Texte intégral
M.-O. Fogiel.- C. Boutin, vous êtes la ministre du Logement et de la Ville. Un sansabri a été retrouvé mort dans le Bois de Vincennes hier, vous vous êtes rendue sur place. N. Sarkozy, on s'en souvient, s'était engagé à ce que plus personne ne meurt dans la rue. Visiblement, vous n'avez pas encore trouvé la solution ?
Écoutez, c'est sûr que l'exclusion est une affaire très complexe. Naturellement, on ne peut qu'être triste de ces décès, et pourtant beaucoup de choses sont mises en place.
On va y venir.
Ce que je peux vous dire, par exemple, en ce qui concerne Vincennes, hier je suis allée, j'étais accompagnée de l'adjointe de la ville de Paris, qui est en charge de ces problèmes. Nous avons décidé de nous mettre tous ensemble, c'était déjà une décision qui avait prise, alors nous l'avons mise en application cette nuit...
Vous avez lancé la mission "Bois de Vincennes", donc, pour passer
au peigne fin le Bois...
Voilà...
...Mais les associations disent qu'il était temps, et qu'il y avait urgence à aller faire une sorte, hélas ! d'inventaire de ce qui s'y passait.
Mais non, de toute façon, bien sûr... mais ça c'est de la responsabilité de la ville de Paris. Le Bois de Vincennes, quand j'ai pensé pouvoir mettre des bungalows, on m'a dit : "non, non, on peut pas, parce que c'est inconstructible". Ce que je peux vous dire, parce que ça c'est important, qu'est-ce qui s'est passé cette nuit ? Cette nuit, la ville, la police, les associations sont allées voir ; la ville a rencontré 66 personnes, sur ces 66 personnes, aucune n'a souhaité être hébergée, il y a 11 duvets qui ont été distribués ; la police a rencontré 32 personnes, une seule personne a voulu être hébergée.
Alors, justement, on est au coeur de la question, parce que ces hébergements, qui ne plaisent pas aux "Sans domicile fixe", parce qu'ils veulent des hébergements "dignes" - vous avez entendu tout à l'heure le président d'Emmaüs - plutôt que des hangars, des halls, ils veulent des lits, pas dans des centres d'accueil. Est-ce que, ce matin, vous répondez favorablement à Emmaüs qui veut des réquisitions de logements vides ?
La réquisition, moi je n'ai rien contre la réquisition. Mais je viens de la rencontre des ministres du Logements, vous le savez, il y a même eu des manifestations de certaines associations, et des associations européennes. Il n'y a que des Français qui demandent la réquisition, les autres n'en veulent pas, et je comprends qu'ils ne la veulent pas. Parce que, quand on regarde ce qui s'est passé, M. Périssol, Mme Lienemann, mes prédécesseurs, ont tenté la réquisition, ils en sont arrivés à rien ! Et je suis prête à donner à Monsieur...
Mais concrètement, aujourd'hui, on n'arrive pas à grand chose non
plus !
Si, si, si, on ne peut pas dire ça. En ce qui concerne l'hébergement, il y a eu une augmentation très importante. Ce qui est certain, c'est qu'il y a certains centres d'hébergement qui ne sont pas dignes, et il y a des crédits qui sont prévus pour les humaniser. Beaucoup...
Mais ça va prendre du temps ?
Bien sûr que ça prend du temps, mais ça, ni vous, ni moi, ni M. Deltombe n'est maître du temps.
Mais tout à l'heure, le Conseil des ministres examinera le développement des places d'hébergement et de logements temporaires...
Bien sûr, oui.
Vous, concrètement, dites-nous ce matin ce que vous souhaitez ?
Ce que je souhaite, c'est qu'il n'y ait pas de blocage. Par exemple, l'humanisation des centres d'hébergement, figurez-vous que le Sénat m'a refusé le financement. Voilà ! Je n'y peux rien ! J'ai 50 millions qui sont prévus, on ne l'accorde pas ! J'espère que l'Assemblée nationale va l'accorder.
Mais concrètement, quand vous parlez avec N. Sarkozy, qui a fait une promesse de campagne -j'imagine que vous avez des discussions en tête-à-tête avec lui - il vous répond quoi le président de la République ?
Mais le président de la République note tous les efforts qui ont été faits. Savez-vous qu'il y a plus de 1,1 milliard du budget de la France qui est consacré à toute cette problématique de l'exclusion. Nous sommes le premier pays européen qui dépense le plus pour le cas des plus démunis. Naturellement, on peut faire beaucoup plus. Aujourd'hui, ce qui se passe, on estime à 100.000 personnes les sans-abri, nous avons 99.600 places qui sont disponibles. Alors, ce n'est pas une affaire de mathématiques, mais en termes de places, nous avons ce qu'il faut...
Mais Mme Boutin, on sait bien qu'il y a un problème ! Si vous avez des places et qu'ils ne veulent pas y aller, c'est bien qu'il y a un problème, c'est que les places ne sont pas adaptées à leur situation !
Non, ce n'est pas du tout ça, ce n'est pas du tout ça ! C'est qu'en France, il y a bien sûr cet effet-là, mais c'est aussi qu'en France, nous respectons la liberté. À la différence des pays anglo-saxons, dans les pays anglo-saxons, vous avez une personne qui se trouve sur le trottoir, il suffit de téléphoner à la police, on ramasse la personne, et on la met dans un endroit, on ne lui demande pas son avis. En France, ce n'est pas du tout comme ça, et je pense que c'est une fierté de la France que de respecter la liberté des personnes. Si la personne ne veut pas, à moins que sa santé soit en jeu, nous n'avons pas la possibilité juridique, légale, de pouvoir la prendre pour la mettre à l'abri.
Donc, concrètement, ce matin, vous demandez plus de moyens pour pouvoir réadapter les centres d'accueil, pour qu'ils soient donc plus adaptés aux SDF qui sont dans la rue ?
Je souhaite que l'Assemblée nationale confirme bien la volonté du Gouvernement d'humaniser les centres d'hébergement et de me donner les financements qui sont prévus.
Pour terminer, est-ce qu'il n'est pas odieux, et le mot est pesé, que des associations qui tentent de sensibiliser l'opinion publique sur le sort de ces personnes soient sanctionnées par la justice, comme le DAL, hier ?
Alors, écoutez, en ce qui concerne l'affaire du DAL, le DAL c'est une action de justice qui a été menée par la préfecture de Paris...
Oui, mais d'un point de vue humain ? Pas du point de vue de la justice, d'un point de vue humain ?
Du point de vue humain, M.-O. Fogiel, il y avait des hommes, des femmes et des enfants qui étaient sur les trottoirs. Regardez les images, et vous verrez qu'il y aurait pu y avoir un accident. Et si une de ces personnes avait été accidentée ou tuée, parce qu'il y avait des voitures et des gens sur les trottoirs, les mêmes auraient réclamé...
Mais aujourd'hui, quand on leur demande 12.000 euros ?!
Ecoutez, ça, je n'ai pas à commenter une décision de justice. Ce qui est certain, c'est une action de la Préfecture de police, ça n'a pas été le ministère du Logement qui l'a demandée, c'est une question d'ordre public, je n'ai pas à apprécier cela. Je sais simplement qu'il y avait effectivement des personnes qui pouvaient être mises en danger, oui.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 26 novembre 2008
Écoutez, c'est sûr que l'exclusion est une affaire très complexe. Naturellement, on ne peut qu'être triste de ces décès, et pourtant beaucoup de choses sont mises en place.
On va y venir.
Ce que je peux vous dire, par exemple, en ce qui concerne Vincennes, hier je suis allée, j'étais accompagnée de l'adjointe de la ville de Paris, qui est en charge de ces problèmes. Nous avons décidé de nous mettre tous ensemble, c'était déjà une décision qui avait prise, alors nous l'avons mise en application cette nuit...
Vous avez lancé la mission "Bois de Vincennes", donc, pour passer
au peigne fin le Bois...
Voilà...
...Mais les associations disent qu'il était temps, et qu'il y avait urgence à aller faire une sorte, hélas ! d'inventaire de ce qui s'y passait.
Mais non, de toute façon, bien sûr... mais ça c'est de la responsabilité de la ville de Paris. Le Bois de Vincennes, quand j'ai pensé pouvoir mettre des bungalows, on m'a dit : "non, non, on peut pas, parce que c'est inconstructible". Ce que je peux vous dire, parce que ça c'est important, qu'est-ce qui s'est passé cette nuit ? Cette nuit, la ville, la police, les associations sont allées voir ; la ville a rencontré 66 personnes, sur ces 66 personnes, aucune n'a souhaité être hébergée, il y a 11 duvets qui ont été distribués ; la police a rencontré 32 personnes, une seule personne a voulu être hébergée.
Alors, justement, on est au coeur de la question, parce que ces hébergements, qui ne plaisent pas aux "Sans domicile fixe", parce qu'ils veulent des hébergements "dignes" - vous avez entendu tout à l'heure le président d'Emmaüs - plutôt que des hangars, des halls, ils veulent des lits, pas dans des centres d'accueil. Est-ce que, ce matin, vous répondez favorablement à Emmaüs qui veut des réquisitions de logements vides ?
La réquisition, moi je n'ai rien contre la réquisition. Mais je viens de la rencontre des ministres du Logements, vous le savez, il y a même eu des manifestations de certaines associations, et des associations européennes. Il n'y a que des Français qui demandent la réquisition, les autres n'en veulent pas, et je comprends qu'ils ne la veulent pas. Parce que, quand on regarde ce qui s'est passé, M. Périssol, Mme Lienemann, mes prédécesseurs, ont tenté la réquisition, ils en sont arrivés à rien ! Et je suis prête à donner à Monsieur...
Mais concrètement, aujourd'hui, on n'arrive pas à grand chose non
plus !
Si, si, si, on ne peut pas dire ça. En ce qui concerne l'hébergement, il y a eu une augmentation très importante. Ce qui est certain, c'est qu'il y a certains centres d'hébergement qui ne sont pas dignes, et il y a des crédits qui sont prévus pour les humaniser. Beaucoup...
Mais ça va prendre du temps ?
Bien sûr que ça prend du temps, mais ça, ni vous, ni moi, ni M. Deltombe n'est maître du temps.
Mais tout à l'heure, le Conseil des ministres examinera le développement des places d'hébergement et de logements temporaires...
Bien sûr, oui.
Vous, concrètement, dites-nous ce matin ce que vous souhaitez ?
Ce que je souhaite, c'est qu'il n'y ait pas de blocage. Par exemple, l'humanisation des centres d'hébergement, figurez-vous que le Sénat m'a refusé le financement. Voilà ! Je n'y peux rien ! J'ai 50 millions qui sont prévus, on ne l'accorde pas ! J'espère que l'Assemblée nationale va l'accorder.
Mais concrètement, quand vous parlez avec N. Sarkozy, qui a fait une promesse de campagne -j'imagine que vous avez des discussions en tête-à-tête avec lui - il vous répond quoi le président de la République ?
Mais le président de la République note tous les efforts qui ont été faits. Savez-vous qu'il y a plus de 1,1 milliard du budget de la France qui est consacré à toute cette problématique de l'exclusion. Nous sommes le premier pays européen qui dépense le plus pour le cas des plus démunis. Naturellement, on peut faire beaucoup plus. Aujourd'hui, ce qui se passe, on estime à 100.000 personnes les sans-abri, nous avons 99.600 places qui sont disponibles. Alors, ce n'est pas une affaire de mathématiques, mais en termes de places, nous avons ce qu'il faut...
Mais Mme Boutin, on sait bien qu'il y a un problème ! Si vous avez des places et qu'ils ne veulent pas y aller, c'est bien qu'il y a un problème, c'est que les places ne sont pas adaptées à leur situation !
Non, ce n'est pas du tout ça, ce n'est pas du tout ça ! C'est qu'en France, il y a bien sûr cet effet-là, mais c'est aussi qu'en France, nous respectons la liberté. À la différence des pays anglo-saxons, dans les pays anglo-saxons, vous avez une personne qui se trouve sur le trottoir, il suffit de téléphoner à la police, on ramasse la personne, et on la met dans un endroit, on ne lui demande pas son avis. En France, ce n'est pas du tout comme ça, et je pense que c'est une fierté de la France que de respecter la liberté des personnes. Si la personne ne veut pas, à moins que sa santé soit en jeu, nous n'avons pas la possibilité juridique, légale, de pouvoir la prendre pour la mettre à l'abri.
Donc, concrètement, ce matin, vous demandez plus de moyens pour pouvoir réadapter les centres d'accueil, pour qu'ils soient donc plus adaptés aux SDF qui sont dans la rue ?
Je souhaite que l'Assemblée nationale confirme bien la volonté du Gouvernement d'humaniser les centres d'hébergement et de me donner les financements qui sont prévus.
Pour terminer, est-ce qu'il n'est pas odieux, et le mot est pesé, que des associations qui tentent de sensibiliser l'opinion publique sur le sort de ces personnes soient sanctionnées par la justice, comme le DAL, hier ?
Alors, écoutez, en ce qui concerne l'affaire du DAL, le DAL c'est une action de justice qui a été menée par la préfecture de Paris...
Oui, mais d'un point de vue humain ? Pas du point de vue de la justice, d'un point de vue humain ?
Du point de vue humain, M.-O. Fogiel, il y avait des hommes, des femmes et des enfants qui étaient sur les trottoirs. Regardez les images, et vous verrez qu'il y aurait pu y avoir un accident. Et si une de ces personnes avait été accidentée ou tuée, parce qu'il y avait des voitures et des gens sur les trottoirs, les mêmes auraient réclamé...
Mais aujourd'hui, quand on leur demande 12.000 euros ?!
Ecoutez, ça, je n'ai pas à commenter une décision de justice. Ce qui est certain, c'est une action de la Préfecture de police, ça n'a pas été le ministère du Logement qui l'a demandée, c'est une question d'ordre public, je n'ai pas à apprécier cela. Je sais simplement qu'il y avait effectivement des personnes qui pouvaient être mises en danger, oui.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 26 novembre 2008