Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, surla mobilisation des services de l'Etat pour la sortie de crise et sur les réformes de la taxe professionnelle, des collectivités locales et de l'administration territoriale de l'Etat, Paris le 3 mars 2010.

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Circonstance : Réunion des préfets à Paris le 3 mars 2010

Texte intégral

Je veux rendre hommage à tous ceux, élus, fonctionnaires, volontaires ou bénévoles, qui se sont mobilisés sous votre direction, pour secourir et apporter un premier appui à des femmes et des hommes éprouvés par la perte de proches, blessés, ou dont le foyer a été dévasté par les flots.
Mais cette crise doit aussi nous conduire à nous interroger sur nos outils. Nous avons évoqué cette question ce matin en Conseil des ministres. Il faut améliorer la rapidité de mise en oeuvre des plans de prévention des risques naturels et vous donner des moyens plus efficaces de les faire appliquer.
Dans le cadre d'une politique qui devra tirer toutes les leçons de cette catastrophe, nous allons conduire un plan pluriannuel de renforcement des digues, indispensables à la sécurité des populations.
Vous le savez, les sorties de crise sont toujours des périodes difficiles. Au cours des prochains mois, votre présence personnelle sera plus que jamais cruciale pour accompagner nos concitoyens et nos entreprises dans la transition économique.
En ce début 2010, la croissance commence à poindre, mais les restructurations d'entreprises se poursuivent, avec des conséquences territoriales et humaines parfois majeures.
Dans ces circonstances, je compte sur votre vigilance, et vous encourage à prendre toutes les initiatives qui facilitent la gestion coordonnée et efficace des acteurs locaux, privés et publics.
La dégradation de l'emploi est désormais moins rapide qu'elle ne l'a été au plus fort de la crise.
Nous allons poursuivre notre effort en faveur de l'emploi au plan national et dans les territoires. Parce que la situation sera encore difficile pendant plusieurs mois, notre mobilisation doit rester forte, et vous serez en première ligne.
Dans notre stratégie de lutte contre le chômage, je vous encourage à mobiliser les outils mis à votre disposition.
- Pour prévenir les licenciements, d'abord, grâce au mécanisme modernisé du chômage partiel, qui a déjà permis de mobiliser 257 millions d'heures en 2009 ;
- Pour accompagner les salariés victimes des restructurations, ensuite, avec la Convention de Reclassement Personnalisée, le Contrat de Transition Professionnelle et l'amélioration de l'assurance chômage, pour ceux qui ont peu cotisé ;
- Pour favoriser la création d'emplois, enfin, avec l'exonération de charge dans les TPE, et, pour lutter contre le chômage des jeunes, le plan exceptionnel en faveur de l'apprentissage et de l'alternance.
Le recours transitoire aux contrats aidés et la mise en place du contrat unique d'insertion au 1er janvier ont été des succès.
Mais l'effort doit se poursuivre.
Dans les mois qui viennent, les contrats aidés vont rester un moyen privilégié d'insertion des demandeurs d'emploi les plus en difficulté.
Parallèlement, nous devons poursuivre les réformes structurelles que nous avons engagées avec le Président de la République dans trois domaines majeurs : la réforme de la fiscalité locale, celle des collectivités locales et celle de l'administration territoriale de l'Etat.
Ces réformes sont nécessaires pour sauvegarder la souveraineté financière de notre pays et faire progresser la compétitivité de notre économie, pour qu'elle tienne son rang dans le classement mondial.
Elles vont modifier profondément l'organisation territoriale, déconcentrée et décentralisée de la France.
C'est pourquoi, elles nécessitent un vigoureux effort d'explication, de pédagogie et d'accompagnement sur le terrain. Là encore, c'est à vous qu'il revient de porter cette tâche au quotidien.
* La première réforme que vous allez devoir accompagner, c'est celle de la fiscalité locale.
En 2010, nous allons achever la réforme de la taxe professionnelle et vos partenaires locaux vont continuer à vous solliciter pour sur sa mise en oeuvre.
Cet impôt était une singularité française, qui frappait les investissements avant même qu'ils n'aient produit de la richesse. Il dissuadait nos entreprises d'investir et nuisait à l'attractivité de nos territoires.
Nous l'avons remplacé par la cotisation économique territoriale. Désormais, le coût moyen d'un investissement est allégé de 20% et la charge fiscale des entreprises est réduite d'environ 6,3 milliards d'euros, en rythme de croisière.
La réforme de la taxe professionnelle est l'un des instruments de la reprise.
C'est la raison pour laquelle nous avons fait le choix d'une réforme en un an, ce qui revient à alléger la charge fiscale sur les entreprises de 12,3 milliards d'euros la première année 2010.
Cette réforme bouleverse l'architecture de la fiscalité locale. Cela ne s'est pas fait sans mal; les discussions ont été nourries au Parlement.
Mais le résultat est là : l'autonomie financière des collectivités territoriales est préservée, les ressources de chacune, prise individuellement, sont garanties et elles bénéficient de nouveaux impôts dynamiques et moins pénalisants pour les entreprises.
Cette réforme suscite des interrogations légitimes de la part des collectivités territoriales, qui ne percevront la cotisation économique territoriale qu'à compter de 2011, alors que le nouveau système s'applique dès cette année aux entreprises.
En 2010, elles percevront donc une compensation relais, de sorte que leurs ressources seront au moins égales à celles perçues en 2009.
Six parlementaires en mission ont été chargés d'expliquer la réforme et de recueillir les remarques des élus.
Mais vous un avez un rôle clé à jouer pour expliquer et convaincre, sur le terrain, les entreprises et les élus locaux, avec le concours des directeurs départementaux des finances publiques.
* La deuxième réforme majeure, c'est celle des collectivités locales.
Le Parlement examine actuellement le projet de loi de réforme des collectivités territoriales qui doit moderniser notre décentralisation.
Pour pouvoir s'emparer rapidement des nouveaux instruments destinés à optimiser la dépense publique locale, les élus auront besoin de votre soutien et de vos explications.
Vous le savez, le Sénat a voté l'institution du conseiller territorial; je pense que la création de cet élu commun à la Région et au Département est une chance historique de combiner proximité dans l'application des politiques départementales et hauteur de vue exigée par les stratégies régionales.
Le renforcement et la rationalisation de l'intercommunalité vont améliorer la gestion locale.
Sans attendre le vote de la loi, je sais que la plupart d'entre vous a engagé sur ce sujet le dialogue avec les élus. Je vous incite vivement à reprendre ce travail indispensable dès que la période de réserve préélectorale sera passée.
* La réforme de l'administration territoriale de l'Etat vous concerne très directement.
Je vous ai dit le 16 novembre dernier, à la Défense, l'importance personnelle que j'attache à sa réussite. L'idée que se font nos concitoyens de la qualité et de l'efficacité de l'administration de l'Etat dépend avant tout de la façon dont les questions sont traitées par les services placés sous votre autorité. La réforme de l'administration territoriale de l'Etat c'est aussi la réforme de l'institution préfectorale : vous êtes au centre de l'architecture nouvelle, au niveau régional comme au niveau départemental.
Nous avons franchi, depuis le début de l'année 2010, des étapes décisives.
Nous venons, en modifiant en profondeur le décret de 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, de renforcer la coordination des services de l'Etat à l'échelon régional. C'est à cet échelon que sont pilotées les politiques de l'Etat. L'ensemble des services ministériels a été réorganisé autour de grands pôles garantissant l'efficacité de ces politiques sous votre conduite.
Le nouveau décret confère aux préfets de région une véritable autorité sur les préfets de département, pour la plus grande partie du champ des actions de l'Etat. L'objectif n'est pas de hiérarchiser votre corps, mais de garantir l'unité d'action. J'attends des préfets de région qu'ils constituent avec leurs collègues de département une équipe collégiale soudée, apte à conduire efficacement les politiques publiques.
Pour vous aider à asseoir votre autorité, j'ai tenu à ce que vous soyez étroitement associés aux nominations des directeurs régionaux et départementaux des services de l'Etat. Vous avez ainsi pu choisir les nouveaux directeurs départementaux interministériels (DDI) que j'ai nommés ces dernières semaines. L'efficacité et la cohésion de vos équipes en seront renforcées.
Grâce à votre engagement et à celui de toutes vos équipes locales, la phase de démarrage de la réforme des services déconcentrés est un succès, comme le Président de la République a pu le constater lors de son déplacement à Laon. Les nouvelles directions départementales sont constituées ; leurs personnels se mobilisent, dans un esprit plus interministériel ; les services sont progressivement regroupés dans des immeubles fonctionnels.
Mes services et ceux de tous les ministères concernés vont continuer à vous apporter leur appui pour l'accompagnement de cette réforme de grande envergure. J'ai créé une nouvelle structure, au sein du Secrétariat général du gouvernement (SGG), qui pilote tous les chantiers nécessitant un travail interministériel et qui garantit des décisions rapides et cohérentes.
Les deux chantiers les plus importants concernent la gestion des ressources humaines et l'immobilier.
La constitution de nouveaux services, regroupant des fonctionnaires de statuts différents, implique une harmonisation des conditions d'emploi. J'ai validé, début janvier, une charte de gestion des ressources humaines des DDI. C'est un processus auquel les organisations syndicales sont légitimement très attachées. Je vous demande de lui prêter une attention particulière et de vous investir personnellement dans le dialogue social avec les personnels et leurs représentants. C'est un des aspects importants de la rénovation de la fonction publique qui est en jeu.
En matière immobilière, vous avez tous élaboré des plans de réinstallation des services déconcentrés et je vous remercie pour votre efficacité. La plupart de vos propositions a, d'ores et déjà, été validée et peut être mise en oeuvre, grâce aux crédits qui ont été mis à votre disposition.
Nous mettons par ailleurs progressivement à votre disposition d'autres outils de gestion performants, notamment pour faciliter la convergence des réseaux informatiques et la simplification des circuits budgétaires.
Il faut enfin, sur cette grande réforme de nos administrations territoriales, que vous poursuiviez vos efforts de communication, à l'égard des élus comme du grand public. Le Service d'information du gouvernement (SIG) vous aide à élaborer des supports de communication, notamment pour ce qui concerne les pages d'accueil et le contenu des sites Internet des services déconcentrés de l'Etat.
Je crois qu'avec cette grande réforme, nous avons entre nos mains un formidable outil de rénovation des services publics de proximité.
Je souhaite que sur le terrain, vous portiez aussi la voix du Gouvernement à l'égard des fonctionnaires.
Il faut assumer la réduction des effectifs de fonctionnaires, car c'est une nécessité.
La révision générale des politiques publiques a permis un examen, administration par administration, et la règle du non remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux, a été adaptée en fonction des nécessités de chaque politique publique : à la Justice par exemple, plus de 900 emplois ont été créés en 2009-2010.
Au-delà de cet effort continuel de pédagogie, je vous demande aussi de souligner, comme le Président de la République a eu l'occasion de le faire hier encore, la considération que le Gouvernement porte au travail et à l'engagement des fonctionnaires. Nous réduisons les effectifs certes. Mais les fonctionnaires en place en sont les premiers bénéficiaires, puisque la moitié des économies obtenues sont utilisées pour dynamiser leurs rémunérations.
Les réformes sont ambitieuses. C'est un travail de conviction que j'attends de vous.
Ces réformes vous appellent à conduire, inlassablement, le dialogue avec les élus, les associations, les organisations syndicales. Je sais bien que vous devez parfois contrer des campagnes de communication conservatrices, qui ne vous facilitent pas la tâche.
Mais nos réformes participent à la crédibilité de notre pays et accélèrent la sortie de crise.
Plus que jamais, nos concitoyens portent un regard attentif sur l'Etat.
Il voit en lui un protecteur, un fédérateur, un acteur. En cela, votre autorité et votre responsabilité s'en trouvent renforcées. A travers vous, c'est la République qui est plébiscitée et jugée.
C'est une charge qui est lourde mais passionnante.
Dans l'exercice de votre mission, vous savez pouvoir compter sur mon appui et ma confiance. Avec le Président de la République et le Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités territoriales, nous comptons sur votre engagement et vous pouvez compter sur le nôtre.
Source http://www.gouvernement.fr, le 4 mars 2010