet article ?
Je suis favorable à la position initiale du Gouvernement.
C'est-à-dire qu'on réintroduise cet article ?
C'est-à-dire, le respect des engagements qui ont été pris pendant la campagne électorale.
Voilà.
...Encore une fois, je pense que l'honnêteté et la clarté, c'est mieux que l'opacité et peut-être des positions qui étaient difficilement explicables, et sur lesquelles on doit revenir en tout cas.
Parlons du Pacte européen sur l'immigration, dont on a beaucoup parlé la semaine dernière, mais je voudrais qu'on apporte quelques précisions. Alors, que dit ce Pacte : "donner la priorité à l'immigration professionnelle sur l'immigration familiale". C'est l'un des axes principaux ?
Non, mais d'abord sur le contexte du Pacte, si vous permettez, parce que c'est ça l'élément important. On est 27 pays...
Les 27 se mettent-ils d'accord ?
Les 27 se mettent d'accord, ça signifie quoi ? Ça signifie que, quelle que soit la situation géographique, que ce soit l'Europe du Sud, Malte, Chypre, la Grèce, que ça soit l'Europe du Nord, l'Europe de l'Ouest, les pays d'Europe Centrale, Slovénie, la République tchèque, et ainsi de suite, quelle soit la situation géographique, ils ont dit : c'est une bonne idée qu'on se mette d'accord sur une politique européenne. Il y a un deuxième élément, et vous y êtes vous-même attentif, qui est d'essayer de dépasser les clivages partisans. Il y a un deuxième élément très fort, c'est que, quelle soit la sensibilité politique des gouvernements, on s'est mis là aussi d'accord. Et vous savez, l'Europe c'est très divers. Vous avez des ministres communistes à Chypre ; vous avez un gouvernement qui est certainement le plus à gauche d'Europe, qui est l'Espagne ; vous avez des sociaux-démocrates, comme en Grande-Bretagne, ou des coalitions, comme en Allemagne ; des gouvernements de centre-droit, comme en France ; des gouvernements un peu plus à droite, comme en Italie. Tout le monde s'est mis d'accord. Cela signifie plusieurs choses. Premier élément : ça signifie que l'Europe doit devenir une Europe concrète, et ça, je pense que vous y êtes attentif et que aussi nos auditeurs et nos téléspectateurs le sont. L'Europe pour l'instant, c'est souvent les questions institutionnelles, les grands sujets un peu théoriques. Là, on aborde enfin des questions de société. Et la question des migrations, c'est un défi de société. Cela ne pouvait plus continuer comme avant. Avant, c'était quoi ? Chacun faisait exactement ce qu'il voulait : régularisait, ne régularisait pas, ouvrait, fermait, ainsi de suite, sans se préoccuper des autres. Là, avec cette mesure, ça a nécessité du temps, ça a nécessité du travail, ça a nécessité de la persuasion. Je suis arrivé, à la demande du président Sarkozy, à ce qu'il y ait un accord pour les 27 pays, encore une fois, quelle que soit la situation géographique, quelle que soit la signification politique. Alors, sur la question...
Alors, donner la priorité à l'immigration professionnelle sur l'immigration familiale ?
Oui, pourquoi ? D'abord, l'immigration familiale, qu'est-ce que ça veut dire ? Ce sont des gens qui arrivent sur les territoires, qui n'ont pas de travail, qui n'ont pas de revenus, qui ne savent pas où ils vont loger, qui ne savent pas ce qu'ils vont faire. C'est...Vous savez, la fausse générosité en trompe-l'oeil, ça suffit ! Il faut que l'on soit responsable ! Quand on accueille sur le territoire, il faut qu'on sache comment accueillir ces populations étrangères. Et remonter l'immigration économique. Je vous dis une chose très simple : aujourd'hui, l'immigration est... enfin, hier plus exactement, il y a deux ans, l'immigration économique en France, l'immigration professionnelle c'était 7 %, et l'immigration familiale c'était quasiment tout le reste. Il faut rééquilibrer les deux, c'est à la fois plus juste pour ceux qui viennent, et plus utile à nos pays.
Donc, priorité à "l'immigration professionnelle", mais parallèlement, développement du partenariat avec les pays sources d'immigration. Là, je ne comprends pas très bien, qu'on veut développer le partenariat mais on attire chez nous les meilleurs éléments de ces pays qu'on va aider ! Alors là ! C'est paradoxal, non ?
Qu'est-ce que ça veut dire le partenariat ? C'est-à-dire que l'on a rompu avec ce qui se passait précédemment, et c'est ce qu'on fait en France, et c'est ce que l'Europe approuve. Qu'est-ce qui se passait auparavant ? En réalité, les pays qui avaient besoin de main-d'oeuvre ne se préoccupaient pas des législations et autres, c'était les entreprises qui faisaient leur marché sans rien demander à personne. Ça a été utile. Est-ce que c'était juste ? C'est une autre histoire. Mais ça a été utile. Ensuite, il y a eu un deuxième temps, c'était le choc pétrolier des années 70. Tout le monde disait : oh là, là, mon Dieu, mon Dieu, il y a beaucoup d'étrangers qui viennent travailler, il n'y a plus de travail pour eux ! Et alors tout à coup, on a ouvert les vannes sur l'immigration familiale.
On s'est d'abord développés sur le dos de ces pays-là, et ensuite, on a dit : oh là, là !
Ensuite, il y a eu l'immigration familiale... Et donc aujourd'hui, le grand changement, le vrai changement, c'est que l'on discute. J'ai signé six accords avec les pays terres d'émigration. Il faut savoir que deux immigrés sur trois qui arrivent en France proviennent du continent africain. Et j'ai pris mon bâton de pèlerin, je suis allé voir les pays africains, et je leur ai dit : il faut qu'on se mette d'accord ! C'est l'immigration choisie, choisie et concertée. Cela veut dire qu'on ne ferme pas les portes ; le Pacte européen ce n'est pas une Europe bunker, ce n'est pas une Europe forteresse, mais ce n'est plus une Europe passoire. Et comme on a la préoccupation de la circulation des compétences mais pas le pillage des cerveaux, on a mis en place un certain nombre de dispositifs, notamment en France, la carte compétence et talent, on accueille des jeunes professionnels, on les forme, on les qualifie, et au bout d'un certain nombre d'années, pour l'essentiel six ans, on les encourage à repartir dans leur pays pour que ces pays se développent. On pourra élever toutes les barrières de la terre, ça ne servira à rien s'il n'y a pas un développent sur place dans les pays d'origine. Et c'est la cohérence, tout se tient : on organise la migration légale, on désorganise l'immigration illégale avec les scandales de ces pirates qui rackettent, vous savez, au travers de filières, des chiffres astronomiques, vous devriez creuser le sujet, c'est un sujet passionnant !
On l'a fait, on l'a fait, on a creusé et...
Continuez à creuser ! Mais c'est invraisemblable ce que l'on trouve, c'est scandaleux ce que l'on découvre. Et puis, le troisième point, on discute avec les pays d'origine. Voyez, c'est (...), c'est juste, c'est équilibré, c'est articulé.
Et on expulse les étrangers qui sont en situation irrégulière. Combien d'expulsions depuis le début de l'année ? Nous sommes le 22 octobre. Je ne parle pas moi d'expulsions, je parle de reconduites.
Bon, de reconduites.
Mais attendez ! Pourquoi, qu'est-ce que ça veut dire, qu'est-ce que c'est "en situation irrégulière" ? Il s'agit de personnes qui sont venues sur le territoire européen ou sur le territoire français en ne disant pas la vérité ou en passant par les filières. Ne "disant pas la vérité", c'est-à-dire : "voilà, je viens pour un visa touristique de trois mois, et je demande donc un visa touristique, et puis je repartirai". Et puis, pas du tout, on ne repart pas, on reste, on reste dans la clandestinité, on reste dans l'indignité...
Ils sont coupables ? Ce sont des coupables ?
C'est une infraction en tout cas à la législation, c'est-à-dire on ne respecte pas les lois de notre pays. D'ailleurs, quand je dis qu'on ne respecte pas les lois de notre pays, c'est la même chose dans tous les pays du monde : pour venir, il faut y être autorisé. J'ai dit une chose simple, les principes de notre politique sont... encore une fois, il n'y a rien à cacher, rien à masquer, c'est totalement clair, c'est : un, notre pays a le droit de choisir qui il veut et qui il peut accueillir sur son territoire ; deux, un étranger qui est en situation légale, c'est-à-dire qui respecte notre législation, qui respecte nos règles, qui partage nos valeurs, doit avoir pour l'essentiel les mêmes droits économiques et sociaux que les Français ; troisième élément, effectivement, quand on est en situation irrégulière, on a vocation à être reconduit dans son pays d'origine. Et le grand changement, puisque vous m'interrogez sur les chiffres, le grand, grand changement, c'est qu'il y a encore deux ans, il y avait 93 % de reconduites contraintes, et simplement 7 % de reconduites volontaires. Et par la politique que l'on mène, par la politique d'incitation, par des moyens financiers, par la pédagogie, et en ayant enfin une ligne claire et compréhensible, eh bien le nombre de reconduits volontaires augmente considérablement, je pense que nous terminerons avec un gros tiers de reconduites volontaires. 7 % il y a deux ans, un gros tiers aujourd'hui. C'est...
Combien de reconduites cette année ?
L'objectif que j'avais indiqué c'était autour de 25.000, ça sera certainement autour de cela, voire un peu plus.
30.000 ?
Mais non, je n'en sais rien, ça sera...
Vous en êtes à combien, là ?
Je ne peux pas donner de chiffres à ce stade précis. Je donnerai le chiffre détaillé à la fin de l'année.
On parle de 20.000, déjà ?
Ce sera certainement dans ces ordres-là, mais ce n'est pas le sujet. On dit 20.000, donc on sera à 30.0000 à la fin de l'année ?
Non, mais la question...
Vous respectez le quota ?
Non, mais attendez ! La question c'est pourquoi ce chiffre ? C'est ça la question aujourd'hui, c'est ça qui peut interroger... Ce matin, il y en a qui se disent : mais pourquoi il faut ces chiffres ?
Pourquoi 30. 000 ?
La raison est très simple, c'est que si à votre micro je vous disais : "attention, ceux qui n'ont pas respecté nos règles, il faut qu'ils soient très prudents, parce qu'ils risquent d'être reconduits chez eux", c'est un message qui est inaudible. Si je dis : "quand on ne respecte pas nos règles, on a vocation à être reconduit dans son pays d'origine", et je le dis, ce ne sont pas des mots, ce ne sont pas des slogans, ce ne sont pas des images, c'est une réalité, il y a en aura 25.000, je vous le dis, pour lesquels ça sera le cas, eh bien c'est un message qui passe non seulement ici, mais qui passe aussi dans les pays terres d'origine, qui comprennent chaque jour davantage qu'on ne vient pas en France, si on n'y est pas autorisé !Source Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 23 octobre 2008