Texte intégral
Intervention d'Arlette Laguiller
au meeting du Mercredi 21 février 2001 à Saint-Nazaire
Travailleuses, travailleurs, camarades et amis.
Les élections municipales n'ont pas seulement pour enjeu de déterminer qui sera l'homme politique qui va diriger la municipalité pendant les six ans à venir. Oh, bien sûr, du point de vue de ceux qui sont en rivalité pour conquérir une mairie, la question est d'importance. Pour certains, devenir maire d'une grande ville est un pas décisif pour leur carrière de politicien. Pour tous, gérer la mairie d'une grande ville, c'est gérer en même temps des budgets importants, décider de leur affectation, de l'attribution des services municipaux comme la gestion de l'eau, le ramassage des ordures, l'organisation des transports publics ou des cantines scolaires. Diriger une mairie, c'est détenir une puissance économique et sociale, pour soi-même et pour ceux qu'on entend favoriser.
Mais il est évident aussi que ces élections auront une portée nationale.
Pour les grands partis de la droite ou de la gauche gouvernementale qui aspirent à servir la bourgeoisie à l'échelle de l'ensemble du pays, les résultats des élections municipales serviront à en tirer des conclusions générales et à préparer les élections de 2002, celle du président de la République et celle des députés.
Si les résultats des élections municipales indiquent une progression des partis de droite, ceux-ci en tireront comme conclusion que la population souhaite leur retour au gouvernement pour qu'ils mènent la politique qui a été la leur sous Balladur et sous Juppé, une politique ouvertement en faveur du grand patronat.
Si la gauche gouvernementale progresse, elle n'hésitera pas à présenter ce succès comme une approbation populaire de la politique menée par Jospin depuis 1997 en feignant d'ignorer que, si la population laborieuse a voté pour elle, c'est en grande partie pour ne pas voter pour la droite.
Le gouvernement Jospin est fier de son bilan. Il s'attribue les mérites de ce qu'il appelle la "croissance économique", et en particulier la diminution du chômage.
Oh, c'est incontestable, les grandes entreprises ont toutes les raisons de considérer que la période est florissante ! Leurs bénéfices battent des records depuis plusieurs années. Elles se livrent à des opérations de rachat et de fusion gigantesques tant leurs disponibilités financières sont énormes.
La situation économique s'est améliorée aussi pour tous ces bourgeois moyens et petits qui constituent la clientèle des restaurants et des boutiques de luxe, qui ont une vie aisée, des voitures haut de gamme, des propriétés un peu partout. Quand la presse parle de l'accroissement de la consommation des Français, elle parle de ceux-là, de ces centaines de milliers, voire des millions de privilégiés, petits ou grands, de ces gens qui, au-delà de leur diversité, ont en général une chose en commun : ils tirent leurs revenus, directement ou indirectement, de l'exploitation des travailleurs.
Mais où est donc l'amélioration pour nous, les travailleurs ?
S'en prendre à la retraite, est le dernier en date des terrains choisis par le grand patronat dans son offensive contre les travailleurs. Le MEDEF voudrait supprimer la retraite à 60 ans et ne laisser aux travailleurs âgés d'autre alternative que de crever au travail ou partir à la retraite avec une pension amputée.
Mais l'offensive tout azimut contre les conditions d'existence des travailleurs dure depuis bien des années. Le patronat a réussi à maintenir les salaires bas, à démolir la sécurité de l'emploi, à imposer la flexibilité des horaires de travail, à rendre les conditions de travail de plus en plus pénibles. C'est en surexploitant les travailleurs et en appauvrissant le monde du travail que les entreprises capitalistes assurent l'augmentation incessante des profits qui permettent à leurs propriétaires et actionnaires d'accroître leurs fortunes personnelles.
Même pour ce qui est du chômage, en quoi les statistiques qui en indiquent la diminution, peuvent-elles consoler les travailleurs jetés à la rue par de grandes entreprises ?
Car les grandes entreprises, d'Unilever à Bull, en passant par Michelin, Aventis, Moulinex ou Danone, continuent d'annoncer des plans de licenciement. Et si Alstom embauche ici, à Saint-Nazaire, d'ailleurs pas tant que cela en fixe et en touchant des aides de l'Etat, il se prépare en même temps à supprimer des emplois à Belfort et dans la région parisienne.
Le dernier en date des secteurs menacés de suppressions d'emplois massives est la sidérurgie. Les dirigeants des trois trusts qui se préparent à fusionner sous l'égide d'USINOR pour créer la plus puissante entreprise sidérurgique du monde se réjouissent de l'opération. Mais les travailleurs sont déjà avertis : cette fusion, si bénéfique pour les actionnaires, va se traduire par de nouvelles suppressions d'emplois dans une industrie qui, au cours des vingt dernières années, a supprimé 100.000 emplois ! Et, plus les entreprises licenciaient, plus l'Etat les arrosait de milliards. De la reprise des dettes de la sidérurgie par l'Etat au plan "acier", en passant par les nationalisations qui consistaient à racheter à bon prix aux maîtres de forge leurs usines devenues non rentables, l'Etat a donné aux patrons de ce secteur plusieurs fois le prix de leurs usines.
Et, de surcroît, après avoir nationalisé la sidérurgie, l'Etat sous Mitterrand s'est chargé de la sale besogne de licencier, de fermer des usines, de ruiner toute une partie de la Lorraine jusqu'à tant que les usines survivantes deviennent rentables. Alors, on les privatisa de nouveau.
Non seulement les patrons de la sidérurgie sont aujourd'hui à la tête d'entreprises florissantes, mais de plus ils ont pu, avec l'argent de l'Etat, se diversifier, à l'instar du baron Seillière, représentant la famille De Wendel, qui est à la tête d'un holding qui a des intérêts dans l'informatique et dans des compagnies aériennes.
Mais, évidemment, le président du Medef qui se pose en représentant du libéralisme économique et proteste contre les interventions de l'Etat, n'a jamais songé à rendre un seul centime des dizaines de milliards que la famille qu'il représente a empoché de l'Etat sans la moindre contrepartie.
Et que fait Jospin aujourd'hui contre les trusts multimilliardaires en profit et qui licencient quand même ? Absolument rien !
Alors, que valent dans ces conditions les chiffres officiels sur le chômage ? Les statistiques ont donné lieu à de multiples manipulations au fil des années. Mais même si on accepte comme vraie la diminution du nombre de chômeurs dont se vante le gouvernement, qu'est-ce que cette société qui condamne plus de 2 millions de ses membres au chômage, alors qu'on prétend que l'économie va bien ?
Qu'est-ce que cette société qui oblige nombre de ceux qu'elle condamne au chômage à vivre avec les 4.500 francs de l'allocation chômage minimum, allocation dégressive avec le temps. Des chômeurs qui, lorsqu'ils ont épuisé leurs droits, doivent vivre avec les 2.608 F du RMI ?
Et puis, même pour ces 500.000 travailleurs qui, d'après les statistiques gouvernementales, ont retrouvé du travail au cours de l'année, il faut un sacré cynisme pour prétendre que leur situation s'est vraiment améliorée. Car la plupart d'entre eux n'ont retrouvé qu'un travail précaire, en intérim, à temps partiel non choisi, en CDD, en CES, avec un salaire à peine plus élevé que l'allocation chômage ou le RMI.
Le travail en intérim, d'exception, est devenu un mode de fonctionnement normal. Les patrons en escomptent de pouvoir faire varier leurs effectifs en fonction de la production. Ils en espèrent une main-d'oeuvre plus docile, contrainte d'accepter toutes les exigences patronales sous peine d'être immédiatement mis à la porte.
Eh bien, je suis sûre que les patrons finiront par être détrompés ! En 1936, l'écrasante majorité des travailleurs ne bénéficiaient pas de plus de protection que les intérimaires aujourd'hui. Et cela n'a pas empêché l'explosion gréviste de juin 1936 !
Le nombre de ceux qu'on a rayés des statistiques mais qui continuent à alterner des périodes d'emplois précaires avec des périodes de chômage, a doublé en quelques années. Si l'on ajoute ceux qui n'ont que des emplois à temps partiel, on arrive au fait qu'un salarié sur six, près de trois millions de personnes, gagne aujourd'hui moins de 4.900 F net et un salarié sur dix gagne même moins de 3.600 F. Ce qu'on appelle pompeusement la diminution du chômage est, en fait, la diminution du salaire de ceux qui retrouvent un emploi !
A tel point que le gouvernement, après le patronat, ose affirmer qu'il ne faut pas augmenter le RMI, sinon celui qui le touche n'aurait aucune raison d'accepter de travailler avec la rétribution qu'on propose actuellement !
Mais, bien au-delà de ceux qui ne touchent que des salaires qui permettent tout juste de survivre, c'est l'écrasante majorité des travailleurs qui ont un problème de pouvoir d'achat. Car les salaires, même de ceux qui ont un emploi fixe, sont bloqués ou freinés depuis très longtemps alors que les prélèvements ne cessent d'augmenter. Et cela concerne aussi bien les travailleurs du secteur public que ceux du secteur privé.
Le gouvernement témoigne du même mépris que les patrons contre les travailleurs lorsqu'il propose 0,5% d'augmentation à ceux du service public. Comme si les travailleurs du service public étaient trop payés.
Trop payés, une infirmière, un agent hospitalier, un ouvrier du secteur public ? Trop payés les instituteurs, les professeurs, le personnel technique de l'Education nationale, les postiers ? Mais 10 % des employés du secteur public gagnent moins de 6.700 francs net et près de la moitié des effectifs du secteur public gagne moins de 9.600 F net.
Quant aux commentaires venant des milieux patronaux sur le nombre trop élevé de "fonctionnaires" comme ils disent, c'est un mensonge. Il n'y a certainement pas trop de personnel soignant dans les hôpitaux et les maternités publics, certainement pas trop de postiers ou d'ouvriers de l'Equipement. Ces attaques des nantis contre les fonctionnaires expriment surtout leur volonté de faire toujours plus d'économies sur les services publics pour continuer à accroître la part qui, dans le budget, est directement empochée par le patronat.
Le gouvernement évoque le coût trop élevé, pour le budget, de l'augmentation des salaires des travailleurs des services publics. Mais l'Etat n'a pas eu de mal à trouver 50 milliards pour financer l'avion de combat Rafale, c'est-à-dire donner de l'argent à Dassault, Lagardère et deux ou trois autres grands patrons de l'industrie de l'armement. De l'argent donc pour une demi-douzaine de fabricants de mort alors qu'on en refuse aux travailleurs des services publics !
Alors, bien que les syndicats du service public auront attendu près de deux mois pour donner une suite à la grève du 30 janvier qui a été un succès, il faut que celle du 22 mars soit un succès plus grand encore !
Pour stopper l'offensive patronal, seul compte le rapport des forces. Et ce rapport des forces, les travailleurs ne le modifieront que par une lutte d'ensemble de tous les travailleurs, ceux du privé comme du public, toutes catégories confondues.
Le patronat a une politique. Il faudrait que les organisations qui se revendiquent de la classe ouvrière opposent à la politique du patronat une autre politique, celle qui représente les intérêts des travailleurs et qu'elles proposent aux travailleurs des moyens pour l'imposer.
Mais ce n'est pas cela qui se passe. Au meilleur des cas, les organisations syndicales répondent à certaines provocations patronales ponctuelles ou se contentent de les dénoncer. Au pire, elles s'alignent sur la politique patronale et s'en font le porte-voix.
La CGT a claqué la porte, à juste titre, lors des négociations avec le Medef sur les retraites. Elle envisage une journée d'action nationale. Si cela se fait, il faudra, bien sûr, que les travailleurs y participent largement, tout à la fois pour répondre à la provocation patronale mais aussi pour faire pression sur les confédérations syndicales elles-mêmes.
Mais des journées d'action ponctuelles, qui ne s'inscrivent pas dans une perspective, ne suffisent pas. En 1995, la CGT et FO ont montré qu'elles étaient capables d'avoir une stratégie et de proposer des actions qui ont fini par déboucher sur la mobilisation qui a fait échouer le plan Juppé contre les travailleurs du service public. Seulement à l'époque, c'était un gouvernement de droite. Mais il n'y a pas de raison que les travailleurs acceptent plus les coups du patronat sous un gouvernement qui se prétend de gauche que sous un gouvernement de droite.
Nous savons bien qu'une lutte d'ensemble ne se déclenche pas en appuyant sur un bouton. Mais c'est dans cette perspective que devraient travailler tous ceux, syndicats ou partis politiques, qui affirment vouloir améliorer le sort des travailleurs.
Car cette lutte d'ensemble est absolument indispensable si les travailleurs ne veulent pas subir l'aggravation incessante de leurs conditions d'existence.
Et puis, regardons donc à quoi leur sert l'argent qu'on économise franc à franc sur le dos des travailleurs. L'affaire Sirven, ou plus exactement l'affaire de la société pétrolière Elf, lève un petit coin du voile sur les millions gaspillés, mais aussi sur les liens qui existent entre les grandes entreprises et leurs patrons, d'un côté, et l'Etat et les dirigeants politiques, de l'autre.
C'est Sirven qui est accusé d'avoir usé de la corruption à des fins personnelles, mais c'est bien Elf qui consacre une partie de ses profits à constituer des fonds destinés à la corruption, où sont impliqués, pêle-mêle, des hommes de droite et des hommes de la gauche gouvernementale. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que, sur le terrain de la corruption, les uns ne valent pas mieux que les autres.
Et ce sont les mêmes qui encaissent sans honte des pourboires qui se chiffrent par millions qui prêchent l'austérité et les sacrifices à des travailleurs qui gagnent le SMIC ou à peine plus, quand ce n'est pas moins.
Mais, au-delà de ce que la justice considère comme de la corruption, il y a une véritable fusion entre l'Etat et les groupes industriels et financiers les plus puissants. Cette fusion est facilitée encore par les navettes que font les dirigeants politiques entre des places de ministres et des positions de hauts cadres dans des trusts privés. Aubry, qui est passée de la place de directrice du trust Péchiney à la tête du ministère du Travail, ou Pierret de la tête du groupe ACCOR au ministère de l'Industrie sans oublier Balladur, passé de la direction d'énormes sociétés au poste de Premier ministre.
Il y a eu l'affaire des marchés publics de la région parisienne qui a révélé comment le RPR, l'UDF et le PS attribuaient les travaux d'entretien et de rénovation des lycées aux grandes entreprises du bâtiment qui leur versaient, en échange, des dessous de table. Et ces partis, tout clivage politique oublié, s'entendaient pour se répartir l'argent de la corruption.
Puis, il y a l'instruction de l'affaire du trafic d'armes en direction de l'Angola. Là encore, 13 millions de commission pour le fils Mitterrand rien que pour avoir servi d'intermédiaire au trafiquant d'armes Pierre Falcone ! Le plus révoltant dans l'affaire est que pour permettre à Falcone d'empocher de gros bénéfices et au fils Mitterrand, de toucher son pourboire, on maintient les habitants d'un des pays les plus pauvres de la planète dans la misère et dans une guerre permanente !
Cette commission, comme les autres, perçues en tant que conseiller aux affaires africaines, ne suffisait apparemment pas à Jean-Christophe Mitterrand. Le "Canard enchaîné" a révélé qu'entre 1996 et 1997, il a perçu de l'ASSEDIC 336.596 francs d'allocation chômage. Que ceux d'entre vous qui ont été ou sont chômeurs ne s'étonnent pas de n'avoir jamais touché un tel pactole de l'ASSEDIC ! C'est qu'avant d'être officiellement chômeur, Jean-Christophe Mitterrand avait un salaire de 100.000 francs par mois, payé par le trust Générale des eaux, devenue aujourd'hui Vivendi.
Voilà leur monde ! C'est celui des relations mondaines, c'est celui de l'argent facile.
Il y a de quoi être écoeuré de leur hypocrisie, des moeurs de ce monde vénal. Mais, en plus, l'argent dilapidé, c'est sur nous qu'ils le prélèvent ! Quand les travailleurs protestent contre leurs salaires trop bas, on leur reproche de ruiner l'économie. Et tout cela, pour que ces trusts entretiennent ce monde de parasites ! Eh bien, oui, c'est à cette économie, c'est à cette société qu'il faudra mettre fin un jour, et cela viendra, je l'espère, plus tôt que tous ces gens ne le redoutent !
Si l'on veut empêcher les groupes financiers et industriels d'utiliser les profits qu'ils réalisent, à influencer la vie politique plus que les élections ne l'influencent, par la corruption et en achetant les hommes au pouvoir, il faut imposer le contrôle des travailleurs, le contrôle des usagers, le contrôle des consommateurs, sur les comptabilités des entreprises privées comme des entreprises publiques !
Les gouvernements de droite que nous avons connus dans le passé ne se donnaient même pas la peine de cacher leur haine et leur mépris des travailleurs. C'était dans l'ordre des choses. C'est du côté des bourgeois et des patrons, petits et grands, que les partis de droite glanent leurs voix. C'est à eux qu'ils cherchent à plaire.
Mais ce gouvernement dirigé par le Parti socialiste ne mène pas une politique différente quant au fond. Il le fait seulement plus hypocritement, en essayant de présenter chacun de ses mauvais coups comme un geste "social", parce que la seule différence qui sépare les partis de la gauche gouvernementale de la droite, c'est que l'électorat de la gauche vient en grande partie du côté des travailleurs.
Regardons le bilan du gouvernement Jospin. Il continue, comme ses prédécesseurs, à combler le patronat de subventions, d'aides de toutes sortes. Il continue à accorder des dégrèvements sur la part patronale des cotisations sociales, quitte à invoquer ensuite les difficultés financières de la Sécurité sociale pour limiter les dépenses de santé des classes populaires. Il continue à faire des cadeaux fiscaux aux plus riches, comme Fabius en réduisant la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu, quitte à maintenir à un niveau élevé les impôts indirects, la TVA et les taxes pétrolières, qui frappent avant tout, là encore, les classes populaires. C'est pour donner toujours plus au grand patronat qu'on économise sur les services publics et qu'on freine les dépenses pour l'éducation, pour la santé, qu'on limite l'embauche d'enseignants, d'animateurs, d'infirmières, de personnel médical et qu'on ferme des hôpitaux et des maternités.
Quant aux 35 heures, elles coûteront dans les années à venir des centaines de milliards au budget de l'Etat, des milliards qui iront aux patrons sous prétexte de les dédommager d'une loi qui, pourtant, non seulement ne leur fait aucun mal, mais comble leurs voeux en leur permettant d'imposer l'annualisation du temps de travail et la flexibilité accrue des horaires. La meilleure preuve que cela se fait contre les travailleurs, c'est que la plupart des grèves qui se déroulent depuis plusieurs mois sont des grèves contre les modalités d'application des 35 heures dans les entreprises.
Quant aux travailleurs immigrés, transformés en sans-papiers par les lois Pasqua-Debré, on sait ce qu'il est advenu de la régularisation promise par le Parti socialiste. Si une partie a été régularisée, il en reste 63.000 dont la situation s'est aggravée. Ayant donné leur adresse, ils paient aujourd'hui d'avoir cru aux promesses d'un Parti socialiste qui s'est renié, sur cette question comme sur bien d'autres.
Et puis regardez la honteuse comédie que jouent ceux qui nous dirigent à propos des 912 Kurdes qui se sont échoués sur les côtes françaises. Oh, le monde politique est unanime pour dénoncer les trafiquants d'esclaves qui ont encaissé des sommes considérables pour amener ces réfugiés jusqu'aux côtes françaises !
Et, bien sûr, le problème fondamental est ce système économique basé sur l'exploitation et l'oppression qui ne laisse pas, bien souvent, d'autre choix aux victimes que de chercher une amélioration hypothétique de leur sort dans un des pays présumés riches de la planète.
Mais que dire de cette discussion odieuse où, sous prétexte de ne pas encourager les trafiquants, on a cyniquement envisagé de renvoyer leurs victimes ?
Le ministre de l'intérieur vient d'accorder un laisser passer qui permet aux réfugiés de sortir au moins de la caserne où on les avait enfermé. C'est peut-être l'annonce que le gouvernement, tout en jouant les durs, finira par accorder aux réfugiés sinon le droit d'asile, du moins le droit de se déplacer sur le sol européen.
Mais qu'est-ce que cela aurait coûté au gouvernement de faire le geste d'accueillir l'ensemble de ces réfugiés ?
Rien, bien sûr, si ce n'est de perdre quelques centaines de voix du côté de cette fraction obtuse de l'électorat qui a été sensible à la démagogie infecte de Le Pen, ou de Mégret, ou aux discours de Pasqua et De Villiers.
Un problème, un millier de réfugiés, dont la moitié seulement d'adultes ? Mais, au temps où le grand patronat avait besoin de main-d'oeuvre, c'est par trains entiers qu'il importait des travailleurs du Maroc ou de la Turquie ! Et ceux qu'on a fait venir ainsi ont fait plus pour l'économie de ce pays que toutes les familles bourgeoises qui se sont enrichis en parasitant le travail, sans se soucier de la nationalité de leurs exploités. Ces travailleurs immigrés font aujourd'hui partie de la classe ouvrière, au même titre que tous les autres exploités !
Je tiens aussi à réaffirmer que tous ceux qui vivent et travaillent dans ce pays, quelles que soient leurs origines et leur nationalité, doivent avoir le droit de vote. Priver les travailleurs immigrés de ce droit élémentaire est une façon pour la bourgeoisie et ses hommes politiques de réduire l'influence électorale de la classe ouvrière. Alors, cette revendication doit être celle de tous les travailleurs !
(Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 22 février 2001)
Travailleuses, travailleurs,
Nous, Lutte ouvrière, nous nous revendiquons du communisme, c'est-à-dire du courant qui milite pour des transformations sociales radicales. Car cette société est pourrie au dernier degré. Il est indispensable, pour l'avenir de l'humanité, de la changer de fond en comble par l'expropriation de la classe bourgeoise, par la suppression de la propriété privée des grands moyens de production et par la réorganisation de l'économie afin qu'elle fonctionne pour satisfaire les besoins de la collectivité et non pour le profit de quelques-uns.
Malheureusement, le grand parti qui, dans ce pays, porte encore le nom de communiste s'est bien éloigné du communisme, et depuis très longtemps. Aujourd'hui, c'est un parti gouvernemental. Sa politique au gouvernement est celle du Parti socialiste.
Mais, si les chefs du Parti communiste sont identiques aux hommes politiques de la bourgeoisie, la différence, c'est que, même aujourd'hui et malgré des dizaines d'années de trahison des idées communistes de la part de leurs dirigeants, il y a encore des milliers de femmes et d'hommes qui sont dans ce parti parce ce qu'ils aspirent à combattre la bourgeoisie et les riches, et non à les servir comme le font leurs dirigeants.
Ces femmes et ces hommes, ces militants, nous les considérons comme nos frères de combat. Et c'est justement pour cela que nous critiquons leurs dirigeants qui mènent une politique nuisible aux travailleurs et à leurs intérêts. Cette politique d'alignement derrière le Parti socialiste et, au-delà, derrière les intérêts de la bourgeoisie ne date pas de Hue, ni même de Marchais, mais bien du temps de Thorez, du "produire d'abord, revendiquer ensuite" qui permit à la bourgeoisie française d'imposer de lourds sacrifices aux travailleurs au lendemain de la guerre.
La direction du Parti communiste invoque le réalisme et prétend oeuvrer, au sein du gouvernement, pour améliorer le sort des ouvriers. Mais les ministres communistes ne servent qu'à cautionner le gouvernement Jospin.
On ne peut pas tout à la fois servir la bourgeoisie au gouvernement et défendre les intérêts des travailleurs. Et, à pratiquer ce grand écart, le parti finit par écoeurer les travailleurs, à commencer par ses propres militants ouvriers. Or ces militants, malgré la politique de leur parti, continuaient à défendre des valeurs du mouvement ouvrier. Et ils sont de moins en moins nombreux pour accomplir cette tâche.
Pourtant, la classe ouvrière a besoin de militants, a besoin d'organisations qui continuent à perpétuer le mouvement ouvrier organisé, dans les entreprises comme dans les quartiers populaires.
C'est ce que Lutte ouvrière essaie de faire, même avec bien moins de moyens que le Parti communiste.
C'est dans cette optique que Lutte Ouvrière sera présente, partout où cela sera possible, aux prochaines élections municipales. A Saint-Nazaire, notre liste sera conduite par Jean-Claude SAINT-ARROMAN et Marie-France BELIN sera candidate aux cantonales à Sainte Nazaire centre.
Nous ne nous présentons pas parce que nous aurions trouvé un moyen miraculeux pour mettre fin à la pauvreté et à l'exploitation dans le cadre d'une municipalité. Ce moyen n'existe pas. Les principaux problèmes des travailleurs, ici comme ailleurs, viennent du chômage, des bas salaires, de la morgue patronale.
Parmi toutes les institutions de cette société bourgeoise, les municipalités sont pourtant celles qui sont les plus proches de la population, les plus à même d'en connaître les problèmes quotidiens et, dans les petites villes en tout cas, les plus faciles à être soumises au contrôle de la population. C'est justement la raison qui fait que l'Etat a toujours cherché à rendre les municipalités les plus indépendantes possible de la population et dépendantes de l'Etat. Le mode de scrutin défavorise les minorités en assurant une sur-représentation à la liste arrivée en tête et se conjugue avec la loi pour donner au maire un pouvoir quasi absolu par rapport à la population de sa commune et même par rapport aux conseillers municipaux, tout en le rendant responsable devant le préfet. Il est significatif que le pouvoir central ait le droit de suspendre ou de révoquer un maire, voire même de dissoudre un conseil municipal, mais que la population, elle, n'ait aucun moyen de révoquer un maire dont elle n'est pas satisfaite pendant les six ans de sa mandature.
Dans ces élections, il n'est pas question évidemment de voter pour les ennemis ouverts des travailleurs que sont les partis de droite et à infiniment plus forte raison, pour les ennemis mortels que sont les partis d'extrême-droite. Mais il n'est pas de l'intérêt des électeurs des classes laborieuses de voter pour les candidats qui soutiennent même indirectement la politique du gouvernement, car ce serait cautionner sa politique anti-ouvrière.
Lutte Ouvrière présente des listes dans ces élections pour que les électeurs puissent exprimer leur rejet de la politique du gouvernement, en montrant clairement que ce rejet vient du côté du monde du travail.
Nous nous présentons pour dénoncer la situation qui est faite aux travailleurs et pour dénoncer les responsables de cette situation.
Nous nous présentons pour faire entendre les exigences du monde du travail, fermement, sans que cela puisse être récupéré ni par la droite, ni par la gauche gouvernementale, ni au premier, ni au deuxième tour.
Non seulement, nous ne participons au premier tour à aucune coalition électorale mais, si nous sommes présents au deuxième tour, nous ne ferons alliance avec aucune des formations qui ont une responsabilité quelconque dans les gouvernements d'hier, et d'aujourd'hui.
Tous ces gens-là n'en ont rien à faire de la dégradation de la condition ouvrière au profit du patronat. Ils voudraient bien pourtant assurer leur place de Maire et le pouvoir qui va avec grâce aux votes des travailleurs. Eh bien, qu'ils ne comptent pas sur nous, ni pour cautionner le gouvernement qu'ils soutiennent, ni pour les installer ou les conforter dans les postes qui les intéressent. Les travailleurs n'ont pas à dire merci, lors des élections, à ceux qui non seulement ne les défendent pas contre les coups du patronat le reste de temps mais leur portent eux-mêmes des coups.
Et si les électeurs sont nombreux à faire le geste politique de voter pour les listes Lutte Ouvrière, cela aura une grande importance pour les combats à venir du monde du travail.
En élisant nos candidats, ils enverront au conseil municipal des élus dont ils pourront être sûrs qu'ils représenteront leurs intérêts. Car ceux qui sont sur nos listes ne poursuivent pas une carrière, ils ne sont liés à aucun grand parti gouvernemental, ils n'ont aucun fil à la patte. Ils sont libres de dénoncer toutes les magouilles, tous les cadeaux faits aux entreprises capitalistes par la municipalité, soit lorsqu'elle leur livre des services essentiels, comme la distribution de l'eau ou les transports publics, soit lorsqu'elle facilite leur installation par des détaxes, par des terrains viabilisés au frais de la commune vendus au franc symbolique.
Eh bien, les élus Lutte ouvrière se considèrent avant tout comme les représentants de la population laborieuse, des travailleurs et des chômeurs ! Ce sont leurs intérêts qu'ils défendront en priorité.
Si les élus Lutte ouvrière sont suffisamment nombreux, ce qui implique déjà une solidarité, un accord avec leurs idées d'une partie de l'électorat, ils chercheront à entraîner l'intervention directe de la population elle-même : pour qu'elle surveille la gestion de la municipalité et exerce la pression qu'il faut, par ses mobilisations, par des manifestations, pour que ses intérêts soient pris en compte. Ils populariseront l'idée que la population a les moyens de prendre des initiatives dans les affaires publiques qui la concernent. Dans tous les domaines où faire se peut, ils feront appel à la participation de tous. Je ne prendrai que deux exemples.
Tout le monde, ou plus exactement tous ceux qui connaissent les quartiers populaires, déplore qu'en raison des classes surchargées et de bien d'autres choses, les enfants de ces quartiers sortent souvent de l'école primaire sans avoir appris à lire, à écrire ou à s'exprimer correctement. Un grand nombre d'entre eux, quand ils ont appris quelque chose une année, régressent l'année suivante, quand certains ne retournent pas à l'analphabétisme.
Eh bien oui, des conseillers municipaux, même minoritaires mais disposant d'un soutien dans la population, pourraient faire appel à la population, à ceux en tout cas qui ont une certaine compétence, des retraités, des parents d'élèves ou des étudiants, pour aider les instituteurs, en prenant à part les élèves à problèmes, par petits groupes, voire par groupes de langue d'origine. Cela ne pallierait certainement pas l'insuffisance d'instituteurs, dont il faudrait continuer à revendiquer l'embauche en faisant sur l'Etat la pression nécessaire, y compris et surtout en mobilisant la population. Mais cela permettrait aux enseignants d'être secondés et donc plus efficaces et de faire autre chose que de la garderie.
Mais il y aurait aussi une politique à mener par rapport aux jeunes des quartiers populaires, entraînés dans la violence gratuite voire dans la délinquance ; délinquance dont les habitants de ces quartiers, y compris leurs propres parents, sont les principales victimes.
A qui faire croire que c'est seulement un problème de police ? Et qu'un millier de policiers de plus à l'échelle du pays, même flanqués de 5.000 emplois jeunes en uniforme, comme le propose le gouvernement, suffiraient pour répondre à la montée de la violence ou de la délinquance dans la jeunesse ?
Je sais que, dans bien des circonstances, la présence d'îlotiers, proches de la population, peut décourager la petite délinquance et, en tout cas, rassurer celles et ceux qui en sont victimes. Mais il suffit d'une poignée de policiers, racistes ou anti-jeunes pour que toute présence policière, même de proximité soit ressentie comme une provocation par l'ensemble des jeunes d'un quartier.
Et surtout, comment se fait-il que ce sont les petits caïds comme il en a toujours existé dans les banlieues ou des dealers, qui imposent leur loi, leurs moeurs, leurs violences dans bien des cités HLM ? Pourquoi ne parvient-on pas à isoler de la majorité des jeunes, cette petite minorité qui préfère dealer, trafiquer c'est à dire vivre en petit parasite sur plus pauvres qu'eux ?
Eh bien, il ne suffit pas de faire donner la police, pour résoudre ces problèmes !
Avant tout, il faudrait que les jeunes aient d'autres perspectives que de commencer leur vie d'adulte en tant que chômeurs !
Et puis, il faudrait dans les quartiers populaires plus d'équipements collectifs, plus de locaux réservés aux jeunes, plus d'animateurs, plus d'éducateurs ! Incapable d'assurer ces 90 % de social qui seraient nécessaires pour que les jeunes ne soient pas entraînés par une poignée de caïds, on fait 90 % de répression policière.
Bien sûr, les habitants d'un quartier dit sensible n'ont pas les moyens de mettre fin aux causes fondamentales de la violence des jeunes, le chômage et la pauvreté. Mais ils peuvent, collectivement, assurer la formation de la conscience et de la morale des adolescents et peser sur leur comportement. Il ne s'agit pas de jouer les zorros la nuit dans les cages d'escalier ou dans les caves d'un HLM. Il s'agit d'amener le maximum d'adultes à intervenir auprès des jeunes, quand ils en ont la possibilité, d'user de leur autorité pour les convaincre, pour les éduquer gentiment, par des petits gestes quotidiens. Une seule observation venant d'un adulte pour demander à un groupe d'adolescents de ne pas laisser traîner des canettes de bière ou des mégots de cigarette dans les parties collectives de l'immeuble entraîne bien souvent des réflexions désobligeantes voire des insultes. Mais si ce type d'intervention ne se limite pas à celle du gardien, si nombreux sont les adultes qui ne restent pas passifs, il y aura sans doute, à la longue, moyen de changer bien des comportements.
Mais pour que cette pression collective soit efficace, il faut que la collectivité combatte en même temps dans ses propres rangs tous les préjugés qui la divisent, à commencer par les préjugés racistes et chauvins. Et il faut aussi que la population des quartiers pauvres surveille et contrôle en même temps les policiers, pour réagir contre ceux qui se permettent des réflexions et des comportements racistes. Un contrôle d'identité au faciès suffit pour que tous les jeunes se sentent, à juste titre, agressés.
Eh bien, les conseillers municipaux de Lutte ouvrière oeuvreraient pour qu'émerge, dans les quartiers populaires, là où l'écrasante majorité est constituée de travailleurs, une conscience collective, la conscience d'intérêts communs.
La seule pression morale de la collectivité ne sera sans doute pas suffisante pour convaincre les dealers et les caïds. Mais la seule voie pour les marginaliser et pour contrecarrer leur influence, c'est d'opposer à leur pouvoir sur les jeunes, le pouvoir de la collectivité !
Une fois cette minorité isolée, la collectivité dispose de bien des moyens, y compris physiques en cas de nécessité, pour empêcher quelques petits voyous ou quelques imbéciles d'agresser par exemple les chauffeurs de l'unique ligne d'autobus qui dessert le quartier ou de brûler des voitures qui, dans les quartiers pauvres, sont celles de travailleurs ou de chômeurs.
Au temps où le mouvement ouvrier était plus puissant qu'il ne l'est aujourd'hui, où le Parti socialiste était réellement socialiste, où le Parti communiste était vraiment communiste, il y avait des militants, des sympathisants dans les quartiers populaires qui, par leur seule présence, par leur capacité d'entraînement, influençaient le climat et les comportements aussi bien sur le plan politique, contre la xénophobie et le racisme, que sur le plan des comportements sociaux, du vandalisme gratuit à l'alcoolisme. Et ils le faisaient, non pas en faisant appel aux autorités, mais en faisant appel à la conscience de classe, et à la participation des gens eux-mêmes à la solution de leurs propres problèmes.
Ce ne sont évidement pas ces élections qui changeront la situation générale de la classe ouvrière. Le véritable combat devra se dérouler, avec les méthodes du mouvement ouvrier, avec les grèves et les manifestations. Pas seulement ici, bien sûr, mais à l'échelle de l'ensemble du pays. Cela arrivera, car c'est, peut-être, précisément le décalage, la contradiction flagrante entre les discours gouvernementaux d'autosatisfaction et l'aggravation du sort des ouvriers qui poussera les exploités à la révolte.
Mais les élections constituent l'occasion d'affirmer une politique.
Depuis des années, l'alternance de la droite et de la gauche gouvernementale au pouvoir ne change rien pour la population laborieuse. Eh bien, il faut un autre choix pour les travailleurs !
Voter pour les listes Lutte ouvrière, c'est affirmer avec nous la volonté d'imposer une autre politique :
- la réquisition des entreprises qui font des bénéfices et suppriment des emplois ;
- l'arrêt des cadeaux aux grandes entreprises ;
- la diminution des impôts payés par les salariés, la suppression des impôts indirects sur la consommation comme la TVA et une taxation accrue sur les bénéfices des sociétés et sur les revenus du capital ;
- la création des emplois nécessaires dans les services publics et les collectivités ;
- la revalorisation des bas salaires, des pensions et des retraites.
Alors, je vous demande d'aider Lutte ouvrière à défendre la politique au nom de laquelle elle se présente auprès de tous les travailleurs, et de toute la population de cette ville. Je vous demande de convaincre vos proches, vos amis, vos camarades de travail, de voter et de faire voter pour la liste Lutte ouvrière conduite par Jean-Claude SAINT-ARROMAN !
Et je vous demande, bien au-delà de ces élections municipales, de nous aider pour que se renforce un courant dont l'unique objectif est de défendre les intérêts politiques des travailleurs et des classes pauvres.
(Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 22 février 2001 )
au meeting du Mercredi 21 février 2001 à Saint-Nazaire
Travailleuses, travailleurs, camarades et amis.
Les élections municipales n'ont pas seulement pour enjeu de déterminer qui sera l'homme politique qui va diriger la municipalité pendant les six ans à venir. Oh, bien sûr, du point de vue de ceux qui sont en rivalité pour conquérir une mairie, la question est d'importance. Pour certains, devenir maire d'une grande ville est un pas décisif pour leur carrière de politicien. Pour tous, gérer la mairie d'une grande ville, c'est gérer en même temps des budgets importants, décider de leur affectation, de l'attribution des services municipaux comme la gestion de l'eau, le ramassage des ordures, l'organisation des transports publics ou des cantines scolaires. Diriger une mairie, c'est détenir une puissance économique et sociale, pour soi-même et pour ceux qu'on entend favoriser.
Mais il est évident aussi que ces élections auront une portée nationale.
Pour les grands partis de la droite ou de la gauche gouvernementale qui aspirent à servir la bourgeoisie à l'échelle de l'ensemble du pays, les résultats des élections municipales serviront à en tirer des conclusions générales et à préparer les élections de 2002, celle du président de la République et celle des députés.
Si les résultats des élections municipales indiquent une progression des partis de droite, ceux-ci en tireront comme conclusion que la population souhaite leur retour au gouvernement pour qu'ils mènent la politique qui a été la leur sous Balladur et sous Juppé, une politique ouvertement en faveur du grand patronat.
Si la gauche gouvernementale progresse, elle n'hésitera pas à présenter ce succès comme une approbation populaire de la politique menée par Jospin depuis 1997 en feignant d'ignorer que, si la population laborieuse a voté pour elle, c'est en grande partie pour ne pas voter pour la droite.
Le gouvernement Jospin est fier de son bilan. Il s'attribue les mérites de ce qu'il appelle la "croissance économique", et en particulier la diminution du chômage.
Oh, c'est incontestable, les grandes entreprises ont toutes les raisons de considérer que la période est florissante ! Leurs bénéfices battent des records depuis plusieurs années. Elles se livrent à des opérations de rachat et de fusion gigantesques tant leurs disponibilités financières sont énormes.
La situation économique s'est améliorée aussi pour tous ces bourgeois moyens et petits qui constituent la clientèle des restaurants et des boutiques de luxe, qui ont une vie aisée, des voitures haut de gamme, des propriétés un peu partout. Quand la presse parle de l'accroissement de la consommation des Français, elle parle de ceux-là, de ces centaines de milliers, voire des millions de privilégiés, petits ou grands, de ces gens qui, au-delà de leur diversité, ont en général une chose en commun : ils tirent leurs revenus, directement ou indirectement, de l'exploitation des travailleurs.
Mais où est donc l'amélioration pour nous, les travailleurs ?
S'en prendre à la retraite, est le dernier en date des terrains choisis par le grand patronat dans son offensive contre les travailleurs. Le MEDEF voudrait supprimer la retraite à 60 ans et ne laisser aux travailleurs âgés d'autre alternative que de crever au travail ou partir à la retraite avec une pension amputée.
Mais l'offensive tout azimut contre les conditions d'existence des travailleurs dure depuis bien des années. Le patronat a réussi à maintenir les salaires bas, à démolir la sécurité de l'emploi, à imposer la flexibilité des horaires de travail, à rendre les conditions de travail de plus en plus pénibles. C'est en surexploitant les travailleurs et en appauvrissant le monde du travail que les entreprises capitalistes assurent l'augmentation incessante des profits qui permettent à leurs propriétaires et actionnaires d'accroître leurs fortunes personnelles.
Même pour ce qui est du chômage, en quoi les statistiques qui en indiquent la diminution, peuvent-elles consoler les travailleurs jetés à la rue par de grandes entreprises ?
Car les grandes entreprises, d'Unilever à Bull, en passant par Michelin, Aventis, Moulinex ou Danone, continuent d'annoncer des plans de licenciement. Et si Alstom embauche ici, à Saint-Nazaire, d'ailleurs pas tant que cela en fixe et en touchant des aides de l'Etat, il se prépare en même temps à supprimer des emplois à Belfort et dans la région parisienne.
Le dernier en date des secteurs menacés de suppressions d'emplois massives est la sidérurgie. Les dirigeants des trois trusts qui se préparent à fusionner sous l'égide d'USINOR pour créer la plus puissante entreprise sidérurgique du monde se réjouissent de l'opération. Mais les travailleurs sont déjà avertis : cette fusion, si bénéfique pour les actionnaires, va se traduire par de nouvelles suppressions d'emplois dans une industrie qui, au cours des vingt dernières années, a supprimé 100.000 emplois ! Et, plus les entreprises licenciaient, plus l'Etat les arrosait de milliards. De la reprise des dettes de la sidérurgie par l'Etat au plan "acier", en passant par les nationalisations qui consistaient à racheter à bon prix aux maîtres de forge leurs usines devenues non rentables, l'Etat a donné aux patrons de ce secteur plusieurs fois le prix de leurs usines.
Et, de surcroît, après avoir nationalisé la sidérurgie, l'Etat sous Mitterrand s'est chargé de la sale besogne de licencier, de fermer des usines, de ruiner toute une partie de la Lorraine jusqu'à tant que les usines survivantes deviennent rentables. Alors, on les privatisa de nouveau.
Non seulement les patrons de la sidérurgie sont aujourd'hui à la tête d'entreprises florissantes, mais de plus ils ont pu, avec l'argent de l'Etat, se diversifier, à l'instar du baron Seillière, représentant la famille De Wendel, qui est à la tête d'un holding qui a des intérêts dans l'informatique et dans des compagnies aériennes.
Mais, évidemment, le président du Medef qui se pose en représentant du libéralisme économique et proteste contre les interventions de l'Etat, n'a jamais songé à rendre un seul centime des dizaines de milliards que la famille qu'il représente a empoché de l'Etat sans la moindre contrepartie.
Et que fait Jospin aujourd'hui contre les trusts multimilliardaires en profit et qui licencient quand même ? Absolument rien !
Alors, que valent dans ces conditions les chiffres officiels sur le chômage ? Les statistiques ont donné lieu à de multiples manipulations au fil des années. Mais même si on accepte comme vraie la diminution du nombre de chômeurs dont se vante le gouvernement, qu'est-ce que cette société qui condamne plus de 2 millions de ses membres au chômage, alors qu'on prétend que l'économie va bien ?
Qu'est-ce que cette société qui oblige nombre de ceux qu'elle condamne au chômage à vivre avec les 4.500 francs de l'allocation chômage minimum, allocation dégressive avec le temps. Des chômeurs qui, lorsqu'ils ont épuisé leurs droits, doivent vivre avec les 2.608 F du RMI ?
Et puis, même pour ces 500.000 travailleurs qui, d'après les statistiques gouvernementales, ont retrouvé du travail au cours de l'année, il faut un sacré cynisme pour prétendre que leur situation s'est vraiment améliorée. Car la plupart d'entre eux n'ont retrouvé qu'un travail précaire, en intérim, à temps partiel non choisi, en CDD, en CES, avec un salaire à peine plus élevé que l'allocation chômage ou le RMI.
Le travail en intérim, d'exception, est devenu un mode de fonctionnement normal. Les patrons en escomptent de pouvoir faire varier leurs effectifs en fonction de la production. Ils en espèrent une main-d'oeuvre plus docile, contrainte d'accepter toutes les exigences patronales sous peine d'être immédiatement mis à la porte.
Eh bien, je suis sûre que les patrons finiront par être détrompés ! En 1936, l'écrasante majorité des travailleurs ne bénéficiaient pas de plus de protection que les intérimaires aujourd'hui. Et cela n'a pas empêché l'explosion gréviste de juin 1936 !
Le nombre de ceux qu'on a rayés des statistiques mais qui continuent à alterner des périodes d'emplois précaires avec des périodes de chômage, a doublé en quelques années. Si l'on ajoute ceux qui n'ont que des emplois à temps partiel, on arrive au fait qu'un salarié sur six, près de trois millions de personnes, gagne aujourd'hui moins de 4.900 F net et un salarié sur dix gagne même moins de 3.600 F. Ce qu'on appelle pompeusement la diminution du chômage est, en fait, la diminution du salaire de ceux qui retrouvent un emploi !
A tel point que le gouvernement, après le patronat, ose affirmer qu'il ne faut pas augmenter le RMI, sinon celui qui le touche n'aurait aucune raison d'accepter de travailler avec la rétribution qu'on propose actuellement !
Mais, bien au-delà de ceux qui ne touchent que des salaires qui permettent tout juste de survivre, c'est l'écrasante majorité des travailleurs qui ont un problème de pouvoir d'achat. Car les salaires, même de ceux qui ont un emploi fixe, sont bloqués ou freinés depuis très longtemps alors que les prélèvements ne cessent d'augmenter. Et cela concerne aussi bien les travailleurs du secteur public que ceux du secteur privé.
Le gouvernement témoigne du même mépris que les patrons contre les travailleurs lorsqu'il propose 0,5% d'augmentation à ceux du service public. Comme si les travailleurs du service public étaient trop payés.
Trop payés, une infirmière, un agent hospitalier, un ouvrier du secteur public ? Trop payés les instituteurs, les professeurs, le personnel technique de l'Education nationale, les postiers ? Mais 10 % des employés du secteur public gagnent moins de 6.700 francs net et près de la moitié des effectifs du secteur public gagne moins de 9.600 F net.
Quant aux commentaires venant des milieux patronaux sur le nombre trop élevé de "fonctionnaires" comme ils disent, c'est un mensonge. Il n'y a certainement pas trop de personnel soignant dans les hôpitaux et les maternités publics, certainement pas trop de postiers ou d'ouvriers de l'Equipement. Ces attaques des nantis contre les fonctionnaires expriment surtout leur volonté de faire toujours plus d'économies sur les services publics pour continuer à accroître la part qui, dans le budget, est directement empochée par le patronat.
Le gouvernement évoque le coût trop élevé, pour le budget, de l'augmentation des salaires des travailleurs des services publics. Mais l'Etat n'a pas eu de mal à trouver 50 milliards pour financer l'avion de combat Rafale, c'est-à-dire donner de l'argent à Dassault, Lagardère et deux ou trois autres grands patrons de l'industrie de l'armement. De l'argent donc pour une demi-douzaine de fabricants de mort alors qu'on en refuse aux travailleurs des services publics !
Alors, bien que les syndicats du service public auront attendu près de deux mois pour donner une suite à la grève du 30 janvier qui a été un succès, il faut que celle du 22 mars soit un succès plus grand encore !
Pour stopper l'offensive patronal, seul compte le rapport des forces. Et ce rapport des forces, les travailleurs ne le modifieront que par une lutte d'ensemble de tous les travailleurs, ceux du privé comme du public, toutes catégories confondues.
Le patronat a une politique. Il faudrait que les organisations qui se revendiquent de la classe ouvrière opposent à la politique du patronat une autre politique, celle qui représente les intérêts des travailleurs et qu'elles proposent aux travailleurs des moyens pour l'imposer.
Mais ce n'est pas cela qui se passe. Au meilleur des cas, les organisations syndicales répondent à certaines provocations patronales ponctuelles ou se contentent de les dénoncer. Au pire, elles s'alignent sur la politique patronale et s'en font le porte-voix.
La CGT a claqué la porte, à juste titre, lors des négociations avec le Medef sur les retraites. Elle envisage une journée d'action nationale. Si cela se fait, il faudra, bien sûr, que les travailleurs y participent largement, tout à la fois pour répondre à la provocation patronale mais aussi pour faire pression sur les confédérations syndicales elles-mêmes.
Mais des journées d'action ponctuelles, qui ne s'inscrivent pas dans une perspective, ne suffisent pas. En 1995, la CGT et FO ont montré qu'elles étaient capables d'avoir une stratégie et de proposer des actions qui ont fini par déboucher sur la mobilisation qui a fait échouer le plan Juppé contre les travailleurs du service public. Seulement à l'époque, c'était un gouvernement de droite. Mais il n'y a pas de raison que les travailleurs acceptent plus les coups du patronat sous un gouvernement qui se prétend de gauche que sous un gouvernement de droite.
Nous savons bien qu'une lutte d'ensemble ne se déclenche pas en appuyant sur un bouton. Mais c'est dans cette perspective que devraient travailler tous ceux, syndicats ou partis politiques, qui affirment vouloir améliorer le sort des travailleurs.
Car cette lutte d'ensemble est absolument indispensable si les travailleurs ne veulent pas subir l'aggravation incessante de leurs conditions d'existence.
Et puis, regardons donc à quoi leur sert l'argent qu'on économise franc à franc sur le dos des travailleurs. L'affaire Sirven, ou plus exactement l'affaire de la société pétrolière Elf, lève un petit coin du voile sur les millions gaspillés, mais aussi sur les liens qui existent entre les grandes entreprises et leurs patrons, d'un côté, et l'Etat et les dirigeants politiques, de l'autre.
C'est Sirven qui est accusé d'avoir usé de la corruption à des fins personnelles, mais c'est bien Elf qui consacre une partie de ses profits à constituer des fonds destinés à la corruption, où sont impliqués, pêle-mêle, des hommes de droite et des hommes de la gauche gouvernementale. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que, sur le terrain de la corruption, les uns ne valent pas mieux que les autres.
Et ce sont les mêmes qui encaissent sans honte des pourboires qui se chiffrent par millions qui prêchent l'austérité et les sacrifices à des travailleurs qui gagnent le SMIC ou à peine plus, quand ce n'est pas moins.
Mais, au-delà de ce que la justice considère comme de la corruption, il y a une véritable fusion entre l'Etat et les groupes industriels et financiers les plus puissants. Cette fusion est facilitée encore par les navettes que font les dirigeants politiques entre des places de ministres et des positions de hauts cadres dans des trusts privés. Aubry, qui est passée de la place de directrice du trust Péchiney à la tête du ministère du Travail, ou Pierret de la tête du groupe ACCOR au ministère de l'Industrie sans oublier Balladur, passé de la direction d'énormes sociétés au poste de Premier ministre.
Il y a eu l'affaire des marchés publics de la région parisienne qui a révélé comment le RPR, l'UDF et le PS attribuaient les travaux d'entretien et de rénovation des lycées aux grandes entreprises du bâtiment qui leur versaient, en échange, des dessous de table. Et ces partis, tout clivage politique oublié, s'entendaient pour se répartir l'argent de la corruption.
Puis, il y a l'instruction de l'affaire du trafic d'armes en direction de l'Angola. Là encore, 13 millions de commission pour le fils Mitterrand rien que pour avoir servi d'intermédiaire au trafiquant d'armes Pierre Falcone ! Le plus révoltant dans l'affaire est que pour permettre à Falcone d'empocher de gros bénéfices et au fils Mitterrand, de toucher son pourboire, on maintient les habitants d'un des pays les plus pauvres de la planète dans la misère et dans une guerre permanente !
Cette commission, comme les autres, perçues en tant que conseiller aux affaires africaines, ne suffisait apparemment pas à Jean-Christophe Mitterrand. Le "Canard enchaîné" a révélé qu'entre 1996 et 1997, il a perçu de l'ASSEDIC 336.596 francs d'allocation chômage. Que ceux d'entre vous qui ont été ou sont chômeurs ne s'étonnent pas de n'avoir jamais touché un tel pactole de l'ASSEDIC ! C'est qu'avant d'être officiellement chômeur, Jean-Christophe Mitterrand avait un salaire de 100.000 francs par mois, payé par le trust Générale des eaux, devenue aujourd'hui Vivendi.
Voilà leur monde ! C'est celui des relations mondaines, c'est celui de l'argent facile.
Il y a de quoi être écoeuré de leur hypocrisie, des moeurs de ce monde vénal. Mais, en plus, l'argent dilapidé, c'est sur nous qu'ils le prélèvent ! Quand les travailleurs protestent contre leurs salaires trop bas, on leur reproche de ruiner l'économie. Et tout cela, pour que ces trusts entretiennent ce monde de parasites ! Eh bien, oui, c'est à cette économie, c'est à cette société qu'il faudra mettre fin un jour, et cela viendra, je l'espère, plus tôt que tous ces gens ne le redoutent !
Si l'on veut empêcher les groupes financiers et industriels d'utiliser les profits qu'ils réalisent, à influencer la vie politique plus que les élections ne l'influencent, par la corruption et en achetant les hommes au pouvoir, il faut imposer le contrôle des travailleurs, le contrôle des usagers, le contrôle des consommateurs, sur les comptabilités des entreprises privées comme des entreprises publiques !
Les gouvernements de droite que nous avons connus dans le passé ne se donnaient même pas la peine de cacher leur haine et leur mépris des travailleurs. C'était dans l'ordre des choses. C'est du côté des bourgeois et des patrons, petits et grands, que les partis de droite glanent leurs voix. C'est à eux qu'ils cherchent à plaire.
Mais ce gouvernement dirigé par le Parti socialiste ne mène pas une politique différente quant au fond. Il le fait seulement plus hypocritement, en essayant de présenter chacun de ses mauvais coups comme un geste "social", parce que la seule différence qui sépare les partis de la gauche gouvernementale de la droite, c'est que l'électorat de la gauche vient en grande partie du côté des travailleurs.
Regardons le bilan du gouvernement Jospin. Il continue, comme ses prédécesseurs, à combler le patronat de subventions, d'aides de toutes sortes. Il continue à accorder des dégrèvements sur la part patronale des cotisations sociales, quitte à invoquer ensuite les difficultés financières de la Sécurité sociale pour limiter les dépenses de santé des classes populaires. Il continue à faire des cadeaux fiscaux aux plus riches, comme Fabius en réduisant la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu, quitte à maintenir à un niveau élevé les impôts indirects, la TVA et les taxes pétrolières, qui frappent avant tout, là encore, les classes populaires. C'est pour donner toujours plus au grand patronat qu'on économise sur les services publics et qu'on freine les dépenses pour l'éducation, pour la santé, qu'on limite l'embauche d'enseignants, d'animateurs, d'infirmières, de personnel médical et qu'on ferme des hôpitaux et des maternités.
Quant aux 35 heures, elles coûteront dans les années à venir des centaines de milliards au budget de l'Etat, des milliards qui iront aux patrons sous prétexte de les dédommager d'une loi qui, pourtant, non seulement ne leur fait aucun mal, mais comble leurs voeux en leur permettant d'imposer l'annualisation du temps de travail et la flexibilité accrue des horaires. La meilleure preuve que cela se fait contre les travailleurs, c'est que la plupart des grèves qui se déroulent depuis plusieurs mois sont des grèves contre les modalités d'application des 35 heures dans les entreprises.
Quant aux travailleurs immigrés, transformés en sans-papiers par les lois Pasqua-Debré, on sait ce qu'il est advenu de la régularisation promise par le Parti socialiste. Si une partie a été régularisée, il en reste 63.000 dont la situation s'est aggravée. Ayant donné leur adresse, ils paient aujourd'hui d'avoir cru aux promesses d'un Parti socialiste qui s'est renié, sur cette question comme sur bien d'autres.
Et puis regardez la honteuse comédie que jouent ceux qui nous dirigent à propos des 912 Kurdes qui se sont échoués sur les côtes françaises. Oh, le monde politique est unanime pour dénoncer les trafiquants d'esclaves qui ont encaissé des sommes considérables pour amener ces réfugiés jusqu'aux côtes françaises !
Et, bien sûr, le problème fondamental est ce système économique basé sur l'exploitation et l'oppression qui ne laisse pas, bien souvent, d'autre choix aux victimes que de chercher une amélioration hypothétique de leur sort dans un des pays présumés riches de la planète.
Mais que dire de cette discussion odieuse où, sous prétexte de ne pas encourager les trafiquants, on a cyniquement envisagé de renvoyer leurs victimes ?
Le ministre de l'intérieur vient d'accorder un laisser passer qui permet aux réfugiés de sortir au moins de la caserne où on les avait enfermé. C'est peut-être l'annonce que le gouvernement, tout en jouant les durs, finira par accorder aux réfugiés sinon le droit d'asile, du moins le droit de se déplacer sur le sol européen.
Mais qu'est-ce que cela aurait coûté au gouvernement de faire le geste d'accueillir l'ensemble de ces réfugiés ?
Rien, bien sûr, si ce n'est de perdre quelques centaines de voix du côté de cette fraction obtuse de l'électorat qui a été sensible à la démagogie infecte de Le Pen, ou de Mégret, ou aux discours de Pasqua et De Villiers.
Un problème, un millier de réfugiés, dont la moitié seulement d'adultes ? Mais, au temps où le grand patronat avait besoin de main-d'oeuvre, c'est par trains entiers qu'il importait des travailleurs du Maroc ou de la Turquie ! Et ceux qu'on a fait venir ainsi ont fait plus pour l'économie de ce pays que toutes les familles bourgeoises qui se sont enrichis en parasitant le travail, sans se soucier de la nationalité de leurs exploités. Ces travailleurs immigrés font aujourd'hui partie de la classe ouvrière, au même titre que tous les autres exploités !
Je tiens aussi à réaffirmer que tous ceux qui vivent et travaillent dans ce pays, quelles que soient leurs origines et leur nationalité, doivent avoir le droit de vote. Priver les travailleurs immigrés de ce droit élémentaire est une façon pour la bourgeoisie et ses hommes politiques de réduire l'influence électorale de la classe ouvrière. Alors, cette revendication doit être celle de tous les travailleurs !
(Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 22 février 2001)
Travailleuses, travailleurs,
Nous, Lutte ouvrière, nous nous revendiquons du communisme, c'est-à-dire du courant qui milite pour des transformations sociales radicales. Car cette société est pourrie au dernier degré. Il est indispensable, pour l'avenir de l'humanité, de la changer de fond en comble par l'expropriation de la classe bourgeoise, par la suppression de la propriété privée des grands moyens de production et par la réorganisation de l'économie afin qu'elle fonctionne pour satisfaire les besoins de la collectivité et non pour le profit de quelques-uns.
Malheureusement, le grand parti qui, dans ce pays, porte encore le nom de communiste s'est bien éloigné du communisme, et depuis très longtemps. Aujourd'hui, c'est un parti gouvernemental. Sa politique au gouvernement est celle du Parti socialiste.
Mais, si les chefs du Parti communiste sont identiques aux hommes politiques de la bourgeoisie, la différence, c'est que, même aujourd'hui et malgré des dizaines d'années de trahison des idées communistes de la part de leurs dirigeants, il y a encore des milliers de femmes et d'hommes qui sont dans ce parti parce ce qu'ils aspirent à combattre la bourgeoisie et les riches, et non à les servir comme le font leurs dirigeants.
Ces femmes et ces hommes, ces militants, nous les considérons comme nos frères de combat. Et c'est justement pour cela que nous critiquons leurs dirigeants qui mènent une politique nuisible aux travailleurs et à leurs intérêts. Cette politique d'alignement derrière le Parti socialiste et, au-delà, derrière les intérêts de la bourgeoisie ne date pas de Hue, ni même de Marchais, mais bien du temps de Thorez, du "produire d'abord, revendiquer ensuite" qui permit à la bourgeoisie française d'imposer de lourds sacrifices aux travailleurs au lendemain de la guerre.
La direction du Parti communiste invoque le réalisme et prétend oeuvrer, au sein du gouvernement, pour améliorer le sort des ouvriers. Mais les ministres communistes ne servent qu'à cautionner le gouvernement Jospin.
On ne peut pas tout à la fois servir la bourgeoisie au gouvernement et défendre les intérêts des travailleurs. Et, à pratiquer ce grand écart, le parti finit par écoeurer les travailleurs, à commencer par ses propres militants ouvriers. Or ces militants, malgré la politique de leur parti, continuaient à défendre des valeurs du mouvement ouvrier. Et ils sont de moins en moins nombreux pour accomplir cette tâche.
Pourtant, la classe ouvrière a besoin de militants, a besoin d'organisations qui continuent à perpétuer le mouvement ouvrier organisé, dans les entreprises comme dans les quartiers populaires.
C'est ce que Lutte ouvrière essaie de faire, même avec bien moins de moyens que le Parti communiste.
C'est dans cette optique que Lutte Ouvrière sera présente, partout où cela sera possible, aux prochaines élections municipales. A Saint-Nazaire, notre liste sera conduite par Jean-Claude SAINT-ARROMAN et Marie-France BELIN sera candidate aux cantonales à Sainte Nazaire centre.
Nous ne nous présentons pas parce que nous aurions trouvé un moyen miraculeux pour mettre fin à la pauvreté et à l'exploitation dans le cadre d'une municipalité. Ce moyen n'existe pas. Les principaux problèmes des travailleurs, ici comme ailleurs, viennent du chômage, des bas salaires, de la morgue patronale.
Parmi toutes les institutions de cette société bourgeoise, les municipalités sont pourtant celles qui sont les plus proches de la population, les plus à même d'en connaître les problèmes quotidiens et, dans les petites villes en tout cas, les plus faciles à être soumises au contrôle de la population. C'est justement la raison qui fait que l'Etat a toujours cherché à rendre les municipalités les plus indépendantes possible de la population et dépendantes de l'Etat. Le mode de scrutin défavorise les minorités en assurant une sur-représentation à la liste arrivée en tête et se conjugue avec la loi pour donner au maire un pouvoir quasi absolu par rapport à la population de sa commune et même par rapport aux conseillers municipaux, tout en le rendant responsable devant le préfet. Il est significatif que le pouvoir central ait le droit de suspendre ou de révoquer un maire, voire même de dissoudre un conseil municipal, mais que la population, elle, n'ait aucun moyen de révoquer un maire dont elle n'est pas satisfaite pendant les six ans de sa mandature.
Dans ces élections, il n'est pas question évidemment de voter pour les ennemis ouverts des travailleurs que sont les partis de droite et à infiniment plus forte raison, pour les ennemis mortels que sont les partis d'extrême-droite. Mais il n'est pas de l'intérêt des électeurs des classes laborieuses de voter pour les candidats qui soutiennent même indirectement la politique du gouvernement, car ce serait cautionner sa politique anti-ouvrière.
Lutte Ouvrière présente des listes dans ces élections pour que les électeurs puissent exprimer leur rejet de la politique du gouvernement, en montrant clairement que ce rejet vient du côté du monde du travail.
Nous nous présentons pour dénoncer la situation qui est faite aux travailleurs et pour dénoncer les responsables de cette situation.
Nous nous présentons pour faire entendre les exigences du monde du travail, fermement, sans que cela puisse être récupéré ni par la droite, ni par la gauche gouvernementale, ni au premier, ni au deuxième tour.
Non seulement, nous ne participons au premier tour à aucune coalition électorale mais, si nous sommes présents au deuxième tour, nous ne ferons alliance avec aucune des formations qui ont une responsabilité quelconque dans les gouvernements d'hier, et d'aujourd'hui.
Tous ces gens-là n'en ont rien à faire de la dégradation de la condition ouvrière au profit du patronat. Ils voudraient bien pourtant assurer leur place de Maire et le pouvoir qui va avec grâce aux votes des travailleurs. Eh bien, qu'ils ne comptent pas sur nous, ni pour cautionner le gouvernement qu'ils soutiennent, ni pour les installer ou les conforter dans les postes qui les intéressent. Les travailleurs n'ont pas à dire merci, lors des élections, à ceux qui non seulement ne les défendent pas contre les coups du patronat le reste de temps mais leur portent eux-mêmes des coups.
Et si les électeurs sont nombreux à faire le geste politique de voter pour les listes Lutte Ouvrière, cela aura une grande importance pour les combats à venir du monde du travail.
En élisant nos candidats, ils enverront au conseil municipal des élus dont ils pourront être sûrs qu'ils représenteront leurs intérêts. Car ceux qui sont sur nos listes ne poursuivent pas une carrière, ils ne sont liés à aucun grand parti gouvernemental, ils n'ont aucun fil à la patte. Ils sont libres de dénoncer toutes les magouilles, tous les cadeaux faits aux entreprises capitalistes par la municipalité, soit lorsqu'elle leur livre des services essentiels, comme la distribution de l'eau ou les transports publics, soit lorsqu'elle facilite leur installation par des détaxes, par des terrains viabilisés au frais de la commune vendus au franc symbolique.
Eh bien, les élus Lutte ouvrière se considèrent avant tout comme les représentants de la population laborieuse, des travailleurs et des chômeurs ! Ce sont leurs intérêts qu'ils défendront en priorité.
Si les élus Lutte ouvrière sont suffisamment nombreux, ce qui implique déjà une solidarité, un accord avec leurs idées d'une partie de l'électorat, ils chercheront à entraîner l'intervention directe de la population elle-même : pour qu'elle surveille la gestion de la municipalité et exerce la pression qu'il faut, par ses mobilisations, par des manifestations, pour que ses intérêts soient pris en compte. Ils populariseront l'idée que la population a les moyens de prendre des initiatives dans les affaires publiques qui la concernent. Dans tous les domaines où faire se peut, ils feront appel à la participation de tous. Je ne prendrai que deux exemples.
Tout le monde, ou plus exactement tous ceux qui connaissent les quartiers populaires, déplore qu'en raison des classes surchargées et de bien d'autres choses, les enfants de ces quartiers sortent souvent de l'école primaire sans avoir appris à lire, à écrire ou à s'exprimer correctement. Un grand nombre d'entre eux, quand ils ont appris quelque chose une année, régressent l'année suivante, quand certains ne retournent pas à l'analphabétisme.
Eh bien oui, des conseillers municipaux, même minoritaires mais disposant d'un soutien dans la population, pourraient faire appel à la population, à ceux en tout cas qui ont une certaine compétence, des retraités, des parents d'élèves ou des étudiants, pour aider les instituteurs, en prenant à part les élèves à problèmes, par petits groupes, voire par groupes de langue d'origine. Cela ne pallierait certainement pas l'insuffisance d'instituteurs, dont il faudrait continuer à revendiquer l'embauche en faisant sur l'Etat la pression nécessaire, y compris et surtout en mobilisant la population. Mais cela permettrait aux enseignants d'être secondés et donc plus efficaces et de faire autre chose que de la garderie.
Mais il y aurait aussi une politique à mener par rapport aux jeunes des quartiers populaires, entraînés dans la violence gratuite voire dans la délinquance ; délinquance dont les habitants de ces quartiers, y compris leurs propres parents, sont les principales victimes.
A qui faire croire que c'est seulement un problème de police ? Et qu'un millier de policiers de plus à l'échelle du pays, même flanqués de 5.000 emplois jeunes en uniforme, comme le propose le gouvernement, suffiraient pour répondre à la montée de la violence ou de la délinquance dans la jeunesse ?
Je sais que, dans bien des circonstances, la présence d'îlotiers, proches de la population, peut décourager la petite délinquance et, en tout cas, rassurer celles et ceux qui en sont victimes. Mais il suffit d'une poignée de policiers, racistes ou anti-jeunes pour que toute présence policière, même de proximité soit ressentie comme une provocation par l'ensemble des jeunes d'un quartier.
Et surtout, comment se fait-il que ce sont les petits caïds comme il en a toujours existé dans les banlieues ou des dealers, qui imposent leur loi, leurs moeurs, leurs violences dans bien des cités HLM ? Pourquoi ne parvient-on pas à isoler de la majorité des jeunes, cette petite minorité qui préfère dealer, trafiquer c'est à dire vivre en petit parasite sur plus pauvres qu'eux ?
Eh bien, il ne suffit pas de faire donner la police, pour résoudre ces problèmes !
Avant tout, il faudrait que les jeunes aient d'autres perspectives que de commencer leur vie d'adulte en tant que chômeurs !
Et puis, il faudrait dans les quartiers populaires plus d'équipements collectifs, plus de locaux réservés aux jeunes, plus d'animateurs, plus d'éducateurs ! Incapable d'assurer ces 90 % de social qui seraient nécessaires pour que les jeunes ne soient pas entraînés par une poignée de caïds, on fait 90 % de répression policière.
Bien sûr, les habitants d'un quartier dit sensible n'ont pas les moyens de mettre fin aux causes fondamentales de la violence des jeunes, le chômage et la pauvreté. Mais ils peuvent, collectivement, assurer la formation de la conscience et de la morale des adolescents et peser sur leur comportement. Il ne s'agit pas de jouer les zorros la nuit dans les cages d'escalier ou dans les caves d'un HLM. Il s'agit d'amener le maximum d'adultes à intervenir auprès des jeunes, quand ils en ont la possibilité, d'user de leur autorité pour les convaincre, pour les éduquer gentiment, par des petits gestes quotidiens. Une seule observation venant d'un adulte pour demander à un groupe d'adolescents de ne pas laisser traîner des canettes de bière ou des mégots de cigarette dans les parties collectives de l'immeuble entraîne bien souvent des réflexions désobligeantes voire des insultes. Mais si ce type d'intervention ne se limite pas à celle du gardien, si nombreux sont les adultes qui ne restent pas passifs, il y aura sans doute, à la longue, moyen de changer bien des comportements.
Mais pour que cette pression collective soit efficace, il faut que la collectivité combatte en même temps dans ses propres rangs tous les préjugés qui la divisent, à commencer par les préjugés racistes et chauvins. Et il faut aussi que la population des quartiers pauvres surveille et contrôle en même temps les policiers, pour réagir contre ceux qui se permettent des réflexions et des comportements racistes. Un contrôle d'identité au faciès suffit pour que tous les jeunes se sentent, à juste titre, agressés.
Eh bien, les conseillers municipaux de Lutte ouvrière oeuvreraient pour qu'émerge, dans les quartiers populaires, là où l'écrasante majorité est constituée de travailleurs, une conscience collective, la conscience d'intérêts communs.
La seule pression morale de la collectivité ne sera sans doute pas suffisante pour convaincre les dealers et les caïds. Mais la seule voie pour les marginaliser et pour contrecarrer leur influence, c'est d'opposer à leur pouvoir sur les jeunes, le pouvoir de la collectivité !
Une fois cette minorité isolée, la collectivité dispose de bien des moyens, y compris physiques en cas de nécessité, pour empêcher quelques petits voyous ou quelques imbéciles d'agresser par exemple les chauffeurs de l'unique ligne d'autobus qui dessert le quartier ou de brûler des voitures qui, dans les quartiers pauvres, sont celles de travailleurs ou de chômeurs.
Au temps où le mouvement ouvrier était plus puissant qu'il ne l'est aujourd'hui, où le Parti socialiste était réellement socialiste, où le Parti communiste était vraiment communiste, il y avait des militants, des sympathisants dans les quartiers populaires qui, par leur seule présence, par leur capacité d'entraînement, influençaient le climat et les comportements aussi bien sur le plan politique, contre la xénophobie et le racisme, que sur le plan des comportements sociaux, du vandalisme gratuit à l'alcoolisme. Et ils le faisaient, non pas en faisant appel aux autorités, mais en faisant appel à la conscience de classe, et à la participation des gens eux-mêmes à la solution de leurs propres problèmes.
Ce ne sont évidement pas ces élections qui changeront la situation générale de la classe ouvrière. Le véritable combat devra se dérouler, avec les méthodes du mouvement ouvrier, avec les grèves et les manifestations. Pas seulement ici, bien sûr, mais à l'échelle de l'ensemble du pays. Cela arrivera, car c'est, peut-être, précisément le décalage, la contradiction flagrante entre les discours gouvernementaux d'autosatisfaction et l'aggravation du sort des ouvriers qui poussera les exploités à la révolte.
Mais les élections constituent l'occasion d'affirmer une politique.
Depuis des années, l'alternance de la droite et de la gauche gouvernementale au pouvoir ne change rien pour la population laborieuse. Eh bien, il faut un autre choix pour les travailleurs !
Voter pour les listes Lutte ouvrière, c'est affirmer avec nous la volonté d'imposer une autre politique :
- la réquisition des entreprises qui font des bénéfices et suppriment des emplois ;
- l'arrêt des cadeaux aux grandes entreprises ;
- la diminution des impôts payés par les salariés, la suppression des impôts indirects sur la consommation comme la TVA et une taxation accrue sur les bénéfices des sociétés et sur les revenus du capital ;
- la création des emplois nécessaires dans les services publics et les collectivités ;
- la revalorisation des bas salaires, des pensions et des retraites.
Alors, je vous demande d'aider Lutte ouvrière à défendre la politique au nom de laquelle elle se présente auprès de tous les travailleurs, et de toute la population de cette ville. Je vous demande de convaincre vos proches, vos amis, vos camarades de travail, de voter et de faire voter pour la liste Lutte ouvrière conduite par Jean-Claude SAINT-ARROMAN !
Et je vous demande, bien au-delà de ces élections municipales, de nous aider pour que se renforce un courant dont l'unique objectif est de défendre les intérêts politiques des travailleurs et des classes pauvres.
(Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 22 février 2001 )