Texte intégral
Je voudrais vous dire quelques mots pour vous dire que tous les réfugiés se ressemblent, même s'ils sont en bonne forme comme vous. Ils ont une tristesse qui va se dissiper mais que je connais bien et qui met quelques jours, voire même plus longtemps à disparaître.
Dans cette région, depuis le début de la deuxième guerre d'Irak, des millions d'Irakiens sont partis. Certains étaient des réfugiés. Vous savez, pour être un réfugié, il faut avoir franchi une frontière ; on est alors pris en charge par le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations unies, ce que nos amis du HCR font très bien.
En Jordanie et en Syrie, il y avait des millions de réfugiés irakiens. J'ai visité les centres d'accueil en Syrie, ce que l'on fait rarement Quelles que soient les relations que nous entretenions avec la Syrie, on doit féliciter les Syriens d'avoir accepté de recevoir des populations irakiennes.
En Jordanie, il y a une tradition d'asile absolu, avec l'accueil de millions de réfugiés, de tous les conflits et, en particulier, des conflits irakiens.
Je suis heureux d'être aujourd'hui avec Brice Hortefeux. Il l'a souligné et il faut s'en souvenir, il est aussi le ministre de l'asile. Je dis cela car je n'étais pas d'accord avec lui. Je me méfiais de la manière dont on faisait cette immigration choisie. Dans les faits, je me suis rendu compte, surtout très récemment, lorsque le Pacte européen pour l'immigration, proposé par Brice à Cannes, a été rapidement accepté, avec très peu de discussion, par les Vingt-six autres pays européens, que nous étions très bien placés dans le domaine de l'accueil des personnes immigrées en termes de droits de l'Homme. Il existe maintenant un Pacte européen qui a été je crois la première des réalisations parmi les priorités de la Présidence française de l'Union européenne.
Le Pacte européen sur l'immigration a été accepté le premier, ainsi que l'asile. J'y viens, car il ne s'agit pas seulement de réglementer avec les pays d'où viennent les émigrés, mais il s'agit aussi d'accueillir. Et notre pays, par rapport à l'Irak, n'avait pas une très bonne réputation pour des raisons qui tenaient à nos rapports antérieurs avec les gouvernements irakiens.
A l'occasion de mes déplacements en Irak, notamment au mois d'août 2007, j'avais bien sûr rencontré Mgr Dely. Mgr Dely me disait : "N'aidez pas les chrétiens mais aidez tous les Irakiens". Cette position est noble et belle mais enfin, c'était malgré tout les chrétiens qui étaient les principaux persécutés.
Or, le HCR a une très belle règle, on ne doit pas faire de discrimination parmi les demandeurs d'asile.
C'est toujours un petit dilemme et une difficulté. C'est pour cela que, symboliquement, il y a une famille sunnite et une famille chrétienne aujourd'hui, c'est très beau aujourd'hui. C'est cependant un peu plus compliqué que cela car si certains Irakiens pouvaient revenir en Irak - ce que tous les demandeurs d'asile espèrent au fond de leur coeur -, pour les chrétiens ce sera peut-être un peu plus dur. Et ce n'est pas seulement en Irak que la situation des chrétiens est difficile, c'est dans tout le Moyen-Orient.
Je ne souhaite pas que Mgr Emmanuel Dely, les chaldéens, les chrétiens d'Irak partent. Je souhaite qu'ils restent en Irak et que ce pays demeure multiforme, multi religieux, tolérant, si je peux me permettre ce mot après toutes les guerres qui s'y sont déroulées. L'Irak aurait avantage à maintenir ses minorités.
Je suis donc très heureux que grâce, aux décisions du président de la République, grâce à ce qu'a fait Brice Hortefeux, nous ayons encore 500 places et je vous assure qu'il y en aurait d'autres s'il en était besoin et peut-être en sera-t-il besoin.
Nous accueillerons des Irakiens et nous nous efforcerons, dans le respect de tous les droits de l'Homme et donc de tous les hommes et donc de toutes les minorités religieuses, d'en accueillir d'autres, dont les Chrétiens.
Je n'oserai même pas demander combien de chrétiens figurent dans les 500 premiers, mais il devrait, je le crois, y en avoir autour de 300.
Merci à tous, vous serez bien en France. Voici mon collègue, médecin et chirurgien cardiaque ; vous savez, pour un chirurgien cardiaque, être pendant deux années dans un camp, quel qu'il soit, c'est difficile même si ce n'était pas insupportable car le HCR organise bien les choses. Cependant, c'est dur de perdre sa volonté et son énergie alors que l'on pourrait la consacrer aux malades qui sont légion dans cet endroit. Les infections cardiaques sont, ainsi qu'il le sait, extraordinairement répandues ; c'est beaucoup de temps perdu pour la communauté humaine.
Je suis heureux que mon pays, la France, ait pu répondre à cette demande. Cela a été long et je pense que l'an prochain, ce sera plus rapide. Le circuit est amorcé, les gens se parlent...
A Sarcelles, il y a une nouvelle église chaldéenne que les fidèles pourront fréquenter, s'ils le souhaitent. Je vous rappelle que c'était le groupe chrétien le plus ancien. Ils étaient extrêmement nombreux, plus d'un million, et je crois qu'il reste autour de 300.000 fidèles. Essayons en tout cas de protéger ceux qui restent, merci beaucoup et bienvenue à tous.
Q - On a beaucoup entendu le mot "chrétien". La France a privilégié l'accueil de réfugiés irakiens chrétiens, mais pas seulement ?
R - Les Chrétiens, plus que d'autres, sont persécutés au Moyen-Orient. Mais des membres d'autres minorités sont aussi en situation d'être accueillis. Nous ne voulons pas tous les accueillir mais en accueillir le plus possible. Tout cela n'est pas contraint ; ils choisissent la France, ils souhaitent aller en France. Ce sont des Irakiens que nous accueillons. Nous tentons de privilégier, s'ils le souhaitent, ceux qui rencontrent le plus de difficultés à rentrer chez eux ; et ce sont les Chrétiens, il n'y a pas de doute.
Cela dit, les règles du Haut commissariat aux Réfugiés des Nations unies sont respectées car nous ne choisissons pas nos réfugiés. Nous ouvrons la porte.
Q - C'est la première fois que vous collaborez avec M. Hortefeux ?
R - Non, nous collaborons depuis longtemps. Nous avons présenté ensemble, il y a un mois et demi, l'adoption du Pacte européen pour l'immigration par les 27 Etats membres de l'Union européenne, ce dont je me réjouis.
Les choses ont évolué. Je me suis rendu compte que la France offrait, si j'ose dire, plus de liberté, de tendresse, d'attention, beaucoup plus que d'autres pays que je croyais plus accueillants que la France. Cela n'était pas vrai.
En proposant ce Pacte aux autres pays de l'Union européenne, Brice Hortefeux nous a démontré que nous pouvions faire cela ensemble. Il faut absolument que l'Europe ait une attitude commune face aux immigrés. Vous savez que l'espace Schengen prévoit que ceux qui sont accueillis dans un pays peuvent, en réalité, voyager librement dans les autres pays. L'adhésion au Pacte européen pour l'immigration n'a pas été difficile. Au contraire, cela a été très facile et je m'en réjouis.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 décembre 2008