Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
M. le Président du Conseil national de l'insertion par l'activité économique, cher Claude ALPHANDERY, je ne peux pas dire le moindre mot sans commencer par parler de vous.
1. Le 7 avril dernier, lors de la réunion plénière du CNIAE, j'ai déjà eu une première occasion de saluer en comité restreint le travail remarquable que vous avez mené à la tête du CNIAE depuis 1991. Mais je tiens à vous remercier à nouveau aujourd'hui, en présence de tous ceux qui, un peu partout en France, ont bénéficié de votre talent de pilote de l'IAE, 17 ans durant. Les structures de l'IAE sont héritières de l'esprit de Résistance que vous avez su incarner sur la durée. Voilà qui nous rappelle à notre devoir de toujours chercher à élever le niveau, à faire émerger une vision commune de ce que nous avons à construire ensemble.
La plus belle preuve de la réussite de votre action, c'est le grand nombre d'acteurs de l'IAE qui se sont rassemblés ici aujourd'hui. En 1998, lorsque l'IAE a trouvé une reconnaissance officielle, ce type d'initiative restait encore marginal. Aujourd'hui, nous sommes passés à la vitesse supérieure. Votre présence en force est un symbole de la place croissante que l'IAE a su occuper dans le paysage des entreprises et dans les mentalités. Le sondage qui a été réalisé en vue de ces Assises montre que les Sociétés d'Insertion par l'Activité économique (SIAE) sont désormais bien connues des Français. C'est une excellente nouvelle, en particulier à un moment où les publics les plus vulnérables sont en première ligne.
2. Votre départ prochain, cher Claude, ne signe pas la fin du CNIAE, bien au contraire : le conseil va poursuivre la lancée que vous avez su lui impulser. Car je réitère devant vous l'engagement que j'ai pris le 7 avril dernier : il n'y aura ni fusion, ni disparition du CNIAE, mais un renforcement.
Plus que jamais en effet, le Gouvernement a besoin des compétences du CNIAE. Vous bénéficiez de deux grands atouts : vous êtes directement opérationnels et vous êtes particulièrement bien adaptés aux problématiques propres aux publics en difficulté. Je souhaite donc que vous puissiez poursuivre votre travail sur la durée, en partenariat étroit avec l'Etat.
Cher Claude, pour préparer ce renforcement du CNIAE, je me risque donc à vous demander une dernière faveur que, j'espère, vous ne me refuserez pas. Je souhaite, si vous le voulez bien, que vous profitiez cette période de transition pour vous concerter brièvement avec les parties prenantes, et nous transmettre, à Martin HIRSCH et à moi-même, une liste synthétique de préconisations sur les missions du futur CNIAE, sa gouvernance, sa relation avec le monde économique et ses moyens. L'idéal serait que vous nous remettiez ce bref document courant juin, afin que nous puissions en tenir compte dans la lettre de mission que nous confierons au nouveau Président. L'IAE est une initiative née au coeur du terrain et elle doit continuer à l'être.
C'est cet état d'esprit qui guide la modernisation de l'IAE et sur lequel je vais revenir maintenant, avant de préciser les acquis de la première étape de la réforme, puis les défis qu'il nous reste à relever ensemble.
I. Tout d'abord, je tiens à souligner que le dynamisme de votre action joue un rôle clé pour renforcer la vision de la société qui fonde la politique du gouvernement.
Le risque, quand on traverse une phase de tempête économique, c'est de voir revenir les vieux démons : c'est que l'on ferme la porte aux demandeurs d'emploi peu ou pas qualifiés, aux jeunes sans expérience professionnelle, aux séniors proches de l'âge de la retraite.
Or, vous, les acteurs de l'IAE épaulés par les services de l'Etat, dans cette période difficile où les entreprises peinent à conserver leurs salariés, y compris les plus qualifiés d'entre eux, vous ne cédez ni à la fatalité, ni à la facilité. Vous continuez à relever le défi que vous vous êtes donné de réinsérer par le travail des hommes et des femmes qui sont souvent sans qualification, des personnes qui, souvent, à cause d'un parcours personnel douloureux, n'ont jamais travaillé. Soyons clairs : vous recrutez ceux de nos concitoyens dont les employeurs n'examinent même pas les CV, ceux qui sans vous resteraient définitivement sur le bas-côté de la route. Vous êtes le dernier relai dynamique, le filet qui rattrape les gens pour les empêcher de tomber dans la spirale de l'exclusion.
Vous faites un pari qui pouvait paraître un peu fou au départ, mais qui, à force de ténacité, a prouvé son efficacité économique. Vous avez montré qu'éthique et profit ne sont pas incompatibles, bien au contraire. Plutôt que de distribuer des aides sans contrepartie, vous insérez les exclus dans le marché du travail en passant avec eux un contrat d'engagement réciproque et en les accompagnant sur la durée : vous les encadrez avant qu'ils ne commencent à travailler à leur poste, puis pendant leur contrat, et encore après, une fois qu'ils ont suffisamment pris confiance en eux pour rebondir ailleurs. Votre action n'est pas de l'assistanat, mais du volontariat économiquement productif.
De fait, on ne comprend rien à l'IAE si on oublie qu'elle se fonde sur l'idée d'une interdépendance entre la dignité de la personne et le travail. Je suis intimement persuadé qu'instaurer une logique gagnant-gagnant entre le salarié et son employeur, c'est la meilleure manière de responsabiliser les acteurs et de consolider le pacte social. La politique du gouvernement est claire : on ne fera pas une économie efficace, on ne fera pas une société apaisée en excluant de l'emploi, les jeunes, les salariés âgés et ceux de nos concitoyens que le marché du travail, spontanément, ne retient pas.
II. Les métiers que vous exercez sont des métiers à vocation, des métiers exigeants, qui jouent un rôle majeur pour la cohésion sociale. En retour, vous êtes en droit d'attendre un soutien efficace de la part de l'Etat. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité renforcer le contrat d'efficacité et de performance qui nous lie. Le renforcement se déroule en deux temps. Nous avons déjà passés une première étape de valorisation de l'IAE. Quels sont les premiers résultats auxquels nous sommes parvenus ?
D'une part, dans le cadre du plan de cohésion sociale, le budget dédié à l'IAE (hors contrats aidés) est passé de 117 millions d'euros en 2004 à 200 millions d'euros en 2009. Cette forte augmentation a permis aux acteurs de l'IAE de gagner en visibilité et en stabilité. Mais il faut qu'on aille plus loin encore.
D'autre part, le plan de modernisation de l'IAE, dans le prolongement du Grenelle de l'insertion, mobilise des outils qui vont vous permettre d'atteindre notre vitesse de croisière.
- Les structures sont désormais conventionnées en fonction d'objectifs précis, négociés entre les services de l'Etat et les structures de l'IAE, et déclinés en fonction des territoires.
Quel objectif se fixe-t-on avec un salarié en insertion quand on le salarie, à 3, 6, 12 mois ? Quels objectifs nous fixons-nous ensemble pour que votre structure réussisse les paris qu'elle fait au quotidien avec ses salariés ? Négocier une feuille de route avec les acteurs de l'insertion, cela permet de garantir que ces objectifs soient réalistes et que chacun avance dans la même direction, avec le même tableau de bord.
Définir des objectifs clairs et évaluer régulièrement les résultats, c'est aussi vous reconnaître comme des acteurs économiques à part entière. Ce n'est pas parce qu'on vient en aide à des gens en difficulté qu'il ne faut pas évaluer ce qu'on fait et ouvrir grand les vannes financières. Au contraire, c'est justement parce qu'on s'adresse à des gens qui en ont vraiment besoin qu'il faut mener une politique exemplaire en termes d'efficacité.
- Dans les mois qui viennent, on va améliorer le dispositif à partir des remontées de terrain et des bonnes pratiques qu'on aura rassemblées. On garde une ligne directrice sans ambiguïté : pas d'usine à gaz. Nous voulons le dispositif le plus simple et le plus lisible possible.
- Se mesurer, c'est anticiper et progresser. J'ai trop souvent vécu ce moment où une entreprise d'IAE bascule dans le rouge. L'IAE, c'est un métier difficile, soumis à beaucoup d'aléas. J'ai fait mes premiers pas d'élu local en accompagnant une entreprise d'IAE chez moi, en Haute-Loire, et j'ai pu constater à la fois l'efficacité du dispositif, mais aussi sa fragilité. Je pense notamment à cette entreprise de palettes de bois qui a failli mettre la clé sous la porte : c'étaient 10 ans de travail qui risquaient de partir au tapis parce que le déficit s'était creusé d'année en année. On a failli ne pas les sauver.
A partir de fin avril, on va donc lancer une campagne de diagnostics économiques et financiers sur les structures de l'IAE. Le principe est simple : si on identifie des besoins en fonds propres, on mettra en place des tours de tables réunissant tous les financeurs, pour accompagner les projets de consolidation et de développement des structures de l'IAE.
- D'autres réformes, lancées dans le cadre du plan de modernisation, sont actuellement en cours. Elles concernent les modalités de financement des structures et l'animation des politiques d'IAE au niveau territorial : comme vous le savez, à la demande du CNIAE, le gouvernement a lancé une opération de redynamisation des conseils départementaux de l'IAE. Les séminaires interrégionaux des CDIAE organisés à l'automne dernier ont réuni 1300 acteurs d'horizons divers (services de l'Etat, collectivités locales, représentants du secteur de l'IAE et acteurs du monde de l'entreprise). Vous êtes nombreux ici à nous avoir fait bénéficier de votre expertise et je vous en remercie.
- Enfin, nous avons mis en place des mesures spécifiques : un taux de cotisation spécial pour les salariés en contrats aidés dans les Ateliers et chantiers d'insertion (ACI) et le financement de 1500 postes supplémentaires pour les Entreprises d'insertion (EI) et les Entreprises de Travail temporaire d'insertion (ETTI). L'IAE s'est vu accorder une place majeure au sein du plan de relance : c'est une grande première, une sorte de petite révolution dans les têtes.
III. Mais il faut encore aller plus loin. Après une phase de décollage de l'IAE, nous voilà parvenus à mi-parcours : nous entrons à présent dans la deuxième phase de redynamisation de l'IAE. Elle passe par une double amélioration : celle de la gouvernance et celle des outils.
1. La bonne gouvernance pour l'IAE doit s'établir entre l'Etat et les conseils généraux. D'ailleurs, le sondage que nous avons fait réaliser en vue de ces assises montre que dans l'esprit de nos concitoyens, les 3 acteurs les plus à même d'assurer l'insertion font jeu quasi égal : les collectivités territoriales (23%), les Sociétés d'insertion par l'activité économique (21%) et l'Etat (19%). Faisons en sorte que ce trio soit un tiercé gagnant !
A ce titre, les CDIAE ont vocation à être le lieu d'expression d'une gouvernance partagée. Je vais écrire à l'Assemblée des départements de France pour qu'une fois par an, dans le cadre des CDIAE, le représentant du Préfet et celui du Conseil général viennent exposer les objectifs en matière d'offre d'insertion, à partir du bilan de l'année écoulée : quels sont les moyens qu'ils y consacrent ? quels sont les publics qu'ils visent ? Quels sont les territoires où s'exercent les actions prioritaires ?
Par cette mesure simple, il s'agit de donner une vraie visibilité aux acteurs, en leur fournissant l'occasion de s'exprimer autour de la même table et d'adapter leurs priorités. C'est en mutualisant ainsi les idées qu'on pourra utiliser efficacement les clauses d'insertion sociale dans les marchés publics.
N'ayez aucun doute là-dessus : l'Etat et les conseils généraux ont un intérêt évident à ce que vous réussissiez dans votre entreprise - un intérêt non seulement social, mais aussi économique. Je souhaite que les CDIAE puissent offrir un cadre régulier et pérenne à la construction des conditions de cette réussite.
Ces Assises sont pour moi un point de départ important. Nous voulons établir un suivi continu de l'action des CDIAE, à l'aide d'un centre de ressources national, créer une banque de données des bonnes pratiques, actualiser au fur et à mesure le kit de pilotage, et développer les tableaux de bord à la disposition des CDIAE.
Les outils ne font pas une politique, mais on ne fait pas de politique sans de bons outils.
2. Deuxième point : parlons-donc des outils utiles, et d'abord de la formation. Nous sommes dans la dernière ligne droite du projet de réforme de la formation professionnelle, qui sera bientôt débattu au Parlement. Avec la création du Fonds d'investissement social, le Président de la République a montré l'importance qu'il attache à la mobilisation de l'outil formation dans toutes ses dimensions : non seulement en direction de ceux qui déjà qualifiés et qui veulent aller plus loin, mais aussi pour ceux qui ne sont pas qualifiés.
Je souhaite que nous développions cet outil formidable qu'est le contrat de professionnalisation dans les Sociétés d'insertion par l'activité économique (SIAE). Il faut aussi renforcer les certifications-passerelles et la valorisation des acquis de l'expérience (VAE) : elles répondent bien en effet aux besoins de salariés qui gardent un mauvais souvenir des bancs de l'école et qui doivent pouvoir progresser par étapes, à leur rythme et en voyant directement l'utilité de ce qu'ils apprennent.
Il reste des freins techniques, organisationnels qu'il nous faut expertiser pour faire tourner le système de l'IAE à plein régime.
C'est pourquoi je souhaite que nous organisions en 2010 de véritables assises, mais cette fois des assises spécifiquement consacrées à la formation et à la professionnalisation des salariés des Sociétés d'insertion par l'activité économique (SIAE). Ces assises concerneront aussi les encadrants, car leurs métiers doivent être mieux reconnus.
Plus largement, j'attends beaucoup de vos discussions. Je souhaite que votre expertise du territoire vous incite à être forces de proposition et porteurs de projets innovants.
Je vous remercie.
Source http://www.cniae.gouv.fr, le 20 juillet 2009
M. le Président du Conseil national de l'insertion par l'activité économique, cher Claude ALPHANDERY, je ne peux pas dire le moindre mot sans commencer par parler de vous.
1. Le 7 avril dernier, lors de la réunion plénière du CNIAE, j'ai déjà eu une première occasion de saluer en comité restreint le travail remarquable que vous avez mené à la tête du CNIAE depuis 1991. Mais je tiens à vous remercier à nouveau aujourd'hui, en présence de tous ceux qui, un peu partout en France, ont bénéficié de votre talent de pilote de l'IAE, 17 ans durant. Les structures de l'IAE sont héritières de l'esprit de Résistance que vous avez su incarner sur la durée. Voilà qui nous rappelle à notre devoir de toujours chercher à élever le niveau, à faire émerger une vision commune de ce que nous avons à construire ensemble.
La plus belle preuve de la réussite de votre action, c'est le grand nombre d'acteurs de l'IAE qui se sont rassemblés ici aujourd'hui. En 1998, lorsque l'IAE a trouvé une reconnaissance officielle, ce type d'initiative restait encore marginal. Aujourd'hui, nous sommes passés à la vitesse supérieure. Votre présence en force est un symbole de la place croissante que l'IAE a su occuper dans le paysage des entreprises et dans les mentalités. Le sondage qui a été réalisé en vue de ces Assises montre que les Sociétés d'Insertion par l'Activité économique (SIAE) sont désormais bien connues des Français. C'est une excellente nouvelle, en particulier à un moment où les publics les plus vulnérables sont en première ligne.
2. Votre départ prochain, cher Claude, ne signe pas la fin du CNIAE, bien au contraire : le conseil va poursuivre la lancée que vous avez su lui impulser. Car je réitère devant vous l'engagement que j'ai pris le 7 avril dernier : il n'y aura ni fusion, ni disparition du CNIAE, mais un renforcement.
Plus que jamais en effet, le Gouvernement a besoin des compétences du CNIAE. Vous bénéficiez de deux grands atouts : vous êtes directement opérationnels et vous êtes particulièrement bien adaptés aux problématiques propres aux publics en difficulté. Je souhaite donc que vous puissiez poursuivre votre travail sur la durée, en partenariat étroit avec l'Etat.
Cher Claude, pour préparer ce renforcement du CNIAE, je me risque donc à vous demander une dernière faveur que, j'espère, vous ne me refuserez pas. Je souhaite, si vous le voulez bien, que vous profitiez cette période de transition pour vous concerter brièvement avec les parties prenantes, et nous transmettre, à Martin HIRSCH et à moi-même, une liste synthétique de préconisations sur les missions du futur CNIAE, sa gouvernance, sa relation avec le monde économique et ses moyens. L'idéal serait que vous nous remettiez ce bref document courant juin, afin que nous puissions en tenir compte dans la lettre de mission que nous confierons au nouveau Président. L'IAE est une initiative née au coeur du terrain et elle doit continuer à l'être.
C'est cet état d'esprit qui guide la modernisation de l'IAE et sur lequel je vais revenir maintenant, avant de préciser les acquis de la première étape de la réforme, puis les défis qu'il nous reste à relever ensemble.
I. Tout d'abord, je tiens à souligner que le dynamisme de votre action joue un rôle clé pour renforcer la vision de la société qui fonde la politique du gouvernement.
Le risque, quand on traverse une phase de tempête économique, c'est de voir revenir les vieux démons : c'est que l'on ferme la porte aux demandeurs d'emploi peu ou pas qualifiés, aux jeunes sans expérience professionnelle, aux séniors proches de l'âge de la retraite.
Or, vous, les acteurs de l'IAE épaulés par les services de l'Etat, dans cette période difficile où les entreprises peinent à conserver leurs salariés, y compris les plus qualifiés d'entre eux, vous ne cédez ni à la fatalité, ni à la facilité. Vous continuez à relever le défi que vous vous êtes donné de réinsérer par le travail des hommes et des femmes qui sont souvent sans qualification, des personnes qui, souvent, à cause d'un parcours personnel douloureux, n'ont jamais travaillé. Soyons clairs : vous recrutez ceux de nos concitoyens dont les employeurs n'examinent même pas les CV, ceux qui sans vous resteraient définitivement sur le bas-côté de la route. Vous êtes le dernier relai dynamique, le filet qui rattrape les gens pour les empêcher de tomber dans la spirale de l'exclusion.
Vous faites un pari qui pouvait paraître un peu fou au départ, mais qui, à force de ténacité, a prouvé son efficacité économique. Vous avez montré qu'éthique et profit ne sont pas incompatibles, bien au contraire. Plutôt que de distribuer des aides sans contrepartie, vous insérez les exclus dans le marché du travail en passant avec eux un contrat d'engagement réciproque et en les accompagnant sur la durée : vous les encadrez avant qu'ils ne commencent à travailler à leur poste, puis pendant leur contrat, et encore après, une fois qu'ils ont suffisamment pris confiance en eux pour rebondir ailleurs. Votre action n'est pas de l'assistanat, mais du volontariat économiquement productif.
De fait, on ne comprend rien à l'IAE si on oublie qu'elle se fonde sur l'idée d'une interdépendance entre la dignité de la personne et le travail. Je suis intimement persuadé qu'instaurer une logique gagnant-gagnant entre le salarié et son employeur, c'est la meilleure manière de responsabiliser les acteurs et de consolider le pacte social. La politique du gouvernement est claire : on ne fera pas une économie efficace, on ne fera pas une société apaisée en excluant de l'emploi, les jeunes, les salariés âgés et ceux de nos concitoyens que le marché du travail, spontanément, ne retient pas.
II. Les métiers que vous exercez sont des métiers à vocation, des métiers exigeants, qui jouent un rôle majeur pour la cohésion sociale. En retour, vous êtes en droit d'attendre un soutien efficace de la part de l'Etat. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité renforcer le contrat d'efficacité et de performance qui nous lie. Le renforcement se déroule en deux temps. Nous avons déjà passés une première étape de valorisation de l'IAE. Quels sont les premiers résultats auxquels nous sommes parvenus ?
D'une part, dans le cadre du plan de cohésion sociale, le budget dédié à l'IAE (hors contrats aidés) est passé de 117 millions d'euros en 2004 à 200 millions d'euros en 2009. Cette forte augmentation a permis aux acteurs de l'IAE de gagner en visibilité et en stabilité. Mais il faut qu'on aille plus loin encore.
D'autre part, le plan de modernisation de l'IAE, dans le prolongement du Grenelle de l'insertion, mobilise des outils qui vont vous permettre d'atteindre notre vitesse de croisière.
- Les structures sont désormais conventionnées en fonction d'objectifs précis, négociés entre les services de l'Etat et les structures de l'IAE, et déclinés en fonction des territoires.
Quel objectif se fixe-t-on avec un salarié en insertion quand on le salarie, à 3, 6, 12 mois ? Quels objectifs nous fixons-nous ensemble pour que votre structure réussisse les paris qu'elle fait au quotidien avec ses salariés ? Négocier une feuille de route avec les acteurs de l'insertion, cela permet de garantir que ces objectifs soient réalistes et que chacun avance dans la même direction, avec le même tableau de bord.
Définir des objectifs clairs et évaluer régulièrement les résultats, c'est aussi vous reconnaître comme des acteurs économiques à part entière. Ce n'est pas parce qu'on vient en aide à des gens en difficulté qu'il ne faut pas évaluer ce qu'on fait et ouvrir grand les vannes financières. Au contraire, c'est justement parce qu'on s'adresse à des gens qui en ont vraiment besoin qu'il faut mener une politique exemplaire en termes d'efficacité.
- Dans les mois qui viennent, on va améliorer le dispositif à partir des remontées de terrain et des bonnes pratiques qu'on aura rassemblées. On garde une ligne directrice sans ambiguïté : pas d'usine à gaz. Nous voulons le dispositif le plus simple et le plus lisible possible.
- Se mesurer, c'est anticiper et progresser. J'ai trop souvent vécu ce moment où une entreprise d'IAE bascule dans le rouge. L'IAE, c'est un métier difficile, soumis à beaucoup d'aléas. J'ai fait mes premiers pas d'élu local en accompagnant une entreprise d'IAE chez moi, en Haute-Loire, et j'ai pu constater à la fois l'efficacité du dispositif, mais aussi sa fragilité. Je pense notamment à cette entreprise de palettes de bois qui a failli mettre la clé sous la porte : c'étaient 10 ans de travail qui risquaient de partir au tapis parce que le déficit s'était creusé d'année en année. On a failli ne pas les sauver.
A partir de fin avril, on va donc lancer une campagne de diagnostics économiques et financiers sur les structures de l'IAE. Le principe est simple : si on identifie des besoins en fonds propres, on mettra en place des tours de tables réunissant tous les financeurs, pour accompagner les projets de consolidation et de développement des structures de l'IAE.
- D'autres réformes, lancées dans le cadre du plan de modernisation, sont actuellement en cours. Elles concernent les modalités de financement des structures et l'animation des politiques d'IAE au niveau territorial : comme vous le savez, à la demande du CNIAE, le gouvernement a lancé une opération de redynamisation des conseils départementaux de l'IAE. Les séminaires interrégionaux des CDIAE organisés à l'automne dernier ont réuni 1300 acteurs d'horizons divers (services de l'Etat, collectivités locales, représentants du secteur de l'IAE et acteurs du monde de l'entreprise). Vous êtes nombreux ici à nous avoir fait bénéficier de votre expertise et je vous en remercie.
- Enfin, nous avons mis en place des mesures spécifiques : un taux de cotisation spécial pour les salariés en contrats aidés dans les Ateliers et chantiers d'insertion (ACI) et le financement de 1500 postes supplémentaires pour les Entreprises d'insertion (EI) et les Entreprises de Travail temporaire d'insertion (ETTI). L'IAE s'est vu accorder une place majeure au sein du plan de relance : c'est une grande première, une sorte de petite révolution dans les têtes.
III. Mais il faut encore aller plus loin. Après une phase de décollage de l'IAE, nous voilà parvenus à mi-parcours : nous entrons à présent dans la deuxième phase de redynamisation de l'IAE. Elle passe par une double amélioration : celle de la gouvernance et celle des outils.
1. La bonne gouvernance pour l'IAE doit s'établir entre l'Etat et les conseils généraux. D'ailleurs, le sondage que nous avons fait réaliser en vue de ces assises montre que dans l'esprit de nos concitoyens, les 3 acteurs les plus à même d'assurer l'insertion font jeu quasi égal : les collectivités territoriales (23%), les Sociétés d'insertion par l'activité économique (21%) et l'Etat (19%). Faisons en sorte que ce trio soit un tiercé gagnant !
A ce titre, les CDIAE ont vocation à être le lieu d'expression d'une gouvernance partagée. Je vais écrire à l'Assemblée des départements de France pour qu'une fois par an, dans le cadre des CDIAE, le représentant du Préfet et celui du Conseil général viennent exposer les objectifs en matière d'offre d'insertion, à partir du bilan de l'année écoulée : quels sont les moyens qu'ils y consacrent ? quels sont les publics qu'ils visent ? Quels sont les territoires où s'exercent les actions prioritaires ?
Par cette mesure simple, il s'agit de donner une vraie visibilité aux acteurs, en leur fournissant l'occasion de s'exprimer autour de la même table et d'adapter leurs priorités. C'est en mutualisant ainsi les idées qu'on pourra utiliser efficacement les clauses d'insertion sociale dans les marchés publics.
N'ayez aucun doute là-dessus : l'Etat et les conseils généraux ont un intérêt évident à ce que vous réussissiez dans votre entreprise - un intérêt non seulement social, mais aussi économique. Je souhaite que les CDIAE puissent offrir un cadre régulier et pérenne à la construction des conditions de cette réussite.
Ces Assises sont pour moi un point de départ important. Nous voulons établir un suivi continu de l'action des CDIAE, à l'aide d'un centre de ressources national, créer une banque de données des bonnes pratiques, actualiser au fur et à mesure le kit de pilotage, et développer les tableaux de bord à la disposition des CDIAE.
Les outils ne font pas une politique, mais on ne fait pas de politique sans de bons outils.
2. Deuxième point : parlons-donc des outils utiles, et d'abord de la formation. Nous sommes dans la dernière ligne droite du projet de réforme de la formation professionnelle, qui sera bientôt débattu au Parlement. Avec la création du Fonds d'investissement social, le Président de la République a montré l'importance qu'il attache à la mobilisation de l'outil formation dans toutes ses dimensions : non seulement en direction de ceux qui déjà qualifiés et qui veulent aller plus loin, mais aussi pour ceux qui ne sont pas qualifiés.
Je souhaite que nous développions cet outil formidable qu'est le contrat de professionnalisation dans les Sociétés d'insertion par l'activité économique (SIAE). Il faut aussi renforcer les certifications-passerelles et la valorisation des acquis de l'expérience (VAE) : elles répondent bien en effet aux besoins de salariés qui gardent un mauvais souvenir des bancs de l'école et qui doivent pouvoir progresser par étapes, à leur rythme et en voyant directement l'utilité de ce qu'ils apprennent.
Il reste des freins techniques, organisationnels qu'il nous faut expertiser pour faire tourner le système de l'IAE à plein régime.
C'est pourquoi je souhaite que nous organisions en 2010 de véritables assises, mais cette fois des assises spécifiquement consacrées à la formation et à la professionnalisation des salariés des Sociétés d'insertion par l'activité économique (SIAE). Ces assises concerneront aussi les encadrants, car leurs métiers doivent être mieux reconnus.
Plus largement, j'attends beaucoup de vos discussions. Je souhaite que votre expertise du territoire vous incite à être forces de proposition et porteurs de projets innovants.
Je vous remercie.
Source http://www.cniae.gouv.fr, le 20 juillet 2009