Déclaration de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, sur la prise en compte dans la pratique des clauses sociales en matière de marchés publics de l'expérience d'autres pays de l'Union européenne, à Paris le 17 octobre 2008.

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Circonstance : Clôture de la journée-Colloque sur le développement des clauses sociales dans la commande publique, à Paris le 17 octobre 2008

Texte intégral

Mesdames et Messieurs, chers amis,
Vous savez qu'il existe un engagement important du ministère de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi en faveur des clauses sociales en matière de marchés publics. Tous ceux qui ont contribué à ce travail, à commencer par Jean-Baptiste de Foucauld, doivent être salués, au lendemain d'une journée européenne consacrée à la lutte contre la pauvreté.
Je sais que vous avez longtemps débattu des différentes pratiques européennes en matière de clauses sociales et des possibilités juridiques qui s'offrent aux acteurs économiques (clauses d'exécution, critères d'attribution, etc.). La question des clauses sociales est aujourd'hui embrassée au plan européen et il me semble important de se saisir des perspectives européennes pour faire vivre les clauses sociales dans la commande publique en France.
Si les pratiques européennes diffèrent, comme l'ont montré les travaux de la journée, cette diversité me paraît riche d'enseignements et mériter d'être étudiée.
Le secteur privé a tout intérêt à se montrer actif en faveur de l'inclusion de clauses sociales : celles-ci ne sont contraires ni à la compétitivité ni aux règles en vigueur en matière d'emploi. Elles peuvent même avantageusement se substituer à des dispositifs plus contraignants, en offrant une piste de diversification des sources de recrutement. Il convient, certes, de préserver la sécurité juridique des contrats et de veiller au maintien de la qualité et des coûts, mais ces obstacles peuvent être levés, afin de contribuer à l'émergence d'une politique d'achats publics socialement responsable.
La France a progressé dans la prise de conscience de la nécessité d'un développement qui soit socialement responsable. Elle affirme la volonté d'utiliser la commande publique en tant que levier d'accès à l'emploi des personnes qui en sont éloignées. Nous souhaitons qu'en 2012, 10 % des contrats publics permettent de faire accéder à l'emploi des personnes qui en sont éloignées (chômeurs de longue durée, jeunes sans qualification, personnes handicapées et allocataires de minimas sociaux). Cette approche paraît adaptée au contexte français ; dans des contextes distincts, d'autres approches peuvent sembler plus appropriées, comme le montrent certaines pratiques intéressantes développées en Italie et au Royaume-Uni. Une concertation est donc plus que jamais nécessaire entre les Etats membres, de même qu'un échange de bonnes pratiques que favorise déjà la Commission européenne. Il semble en tout cas possible d'inclure dans les bonnes pratiques de l'achat public différentes préoccupations sociales, telles que les recommandations fondamentales de l'OIT (Organisation internationale du Travail), le respect de la diversité, l'égalité hommes-femmes et la lutte contre les discriminations.
Il est important de mesurer la diversité des expérimentations que permettent des directives communes. Il faut promouvoir ces expériences et la poursuite d'une démarche d'innovation dans ce domaine. Les acheteurs publics ont une responsabilité importante, même si elle n'est pas toujours facile à assumer, compte tenu de la nature des achats, parfois peu favorable à l'application des clauses sociales. En tout état de cause, il ne doit pas exister d'a priori dans ces domaines et nous devons tirer tout le parti des expériences déjà menées.
En nous appropriant les bonnes pratiques, comme l'a fait Martin Hirsch en matière d'inclusion active, nous pouvons contribuer à faire émerger une préoccupation européenne et à faire exister un ensemble d'outils.
Enfin, les citoyens doivent aussi être convaincus de l'utilité de cette démarche nouvelle. Celle-ci constituait, au départ, un pari loin d'être gagné. Elle a démontré son efficacité et il faut, là comme ailleurs, identifier une régulation pertinente pour dépasser le stade de l'échange des bonnes pratiques.
La commande publique au service de l'emploi n'est pas seulement une idée généreuse : il doit s'agir d'un levier économique et social inclus dans les politiques de développement durable. Nous devons actualiser, en ce sens, la stratégie de Lisbonne, bien qu'elle comprenne déjà des références à ce type d'approche. Il doit exister une responsabilisation sociale des marchés, au travers de l'application des directives européennes. Les travaux de la Direction Générale Emploi seront enrichis par les échanges qui ont eu lieu aujourd'hui et je vous en remercie.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 4 décembre 2008