Texte intégral
M. Darmon.- On du mal à comprendre, sa cote grimpe en même temps que la fièvre des agriculteurs. B. Le Maire, vous dites "la France traverse la crise la plus grave sur le plan agricole depuis 30 ans", mais c'est un constat qui se transmet de ministre en ministre, et la crise est toujours là ?
Je crois que c'est une crise qui a deux aspects. Il y a une crise d'abord financière, de trésorerie, une crise économique dont la particularité - c'est pour ça que je dis que c'est la plus grave depuis 30 ans -, c'est qu'elle touche toutes les filières. Quand vous faites du lait, vous perdez de l'argent aujourd'hui. Si vous faites des céréales en plus, comme le cours des céréales a baissé, vous perdez aussi de l'argent sur les céréales, vous ne pouvez pas vous refaire sur les céréales. Donc, la crise touche toutes les filières, c'est donc d'une gravité particulière. Et puis il y a un deuxième aspect aussi qui me paraît important c'est que, je crois que l'agriculture française traverse une crise d'identité, elle se demande ce qu'on attend d'elle aujourd'hui en France, quelles sont ses perspectives en Europe, quels sont les soutiens dont elle disposera, et je crois que le rôle du ministre de l'Agriculture, c'est à la fois de répondre à la crise immédiate, et en même temps de dire aux agriculteurs : "vous êtes une activité stratégique en France, nous vous défendrons".
La colère quand même est forte, malgré vos propos apaisants, la colère quand même est forte, déjà des préfets disent pour demain - parce qu'il y a une journée de mobilisation donc nationale, organisée par la FNSEA - déjà les préfets disent : attention, ça va être très très dur. Que dites-vous aux agriculteurs qui peuvent entendre ?
Je leur dis que, nous travaillons nuit et jour pour apporter des solutions immédiates. On a déjà fait un certain nombre d'efforts sur la trésorerie des agriculteurs, en apportant des aides publiques importantes ; nous verserons demain les aides de la PAC, qui représentent une somme très importante, un mois et demi à l'avance - normalement elles sont versées le 1er décembre, elles seront versées demain. Et puis par ailleurs, je regarde attentivement quel est le revenu exact de l'ensemble des agriculteurs en France. Et les premières indications dont je dispose, montrent que tous les agriculteurs en France ont perdu de 10 à 20 % de leurs revenus en 2009. Quel Français accepterait aujourd'hui de perdre 10 à 20 % de son revenu ! Dès que j'aurai les indications plus précises, je ferai des propositions au président de la République et au Premier ministre, en vue de définir un plan global de soutien aux agriculteurs français. Nous l'avons fait pour l'industrie automobile, parce que ça allait très mal, en estimant qu'il ne fallait pas perdre les capacités automobiles françaises. J'estime que il serait logique, il serait légitime de faire la même chose pour les agriculteurs de France.
La crise du lait, est très forte dans les campagnes, est-elle maîtrisée ou est-ce que les mesures qui ont été annoncées, qui seront annoncées, sont justes des palliatifs face à une dérégulation du marché, qui de toute manière est inéluctable ?
Là aussi, je crois qu'il faut bien voir les deux aspects de ce sujet. Il y a la crise du revenu avec l'effondrement du prix du lait ; on apporte des réponses, on aide la trésorerie des agriculteurs, notamment des producteurs de lait. Et puis, il y a la nécessité de donner des assurances sur le long terme aux agriculteurs français, et notamment aux producteurs de lait. Ca, c'est la bataille pour la régulation européenne que je conduis depuis plusieurs semaines. On ne sortira pas de la crise si on donne uniquement des réponses de court terme aux agriculteurs.
Vous êtes entendu, parce qu'il y a un Conseil de l'agriculture, là, bientôt...
Nous avons commencé à deux, avec l'Allemagne début juillet, en disant : la voie de la dérégulation c'est une impasse. Il faut des règles européennes, il faut maîtriser le marché, sinon personne ne s'en sortira. Nous sommes aujourd'hui au moment où je vous parle, 21 Etats à être sur cette ligne de la régulation. Je mettrai toute la pression politique qu'il faudra pour convaincre la présidence suédoise et la Commission au prochain Conseil des ministres de l'agriculture qui a lieu lundi, de s'engager définitivement dans cette voie de la régulation.
Sur le coup de "Je claquerai la porte, je partirai si je n'y arrive pas ?"...
On n'en est pas encore là, mais je peux vous dire que ma détermination est totale, parce que c'est une simple question de bon sens et une question de justice. Vous n'arriverez pas à maintenir une agriculture en France et en Europe s'il n'y a pas un encadrement par des règles du marché.
Vous parlez de crise d'identité des agriculteurs, régulièrement des élus des départements ruraux défilent dans le bureau du président de la République ou font passer des messages en disant : on n'est pas entendus, on n'est pas assez considérés, vous êtes plus dans les usines que dans les fermes. Que se passe-t-il ? Ils prennent conscience que le président de la République n'est pas vraiment en phase avec le monde agricole ?
Je crois que le président de la République est en phase avec le monde agricole, et je crois surtout qu'il y prête une attention particulière et quotidienne. Je vais vous dire, il laisse au ministre de l'Agriculture gérer la crise actuelle, ce qui me paraît de bonne politique, et je peux vous dire qu'il suit au jour le jour ce qui se passe dans le monde agricole. Je le tiens informé régulièrement de ce qui se passe, des mesures qui pourraient être prises, et il est tout à fait déterminé à apporter les réponses nécessaires, fortes, aux questions que se posent les agriculteurs.
Une des réponses c'est de dire : "je ne ferai plus de chèque à la FNSEA pour régler les problèmes des producteurs". C'est assez mal pris par le monde agricole. Est-ce que c'est une réponse justement à donner au monde paysan ?
D'abord, ce sont des propos qui sont prêtés au président de la République, et par ailleurs, il apportera des réponses, fortes, les réponses qui sont attendues par les agriculteurs. Et il ne les apportera pas comme ça, un jour, parce qu'il se sera dit "tiens, je vais parler aux agriculteurs", il les apportera parce que, depuis le premier jour où je suis ministre de l'Agriculture, il se tient informé de ce qui se passe dans le monde agricole. Il me demande des propositions, des solutions, et il regarde de très près ce qui se passe. Il a une attention particulière au monde agricole.
Vous sillonnez beaucoup le pays, est-ce que les prises de position de N. Sarkozy - RSA jeunes, taxe carbone, suppression des tests ADN - est-ce que c'est bien compris par cet électorat qui, au fond, sur une base assez droitière, a voté pour lui en 2007 ?
Je crois que les agriculteurs, aujourd'hui, leur préoccupation première, c'est qu'on réponde à leurs questions sur le revenu, et surtout qu'on leur offre une perspective de long terme. Qu'on leur dise : oui, vous êtes une activité stratégique pour la France, vous êtes une activité stratégique pour l'Europe, et on prendra les moyens de vous défendre. Sur la taxe carbone, par exemple...
Mais est-ce que ce n'est pas toujours les sacrifiés de la mondialisation et de l'Europe qui avance, on dit toujours ça aux agriculteurs, et ce sont eux qui perdent le plus !
Je crois justement qu'il faut remettre l'agriculture à sa juste place, c'est-à-dire, bien faire comprendre à chacun que c'est une activité stratégique, non seulement pour la France mais aussi pour l'Union européenne. Vous faisiez tout à l'heure un reportage sur la faim dans le monde. Mais qui va nourrir le monde si ce n'est des agriculteurs européens ! On regardait les problèmes de sécurité sanitaire qui étaient évoqués également. Qui va garantir la sécurité sanitaire des aliments sinon les agriculteurs ! Je pense qu'il est temps que nous reprenions conscience du caractère stratégique de l'agriculture française européenne.
Est-ce que vous constatez, comme certains élus, dont P. Cardo par exemple, est-ce que vous dites : il y aura un impact sur les élections, sur les électeurs, des récentes polémiques, comme celle par exemple sur J. Sarkozy ?
Je ne crois pas du tout. Je pense que les électeurs sont par définition, je vous le dis comme ancien député, des gens lucides qui savent faire la part des choses entre l'écume et les vrais sujets de fond. J. Sarkozy a été élu par le Conseil général pour être candidat à la présidence de l'EPAD. Il est légitime parce qu'il est élu.
Est-ce que R. Yade a eu raison de dire : "Il faut quand même tenir compte de l'émotion de l'opinion" ?
Je crois qu'il faut tenir compte de l'élection par le Conseil général de J. Sarkozy comme candidat à l'EPAD.
Mais est-ce qu'elle a eu raison de dire ça ?
Je vous dis qu'il faut tenir compte de l'élection, c'est ça qui est important. Il faut toujours regarder les sujets de fond.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 15 octobre 2009
Je crois que c'est une crise qui a deux aspects. Il y a une crise d'abord financière, de trésorerie, une crise économique dont la particularité - c'est pour ça que je dis que c'est la plus grave depuis 30 ans -, c'est qu'elle touche toutes les filières. Quand vous faites du lait, vous perdez de l'argent aujourd'hui. Si vous faites des céréales en plus, comme le cours des céréales a baissé, vous perdez aussi de l'argent sur les céréales, vous ne pouvez pas vous refaire sur les céréales. Donc, la crise touche toutes les filières, c'est donc d'une gravité particulière. Et puis il y a un deuxième aspect aussi qui me paraît important c'est que, je crois que l'agriculture française traverse une crise d'identité, elle se demande ce qu'on attend d'elle aujourd'hui en France, quelles sont ses perspectives en Europe, quels sont les soutiens dont elle disposera, et je crois que le rôle du ministre de l'Agriculture, c'est à la fois de répondre à la crise immédiate, et en même temps de dire aux agriculteurs : "vous êtes une activité stratégique en France, nous vous défendrons".
La colère quand même est forte, malgré vos propos apaisants, la colère quand même est forte, déjà des préfets disent pour demain - parce qu'il y a une journée de mobilisation donc nationale, organisée par la FNSEA - déjà les préfets disent : attention, ça va être très très dur. Que dites-vous aux agriculteurs qui peuvent entendre ?
Je leur dis que, nous travaillons nuit et jour pour apporter des solutions immédiates. On a déjà fait un certain nombre d'efforts sur la trésorerie des agriculteurs, en apportant des aides publiques importantes ; nous verserons demain les aides de la PAC, qui représentent une somme très importante, un mois et demi à l'avance - normalement elles sont versées le 1er décembre, elles seront versées demain. Et puis par ailleurs, je regarde attentivement quel est le revenu exact de l'ensemble des agriculteurs en France. Et les premières indications dont je dispose, montrent que tous les agriculteurs en France ont perdu de 10 à 20 % de leurs revenus en 2009. Quel Français accepterait aujourd'hui de perdre 10 à 20 % de son revenu ! Dès que j'aurai les indications plus précises, je ferai des propositions au président de la République et au Premier ministre, en vue de définir un plan global de soutien aux agriculteurs français. Nous l'avons fait pour l'industrie automobile, parce que ça allait très mal, en estimant qu'il ne fallait pas perdre les capacités automobiles françaises. J'estime que il serait logique, il serait légitime de faire la même chose pour les agriculteurs de France.
La crise du lait, est très forte dans les campagnes, est-elle maîtrisée ou est-ce que les mesures qui ont été annoncées, qui seront annoncées, sont justes des palliatifs face à une dérégulation du marché, qui de toute manière est inéluctable ?
Là aussi, je crois qu'il faut bien voir les deux aspects de ce sujet. Il y a la crise du revenu avec l'effondrement du prix du lait ; on apporte des réponses, on aide la trésorerie des agriculteurs, notamment des producteurs de lait. Et puis, il y a la nécessité de donner des assurances sur le long terme aux agriculteurs français, et notamment aux producteurs de lait. Ca, c'est la bataille pour la régulation européenne que je conduis depuis plusieurs semaines. On ne sortira pas de la crise si on donne uniquement des réponses de court terme aux agriculteurs.
Vous êtes entendu, parce qu'il y a un Conseil de l'agriculture, là, bientôt...
Nous avons commencé à deux, avec l'Allemagne début juillet, en disant : la voie de la dérégulation c'est une impasse. Il faut des règles européennes, il faut maîtriser le marché, sinon personne ne s'en sortira. Nous sommes aujourd'hui au moment où je vous parle, 21 Etats à être sur cette ligne de la régulation. Je mettrai toute la pression politique qu'il faudra pour convaincre la présidence suédoise et la Commission au prochain Conseil des ministres de l'agriculture qui a lieu lundi, de s'engager définitivement dans cette voie de la régulation.
Sur le coup de "Je claquerai la porte, je partirai si je n'y arrive pas ?"...
On n'en est pas encore là, mais je peux vous dire que ma détermination est totale, parce que c'est une simple question de bon sens et une question de justice. Vous n'arriverez pas à maintenir une agriculture en France et en Europe s'il n'y a pas un encadrement par des règles du marché.
Vous parlez de crise d'identité des agriculteurs, régulièrement des élus des départements ruraux défilent dans le bureau du président de la République ou font passer des messages en disant : on n'est pas entendus, on n'est pas assez considérés, vous êtes plus dans les usines que dans les fermes. Que se passe-t-il ? Ils prennent conscience que le président de la République n'est pas vraiment en phase avec le monde agricole ?
Je crois que le président de la République est en phase avec le monde agricole, et je crois surtout qu'il y prête une attention particulière et quotidienne. Je vais vous dire, il laisse au ministre de l'Agriculture gérer la crise actuelle, ce qui me paraît de bonne politique, et je peux vous dire qu'il suit au jour le jour ce qui se passe dans le monde agricole. Je le tiens informé régulièrement de ce qui se passe, des mesures qui pourraient être prises, et il est tout à fait déterminé à apporter les réponses nécessaires, fortes, aux questions que se posent les agriculteurs.
Une des réponses c'est de dire : "je ne ferai plus de chèque à la FNSEA pour régler les problèmes des producteurs". C'est assez mal pris par le monde agricole. Est-ce que c'est une réponse justement à donner au monde paysan ?
D'abord, ce sont des propos qui sont prêtés au président de la République, et par ailleurs, il apportera des réponses, fortes, les réponses qui sont attendues par les agriculteurs. Et il ne les apportera pas comme ça, un jour, parce qu'il se sera dit "tiens, je vais parler aux agriculteurs", il les apportera parce que, depuis le premier jour où je suis ministre de l'Agriculture, il se tient informé de ce qui se passe dans le monde agricole. Il me demande des propositions, des solutions, et il regarde de très près ce qui se passe. Il a une attention particulière au monde agricole.
Vous sillonnez beaucoup le pays, est-ce que les prises de position de N. Sarkozy - RSA jeunes, taxe carbone, suppression des tests ADN - est-ce que c'est bien compris par cet électorat qui, au fond, sur une base assez droitière, a voté pour lui en 2007 ?
Je crois que les agriculteurs, aujourd'hui, leur préoccupation première, c'est qu'on réponde à leurs questions sur le revenu, et surtout qu'on leur offre une perspective de long terme. Qu'on leur dise : oui, vous êtes une activité stratégique pour la France, vous êtes une activité stratégique pour l'Europe, et on prendra les moyens de vous défendre. Sur la taxe carbone, par exemple...
Mais est-ce que ce n'est pas toujours les sacrifiés de la mondialisation et de l'Europe qui avance, on dit toujours ça aux agriculteurs, et ce sont eux qui perdent le plus !
Je crois justement qu'il faut remettre l'agriculture à sa juste place, c'est-à-dire, bien faire comprendre à chacun que c'est une activité stratégique, non seulement pour la France mais aussi pour l'Union européenne. Vous faisiez tout à l'heure un reportage sur la faim dans le monde. Mais qui va nourrir le monde si ce n'est des agriculteurs européens ! On regardait les problèmes de sécurité sanitaire qui étaient évoqués également. Qui va garantir la sécurité sanitaire des aliments sinon les agriculteurs ! Je pense qu'il est temps que nous reprenions conscience du caractère stratégique de l'agriculture française européenne.
Est-ce que vous constatez, comme certains élus, dont P. Cardo par exemple, est-ce que vous dites : il y aura un impact sur les élections, sur les électeurs, des récentes polémiques, comme celle par exemple sur J. Sarkozy ?
Je ne crois pas du tout. Je pense que les électeurs sont par définition, je vous le dis comme ancien député, des gens lucides qui savent faire la part des choses entre l'écume et les vrais sujets de fond. J. Sarkozy a été élu par le Conseil général pour être candidat à la présidence de l'EPAD. Il est légitime parce qu'il est élu.
Est-ce que R. Yade a eu raison de dire : "Il faut quand même tenir compte de l'émotion de l'opinion" ?
Je crois qu'il faut tenir compte de l'élection par le Conseil général de J. Sarkozy comme candidat à l'EPAD.
Mais est-ce qu'elle a eu raison de dire ça ?
Je vous dis qu'il faut tenir compte de l'élection, c'est ça qui est important. Il faut toujours regarder les sujets de fond.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 15 octobre 2009