Déclaration de M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, sur les grandes lignes du projet de loi de finances pour 2010 présenté comme un budget de sortie de crise et marqué par un déficit élevé et des priorités pour la recherche et l'enseignement supérieur, la mise en place de la taxe carbone, Paris le 30 septembre 2009.

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Circonstance : Présentation du projet de loi de finances pour 2010, à Paris le 30 septembre 2009 (audition par les commissions des finances du Parlement, conférence de presse)

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Notre stratégie budgétaire est le prolongement de notre stratégie économique et sociale. Bâtir un projet de loi de finances, c'est partir de nos objectifs économiques et sociaux et nous donner les moyens de les atteindre. Ces objectifs, quels sont-ils ?
Christine vous les a rappelés : il y a un an, c'était d'éviter que le système financier et l'activité s'effondrent. Tout le budget 2009, et les différents collectifs qui l'ont complété, ont été construits en fonction de cet impératif : faire face à une crise exceptionnelle.
Le Président de la République et le Gouvernement ont pris et assumé des décisions d'urgence. Oui, nous avons été conduits à accepter une hausse des déficits, je vais y revenir. Mais ce sont ces décisions qui nous permettent de présenter ce budget 2010 sous des auspices plus favorables. En 2009, la récession sera finalement moins forte que prévue et nous devrions renouer avec la croissance dès 2010.
Alors aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, notre objectif, c'est de réussir la sortie de crise. Il ne s'agit plus, comme il y a un an, de tout faire pour limiter l'ampleur de la chute. Il s'agit désormais de tout faire pour favoriser la reprise et, j'insiste, pour que cette reprise soit durable. Renouer avec la croissance, et avec une croissance plus forte : c'est sur cet impératif que nous avons construit le budget 2010.
1. Avant d'entrer dans le détail du budget 2010, je voudrais revenir quelques instants sur l'année 2009. Aucun autre Gouvernement n'avait en effet été confronté, depuis la Seconde Guerre Mondiale, à une telle crise.
Face à cette crise exceptionnelle, le Gouvernement a, en matière budgétaire, pris trois décisions essentielles. La première, de mettre en oeuvre des mesures immédiates de soutien aux banques. La seconde, d'accepter des baisses de recettes fiscales d'une ampleur inégalée. La troisième, de relancer l'activité économique par un effort supplémentaire d'investissement et de pouvoir d'achat.
Dire que nous avons été attaqués est un euphémisme. A l'époque, je vous le rappelle, le plan de relance français était jugé par l'opposition, mal construit, déséquilibré, insuffisant et le soutien aux banques, excessif et coûteux.
Je considère pour ma part que nous avons réussi l'examen de passage 2009. Des premiers résultats, nous en avons : en matière de croissance, Christine l'a rappelé, nous faisons aujourd'hui mieux que nos principaux partenaires. Même si rien n'est assuré et que la situation en matière d'emploi, n'est évidemment pas satisfaisante, notre gestion de l'année 2009, en matière économique et budgétaire, a prouvé son efficacité :
- les décisions du Gouvernement ont largement permis de soutenir la consommation. C'est l'effet d'abord du dynamisme des transferts sociaux, qui a été 3 fois plus rapide que pendant les 10 dernières années, mais évidemment des mesures du plan de relance destinées à soutenir l'emploi et le pouvoir d'achat ;
- ces décisions ont également permis de limiter la contraction de l'investissement. Les mesures de trésorerie ont soulagé la situation de près de 200 000 PME et 700 chantiers de relance ont été engagés dès l'année 2009 ;
- les mesures de sauvetage des banques ont été proportionnées et efficaces. Et, contrairement à ce que je lis çà et là, ce soutien rapporte au contribuable : en 2009, c'est 1,4 Mdeuros qui reviennent au budget l'État.
Bien sûr, le déficit public est important cette année : il atteindrait 8,2 points de PIB à la fin de l'année. C'est près de 5 points de dégradation par rapport à 2008. Mais il faut être très clair : 100 % de cette dégradation est due à la crise. Ne confondez pas la crise et la mauvaise gestion. La dépense « hors relance » est tenue et respectera en 2009 la norme « 0 volume ». Ce sont les recettes qui ont fondu sous l'effet de la crise, et non pas les dépenses de tous les jours qui ont explosé ! 53 Mds d'euros : voilà les recettes que l'État a perdues entre 2008 et 2009. Rien que sur l'impôt sur les sociétés, la baisse est de 30Mds d'euros : c'est quasiment l'ampleur du déficit budgétaire de 2007.
Additionnés, la baisse des recettes et le plan de relance expliquent donc près de 100 % de l'augmentation du déficit budgétaire, qui devrait atteindre cette année 141 Mdeuros. Sur ces 141 Mds, le déficit de crise s'élève à 96 Mds, soit 70 % !
La sphère sociale est dans la même situation : le déficit du régime général atteindrait 23,5 Mdeuros, mais la moitié de ce déficit est due à la crise. L'évolution des dépenses d'assurance maladie, pour la deuxième année consécutive, sera en effet largement tenue, avec une progression de l'ONDAM conforme à notre objectif de 3,3 %.
Si l'on ajoute le déficit des collectivités locales, de l'ordre de 0,4 point de PIB, et celui du régime d'assurance chômage, l'ensemble du déficit public devrait se monter, comme je le disais, à 8,2 points de PIB en 2009. Cette dégradation est moins forte en France : pour l'ensemble des pays industrialisés, depuis 2007 la dégradation devrait être, selon l'OCDE, de plus de 6 points de PIB, contre 5,5 pour la France. Cela signifie deux choses : nous avons, premier point, pour un coût comparable, obtenu des meilleurs résultats en matière de croissance et, deuxième point, notre positionnement relatif en matière de déficit s'est amélioré.
2. Notre politique budgétaire nous a donc permis d'enrayer la chute de l'activité en 2009 et de terminer l'année avec une récession moindre que prévue. Mais, vous le savez, la situation reste fragile. Le défi de l'année 2010, c'est bien évidemment de réussir la sortie de crise et d'en sortir durablement, avec un budget cohérent.
2.1. Réussir la sortie de crise, Mesdames et Messieurs, c'est d'abord réussir à ce que la reprise, aujourd'hui encore fragile, ne casse pas. Cela signifie porter une grande attention aux conditions dans lesquelles le plan de relance est retiré.
Vous le savez, ce plan a une vocation temporaire. L'essentiel des dépenses de relance 2009 (39 Mdeuros, y compris 6,7 Mdeuros de prêts aux constructeurs automobiles) ont donc vocation à ne pas être reconduites en 2010. Mais nous avons décidé qu'un petit nombre d'entre elles devaient l'être, parce qu'il serait excessivement dangereux pour la sortie de crise de les stopper totalement.
Les dépenses de la « mission Relance » représenteront donc encore 4,1 Mdeuros de crédits en 2010. Ils seront consacrés à deux priorités : l'investissement et l'emploi. Le budget prévoit notamment les crédits nécessaires à la poursuite des mesures exceptionnelles en faveur de l'emploi mises en oeuvre dans le cadre du FISO (1,4 Mdeuros), mais aussi de l'exonération de charges pour les nouvelles embauches dans les petites entreprises (410 Meuros). Le secteur automobile continuera à bénéficier d'un soutien particulier, à travers le maintien en 2010 d'une prime à la casse, dont le montant sera néanmoins progressivement réduit (240 Meuros).
Au-delà des crédits de la « mission Relance », notre vigilance sur la reprise de l'activité nous a conduits à accentuer notre effort en matière de politique de l'emploi et de soutien à la trésorerie des entreprises :
- en complément du FISO et de l'exonération pour les nouvelles embauches dans les petites entreprises, les crédits relatifs à l'emploi seront renforcés de 700Meuros par rapport à ce que prévoyait le budget triennal ;
- la trésorerie des entreprises bénéficiera de la prolongation de la possibilité de se faire rembourser immédiatement le CIR (2,5 Mdeuros) et surtout de la mise en place de la suppression de la TP en un an. Du fait de phénomènes de décalage temporel dans la m??canique des impôts, cette suppression apporte en effet un surcroît supplémentaire de trésorerie aux entreprises de 7 Mdeuros en 2010, au delà de l'impact de la réforme en régime de croisière (5,8 Mdeuros).
Tous ces choix, vous le comprenez, ont été longuement pesés. Ils ne sont d'ailleurs pas propres à la France : la plupart des grandes économies développées considèrent l'année 2010 comme une année charnière pour réussir à sortir de la crise et utilisent leur budget public en conséquence. Le G20 a, à cet égard, bien montré le très fort consensus sur les plans de relance.
Ce retrait progressif du plan de relance conduit à une réduction de 25 Mdeuros du déficit de l'Etat, qui passera, en 2010, de 141 Mdeuros à 116 Mdeuros. Le déficit de crise restera néanmoins la principale composante du déficit budgétaire (plus de 60 %) : en effet, l'amélioration des recettes grâce au début de reprise n'est pas suffisante pour rattraper le retard accumulé en 2009.
Alors bien sûr, certains nous diront que ce n'est pas assez, que nous devrions déjà être sous la barre des 100 Mdeuros. Mais ne perdons pas nos repères. Passer de 141 Mdeuros à 116 Mdeuros, c'est une baisse de 18 % en un an. Et ces 16 Mdeuros qui nous manquent pour passer sous la barre des 100 Mdeuros dès 2010, ce sont ceux qui nous semblent indispensables pour sécuriser la reprise, ceux des « mesures relance » maintenues, du CIR ou encore de la suppression en un an de la TP. Ces 16 Mds, ce sont donc ceux de notre vigilance face à la sortie de crise.
Amélioration du déficit budgétaire donc d'un côté, mais dégradation des comptes sociaux de l'autre en raison de l'emploi. Ne nous leurrons pas, il reste quelques mois difficiles devant nous sur le front du chômage. La masse salariale, qui est la base des cotisations sociales, devrait en conséquence encore diminuer en 2010 de -0,4 %. Encore une fois prenons des repères : pour retrouver le déficit d'avant crise (10 Mdeuros), il faudrait une croissance de la masse salariale de 10 % en 2011 et en 2012, contre 4,2 % ces 10 dernières années en moyenne. En dépit des efforts pour maîtriser la dépense d'assurance maladie, que je présenterai plus longuement demain dans le cadre du PLFSS, le déficit du régime général continuera donc de se dégrader, pour atteindre 31 Mdeuros. Le déficit des administrations sociales passera de -1,4 % à -2,3 %.
Au total, le déficit public devrait être de 8,5 % en 2010. Mais, comme je l'ai évoqué, la réforme de la TP coûte plus cher à l'Etat en 2010 qu'en régime de croisière. Si l'on isole ce « surcoût » temporaire, le solde public se stabilise à 8,2 points de PIB. La dette publique, quant à elle, atteindra 84 % du PIB (77 % en 2009). C'est un niveau inférieur à la moyenne de l'OCDE (100 %) et de la zone euro (86 %).
2.2 Face à ce déficit, il y a une voie sans issue et un vrai chemin.
La voie sans issue, c'est celle qui consiste à faire revenir les recettes en augmentant les impôts. A ceux qui soutiennent cette approche, je rappelle que la France a le 5e niveau au monde de prélèvements obligatoires. A ce niveau, une nouvelle hausse de mettrait en cause la crédibilité de la signature de la France. Aujourd'hui, si nos finances publiques sont dans une situation difficile, mais la France se finance à des taux historiquement bas. C'est d'abord le résultat d'une analyse globale de notre endettement : la somme de la dette des ménages, des entreprises privées non financières et de la sphère publique était, fin 2008, de 180 points de PIB. C'est comparable à l'Allemagne, mais en-dessous de l'Espagne, du Royaume-Uni ou des Etats-Unis, qui sont à environ 220 à 230 points. Notre coût de financement résulte donc de cette analyse mais aussi d'une politique économique qui est jugée crédible. Et elle l'est précisément parce qu'elle ne vient pas rajouter de la crise à la crise en faisant de la hausse des impôts la solution d'avenir d'un pays déjà surimposé !
Le vrai chemin, c'est celui qui consiste à tout faire pour encourager le retour de la croissance, et à continuer parallèlement notre action de resserrement de la dépense publique. Les recettes doivent revenir non pas par les taux d'imposition, mais par l'activité. Les dépenses doivent rester sous un strict contrôle, comme cela a été le cas en 2009. Des réformes structurelles pour la croissance ; des réformes structurelles pour moins de dépenses : c'est sur cette stratégie que repose ce budget.
2.3 Faire revenir les recettes en faisant revenir durablement la croissance nécessite, sans attendre les décisions sur l'emprunt national pour l'investissement, de continuer à améliorer nos atouts économiques. Notre budget est cohérent avec cette stratégie de croissance.
Premier élément de cohérence : des réformes fiscales de grande ampleur pour être plus compétitifs.
La suppression de la TP, complétée par la poursuite de la suppression de l'IFA (210 000 entreprises supplémentaires exonérées, pour un coût de 336 Meuros), permet de remédier à deux faiblesses profondes de l'économie française. Je sais bien que certains vont chercher à nous entraîner sur le terrain facile de l'opposition entre les mesures pour les entreprises et celles pour les ménages. Je récuse totalement cette assertion. C'était le même débat d'ailleurs entre consommation et investissement au moment du plan de relance ! Je n'ai pas peur de l'affirmer : soutenir nos entreprises dans un monde de plus en plus compétitif, c'est aider l'emploi, c'est aider les ménages.
Deuxième élément de cohérence économique, notre budget conforte la priorité donnée à la formation et à l'économie de la connaissance :
- l'enseignement supérieur et la recherche continue d'être prioritaire, avec 1,8 Mdeuros par an de moyens supplémentaires ;
- le « Plan Jeunes » sera intégré dans le budget 2010 pour mettre l'accent sur la formation des moins de 25 ans (500 à 600 Meuros).
Troisième élément de cohérence, nous continuons à tout faire pour valoriser le travail :
- en rétablissant une plus grande équité de taxation entre les revenus de remplacement et les revenus du travail : les indemnités de départ en retraite volontaire seront fiscalisées au premier euro. Et si un amendement parlementaire pour étendre l'application de ce principe aux indemnités journalières pour les accidents du travail est déposé, le Gouvernement le soutiendra. ;
- ensuite, dans le cadre du PLFSS, nous élargirons le financement de la protection sociale par les revenus du capital, pour éviter qu'il ne repose à l'excès sur le travail (plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières être soumises aux prélèvements sociaux au premier euro ; fin de l'exonération pour les contrats d'assurance-vie multi-support en cas de dénouement par décès du titulaire, doublement du forfait social).
4e élément de cohérence, nous poursuivons le basculement de l'économie française vers un modèle de croissance verte :
- en déplaçant la fiscalité de la production vers la pollution avec la taxe carbone ;
- en procédant à un certain nombre d'ajustements de nos dispositifs fiscaux pour encourager les comportements écologiques (verdissement du TEPA, verdissement du SCELLIER, poursuite du crédit d'impôt chaudière).
Travailler au retour durable de la croissance, c'est enfin continuer à réformer le capitalisme pour ne pas reproduire les errements du passé. Nous avons beaucoup agi pour obtenir la fin du secret bancaire. Personne ne peut contester nos premiers résultats. Nous allons continuer, dans le prolongement du Sommet de PITTSBURGH, et vous proposerons, avec Christine LAGARDE, des mesures dans le cadre du PLFR 2009. Parallèlement, nous continuons à réformer les modes de taxation des nouvelles formes de rémunération. En complément de l'action engagée par le Gouvernement lors du PLF 2009 avec notamment la création d'une contribution patronale pour les stock-options, nous vous proposons de doubler le taux des contributions de l'employeur pour les « retraites chapeau ».
2.4 Action forte pour favoriser le retour durable de la croissance d'un côté donc, et poursuite de notre effort de resserrement de la dépense publique de l'autre.
Il n'y aura pas d'amélioration de nos finances publiques si nous relâchons notre effort en matière de dépenses. En 2009, je le dis clairement, notre comportement en matière de dépenses a été exemplaire. Pour ceux qui ont perdu leurs repères en matière de finances publiques, permettez-moi de rappeler qu'en plein milieu de la crise économique aussi violente, nous avons été capables de tenir les deux objectifs que nous nous étions fixés : pas un euro de dépenses en plus pour l'État en dehors de l'inflation ; une hausse des dépenses d'assurance-maladie à près de 3,3 %, ce qui n'est pas arrivé depuis la création de l'ONDAM en 1997 !
Cet effort, je souhaite donc que nous le poursuivions sans relâche en 2010. Face au déficit structurel, il ne peut y avoir que des réformes structurelles.
Les dépenses de l'Etat (352 Mdeuros) n'augmenteront pas plus vite que l'inflation, alors même que :
- l'hypothèse d'inflation est plus faible (passage de 1,75 % dans le triennal à 1,2 %) ;
- la crise nous conduit à augmenter certains postes par rapport au triennal : + 700 Meuros pour l'emploi ; + 1,5 Mdeuros pour les dotations sociales ;
- les charges contraintes progressent : pensions + 1 Mdeuros (2,8 %) ; PSR UE (+ 600 Meuros, soit 3,2 %).
C'est donc un effort encore plus exigeant sur les autres dépenses. Cet effort portera naturellement sur ses effectifs. Les effectifs de l'État diminueront en conséquence de 34.000 postes en 2010, dont 16 000 à l'Education Nationale et 8 250 à la Défense. La masse salariale, qui s'élèvera à 84,6 Mdeuros, progressera moins vite que l'inflation (+0,6). Entre 2007 et 2010, nous aurons supprimé 100 000 postes dans la fonction publique d'Etat : c'est une économie brute de 3 Mdeuros. Entre 2005 et 2010, le nombre des corps est par ailleurs passé de 685 à 380 corps et je compte annoncer un nouveau programme très ambitieux d'ici 1 mois.
Nous allons également accentuer notre effort sur les dépenses de fonctionnement. Entre 2007 et 2008, dernier chiffre constaté, les dépenses de fonctionnement de l'État, hors personnel, ont été réduites de 1,3 %. Nous allons accentuer cet effort : entre 2009 et 2010, les dépenses de fonctionnement diminueront de l'ordre de 1 % grâce aux réformes structurelles que nous avons engagées dans tous les ministères. Réduction du nombre de bases de défense, fusion de directions, regroupement des services déconcentrés, mutualisation des achats, tout ceci rapporte déjà mais va surtout encore rapporter car ces réformes montent en puissance.
Enfin l'Etat, c'est aussi un train de vie. Et en la matière, nous devons répondre à la demande considérable d'exemplarité des Français. Lorsque je mène une politique de baisse des surfaces immobilières (-137 000 m2 en 2007 et 2008), lorsque je supprime le statut de conservateur des hypothèques, lorsque je décide de réduire le parc automobile de l'Etat de plus de 10 %, lorsque je demande de faire payer de vrais loyers aux occupants des logements de fonction, j'ai évidemment conscience que cela ne représente pas un montant d'économies à la hauteur de notre déficit. Mais comment voulez-vous que les Français comprennent notre action de baisse des dépenses publiques s'ils ont le sentiment que rien ne change ?
Cet effort de bonne gestion de l'État doit évidemment avoir son prolongement au niveau local. Il ne peut pas y avoir d'évolution différente. Il ne peut pas y avoir, d'un côté, l'Etat qui s'est fixé une règle et s'y tient et, de l'autre, des dépenses de fonctionnement des collectivités locales plus dynamiques.
C'est pour cette raison que l'ensemble des concours de l'État aux collectivités locales progresseront comme l'inflation (+1,2 %). Les dotations (hors FCTVA) augmenteront de 0,6 %. Et c'est pour cette raison également que les collectivités territoriales doivent accepter d'ouvrir le débat sur leurs effectifs. Il ne peut pas y avoir, d'un côté, un Etat qui fait des efforts considérables de productivité et, de l'autre, une fonction publique territoriale qui voit ses effectifs augmenter de 3 % par an en moyenne. Entre 2000 et 2007, les effectifs des collectivités territoriales ont augmenté de 322 000 (hors loi de décentralisation).
3. Voilà, Mesdames et Messieurs, les fondements du budget 2010. Mais, me direz-vous, et après ? Quels sont les objectifs du Gouvernement en matière de finances publiques d'ici 2012 ? Et comment les atteindre.
Globalement, je conserve l'analyse que j'avais faite au moment du débat d'orientation budgétaire. Si nous poursuivons cette stratégie consistant à, d'un côté, favoriser le retour des recettes par la croissance et non par l'augmentation d'impôt, et, de l'autre, à tenir les dépenses, nous pouvons réduire de l'ordre de 1 point de PIB par an le déficit. Concrètement, un taux de croissance de 2,5 % à compter de 2011, et une progression des dépenses publiques de 1 % en volume nous permettra de réduire chaque année le déficit de 1 point. En 2001, l'amélioration pourrait être supérieure avec l'extinction du plan de relance et la disparition du surcoût de la TP. En 3 ans, le déficit public pourrait ainsi être réduit de 3,5 points et s'élever à 5 % en 2013.
La clé résidera bien évidemment d'abord dans notre capacité à accélérer la croissance, par la poursuite des réformes structurelles sur la croissance : autonomie des universités, réforme de la formation professionnelle, loi de modernisation de l'Economie, travail le dimanche, réforme de l'accompagnement de l'emploi, augmentation des moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche, réforme fiscale, tout ceci soutiendra notre croissance.
De l'autre côté, notre capacité à tenir dans la durée une augmentation de la dépense publique limitée à 1 % par an en euros constants passe là encore par la poursuite des réformes structurelles sur la dépense. Les engagements pris par le Gouvernement pour cette année 2010 démontrent notre détermination. Nous avons notamment clairement indiqué que l'année 2010 sera celle du rendez-vous sur les retraites, de la mise en oeuvre de la réforme des collectivités territoriales, de la poursuite de la modernisation de notre système hospitalier, de la montée en puissance des réorganisations administratives (poursuite du 1 sur 2, État local, mise en place des bases de défense, carte judiciaire, fusion d'administrations centrales etc.).
Le retour à 3 points de PIB de déficit en 2012, dans la mesure des informations qui sont disponibles actuellement, n'est donc pas atteignable sans un rebond extrêmement fort de la croissance, qui ne peut être exclu, mais qu'on ne peut prendre comme référence dans un débat d'orientation budgétaire.
Est-ce à dire que le pacte de stabilité n'existe plus, ou que la France s'en affranchit ? L'esprit du pacte, c'est que les Etats européens conduisent une politique budgétaire dominée par la vertu et la volonté d'encourager la croissance économique. Respecter le pacte, ce n'est donc pas chercher à toute force à revenir à 3 % au risque de casser la reprise de la croissance, mais conduire une politique budgétaire permettant de réduire progressivement le déficit public tout en soutenant la croissance. C'est, vous l'avez compris, toute la logique de notre action.
Mesdames et Messieurs, vous l'avez compris : 2009 était un budget de gestion de la crise ; 2010 est un budget de gestion de la sortie de crise par la croissance, par la compétitivité et par l'emploi. Nous sommes dans une année charnière : la reprise reste fragile, et nous devons tout faire réussir non seulement à la consolider, mais à renouer durablement avec la croissance.
Source http://www.comptes-publics.gouv.fr, le 7 octobre 2009