Texte intégral
Monsieur le président, cher Claude Leicher,
Mesdames, messieurs,
Je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui, dans ce grand palais de Lille, pour ce congrès de MG France.
Si vous me le permettez, je voudrais tout de suite aborder un sujet avec vous.
J'ai entendu dire, ici ou là, que certains estimaient que le traitement de la grippe reflétait un mépris de ma part à l'égard des médecins.
Alors je veux vous le dire avec beaucoup de solennité : on peut ne pas être d'accord avec les mesures prises.
On peut exprimer son désaccord.
Mais je ne peux pas laisser dire que les décisions que j'ai prises traduisent un quelconque mépris de ma part à l'égard des médecins.
Ce serait nier mon histoire personnelle, mon parcours, ma personnalité, mes combats, en un mot : tout ce que je suis.
J'ai pour les médecins un profond respect et je ne laisserai personne prétendre le contraire.
Je sais qu'il peut exister entre nous des malentendus. Discutons-en ! Dissipons-les !
Vous vous interrogez sur la gestion de la grippe A(H1N1) et vous avez eu l'impression que l'on ne vous faisait pas confiance.
Ce n'est évidemment pas le cas, mais gérer une crise sanitaire, c'est faire des choix.
A chaque étape de ces choix importants, vous avez été consultés.
Pourquoi avons-nous pris la décision d'ouvrir des centres de vaccination ?
Nous l'avons décidé parce que c'était la manière la plus efficace de protéger l'ensemble de nos concitoyens contre un virus annoncé comme extrêmement virulent par les experts.
Nous l'avons décidé, aussi, pour vous permettre de continuer à soigner les Français. Ce que vous avez fait.
Qui aurait pris le risque, l'été dernier, de faire d'autres choix ?
J'ai pris ces décisions, et je les assume.
En tant que responsable de la santé de mes concitoyens, je me réjouis que la grippe n'ait pas été aussi grave qu'on pouvait le redouter.
Mais pourquoi le nier ?
Comme dans toute situation d'urgence, des erreurs ont pu être commises.
Ce sera le rôle du retour d'expérience que nous allons mettre en place de les identifier et d'y trouver des solutions efficaces. J'aurai l'occasion d'y revenir.
Car ce qui m'intéresse, ce qui vous intéresse, c'est de se doter des meilleurs outils pour faire face, ensemble, dans l'avenir, à une nouvelle alerte sanitaire, en tirant profit des enseignements de la précédente.
Et j'ai évidemment besoin de vous.
Quelle difficulté principale avons-nous rencontrée avec cette grippe ?
Nos concitoyens ne sont pas allés suffisamment se faire vacciner.
Notre objectif est donc simple : nous avons la responsabilité commune de déterminer comment faire en sorte que, lors d'une prochaine épidémie, ils adoptent une véritable démarche de santé publique.
Puisque, je le disais, en cas de virus très virulent, les centres de vaccination sont sûrement la seule solution efficace, soyons pragmatiques et faisons en sorte que vous soyez mieux associés à la mise en oeuvre de solutions graduées.
Vous l'aurez compris : oui, je suis très attachée aux médecins généralistes, dont je connais le rôle incontournable dans notre système de soins, mais aussi les contraintes et les aspirations.
Je les entends et j'y répondrai.
Toutefois, en tant que ministre de la santé, j'ai aussi la responsabilité de garantir à l'ensemble de nos concitoyens un égal accès à des soins de qualité, en toute sécurité, partout dans le territoire.
Je dois également veiller à la maîtrise des dépenses de santé alors que la situation économique et financière de notre pays est dégradée. Mais nous avons aussi des marges de manoeuvre, à nous de les identifier.
Ce sont tous ces impératifs que je dois concilier. C'est mon rôle et je veux l'assumer.
Alors, disons-le : il est normal que vous ayez des revendications, que vous les exprimiez. Ces revendications, je les connais et je les comprends.
Mais vous comprenez aussi que je dois prendre des décisions et assumer des responsabilités en conciliant toutes ces exigences.
Si je suis parmi vous aujourd'hui, c'est précisément parce que j'entends, tout en assumant mes responsabilités, lever des malentendus et vous expliquer comment j'envisage, avec vous, l'avenir.
Car nous partageons la même ambition : celle de moderniser en profondeur notre système de santé.
C'est ensemble que nous trouverons des réponses concrètes aux problèmes de la médecine générale, comme celui de la démographie médicale, qui touchent nos concitoyens.
La mise en oeuvre de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » (HPST) suscite parmi vous des interrogations. Je les entends.
Je vous rappelle que c'est vous qui avez inspiré cette loi à travers les Etats généraux. Toutes les mesures correspondent à des initiatives prises par des médecins pour résoudre leurs problèmes concrets.
Ne nous y trompons pas : le diagnostic posé par la loi HPST est aujourd'hui plus que jamais confirmé par les réalités du terrain.
Il est vrai que la concertation des derniers mois a pu donner l'impression que les choses n'avançaient pas aussi rapidement que vous le souhaitez.
Ces décrets sont une machinerie nécessaire. Cela ne signifie en aucun cas que nous avons construit une nouvelle « usine à gaz ».
Au contraire, nous nous sommes donnés les outils pour faire vivre cette réforme ensemble.
Vous allez vous en rendre compte, très concrètement, dans les tout prochains jours.
Le 1er avril, la création des agences régionales de santé (ARS) sera le point de départ de la nouvelle organisation des soins en France.
Le 1er avril, nous passerons du concept à la réalité.
Pour autant, je sais que certaines difficultés perdurent dans l'exercice de votre spécialité.
Je sais, par exemple, que vous êtes contraints d'assumer une charge administrative de plus en plus lourde.
Je sais que vous devez faire face à la gestion de situations de plus en plus complexes, à des exigences croissantes de la part des patients comme des pouvoirs publics, à une charge de travail importante.
Je sais que vous souhaitez disposer de moyens spécifiques pour prendre en charge vos patients dans de meilleures conditions et répondre ainsi à leurs besoins.
Je sais que vous aspirez à mieux concilier votre vie professionnelle et votre vie privée.
Je sais que vous souhaitez qu'on reconnaisse mieux votre expertise, votre sens des responsabilités, votre connaissance du terrain, votre engagement pour une médecine de qualité.
Je vous ai entendus sur l'organisme de gestion du développement professionnel continu.
Je vous ai entendus sur la continuité des soins et la déclaration des absences ou encore le contrat santé solidarité.
Sur tous ces sujets, je vous réaffirme que j'entends agir avec pragmatisme et responsabilité.
Ainsi, les décrets qui posent problème pourront être revus et assouplis.
Première illustration de mon pragmatisme.
Vous le savez : bientôt, se tiendront les élections, pour lesquelles j'ai déjà reçu l'ensemble des responsables, dont ceux de MG France.
Ils m'ont tous indiqué leur souhait de disposer du temps nécessaire pour conduire leur campagne avant le scrutin. Je profite de l'occasion de votre congrès pour confirmer ce que je leur ai dit : les élections auront lieu le 29 septembre 2010.
Alors s'ouvrira la négociation conventionnelle.
Je m'emploierai pour ma part à faire entendre mon point de vue, à savoir que les médecins généralistes doivent disposer de modes de rémunération spécifiques à leur spécialité.
Le diagnostic qu'ensemble nous avons établi, à travers les Etats généraux et la loi HPST, le président de la République le partage.
Comme moi, il souhaite apporter une réponse concrète au problème de vos conditions de travail et de la démographie médicale.
Quels que soient leur lieu de résidence ou leurs moyens financiers, nos concitoyens doivent en effet pouvoir consulter un médecin généraliste, près de chez eux, sans avoir à parcourir des dizaines de kilomètres en voiture.
Pour parvenir à ce résultat, le président de la République recevra prochainement vos responsables pour qu'ensemble nous bâtissions un plan en faveur de la médecine de proximité. Cela constituera l'une des priorités de la seconde moitié de son quinquennat.
C'est une chance pour vous. C'est une chance pour nous.
Quelles seront les orientations de ce plan ?
Je ne pourrai, à ce stade, vous indiquer que mes préconisations.
Simplifier votre travail et libérer du temps médical pour que vous puissiez vous alléger des tâches administratives et vous recentrer sur votre coeur de métier.
Valoriser les médecins qui entreprennent, notamment dans le cadre des maisons de santé pluridisciplinaires.
Promouvoir des modes de rémunération spécifiques à votre spécialité, adaptées à vos missions.
Reconnaître votre responsabilité pour organiser l'offre de soins dans l'ensemble de nos territoires, en facilitant les coopérations avec l'hôpital et les regroupements pluridisciplinaires.
Valoriser votre expertise, parce que, vous aussi, vous êtes désormais des spécialistes et que vous devez aussi être mieux reconnus en matière d'enseignement et de recherche.
Ce sont ces orientations qu'ensemble nous devons faire vivre pour aller encore plus loin.
Je le redis : les médecins de proximité sont, vous êtes véritablement des acteurs majeurs, au coeur de notre système de santé, tant au niveau national qu'au niveau régional.
Je vous remercie.
Source http://www.mgfrance.org, le 1er avril 2010