Déclaration de Mme Marie-Luce Penchard, ministre de l'Outre-mer, sur la signature d'un mémorandum sur la place des régions ultrapériphériques (RUP) au sein de l'Union européenne, à Las Palmas (Espagne) le 7 mai 2010.

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Circonstance : Réunion ministérielle des régions ultrapériphériques européennes, à Las Palmas aux Canaries (Espagne), le 7 mai 2010

Texte intégral

Monsieur le Ministre, représentant la présidence espagnole du Conseil,
Monsieur le Président du gouvernement des Canaries,
Monsieur le Secrétaire d'Etat aux affaires européennes du Portugal,
Monsieur le Commissaire chargé de la politique régionale, cher Johannes,
Monsieur le Secrétaire d'Etat aux affaires européennes d'Espagne,
Messieurs les Présidents des Régions ultrapériphériques,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse d'être à nouveau aux Canaries pour parler de la stratégie de l'Union européenne vis-a-vis des Régions Ultrapériphériques et ce d'autant que, comme vous le savez, je ne suis pas seulement la « Ministre française de l'outre-mer », en charge des RUP et des PTOM, j'ai aussi l'immense fierté d'être originaire d'une RUP. Je mesure aujourd'hui le chemin parcouru depuis la Présidence portugaise au 2ème semestre 2007, celle de la France au 2ème semestre 2008 et maintenant celle de l'Espagne. Ces présidences ont marqué des temps forts : le lancement de la consultation sur l'avenir de la stratégie européenne vis-à-vis des RUP en septembre 2007, la communication sur « les RUP : un atout pour l'Europe » en octobre 2008, et aujourd'hui le mémorandum conjoint.
Voilà autant d'étapes qui ont permis aux uns et aux autres de mieux appréhender les aspects du bilan de l'action de l'Europe vis-à-vis des RUP : je ne referai pas l'historique du statut de nos territoires mais il faut souligner le travail de construction, pas à pas, de notre relation avec l'Union.
Quel est désormais l'enjeu ?
Il s'agit tout simplement pour les RUP de mieux valoriser leurs potentiels et leurs atouts, tout en veillant à une prise en compte appropriée de leurs spécificités et de leurs contraintes structurelles. J'insiste sur ce point : valoriser les atouts ne veut pas dire oublier les contraintes, et donc l'aide que l'Europe doit apporter.
C'est, je crois, le sens du mémorandum que nous avons élaboré avec l'Espagne, le Portugal et les RUP. Je tiens d'ailleurs à remercier tous les acteurs pour la qualité du dialogue que nous avons eue, ainsi que la solidarité et l'esprit constructif qui ont toujours été de mise lors de la rédaction de ce texte.
Monsieur le Ministre, cher Manuel CHAVES GONZALEZ, un grand merci à l'Espagne pour avoir si bien piloté cet exercice.
Qu'il me soit également permis de souligner le remarquable travail des fonctionnaires qui, au sein des ministères comme des RUP, ont contribué concrètement à la rédaction de ce mémorandum. Je sais que ces derniers jours ont été très actifs pour vous, mais le résultat est là.
Que voulions-nous dire, quand nous avons évoqué, en conclusion de notre mémorandum, la nécessité d'un « triple équilibre », premièrement entre le maintien de la compensation des contraintes et la valorisation des atouts, deuxièmement entre les volets interne et externe des politiques de l'Union européenne, et troisièmement entre des adaptations à des politiques générales et la mise en place de cadres spécifiques ?
D'abord que les RUP ont des atouts, des potentiels, et qu'il faut les aider à les développer.
Je suis bien placée pour le savoir, en tant que Ministre de la République : l'Europe peut être fière de la biodiversité et de la dimension maritime que lui apportent les RUP. L'Europe peut être fière de la vocation spatiale que lui offre la Guyane. L'Europe peut être fière que grâce à la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Martin et la Guyane, elle soit présente dans les Amériques. L'Europe peut être fière qu'avec la Réunion, cher Didier ROBERT, elle démontre un vrai dynamisme économique et une croissance durable tournés vers l'avenir et sa région.
Il nous appartient donc maintenant d'identifier les grands axes de développement à privilégier, les nouvelles activités à promouvoir et les domaines d'excellence à soutenir pour que chacun de nos territoires soit en mesure de relever le défi de la croissance économique, de la diversification des activités ou des productions, de l'autosuffisance alimentaire, des besoins en énergie et, bien sûr, de la formation et de l'emploi.
Il est indispensable de développer des secteurs porteurs pour lesquels les RUP possèdent des avantages comparatifs forts, et qui peuvent apporter une réelle valeur ajoutée à l'Europe. Pour cela, il faudra faire le pari de l'ouverture, de l'intelligence et de l'innovation.
Dans le même temps, habiter, travailler, entreprendre, bref, vivre dans une RUP n'est pas tout à fait la même chose que vivre en Europe continentale.
Les entreprises ultramarines sont en compétition, dans leur environnement régional, avec des entreprises qui ne sont pas soumises aux mêmes règles européennes, ni aux mêmes contraintes. C'est la raison pour laquelle, nous devons obtenir des aménagements au titre de l'article 349 car si la règle européenne doit s'appliquer, elle doit aussi pouvoir s'adapter quand c'est nécessaire.
En outre, les secteurs traditionnels tels que l'agriculture et la pêche, et les emplois qu'ils procurent, doivent continuer à être soutenus. C'est aussi pour cela que les mesures spécifiques de soutien à l'emploi, telles que l'octroi de mer, doivent être pérennisées.
La situation géographique de nos RUP est certes un avantage, tant pour les territoires eux-mêmes que pour l'Europe toute entière. Mais leur intégration à la fois au sein de leurs zones respectives et dans le Marché Intérieur de l'Union représente un véritable défi que l'on doit réussir à relever ! Il est indispensable de veiller à une meilleure cohérence des politiques de l'Union, en particulier en matière de transports, d'environnement et de commerce.
De ce point de vue, j'estime que la négociation des accords de libre échange ou de partenariat économique doit faire l'objet de mesures appropriées qui préservent les intérêts des RUP. La Commission doit donc veiller à obtenir des clauses de sauvegarde spécifiques pour les RUP ainsi que, le cas échéant, des mesures de compensation. A cet égard, les risques encourus par les filières de la banane et de la canne - sucre - rhum, à l'occasion du projet d'accord « pays andin », sont significatifs. En outre, comme je l'ai demandé, une étude préalable d'impact sur les RUP doit être réalisée. Je souhaite d'ailleurs que ceci s'applique aux accords en cours de négociation.
Dans ce contexte, M. le Commissaire, la politique régionale doit être au coeur d'une stratégie européenne « intégrée » à l'égard des RUP. Il est indispensable de favoriser la coordination de l'ensemble des politiques transversales et sectorielles, qui contribuent à cette stratégie. Pourquoi d'ailleurs ne pas réfléchir à la possibilité d'une expérimentation à valeur européenne de gouvernance multi-niveaux dans les RUP, dans le cadre de la stratégie UE 2020 ?
En conclusion, vous me permettrez un message d'optimisme : ce mémorandum, qui s'inscrit dans la continuité de celui de 2003, a montré - une fois de plus - la solidarité entre nos territoires et notre volonté de démontrer ensemble nos apports, nos richesses mais aussi notre diversité à l'Union européenne.
Il nous reste maintenant, chers amis, à tous nous projeter avec efficacité dans l'avenir et à poursuivre la réflexion sur les grands enjeux auxquels nos territoires sont confrontés : la mondialisation, le changement climatique et le défi énergétique, la gestion durable des ressources naturelles ...
Il nous reste aussi à mieux faire connaître les RUP et leurs particularités à l'ensemble de l'Europe.
Ce sera notamment l'objet du « forum de l'ultrapériphérie » les 27 et 28 mai prochains à Bruxelles, auquel nous aurons, je crois, tous le plaisir de nous retrouver.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 10 mai 2010