Texte intégral
M.-O. Fogiel.- Vous êtes la secrétaire d'Etat à la Famille, en tout cas pour l'instant. F. Fillon a chargé le député J. Leonetti d'une mission sur la modernisation de la légalisation sur l'autorité parentale et le droit des tiers, c'était votre dossier. Vous vous êtes sentie désavouée par le Premier ministre ?
Bien sûr que non.
Ah bon ? !
Vous savez qu'aujourd'hui vous avez 35 parlementaires en mission, donc c'est une habitude, c'est une tradition que de pouvoir sur beaucoup de textes avoir l'avis du Parlement, le compléter - ça a été le cas de M. Tabarot, qui a été rapporteur aussi en mission sur les modes de garde.
Mais une mauvaise habitude à vous écouter, puisque vous dites on ne peut pas parler de renouveau du Parlement en choisissant toujours les mêmes" ?
Oui, parce que...
Vous vous souvenez, vous l'aviez dit ?
Vous étiez là ? J'aime bien quand les journalistes disent : "vous l'aviez dit" mais qu'on triture un peu les phrases et qu'on prenne les choses...
Vous venez de me dire "oui".
Voilà la façon dont je l'ai dit : j'ai dit que ce serait bien, alors que certains parlementaires, certes, expérimentés, ont la charge de gros dossiers - je pense à J. Leonetti qui a une très grande expérience, c'est vrai, puisqu'il a en charge aussi la bioéthique, la mission d'information d'évaluation sur la loi sur la fin de vie, maintenant sur l'autorité parentale - c'est vrai que j'ai dit ce serait bien que de nouveaux parlementaires, pas jeunes, nouveaux parlementaires, puissent participer à d'autres choses.
En tout cas, lui est contre ce statut de beaux-parents pour les couples homosexuels, puisque vous vous voulez l'élargir ; il dit qu'il n'est pas pertinent d'aborder la question de l'homo-parentalité de manière détournée. Vous prenez une critique, là ?
Non, ça n'est pas une critique, parce que...
Ah bon !
... ce texte ne traite pas et ne change pas, dans le texte de la loi, n'inscrit aucune autre forme de familles. Ni les familles recomposées, ni les familles monoparentales, ni les familles homo-parentales.
Mais finalement, est-ce que il y aura donc un droit de beaux-parents pour les couples homosexuels ? Est-ce que ça y sera dans le texte, oui ou non ? C'était une promesse de campagne de N. Sarkozy.
Cet engagement fait partie du projet du président de la République, c'est aussi dans le tableau de bord de l'UMP, l'engagement numéro 9. Donc c'est très clairement affiché, mais il ne s'agit pas... Pour être très précise, ce texte ne parle ni de filiation, ni d'adoption. Il parle de l'autorité parentale...
Oui, mais on a entendu C. Boutin qui était contre cette autorité parentale. Est-ce qu'il y sera, oui ou non ?
Mais ce texte y sera, il a toujours été prévu que ce texte passe à l'automne au Parlement.
Avec, donc, cette mention-là ?
Donc, quand je lis ou quand je vous entends : "il a été ajourné", ou quand je vous entends dans votre annonce me dire que je me suis fait taper sur les doigts, je rappelle...
Non, j'ai dit : est-ce que vous vous êtes fait taper sur les doigts, vous n'avez pas dû entendre toute la phrase !
Enfin... Donc, ce texte a été à la fois validé par l'Elysée, validé par Matignon, validé à la Chancellerie. C'est le texte du Gouvernement.
Donc, ça y sera et donc en cette période de crise, on ne rassure pas la droite traditionnelle en revenant en arrière, par exemple ?
Mais il n'y a pas à rassurer la droite traditionnelle ! Est-ce qu'on enlève des droits aux familles traditionnelles ? On donne des outils juridiques nouveaux aux familles recomposées, monoparentales, et aux adultes de même sexe qui élèvent des enfants, c'est une réalité dans notre pays, nous la prendrons en compte, c'est l'engagement du Président. Ca concerne en tout 4 millions d'enfants, et ce sont des outils juridiques nouveaux.
A plusieurs reprises, vous vous êtes également prononcée en faveur d'une légalisation des mères porteuses dans le cadre d'une législation très stricte et non marchande. Du côté de C. Boutin, on vous accuse de traiter les questions de société "au bulldozer".
Ecoutez, chacun ses convictions, ça fait partie du débat démocratique.
Vous êtes dans le même Gouvernement.
Ça fait partie du débat démocratique. C'est très bien parce que vous voyez que dans ce Gouvernement, non seulement il y a l'ouverture, mais il y a une diversité très importante de convictions. Je ne suis pas pour les mères porteuses, comme vous l'avez dit, mais pour les femmes porteuses, c'est différent. Parc qu'une mère porteuse donne une partie de son capital génétique, alors qu'une femme porteuse, elle porte l'embryon d'un couple qui ne peut pas avoir d'enfant du fait de la stérilité utérine de la mère.
Vous, vous êtes pour l'instant secrétaire d'Etat chargée de la Famille.
Très heureuse, je vous rassure.
Ah bon ! Parce que, comme vous visiez l'Intérieur, la Défense, un ministère de l'Education élargi... Alors c'est vrai que depuis vous avez dit : non, non, je n'ai pas tout à fait dit cela, parce que vous vous êtes fait taper sur les doigts à l'Elysée...
Ca, c'est les journalistes ! Moi je n'ai pas besoin de me faire taper sur les doigts à l'Elysée, premièrement, parce que je n'ai pas besoin de passer par la presse pour dire à N. Sarkozy, que je vois très régulièrement, ce que je veux faire au service de mes convictions...
Vous voulez faire quoi alors, exactement ?
Ce que je veux faire pour la France...
Vous voulez faire quoi pour la France ? Plus que ça ?
Ce qui est une réalité pour moi, parce qu'on parle de l'honnêteté des politiques, ça serait bien qu'on parle un peu d'honnêteté journalistique. Parce que quand je lis des phrases détournées, manipulées, ça me soûle un peu. Ce que j'ai dit très concrètement, et ce que je redis encore une fois, c'est que j'ai travaillé à une prospective de rapprochement du ministère de la Famille et de l'Education nationale, comme en Espagne et comme en Angleterre. Parce que ça me semble judicieux et que ça pourrait être une nécessité, voilà. Ca, c'est une réalité, je l'ai fait et je l'ai dit.
Et donc, vous êtes candidate à ce super poste ?
Mais de toute façon c'est le président de la République qui décide. Mais s'il me confiait cette responsabilité, je l'accepterais avec joie. Et alors quand j'entends parler de promotion sur une ministère aussi difficile, que tout le monde me dit : "oh là, là, prendre l'Education nationale mais alors c'est tout à fait difficile !"
Mais pour l'instant vous n'êtes, entre guillemets, que "secrétaire d'Etat". Ministre c'est une marche supplémentaire dans votre cursus ?
Mais ce n'est pas comme ça que je raisonne. Je me suis engagée en politique pour changer la vie des gens, des Français, pour améliorer le fonctionnement de la France, c'est ça le sens de mon engagement.
Alors justement, puisque vous êtes engagée en politique, en deux mots, et ça va changer la vie des Français : pour ces "jardins d'éveil" pour les deux-trois ans, on parle beaucoup d'une offre pas suffisante. Qu'allez-vous faire pour qu'il y ait suffisamment de places pour ces jeunes enfants ? Concrètement, la mesure que vous voulez voir adopter, puisque là il y a une polémique ?
La mesure c'est 200.000 offres de gardes supplémentaires, c'est l'engagement du président de la République, et nous mettons, rien que dans ces 200.000 offres de gardes supplémentaires, 100.000 créations de crèches, de places de crèches supplémentaires, c'est un effort financier majeur de la part de l'Etat qui est de 1,3 milliard d'euros.
Mais les associations familiales disent que ce n'est pas assez.
Oui mais vous aurez toujours des gens qui vous diront que "ce n'est pas assez". Sauf qu'au regard du taux de natalité, c'est exactement les chiffres dont nous avons besoin, et donc nous les ferons avant la fin du quinquennat.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 22 avril 2009