Texte intégral
Merci à chacun d'entre vous pour votre contribution à cette table-ronde. Quand on parle de prévention, il faut se placer au plus près du terrain : athlètes, entraîneurs, environnement familial. Aujourd'hui nous avions l'élite des représentants de chacune de ces catégories puisqu'ils exercent leurs compétences au service de l'INSEP, le vaisseau amiral du sport français.
J'ai souhaité prendre la parole aujourd'hui sur la lutte anti dopage car il y a exactement un an, j'engageais à l'Assemblée Nationale et au Sénat la discussion autour de la loi sur la pénalisation de la détention de produits dopants. Adoptée puis promulguée avant l'édition 2008 du Tour de France, cette loi permet à la France de rester leader en matière de lutte anti dopage.
J'ai souhaité le faire en présence et avec la contribution d'Etienne APAIRE le président de la MILDT parce que je considère que c'est le même esprit qui anime ce texte sur la pénalisation de la détention qui nous a conduit à renforcer notre coopération avec la MILDT en lui confiant une véritable compétence en matière de dopage.
Comme vous l'a signalé son président Etienne APAIRE tout à l'heure, les phénomènes d'addiction aux produits dopants ou aux drogues sont similaires, les publics les plus fragiles également, les méthodes de prévention aussi. Parce que finalement, le dopage c'est de la drogue, la drogue c'est du dopage. D'ailleurs, je suis surpris du distingo qui peut être fait parfois sur la finalité de l'usage par des sportifs de la cocaïne ou du cannabis. Je voudrais simplement poser une question : est-ce que ce ne sont pas des produits interdits par la loi ?
A l'occasion de ces discussions au parlement il y a un an, de nombreux Parlementaires ont souligné la nécessité de renforcer les mesures de prévention. Il est évident que la prévention ne relève pas du niveau législatif : ce n'est pas la loi, ce n'est pas le Code du sport qui dit comment un entraîneur, un diététicien ou un parent doit tenir son athlète éloigné de ce type de produits. C'est leur propre éthique et leur propre action personnelle au quotidien qui parvient au bon résultat. Mais, le débat avec les Parlementaires a été extrêmement riche et a permis de faire émerger de nouvelles pistes de réflexion.
C'est dans cet esprit que le DVD la formation de formateurs, le guide, la mise à jour de la mallette... ont été réalisés. Au-delà des aspects prévention, la présence de la MILDT aujourd'hui est également l'illustration des similitudes qui existent entre la lutte anti-dopage et la lutte contre les stupéfiants. Dans les deux cas, nous avons des victimes, des trafiquants et des réseaux mafieux pour la fabrication et l'alimentation des filières.
Avec ma loi sur la pénalisation de la détention de produits dopants, nous avons comblé un vide juridique important : avant, il était possible de se balader avec des voitures pleines de produits sans que la Justice puisse réellement inquiéter le détenteur. Avec cette loi, nous avons radicalement changé la donne. Et les efforts déployés ont été bien perçus par le public. Je vous rappelle que la crédibilité du Tour de France a gagné plus de 20 points entre les éditions 2007 et 2008 selon un sondage de l'institut SportLab. Le rôle de nos Gendarmes y a été pour beaucoup. Mieux, en légitimant l'action des Gendarmes, nous avons fluidifié les procédures et protégé les gens propres. Comparez les actions de la Gendarmerie sur les Tour de France 2007 et 2008. Dans le premier cas, ils étaient prévenus tardivement, ils n'avaient pas de mandat clair pour intervenir et au final, la presse, les photographes et les badauds se pressaient en même temps qu'eux à la sortie de l'hôtel lors des opérations des forces de l'ordre. Les images étaient déplorables pour le public, pour le sport, pour les spectateurs et pour tous les coureurs intègres qui assistaient à l'événement. En 2008, les forces de l'ordre étaient parfaitement intégrées au dispositif et toutes les interpellations se sont faites en souplesse, sans impact négatif sur l'image de l'épreuve ou sur les coureurs sains. J'ai évidemment demandé à ce qu'un dispositif analogue soit mis en place pour le prochain Tour de France. Je veux en effet que l'on continue à améliorer la crédibilité de cette grande épreuve, partie intégrante du patrimoine de la France. Afin de remonter ces mesures au niveau international, j'ai affecté un officier de gendarmerie français auprès d'Interpol. Il prendra ses fonctions le 1er septembre prochain.
On me dit régulièrement que si on jetait un voile pudique sur les faits de dopage, on protègerait le sport. On me dit qu'en les révélant au grand jour, on jette l'opprobre sur le sport. C'est bien entendu tout le contraire. Bien sûr que l'on stigmatise les tricheurs. Mais les autres athlètes, leur compétitivité, la validité de leurs résultats, le Sport avec un grand S et les événements sportifs en sortent purifiés et grandis. Le Tour de France 2008 est exemplaire de ce point de vue. Les Français et tous les passionnés de cyclisme ne s'y sont pas trompés.
Prévention et répression : l'un ne va pas sans l'autre. Quand j'entends des athlètes qui se défendent en disant qu'ils ont pris ce produit parce qu'ils pensaient qu'il était indétectable, je me dis qu'il faut les sanctionner de manière exemplaire tant leur état d'esprit est corrompu.
Je vous dis tout cela d'autant plus librement que je suis moi-même ancien athlète, ancien entraîneur et que j'ai toujours évolué dans la famille du sport.
Le troisième pilier de cette lutte anti-dopage, c'est toute la partie contrôles.
Vous avez suivi comme moi le remarquable travail de l'AFLD, l'Agence Française de Lutte contre le Dopage lors du dernier Tour de France. L'Agence a montré que les tricheurs étaient attrapés et même que la menace planait plusieurs mois après le contrôle grâce au système des analyses rétroactives. Je soutiens fortement la position du président BORDRY dans ses négociations avec l'UCI pour avoir un rôle actif dans le ciblage et la gestion des résultats sur le Tour 2009.
De même, l'intérêt de sa campagne de tests capillaires dans les sports collectifs est inéluctable : le monde sportif commence à comprendre qu'aucun sport n'est épargné et qu'on ne doit pas continuer à se voiler la face. Les sports doivent être traités de manière homogène : il n'y a pas de raison que le cyclisme continue d'être l'arbre qui cache la forêt de la tricherie dans les autres sports.
On peut améliorer l'efficacité des contrôles par la recherche médicale. Celle là-même qui, détournée, permet aux tricheurs d'avoir une molécule d'avance sur les autorités de la lutte anti-dopage. Entre le premier usage de l'EPO pour augmenter artificiellement les performances et l'existence d'un test fiable, développé d'ailleurs par le laboratoire français, il s'est écoulé 15 ans. Nous avons, depuis novembre 2008, un protocole d'accord avec l'industrie du médicament pour que le développement de tout nouveau médicament potentiellement dopant donne lieu à une information des autorités antidopage. La durée de la phase de développement étant d'une quinzaine d'années, nous avons ainsi tout loisir de développer un test avant que le produit ne circule.
Prévention, contrôle, répression et surtout état d'esprit irréprochable de sportifs et engagement sans faille de l'encadrement proche : avec des gens comme vous, j'ai confiance en l'avenir d'un sport propre.
Je vous remercie. Etienne, moi et tous les participants sommes prêts à répondre à toutes vos questions.
Source http://www.sports.gouv.fr, le 4 juin 2009