Interview de M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, à "Europe 1" le 24 avril 2009, sur la fixation des quotas de pêche par la Commission européenne.

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Média : Europe 1

Texte intégral

M.-O. Fogiel.- Bonjour M. Barnier. Vous êtes ministre de l'Agriculture et de la Pêche, également tête de liste UMP en Ile-de-France aux européennes, et les ministres européens de la Pêche se sont réunis à Luxembourg hier. La Commission européenne a de nouveau refusé l"idée d'accorder de nouvelles possibilités de captures aux pêcheurs français. C'est le désarroi chez nos pêcheurs. Est-ce que vous regrettez la décision de la Commission européenne.

Mais hier, il n'y a pas eu de surprise. Nous ne sommes pas venus avec les pêcheurs du Nord-Pas-de-Calais, qui ont été reçus pendant près de deux heures par le Commissaire européen personnellement, nous ne sommes pas venus chercher des quotas nouveaux pour cette année. Nous savons très bien qu'ils ont été fixés ; ils ont d'ailleurs été augmentés de 30 % cette année par rapport à l'année dernière, mais ce n'est pas suffisant. Nous sommes venus préparer les quotas de 2010 et des années suivantes.

Mais est-ce que vous souhaitez que les quotas soient augmentés l'année prochaine ?

Ils ont été augmentés de 30 % cette année, de 25 % l'année précédente. Donc il y a, dès l'instant où le stock de cabillaud - puisque nous parlons là du cabillaud, on pourrait parler de la sole aussi -, la reconstitution des stocks se produit, il y a des augmentations.

De combien vous souhaitez l'augmentation de quotas l'année prochaine puisque, vous le savez, c'est le désarroi et les pêcheurs sont en colère ?

Les pêcheurs qui étaient avec moi, hier, ont exprimé leur satisfaction - franchement, ce n'est pas moi qui le dit, ce sont eux -, d'avoir été reçus pour la première fois, d'avoir pu dialoguer avec la Commission européenne et de trouver des voies pour améliorer cette gestion des quotas.

Le parti socialiste, lui, en revanche, vous accuse de laisser, après votre départ du Gouvernement, un secteur en total désarroi, sans aucune solution durable quant à son avenir.

Je recommande qu'on ne fasse pas, sur ces sujets très graves, et la situation des marins pêcheurs qui sont des hommes et des femmes courageux, qui travaillent dangereusement et qui font un métier extrêmement vital, qu'on ne fasse pas de polémique. Ce n'est pas mon état d'esprit, surtout en ce moment, ni avec les agriculteurs, ni avec les pêcheurs.

Mais alors, vous voulez une augmentation de quotas de combien pour l'année prochaine ?

Mais ça dépend du stock. Vous devez bien comprendre, et les auditeurs comprennent, que le quota est fixé, et on a besoin des quotas sinon on livre la pêche artisanale à la finance et à la marchandisation, on fixe les quotas en fonction des stocks de poisson. Les pêcheurs savent qu'ils ont besoin de poisson pour pêcher. Il y a des observations scientifiques que nous voulons rapprocher de ce que constatent les marins pêcheurs, et c'est ça dont nous sommes venus parler avec la Commission européenne. Donc, ne me demandez pas de combien le quota sera augmenté...

Alors, je ne vais pas vous demander combien de quotas, mais je vais vous demander combien d'argent vous allez donner aux pêcheurs. Est-ce que vous allez leur donner une enveloppe supplémentaire ?

Ils ont reçu, pour cette année, ce que l'on appelle des "arrêts temporaires de pêche", près de 4 millions d'euros ; déjà l'année dernière, nous les avons aidés pour passer ces jours où ils ne peuvent pas pêcher parce qu'il y a des quotas. Ce que je voudrais tenter d'expliquer à ceux qui nous écoutent, c'est que la politique des quotas, on en a besoin. D'ailleurs, les pêcheurs qui étaient avec moi, hier - et les autres régions maritimes viendront avec moi et le ministère pour poursuivre ce dialogue avec la Commission - ont compris que nous avons besoin d'une politique commune des pêches. On a besoin de quotas. La question, c'est : est-ce que ces quotas sont bien gérés, est-ce qu'on ne peut pas améliorer les décisions, rapprocher les oints de vue des scientifiques et des marins pêcheurs. C'est de cela dont nous sommes venus parler.

On comprend que tous ces dossiers sont assez compliqués. Est-ce que justement c'est parce que ces dossiers sont compliqués que N. Sarkozy ne vous laisse pas quitter votre poste ? Vous deviez partir bien plus tôt pour vous lancer sur les européennes.

Non, je ne devais pas partir bien plus tôt. J'ai indiqué ma disponibilité pour quitter le Gouvernement et m'engager totalement dans la campagne, disons un mois avant, c'est-à-dire au début du mois de mai. C'est le président de la République qui prendra la décision.

Mais quand partez-vous, à votre avis ?

C'est lui qui le décidera. Vous savez bien que sous la Vème République, c'est le chef de l'Etat qui décide du Gouvernement. C'est sa décision, en fonction de l'intérêt général, en fonction du suivi des dossiers. Vous dites "des dossiers compliqués"...

Mais vous, vous n'avez pas une envie ?

Moi, j'ai envie de faire mon travail jusqu'au bout, et je le fais à 100 %. Je suis à Luxembourg avec les ministres de l'Agriculture et de la Pêche pour parler de la crise du porc, pour parler de la Politique agricole commune. J'étais hier à Bruxelles avec les pêcheurs. Je fais mon travail et je le ferai jusqu'au bout. Il y a un moment où je voudrai être totalement disponible pour conduire la campagne que le président de la République et mon parti m'ont demandé de conduire dans toute la France.

Alors, justement, cette campagne ne commence pas très bien. Vous avez vu le cafouillage de R. Dati avant-hier. Vous l'avez pris comment, notamment son retard, ne serait-ce que ça ?

Franchement, j'ai du mal à comprendre cette polémique. Franchement. J'étais présent à cette réunion. Elle est arrivée au moment qui était prévu puisqu'elle avait un autre engagement avant. Vous disiez sur votre antenne : "son premier meeting" ; ce n'est pas vrai. Nous avons tenu près de soixante réunions avec R. Dati dans la région parisienne.

Mais vous l'avez trouvée drôle ? Elle vous a fait rire ?

Oui, elle a été drôle. Parce que le moment était drôle. Ce qu'il faut comprendre, c'est que c'était la fin d'une réunion organisée par les jeunes, dans une ambiance formidable, et on a parlé d'Erasmus, on a parlé d'emploi, on a parlé de mobilité, on a parlé de la crise, et à la fin, il y avait un quizz, un moment de décontraction, d'humour, et elle était dans ce ton là, et pas autre chose.

Alors, comment expliquez-vous que les journalistes qui ont couvert le meeting, notamment Y. Goosz, ne vous a pas du tout trouvé souriant à ce moment là ?

Parce que je n'étais pas là. Il ne m'a pas trouvé souriant puisque j'étais parti pour une autre réunion. C'est pour ça qu'il ne m'a pas trouvé souriant.

Donc, en tout cas, cela vous a fait sourire rétrospectivement.

Oui, mais il faut être sérieux ; vous voyez bien comment vous rapportez les informations. C'était un moment de décontraction et d'humour, un moment un peu décalé. Elle était dans ce ton là. Nous avons fait soixante réunions, je le répète, rencontré près de 3.000 personnes, et on continuera à faire, avec Rachida, une campagne sérieuse, de contact et de dialogue avec les habitants d'Ile-de-France.

Merci M. Barnier.

Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 24 avril 2009