Déclaration de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports sur le rôle des futures Directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS), Paris le 13 octobre 2009.

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Circonstance : Séminaire d'intégration des préfigurateurs des Direction régionales de la jeunesse, des sports et la cohésio sociale (DRJSCS) à Paris le 13 octobre 2009

Texte intégral

Monsieur le Secrétaire général, cher Jean-Marie Bertrand,
Mesdames, messieurs les directeurs d'administration centrale,
Mesdames, messieurs,

Je voudrais tout d'abord vous souhaiter la bienvenue, à l'occasion de ce premier séminaire d'accueil des préfigurateurs des Directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS).
Je tiens également à vous féliciter chaleureusement pour votre nomination à ces postes.
Vous avez été désignés à l'issue d'une procédure longue et particulièrement sélective, afin de mener un chantier très important : la réforme de l'administration territoriale de l'État.
Cette journée, qui nous réunit quasiment tous au complet, à l'exception de vos futurs collègues pour les régions d'Ile-de-France et d'outre-mer, mais avec l'ensemble de vos interlocuteurs de l'administration centrale - est l'occasion d'entamer ensemble la dernière phase avant la mise en place effective des DRJSCS.
Les préfigurations dans les huit premières régions « pionnières » ont en effet permis d'élaborer une doctrine nationale et une méthode d'action.
Nous venons de désigner les 13 autres préfigurateurs qui doivent, à leur tour, conduire le difficile chantier de la création d'un nouveau service.
Le déploiement des DRJSCS entre désormais dans une phase opérationnelle, avec le lancement des préfigurations dans les 13 autres régions métropolitaines.
Le décret portant création des DRJSCS a été validé. Il a été présenté à ma signature, ainsi qu'à celle de mes collègues ministres.
Nous disposons à présent d'un cadre juridique cohérent pour valider le schéma d'organisation interne et les modalités de fonctionnement des DRJSCS, et pour positionner clairement la nouvelle direction régionale dans ses missions spécifiques au service du sport, de la jeunesse et de la cohésion sociale.
Vous allez également recevoir de la part du secrétariat général des ministères sociaux un ensemble d'outils qui vous aideront dans cette phase de préfiguration que vous êtes chargés de mener.
Dans les semaines à venir, les derniers arbitrages en ce qui concerne le nombre d'adjoints et la répartition des effectifs entre les DRJSCS, les directions départementales interministérielles et les Agences régionales de santé (ARS) seront rendus.
Les délais sont donc particulièrement serrés : nous ne sommes plus qu'à deux mois et demi de l'échéance de création des DRJSCS métropolitaines, hors Île-de-France, qui doivent voir le jour au 1er janvier 2010.
Cette mission qui vous est confiée est éminemment complexe : j'en ai pleinement conscience et c'est d'ailleurs bien pour cela que vous avez été choisis.
Il s'agit toutefois d'une mission passionnante dans le parcours des hauts fonctionnaires que vous êtes : vos capacités d'adaptation au changement et de gestionnaires de projet ont été déterminantes dans le choix qui a présidé à votre sélection en tant que préfigurateurs.
Dans un premier temps, je voudrais vous dire que vous êtes appelés à devenir les maîtres d'oeuvre de cette réforme, dont je voudrai rappeler les principaux objectifs.
Dans un second temps, ce moment d'échange est également l'occasion pour moi de revenir sur les conditions de réussite de cette réforme.

Quels sont les objectifs de la création des DRJSCS ?
Il s'agit, rien de moins, que de renouveler en profondeur le mode d'intervention de l'État au niveau régional.
La réforme qui a été engagée, en effet, va bien au-delà du simple regroupement de trois directions, à savoir : la direction régionale de la jeunesse et des sports, le pôle social de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales, la direction régionale de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances.
L'ambition est plus forte : nous devons créer un service régional qui réponde aux attentes nouvelles de nos concitoyens.

a) Pour cela, les DRJSCS devront d'abord améliorer le service rendu aux usagers en apportant une plus grande cohérence dans l'action de l'État en matière sociale, comme dans les domaines de la jeunesse, de la vie associative et du sport.
Les services et l'action de l'État sont encore trop éclatés au niveau local. Pour y remédier, les DRJSCS auront un champ d'intervention large, qui s'appuiera sur une conception particulièrement étendue de la cohésion sociale.
Ces services déconcentrés d'un type nouveau seront en effet compétents en matière d'inclusion sociale et d'accompagnement des publics les plus vulnérables, en reprenant les missions développées au plan régional par la partie sociale des DRASS.
Ils auront également pour mission de promouvoir le lien social au sens large, c'est-à-dire la promotion de la citoyenneté, la vie associative, la promotion et l'accompagnement du bénévolat et du volontariat, mais aussi le sport et l'action éducative hors temps scolaire, au profit des jeunes, et de contribuer au développement personnel qui doit s'entendre comme l'autonomie des jeunes, la promotion de l'éducation populaire.
Ces directions nouvelles seront également compétentes en matière de lutte contre les discriminations, de promotion de l'égalité des chances, notamment pour les personnes immigrées ainsi que pour les personnes handicapées, et de cohésion territoriale dans les territoires de la politique de la ville.
Ce rôle d' « assemblier » ou d'animateur de l'État des futures DRJSCS est essentiel : il permettra enfin de pouvoir prendre en compte les nouvelles problématiques de l'inclusion sociale.
C'est pourquoi le champ de compétence de ces politiques concernera également l'accès au logement social, ainsi que l'insertion sociale et professionnelle des personnes vulnérables et des jeunes.
Cette fédération de missions est essentielle : elle permettra de renforcer l'efficacité des interventions autour de la démarche d'« ingénierie sociale », pour apporter une réponse plus globale aux sujets sociaux.
Cet objectif premier qui vous est assigné ne sera pas rempli en un jour, j'en ai bien conscience. Mais je sais que je peux compter sur votre mobilisation totale pour y parvenir, avec humilité et détermination.

b) La création des DRJSCS permettra, en deuxième lieu, d'unifier au niveau régional le rôle de l'État en matière de cohésion sociale, afin d'accroître la lisibilité des interventions de l'État au plan régional auprès des partenaires, en jouant un rôle d'animation.
Mon parcours politique m'a permis de constater que l'action de l'État au niveau territorial, souvent dispersée et peu lisible, n'a pas su s'adapter jusqu'à présent au vaste mouvement de décentralisation intervenu depuis les années 1980.
Je souhaite que la réforme que nous menons aboutisse à doter les directions régionales d'une fonction de pilotage des politiques relevant de la cohésion sociale au sens large : inclusion sociale et accompagnement des personnes vulnérables, jeunesse et éducation populaire, jeunesse, sports et vie associative.
Le niveau régional doit devenir le pivot de l'action déconcentrée de l'État. C'est le sens de notre histoire administrative.
Dans le domaine du sport, par exemple, la responsabilité du pilotage des politiques sera étendue à l'ensemble des crédits déconcentrés du centre national pour le développement du sport (CNDS) afin de développer de nouvelles stratégies territoriales de soutien au mouvement sportif.
Le préfet de région s'appuiera également sur la DRJSCS pour la mise en oeuvre des actions relevant de l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé), dont il est le délégué territorial. La DRJSCS contribuera ainsi à la régulation et apportera son expertise au profit des préfets de départements et des directions départementales en matière de politique de la ville.

C'est au nom de cette logique de pilotage territorial des politiques de cohésion sociale que le niveau régional se verra investi de fonctions propres, dont la mise en oeuvre relèvera directement de votre responsabilité, qu'il s'agisse par exemple :

  • des actions de formations initiales et continues dans le domaine social, de la jeunesse de l'éducation populaire et des sports ;
  • de la politique en faveur du sport de haut niveau et du sport professionnel ;
  • ou de la mise en oeuvre de l'ensemble des actions relatives à la mobilité internationale des jeunes et en matière d'accompagnement de projets régionaux d'éducation populaire.

c) Enfin, pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté entre nous, je souhaite rappeler clairement que cette réforme, même si cela ne constitue pas son objectif premier, participe également de l'effort de l'État pour réduire la dépense publique, notamment par le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.
Dans cette perspective, je vous demande de veiller à chercher, à chaque fois que cela est possible, à mutualiser au maximum les compétences, en regroupant les différents réseaux « jeunesse et sports », « affaires sociales », agences régionales pour la cohésion sociale et l'égalité des chances et de leurs services régionaux.
Je vous demande que l'exercice de ces responsabilités s'accompagne d'un effort particulier de rationalisation, notamment en ce qui concerne les fonctions support, à travers une allocation de moyens budgétaires et comptables aux directions départementales chargées de la cohésion sociale la plus efficace possible.
Pour cela, la DRJSCS sera investie d'une série de fonctions propres, en particulier en ce qui concerne la planification budgétaire et l'évaluation, de nature à favoriser cet effort de mutualisation : vous devrez ainsi gérer les moyens budgétaires en emplois et en crédits de fonctionnement relatifs aux politiques que vous aurez à mener dans votre région.
Vous aurez également à exercer des responsabilités élargies dans la gestion des ressources humaines, y compris pour les personnels affectés dans les services départementaux.
Cette ambitieuse réforme ne saurait toutefois réussir que si plusieurs conditions sont cumulativement remplies.

Je voudrai rappeler devant vous trois conditions qui me semblent particulièrement essentielles pour atteindre les objectifs que je viens de rappeler :
a) La première condition est que vous renforciez au plus vite votre capacité de dialogue et de concertation avec les autres services déconcentrés de l'État, à savoir les nouvelles directions départementales désormais de nature interministérielle, mais aussi les Agences régionales de santé (ARS).
Les fonctions de pilotage et de coordination des politiques publiques qui fondent cette capacité doivent permettre à la DRJSCS de devenir une interlocutrice efficace pour les directions départementales de la cohésion sociale, et plus encore pour les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP).
Le principe de la distinction des missions exercées au plan régional de celles assurées au plan départemental n'est pas dissociable de l'autre principe, qui confie au niveau régional le rôle de pilotage et de coordination des politiques de l'État dans la région.
Cette organisation ne peut pas fonctionner sans une articulation forte entre les directions régionales et les directions départementales.
Il en va de la cohérence d'ensemble dans la mise en oeuvre des politiques de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale, mais aussi du maintien d'un sentiment d'appartenance ministérielle pour les personnels affectés au plan départemental.
Pour piloter les politiques publiques en région, la DRJSCS aura besoin de ses compétences en matière de planification stratégique, d'observation et d'évaluation.
La DRJSCS sera également investie d'une mission d'appui aux départements, dans les différents « métiers » sur l'ensemble des domaines d'intervention des DDI.
Je vous sais très attentif à cet objectif, et je vous demande de concevoir la préfiguration de la DRJSCS en y associant fortement l'échelon départemental, c'est-à-dire les préfets de département, les DDJS et les DDASS de votre région.
Vous devrez veiller également à établir des liens étroits avec les nouvelles ARS, qui vont se mettre progressivement en place au cours du premier trimestre 2010. Il s'agit de tenir compte de l'origine commune des ARS et des DRJSCS, mais aussi de l'importance des problématiques sociales dans les déterminants de santé et dans les questions relatives à l'accès aux soins. Des relations particulières devront être établies avec les ARS, et donc avec les préfigurateurs des ARS, désormais nommés.
Au plan institutionnel, les directeurs des DRJSCS seront présents au conseil de surveillance des ARS et à la conférence régionale de la santé et de l'autonomie. De plus, des commissions de coordination sont mises en place par l'ARS dans deux domaines où les liens entre santé et social sont évidents : la prévention et le secteur médico-social. Le DRJSCS siègera dans chacune de ces commissions de coordination réunissant les principaux décideurs-financeurs de la région pour rapprocher leurs politiques.
Je vous remercie d'être très attentifs aux relations avec ces acteurs, dès le démarrage des préfigurations.

b) La deuxième condition de réussite de la création des DRJSCS réside dans votre capacité à renforcer la collaboration avec les autres niveaux d'intervention gérés par les collectivités territoriales et administrations décentralisées, ou par le monde associatif.
Les domaines d'actions des DRJSCS ont connu, avec les lois de décentralisation, de profonds changements.
L'État n'est pas le seul acteur de la cohésion sociale : les lois de décentralisation ont confié aux collectivités territoriales des responsabilités essentielles dans le champ social, dans lequel agissent aussi, traditionnellement, les associations et les organismes sociaux.
Il en est de même pour les domaines du sport et des actions en faveur des jeunes, qui ont été marqués ces trois dernières décennies par une intervention accrue des collectivités territoriales et par la transformation du secteur associatif, deux évolutions importantes qui justifiaient l'adaptation des organisations et des politiques conduites.
Cette évolution générale a d'ailleurs rendu inévitable cette réforme.
C'est pourquoi l'objectif poursuivi dans la réforme vise à concentrer les moyens de l'État et à recentrer ses interventions dans le champ de la cohésion sociale en s'appuyant largement sur l'ingénierie sociale afin de construire des projets partagés dans un territoire donné : il renvoie aux compétences d'un État animateur par opposition à un État gestionnaire, qui doit « faire faire » plutôt que faire, dans des contextes de gouvernance particulièrement complexes.
En tant que préfigurateurs de DRJSCS, je vous demande de jouer pleinement votre rôle d'« animateur », d'impulser les projets, de les coordonner et d'en assurer l'évaluation.

c) Enfin, vous serez rapidement confrontés à un défi managérial d'envergure : faire travailler ensemble les personnels issus de réseaux différents et de cultures parfois différentes.
Cette intégration des personnels sera facilitée par la cohérence d'ensemble que vous donnerez à la mise en oeuvre des politiques de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale.
Il vous faudra toutefois être particulièrement attentif à maintenir un sentiment d'appartenance commune pour l'ensemble des agents affectés au sein de vos directions.
Je n'ai que peu de préceptes à vous livrer pour réussir dans cette tâche, si ce n'est de recourir, plus que jamais, à votre esprit d'initiative, à votre enthousiasme et à votre expertise du changement, pour répondre au mieux aux attentes des agents qui seront sous vos ordres.
La création d'une culture commune à l'ensemble des agents se fera de façon naturelle, du moins en partie, en permettant aux personnels de changer de métier, de région, voire de types d'organismes.
Il nous faudra certainement aussi réfléchir, à moyen terme, à la mise en place d'un corps commun, qui pourrait s'appeler le « corps de l'inspection de la santé et de la cohésion sociale ».
Je vous invite surtout à insister sur les possibilités d'épanouissement professionnel qu'offrira à l'ensemble des personnels la fédération de plusieurs réseaux au service d'une même ambition.
Je crois qu'il ne faut pas minimiser les possibilités nouvelles d'évolution qui se présenteront aux agents, à travers les expériences professionnelles diverses qu'ils pourront acquérir, et par les efforts de formation qui leurs seront proposés.
Il vous reviendra, en un mot, de mobiliser cette richesse que représente la mise en commun d'agents dotés d'expertise complémentaires pour faire vivre la réforme, pour enraciner la protection des personnes les plus vulnérables, pour développer la pratique sportive pour tous, pour intégrer les jeunes dans la société.
Je vous demande, enfin, de puiser dans la diversité de vos parcours professionnels, afin d'aller bien au-delà du périmètre dont vous aviez la charge dans vos précédentes fonctions.
En un mot, je vous demande de vous considérez comme les véritable gestionnaires de la cohésion sociale.
Il me reste à vous souhaiter une excellente journée de séminaire en espérant qu'elle vous soit pour vous l'occasion d'échanger au maximum sur vos expériences et d'exprimer vos attentes.
Je vous remercie de votre attention.

Source http://construisonsensemble.org, le 20 novembre 2009