Texte intégral
Q - Commençons par la question typique qui occupe l'esprit de nombreux Iraniens. Insisteriez-vous autant sur le respect des droits de l'Homme en Iran que sur vos préoccupations à propos du programme nucléaire de la République islamique?
R - Ce n'est pas un choix. Les deux questions sont importantes. Parlons des droits de l'Homme. Nous sommes préoccupés par la situation en Iran et par la manière dont les autorités iraniennes ont réagi contre les manifestations après l'élection. En tant qu'amis de l'Iran, nous sommes préoccupés, compte tenu du fait que les gens manifestent dans les rues pour protester contre le résultat de l'élection parce qu'ils croient que les autorités ont manipulé les résultats. Notre préoccupation à propos des droits de l'Homme n'est pas dirigée contre l'Iran. Nous sommes attachés au principe général d'élections libres et équitables, et du respect du droit de manifester pacifiquement sans crainte d'emprisonnement, de poursuites, de torture ou de viol.
Nous sommes également préoccupés - et pas seulement nous, mais l'ensemble de la communauté internationale - par le programme nucléaire de Téhéran. Je serai clair à ce propos : l'Iran a le droit d'avoir un programme nucléaire civil. Mais nous sommes préoccupés par le refus iranien de répondre à l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA). Et les questions posées par l'AIEA étaient simples. L'inquiétude de la communauté internationale est justifiée ; nous sommes inquiets de l'éventualité que l'Iran mette au point des armes nucléaires. Ce serait une menace pour tous. Le Moyen-Orient est déjà un endroit très dangereux et explosif ; nous n'avons pas besoin d'une nouvelle source de tension. Nous disons à l'opinion publique iranienne que vous avez le droit de développer votre propre énergie nucléaire civile et nous n'avons rien contre cela. Mais le gouvernement n'a pas le droit, étant donné qu'il a signé le TNP, de développer 'un programme nucléaire à des fins militaires. Ce serait un danger, non seulement pour la région tout entière, mais aussi pour le monde, car cela entraînerait un délitement du régime de non-prolifération. En un mot, nous ne sommes pas préoccupés de la même manière par la situation des droits de l'Homme en Iran et par le programme nucléaire. Nous sommes profondément impressionnés par le courage et la dignité des Iraniens qui protestent très courageusement contre le résultat des élections.
Q - Si Téhéran annonçait demain qu'elle cessera immédiatement et complètement l'enrichissement de l'uranium à condition que l'Occident cesse d'afficher ses susceptibilités en ce qui concerne les affaires intérieures iraniennes, quelle serait votre réaction ?
R - Tout d'abord, ils n'ont jamais proposé un tel marché. Deuxièmement, nos préoccupations à l'égard du programme nucléaire sont nées bien avant les manifestations. Troisièmement, il n'y a aucun lien entre la situation des droits de l'Homme en Iran et la capacité de l'Agence à accomplir sa mission en Iran. Les droits de l'Homme sont notre affaire, l'affaire de la communauté internationale, de l'Organisation des Nations unies et les ONG.
Nous serons ravis que Téhéran mette un terme à l'enrichissement. Mais il ne nous appartient pas de dire qu'ils y ont mis fin ; c'est le rôle de l'AIEA et des inspecteurs. Permettez-moi de vous rappeler que les Français et les Russes ont proposé aux autorités iraniennes d'enrichir leur uranium d'environ 5 à 19 %. Ils ont refusé alors qu'il s'agissait là d'une offre généreuse.
La France est très favorable à la proposition faite par l'Administration Obama aux autorités iraniennes d'engager des négociations politiques. Mais le gouvernement iranien continue à enrichir de l'uranium dans le pays et veut développer dix nouveaux sites. C'est une provocation. Que recherchent-ils ?
Q - Estimez-vous que l'Administration Ahmadinejad est suffisamment stable pour conclure un accord avec la communauté internationale, un accord qui serait acceptable pour le futur gouvernement iranien ?
R - Il n'y a aucune raison de parler dès maintenant du futur gouvernement de l'Iran. Les élections ont certes été contestées par le peuple iranien à un degré qui a alerté l'ensemble de la communauté internationale. Cette même direction, qui est accusée d'être en mesure de développer un programme nucléaire militaire, est également accusée de fraude électorale et de réprimer brutalement des manifestations pacifiques.
Q - Pouvez-vous dire clairement si vous croyez que la dernière élection présidentielle iranienne a ou non été truquée ? Croyez-vous que le gouvernement de M. Ahmadinejad possède suffisamment de légitimité pour être reconnu par la communauté internationale ?
R - Ce qui est manifeste, c'est que le gouvernement Ahmadinejad est contesté par son propre peuple. Certains affirment que les contestataires sont seulement les jeunes, seulement les femmes et que seules les villes sont concernées. Mais cela représente les trois quarts de la population ! La manière dont réagit le président Ahmadinejad, la manière dont il menace d'autres pays, est inacceptable.
Q - Quel est votre sentiment personnel sur le "mouvement vert" iranien? Et quelle est votre position officielle à ce sujet ?
R - Dans les fonctions qui sont les miennes, je n'ai pas de sentiments personnels. Nous demandons au gouvernement iranien de ne pas réprimer des manifestants pacifiques. Nous considérons que beaucoup de gens dans le pays n'étaient pas d'accord avec le résultat des élections. Comme je l'ai dit, nous soutenons fermement tous ceux qui luttent avec courage, dignité et détermination pour leurs droits fondamentaux.
Q - Selon vous, comment devrait réagir la communauté internationale si le gouvernement iranien arrêtait les candidats rivaux de M. Ahmadinejad, MM. Moussavi et Karoubi ? Ou comment devrait réagir la communauté internationale si le gouvernement iranien tuait par exemple une centaine de manifestants iraniens ?
R - Je ne veux pas envisager une issue aussi sanglante. Je veux juste empêcher que de tels événements ne se produisent. Je veux dire aux autorités iraniennes de mettre un terme à la répression. Les manifestants représentent la majorité des Iraniens, le coeur et la composante essentielle du pays.
Il serait à l'évidence également inacceptable que certains candidats rivaux soient arrêtés. Ils étaient des candidats légitimes. Regardez les déclarations de certains grands religieux chiites iraniens : elles sont capitales.
Q - Et la dernière question portera sur Clotilde Reiss. A quoi êtes-vous prêt pour obtenir sa libération ? Etes-vous prêt à négocier avec la République islamique ou à l'échanger contre certains prisonniers iraniens par exemple ?
R - Il n'y a aucun marché. Clotilde Reiss est innocente. C'est une jeune enseignante qui a été accusée d'espionnage. Elle prenait des photos avec son téléphone portable. Des milliers de personnes l'ont fait. L'accusation d'espionnage est mensongère. Heureusement, elle a été libérée sous caution. Nous avons confiance que la justice iranienne reconnaîtra rapidement son innocence et la relaxera.
En conclusion, je voudrais souligner que tous les pays du monde sont réellement attentifs à ce qui se passe en Iran. D'une certaine manière, cela veut dire que nous sommes tous Iraniens. Nous sommes partisans d'un Iran pacifique, libre et moderne. Le dirigeant est-il en accord avec le haut clergé chiite ? Je ne le sais pas, apparemment non. M. Ahmadinejad est-il en accord avec tous les ayatollahs les plus importants du pays ? Visiblement non. En sommes-nous responsables ? Non. Mais nous sommes assurément préoccupés. Et les gens qui manifestent pour la liberté dans le monde doivent savoir qu'ils peuvent compter sur nous.Source:http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 décembre 2009
R - Ce n'est pas un choix. Les deux questions sont importantes. Parlons des droits de l'Homme. Nous sommes préoccupés par la situation en Iran et par la manière dont les autorités iraniennes ont réagi contre les manifestations après l'élection. En tant qu'amis de l'Iran, nous sommes préoccupés, compte tenu du fait que les gens manifestent dans les rues pour protester contre le résultat de l'élection parce qu'ils croient que les autorités ont manipulé les résultats. Notre préoccupation à propos des droits de l'Homme n'est pas dirigée contre l'Iran. Nous sommes attachés au principe général d'élections libres et équitables, et du respect du droit de manifester pacifiquement sans crainte d'emprisonnement, de poursuites, de torture ou de viol.
Nous sommes également préoccupés - et pas seulement nous, mais l'ensemble de la communauté internationale - par le programme nucléaire de Téhéran. Je serai clair à ce propos : l'Iran a le droit d'avoir un programme nucléaire civil. Mais nous sommes préoccupés par le refus iranien de répondre à l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA). Et les questions posées par l'AIEA étaient simples. L'inquiétude de la communauté internationale est justifiée ; nous sommes inquiets de l'éventualité que l'Iran mette au point des armes nucléaires. Ce serait une menace pour tous. Le Moyen-Orient est déjà un endroit très dangereux et explosif ; nous n'avons pas besoin d'une nouvelle source de tension. Nous disons à l'opinion publique iranienne que vous avez le droit de développer votre propre énergie nucléaire civile et nous n'avons rien contre cela. Mais le gouvernement n'a pas le droit, étant donné qu'il a signé le TNP, de développer 'un programme nucléaire à des fins militaires. Ce serait un danger, non seulement pour la région tout entière, mais aussi pour le monde, car cela entraînerait un délitement du régime de non-prolifération. En un mot, nous ne sommes pas préoccupés de la même manière par la situation des droits de l'Homme en Iran et par le programme nucléaire. Nous sommes profondément impressionnés par le courage et la dignité des Iraniens qui protestent très courageusement contre le résultat des élections.
Q - Si Téhéran annonçait demain qu'elle cessera immédiatement et complètement l'enrichissement de l'uranium à condition que l'Occident cesse d'afficher ses susceptibilités en ce qui concerne les affaires intérieures iraniennes, quelle serait votre réaction ?
R - Tout d'abord, ils n'ont jamais proposé un tel marché. Deuxièmement, nos préoccupations à l'égard du programme nucléaire sont nées bien avant les manifestations. Troisièmement, il n'y a aucun lien entre la situation des droits de l'Homme en Iran et la capacité de l'Agence à accomplir sa mission en Iran. Les droits de l'Homme sont notre affaire, l'affaire de la communauté internationale, de l'Organisation des Nations unies et les ONG.
Nous serons ravis que Téhéran mette un terme à l'enrichissement. Mais il ne nous appartient pas de dire qu'ils y ont mis fin ; c'est le rôle de l'AIEA et des inspecteurs. Permettez-moi de vous rappeler que les Français et les Russes ont proposé aux autorités iraniennes d'enrichir leur uranium d'environ 5 à 19 %. Ils ont refusé alors qu'il s'agissait là d'une offre généreuse.
La France est très favorable à la proposition faite par l'Administration Obama aux autorités iraniennes d'engager des négociations politiques. Mais le gouvernement iranien continue à enrichir de l'uranium dans le pays et veut développer dix nouveaux sites. C'est une provocation. Que recherchent-ils ?
Q - Estimez-vous que l'Administration Ahmadinejad est suffisamment stable pour conclure un accord avec la communauté internationale, un accord qui serait acceptable pour le futur gouvernement iranien ?
R - Il n'y a aucune raison de parler dès maintenant du futur gouvernement de l'Iran. Les élections ont certes été contestées par le peuple iranien à un degré qui a alerté l'ensemble de la communauté internationale. Cette même direction, qui est accusée d'être en mesure de développer un programme nucléaire militaire, est également accusée de fraude électorale et de réprimer brutalement des manifestations pacifiques.
Q - Pouvez-vous dire clairement si vous croyez que la dernière élection présidentielle iranienne a ou non été truquée ? Croyez-vous que le gouvernement de M. Ahmadinejad possède suffisamment de légitimité pour être reconnu par la communauté internationale ?
R - Ce qui est manifeste, c'est que le gouvernement Ahmadinejad est contesté par son propre peuple. Certains affirment que les contestataires sont seulement les jeunes, seulement les femmes et que seules les villes sont concernées. Mais cela représente les trois quarts de la population ! La manière dont réagit le président Ahmadinejad, la manière dont il menace d'autres pays, est inacceptable.
Q - Quel est votre sentiment personnel sur le "mouvement vert" iranien? Et quelle est votre position officielle à ce sujet ?
R - Dans les fonctions qui sont les miennes, je n'ai pas de sentiments personnels. Nous demandons au gouvernement iranien de ne pas réprimer des manifestants pacifiques. Nous considérons que beaucoup de gens dans le pays n'étaient pas d'accord avec le résultat des élections. Comme je l'ai dit, nous soutenons fermement tous ceux qui luttent avec courage, dignité et détermination pour leurs droits fondamentaux.
Q - Selon vous, comment devrait réagir la communauté internationale si le gouvernement iranien arrêtait les candidats rivaux de M. Ahmadinejad, MM. Moussavi et Karoubi ? Ou comment devrait réagir la communauté internationale si le gouvernement iranien tuait par exemple une centaine de manifestants iraniens ?
R - Je ne veux pas envisager une issue aussi sanglante. Je veux juste empêcher que de tels événements ne se produisent. Je veux dire aux autorités iraniennes de mettre un terme à la répression. Les manifestants représentent la majorité des Iraniens, le coeur et la composante essentielle du pays.
Il serait à l'évidence également inacceptable que certains candidats rivaux soient arrêtés. Ils étaient des candidats légitimes. Regardez les déclarations de certains grands religieux chiites iraniens : elles sont capitales.
Q - Et la dernière question portera sur Clotilde Reiss. A quoi êtes-vous prêt pour obtenir sa libération ? Etes-vous prêt à négocier avec la République islamique ou à l'échanger contre certains prisonniers iraniens par exemple ?
R - Il n'y a aucun marché. Clotilde Reiss est innocente. C'est une jeune enseignante qui a été accusée d'espionnage. Elle prenait des photos avec son téléphone portable. Des milliers de personnes l'ont fait. L'accusation d'espionnage est mensongère. Heureusement, elle a été libérée sous caution. Nous avons confiance que la justice iranienne reconnaîtra rapidement son innocence et la relaxera.
En conclusion, je voudrais souligner que tous les pays du monde sont réellement attentifs à ce qui se passe en Iran. D'une certaine manière, cela veut dire que nous sommes tous Iraniens. Nous sommes partisans d'un Iran pacifique, libre et moderne. Le dirigeant est-il en accord avec le haut clergé chiite ? Je ne le sais pas, apparemment non. M. Ahmadinejad est-il en accord avec tous les ayatollahs les plus importants du pays ? Visiblement non. En sommes-nous responsables ? Non. Mais nous sommes assurément préoccupés. Et les gens qui manifestent pour la liberté dans le monde doivent savoir qu'ils peuvent compter sur nous.Source:http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 décembre 2009