Déclaration de Mme Marie-Luce Penchard, ministre de l'outre-mer, sur la structuration des filières agricoles et sur la diversification et l'organisation de l'agriculture dans les départements d'outre-mer, Paris le 26 novembre 2009.

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Circonstance : 25ème anniversaire de l'ODEADOM (Office de Développement de l'Économie Agricole des Départements d'Outre-Mer), à Paris le 26 novembre 2009

Texte intégral

M. le Ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, cher Bruno,
M. Nelson, président de l'ODEADOM,
Mesdames messieurs les représentants des agricultures d'Outre-mer,
Monsieur LUU, Directeur de l'ODEADOM,
Mesdames, Messieurs,
C'est un plaisir de vous accueillir ici à l'hôtel Montmorin. Le monde agricole ultramarin a la chance d'avoir deux maisons, l'une au Ministère de l'Agriculture et de la Pêche, l'autre ici.
Je rentre ce matin d'un déplacement à la Réunion où j'ai eu un contact formidable avec vos collègues réunionnais, comme ce fut également le cas aux Antilles. J'ai notamment pu me rendre à l'abattoir de Saint-Pierre pour les filières animales, ainsi que sur une exploitation d'un planteur de cannes et à l'ARMEFLHOR (Association réunionnaise pour la modernisation de l'économie fruitière légumière et horticole) pour les filières diversification végétales. Ces rencontres furent un moment privilégié pour m'entretenir avec vous des enjeux du développement endogène Outre-mer et annoncer ces bonnes nouvelles que sont les mesures CIOM pour l'agriculture et la pêche, notamment l'abonnement du POSEI (Programme d'Options Spécifiques à l'Éloignement et à l'Insularité des Départements Français d'Outre-mer) pour la diversification agricole, ainsi que la signature le 18 novembre dernier de l'arrêté tarifaire bagasse.
Le monde agricole ultramarin s'est structuré autour de deux filières traditionnelles : la banane et la canne à sucre. Aujourd'hui, notre objectif consiste bien entendu à les fortifier mais également à assurer une diversification et une structuration des autres filières.
En effet, c'est la structuration en filières qui fait la force de notre agriculture. Les professionnels des filières bananes et canne à sucre l'ont bien compris et ont réussi une organisation remarquable signalée d'ailleurs par le Président de la République dans son discours du 6 novembre dernier.
Le décret bagasse est ainsi le symbole d'une modernisation agricole réussie. Il valorise une filière traditionnelle, la filière canne à sucre, tout en l'articulant avec le développement durable et les énergies renouvelables. Il témoigne d'une approche pragmatique et efficace consistant à s'appuyer sur la force de ces filières traditionnelles, auxquelles nous demeurons tous très attachés, tout en les valorisant et en les inscrivant dans les enjeux du XXIème siècle.
En complément de nos filières traditionnelles, notre objectif doit être une agriculture plus diversifiée et mieux organisée.
Pour mettre en oeuvre cette politique qui repose sur deux axes : renforcement des filières existantes et diversification des autres filières, le CIOM met en oeuvre une série de mesures qui reprennent les propositions que vous aviez formulées lors des EGOM. 
Ce soir je souhaiterais uniquement insister sur les axes qui me semble prioritaires, au regard de nos récents échanges :
La préservation du foncier agricole,
l'accès aux crédits et aux financements,
et enfin, le développement de la vulgarisation scientifique, agronomique, halieutique,
Je sais que la protection foncière est une attente majeure. Une mesure CIOM a pour objectif de « préserver et mettre en valeur les espaces agricoles naturels » et notamment de lutter contre l'érosion foncière agricole, à travers la création d'une Commission Départementale d'Aménagement Foncier (CDAF), sous l'autorité du Préfet. Elle vous fera une large place et sera amenée à prendre des décisions sur les demandes de déclassement.
Deuxième sujet qui vous tient particulièrement à coeur, l'accès aux crédits et aux financements. Le CIOM met en place un fonds de garantie pour l'agriculture et la pêche qui sera abondé à hauteur de 10 Meuros dès 2010. Il s'agit pour nous d'améliorer l'accès aux crédits bancaires par la mise en place de garanties qui devraient être gérées par l'AFD. Cette mesure a ainsi été votée la semaine dernière lors de l'adoption du PLF 2010 à l'Assemblée nationale.
Concernant l'accès aux financements, le PLF 2010 a également intégré la décision du CIOM d'augmenter les crédits nationaux de 40 Meuros dans le cadre du programme européen POSEI. Cette mesure a été, je crois, une des mesures les plus commentées dans le monde agricole ultramarin. Le passage en 2010 du POSEI de 280 à 320 Meuros permettra de donner aux filières de diversification agricoles, végétales et animales les moyens d'atteindre les objectifs qu'elles se sont fixées. L'Etat sera particulièrement attentif à ce que les productions ne soient pas mises en concurrence mais bénéficient dans leur ensemble de ce dispositif.
Concernant le développement de la vulgarisation scientifique, agronomique, halieutique, comme beaucoup d'entre vous, je fais le constat d'un maillon manquant entre le monde agricole et la recherche, deux secteurs dans lesquels la France se révèle performante, mais où les interactions sont encore faibles en Outre-mer. D'un côté des agriculteurs mieux formés grâce aux réseaux des lycées agricoles du MAAP, de l'autre une recherche de haut niveau mais éclatée entre divers instituts. Entre les deux, le chaînon manquant, c'est l'institut technique.
Pour l'instaurer, bien sûr, nous partirons de l'existant et le renforcerons. Cela se fera par étapes. Nombreux sont les exemples en ce domaine et pour n'en citer qu'un, je retiendrai celui de la structure l'ARMEFLHOR qui deviendra en 2010 un institut technique agricole multifilière. Il pourra faire le lien avec les centres de recherche agronomique déjà regroupés au sein du pôle de protection des plantes de Saint-Pierre. L'institut technique de la banane aux Antilles pourrait avoir la même vocation si les professionnels le souhaitent bien entendu.
Selon les territoires et les filières, et sous l'impulsion de l'ensemble de la profession, nous accompagnerons la mutualisation d'actions sur plusieurs territoires ou la création d'institut technique à même d'accompagner les agriculteurs dans les défis techniques à venir : baisse des intrants chimiques, productivité, respect de l'environnement, qualité organoleptique etc.
Quant à la diversification, j'ai bien conscience qu'elle est déjà à l'oeuvre, mais elle doit être encouragée et renforcée.
Lors de mon déplacement en Guadeloupe, j'ai rencontré des producteurs de melon pour participer à leur première récolte de l'année. Cette anecdote a valeur d'exemple et je tiens, à travers elle, à saluer toutes ces initiatives qui, ici et là, participent au développement de nos productions locales. Je n'oublie pas que certaines productions locales comme les ressources marines sont insuffisamment exploitées. Le CIOM vous donnera par exemple des outils pour structurer la filière pêche, au niveau des structures professionnelles et au plan technique et économique.
De même, une autre mesure vous aidera à élaborer un schéma de développement de l'aquaculture marine pour chaque Dom, en s'appuyant sur des programmes de recherche/développement aquacole et en renforçant votre organisation professionnelle et économique.
Afin d'assurer des débouchés à vos filières, la production locale sera favorisée en assouplissant le code des marchés publics dans le cadre des appels d'offres en matière de restauration collective.
Les actions favorisant le développement endogène seront également facilitées par la création de 3 commissaires (Antilles, plateau des Guyanes et Océan Indien), chargés de lever les blocages et de mettre en relation les acteurs.
En outre, je sais le rôle crucial que jouent les chambres d'agricultures dans l'organisation du monde agricole dans nos territoires. Une mission interministérielle sera chargée de les renforcer et de garantir leur financement.
Mais l'environnement global du secteur agricole et pêche d'Outre-mer ne se limite pas aux seules mesures CIOM.
La LODEOM, le plan contre la crise du secteur agricole annoncé par le Président de la République qui s'appliquera également en Outre-mer, ainsi que la future loi de modernisation agricole de mon collègue Bruno LEMAIRE complètent ce tableau.
C'est donc tout un environnement nouveau qui se met en place et je veillerai tout particulièrement à mettre en avant l'excellence de nos filières, qui constituent un élément clé de la valorisation de nos Outre-mer, loin des clichés souvent véhiculés.
Pour clore mon propos, permettez moi d'insister sur le rôle que doit jouer l'ODEADOM. Gestionnaire et payeur des aides nationales et communautaires, son action dépasse ce simple cadre. Interface indispensable entre professionnels et administrations, il participe à l'élaboration des grandes orientations de l'agriculture pour l'Outre-mer. Au nom du MAAP et du MOM, je tiens à remercier le conseil d'administration de l'ODEADOM, son président ainsi que son directeur pour leur précieuse collaboration.
Dans cette nouvelle page de l'agriculture et de la pêche que nous allons écrire ensemble, l'ODEADOM occupera certainement une place essentielle. Permettez-moi donc de vous souhaiter un heureux anniversaire, ainsi que tous mes voeux de réussite.
Source : http://www.outre-mer.gouv.fr, 7 décembre 2009