Texte intégral
M.-O. Fogiel.- Bonjour G. Tron.
Bonjour.
Vous êtes le nouveau secrétaire d'Etat à la Fonction publique. Libération ce matin ironise : le changement, c'est G. Tron.
Je suis fier !
Vous êtes fier. Alors, je vais quand même récapituler les épisodes précédents. Vous êtes "villepiniste". En 2008, vous qualifiez la première année de N. Sarkozy à la présidence d'année de surprises et finalement, de déceptions, disant craindre à court terme des déconvenues. En janvier, l'appel du Parquet à la suite de la relaxe, en première instance, de l'ancien Premier ministre, vous a fait dire que monsieur de Villepin deviendra, non plus par la volonté des Français, mais par la volonté du Président, son principal opposant. Vous dites que, ce matin, tout ça, c'est du passé, vite oublié ?
Non, je ne dis absolument pas cela, si je le disais, d'ailleurs, vous vous feriez un malin plaisir de montrer l'incohérence de mes propos.
C'est exact.
C'est pour ça que je vous connais bien. Donc par définition, je ne vais pas dire les choses comme cela...
Mais vous dites quoi alors ? Que vous êtes trop heureux de rentrer au Gouvernement ?
Eh bien, je dis que par exemple, le fait qu'il y ait effectivement cette procédure ne me paraît pas idéal dans le calendrier de la majorité. Et c'est la raison pour laquelle je fais partie de ceux qui pensent que si on peut mettre un peu d'huile à sa modeste place - je parle de la mienne - entre les hommes, c'est excellent pour la majorité, pour nos électeurs et pour la France.
Donc vous dites ce matin que votre utilité, c'est courroie de transmission entre D. de Villepin et N. Sarkozy, entre autres, j'imagine bien que vous allez travailler sur les dossiers, mais vous allez essayer d'arranger les relations entre les deux ?
J'aimerais que nous ayons la possibilité d'éviter de travailler pendant deux ans, puis, d'aborder dans des conditions que je ne connais d'ailleurs pas plus que les autres 2012 avec des tensions dans la majorité dont on peut faire l'économie. D'ailleurs, je crois que le message de dimanche dernier et du dimanche précédent était, de la part de nos électeurs, celui-là.
Mais alors, vous avez bien entendu D. de Villepin dimanche soir annoncer la création d'un mouvement au service des Français, il va le faire jeudi. Est-ce que vous ferez partie de ce parti ?
D'abord, vous ne savez pas, et moi non plus, si c'est un parti...
Oui, ou enfin de cette mouvance, est-ce que vous allez adhérer à cette amicale...
Ce n'est pas pareil, ce n'est pas dimanche soir qu'il l'a annoncé, c'était prévu bien avant. En second lieu, ça a été précisé hier, comme étant dans l'orbite de la majorité, ce que, pour ma part, je trouve indispensable. Et en troisième lieu, dans ces conditions, je ne crois pas qu'il y aura d'incompatibilité, puisque c'est dans l'orbite de la majorité à en faire partie.
Vous ne craignez pas des tensions quand même, notamment en Conseil des ministres, quand vous allez vous retrouver entre deux chaises ?
Aucune tension. Je ne serai assis entre deux chaises, mais sur une chaise simplement, et en second lieu, il y a autour de la table du président de la République, en passant par tous les ministres et le Premier d'entre eux, des personnes, des hommes et des femmes que je connais tous, donc il n'y a aucun problème, aucune tension. Et je dois dire d'ailleurs que, y compris dans les moments de ces dernières années, mon expression était libre, je la revendique toujours comme libre, et je parlerai avec eux comme un homme libre.
Et comme un homme libre, est-ce que - pour terminer là-dessus - vous décrypter cette nomination comme un signe de N. Sarkozy envers D. de Villepin, un signe d'ouverture ?
Eh bien, écoutez, je vais poser la question en sens inverse, avec votre autorisation...
Allez-y...
S'il n'y avait pas eu un signe - que ce soit G. Tron, H. Mariton ou F. Goulard ou qui vous voulez - s'il n'y avait pas eu un signe de cette nature, qu'aurait-on dit ? On aurait dit qu'en réalité, il n'y avait absolument aucune leçon de tirée de ce que les électeurs avaient passé dimanche dernier comme message...
Donc un signe clairement.
Très clairement, c'est un signe.
Une nomination qui intervient alors qu'aujourd'hui, une grande journée de mobilisation de la Fonction publique se prépare, le message que vous adressez à B. Thibault, invité de J.-P. Elkabbach tout à l'heure, puisque, aujourd'hui, ça dépend de vous ?
Oui, tout à fait. Eh bien, d'abord, c'est un message de salutation très cordiale, parce que je connais bien B. Thibault. En second lieu, c'est que la réforme de la Fonction publique n'a de sens que si elle est comprise, si elle est expliquée, je crois que les Français ne souhaitent pas l'immobilisme, d'ailleurs, tous les sondages ont montré dimanche dernier que malgré le vote très clair qu'ils ont exprimé, que c'est un vote de déception et de protestation, ils souhaitaient la poursuite des réformes. Le président de la République souhaite la poursuite des réformes, et la réforme de la Fonction publique est indispensable. Donc il faut le faire peut-être de façon très explicative.
Donc de la pédagogie, vous dites que vous allez mieux expliquer. Mais en 2005, vous avez été aussi le député qui a suggéré dans un rapport le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux, que met en pratique aujourd'hui le Gouvernement. Vous n'avez pas l'impression que ça pourrait corser vos rapports avec les syndicats, G. Tron ?
Pas le moins du monde, et je vais même vous dire une chose, non seulement, je l'ai proposé, enfin, je l'ai proposé, j'étais de ceux qui l'ont proposé dès le début, parce que je travaille sur ces dossiers depuis une dizaine d'années, mais je pense même que c'est en fait un faux débat, pour deux raisons. Première raison, c'est que si vous avez un peu moins de fonctionnaires dans une France qui en compte un nombre plus important que tous les pays qui nous entourent, vous avez des possibilités de répondre à leur demande de pouvoir d'achat, et je vous rappelle d'ailleurs que la suppression d'un fonctionnaire sur deux permet de leur restituer la moitié des économies budgétaires dégagées, ce qui ne fait jamais que 500 millions d'euros, vous voyez bien que les impératifs financiers ne sont pas primordiaux. Et la seconde chose que je voudrais souligner, c'est que nous avons tant et tant de chantiers dans la Fonction publique qu'il ne faut pas s'arrêter à celui-là. Parmi les chantiers, il y a celui également de s'intéresser à ce que l'on appelle les opérateurs de l'Etat, tous ces organismes qui gravitent autour des ministères, et qui, pour vous donner un ordre d'idée, ont embauché dans la même période que vous venez d'évoquer, ces trois dernières années, autant de fonctionnaires que les administrations centrales, elles, n'en ont pas remplacé. Donc vous le voyez, il y a de vrais chantiers.
Très bien. Pour terminer, en une phrase, vous entendiez le reportage tout à l'heure dans le journal, les députés UMP, dont vous faites partie, réunis tout à l'heure donc pour la première réunion de groupe, et la colère qui monte, vous leur dites quoi à vos collègues ?
Je leur dis que je comprends toujours que les députés puissent avoir une très grande liberté d'expression, je l'ai utilisée moi-même, et il appartient au Gouvernement, et donc aujourd'hui à moi, de les entendre et puis de faire en sorte d'avancer tous dans la même direction. Je vous l'ai dit en commençant, je vous le dis en terminant, c'est l'objectif politique que très modestement je voudrais essayer de contribuer à poursuivre.
Merci G. Tron d'être intervenu ce matin sur Europe 1.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 26 mars 2010