Texte intégral
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Madame le Sénateur et président du conseil général,
Madame la vice-présidente du conseil régional,
Monsieur le conseiller général et maire,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les professionnels de santé,
Mesdames et messieurs,
Je suis très heureux d'inaugurer aujourd'hui la maison de santé de CASTELNAU -MAGNOAC, dans ce beau département des Hautes - Pyrénées, car je considère qu'il s'agit d'une action modèle, qui illustre bien les enjeux et les possibilités de développement de services en milieu rural.
Ainsi je ne peux que féliciter l'ensemble des promoteurs de ce projet réussi en rappelant que nous assistons à une évolution majeure des politiques de santé.
Une de ces évolutions, c'est la territorialisation. Et c'est le chemin que la loi Hôpital Patients Santé Territoires a fait prendre à nos politiques. En effet, pour apporter des réponses aux enjeux de santé, il est essentiel de faire émerger des réponses adaptées aux territoires.
A cet égard, votre réalisation est anticipatrice, pionnière.
Le diagnostic, réalisé dès 2004, anticipait les difficultés dues à la démographie médicale et proposait de mobiliser les acteurs pour réaliser le projet qui s'est achevé en 2009 et que j'ai l'honneur d'inaugurer avec vous.
Sans la participation et la coopération de tous, d'abord par la prise de conscience de l'ARH, puis par la mobilisation des professionnels de santé et des élus locaux, ce projet n'aurait pas pu se faire.
Cette maison, c'est d'abord un projet collectif adapté au territoire : une équipe de médecins, vétérinaires, praticiens, autour de l'Association « Carole Santé ».
C'est aussi, bien sûr, une plate forme de plus de 1000 m² capable de contenir de nombreux services et notamment des services de soins à domicile.
C'est la raison pour laquelle, l'Etat, mais aussi les collectivités territoriales dont je tiens à saluer et remercier les représentants, ont participé au financement et à la réalisation de cet établissement.
En 2006, le projet est retenu au titre de l'appel à projets PER avec un soutien de l'Etat de 859 100 euros sur un total de 2 210 000 euros.
1/ La santé enjeu territorial pour notre pays
a) La fin de la désertification rurale...
Nous le savons bien, et les Assises des territoires ruraux que j'ai organisées l'hiver dernier l'ont bien montré, la désertification du monde rural est derrière nous. A nouveau les territoires ruraux sont attractifs. Pour autant, le contexte sociologique a considérablement changé. Désormais, les nouveaux résidents attendent des services de qualité égaux à ceux des villes.
Parallèlement, on observe une augmentation des besoins en santé primaire en France, liée au vieillissement de la population et à la diminution des temps d'hospitalisation, qui entraîne un transfert d'activités vers le secteur ambulatoire. Ceci est particulièrement vrai en zone rurale où la part des plus de 60 ans est supérieure à 30%, tandis qu'en zone urbaine elle est de 19%. Il y a donc nécessité, le Président de la République l'a rappelé, de renforcer l'ensemble des services ruraux qu'il s'agisse de santé, de social, d'aide aux personnes âgées ou à la petite enfance. Nous avons donc une ingénierie spécifique à inventer pour répondre à ces nouveaux besoins.
b) ...mais le risque de déserts médicaux
La France se trouve dans une situation paradoxale : le nombre de médecins n'a jamais été aussi élevé qu'aujourd'hui : la densité médicale qui était de 275 praticiens pour 100 000 en 1985 est passée en 2005 à 340 pour 100 000 habitants. Mais ils sont mal répartis sur le territoire. La démographie médicale des territoires ruraux en France est ainsi caractérisée par une grande disparité dans la densité et la typologie des praticiens libéraux installés. Il en est de même des auxiliaires médicaux, ce qui démultiplie ce déséquilibre.
Par ailleurs, la diminution du nombre d'étudiants en médecine au cours des années 80 et 90 conduira mécaniquement à une diminution de la densité moyenne des praticiens en France. On estime ainsi que cette densité sera de 283 médecins généralistes pour 100 000 habitants en 2025. La France va revenir quasiment au même niveau qu'en 1985, mais avec des besoins accrus en soins primaires, du fait du vieillissement de la population !
Il y a donc un problème de géographie médicale et de démographie médicale : c'est bien un enjeu territorial.
En effet, un médecin généraliste gagnera mieux sa vie en s'installant en zone rurale qu'en ville où la concurrence est plus forte. Il faut donc créer des conditions de travail qui puissent attirer les médecins en zone rurale. Cela passe par un travail de groupe, des collaborations entre professionnels de santé, et une aide à l'organisation administrative. Ces solutions doivent permettre aux médecins de se concentrer sur le diagnostic et la prescription de traitements.
Nous avons deux exigences à remplir : donner aux populations rurales des services de santé adaptés, trouver des médecins et des auxiliaires de santé pour les zones rurales.
Dans ce contexte qui est autant sociologique qu'économique, nous devons répondre à deux défis, le défi de la proximité et celui de la qualité.
2/ Les maisons de santé sont une réponse à ces difficultés, comme les décisions du CIADT du 11 mai dernier l'ont confirmé
A la demande du Président de la République, le Premier Ministre a, sur ma proposition, fait arbitrer des choix importants pour l'accès aux soins dans les territoires ruraux et la lutte contre la désertification médicale.
Dès 2010, nous aiderons à l'ouverture de maisons pluridisciplinaires de santé. Ainsi, sur trois années :
- 250 maisons de santé seront financées dans le cadre d'un programme national que je lancerai très prochainement avec Roselyne Bachelot.
- 400 contrats d'engagement de service public seront signés chaque année pour inciter les jeunes professionnels de santé à venir exercer dans les territoires ruraux
Ces décisions s'inscrivent dans un contexte porteur.
a) Le travail en équipe médicale se développe dans toute l'Europe
Les conditions d'exercice changent, les solutions doivent s'adapter à ce changement. Il y a une vraie demande des médecins pour le travail en groupe aujourd'hui. Or en France 60 % des médecins travaillent seuls. Dans d'autres pays du nord de l'Europe, les médecins généralistes sont regroupés dans des cabinets de groupe, souvent pluridisciplinaires, qui sont de véritables petits centres de santé. Ils peuvent procéder à des examens biologiques et disposent parfois de plateaux techniques pour la petite chirurgie. Tout ceci est rendu possible car ils bénéficient technologies et du personnel adéquats (infirmière, assistante médicale...).
Ce modèle de regroupement et de complémentarité est celui que vous avez choisi, c'est celui de l'avenir.
b) L'adaptation au territoire est la condition de la réussite
Ce projet repose sur un principe essentiel: s'adapter aux besoins d'une population sur un territoire donné. Il ne s'agit pas ici d'imposer un modèle ou une structure mais de trouver des solutions en concertation avec tous les acteurs locaux. Le mode collaboratif entre tous les acteurs me semble indispensable pour que ces solutions fonctionnent sur le long terme. Il s'agit bien d'une politique de santé territorialisée, car elle doit lier projet de santé porté par les professionnels et projet de territoire porté par les élus.
Je crois d'ailleurs savoir que ce projet exemplaire et pionnier intéresse d'autres départements, c'est le signe de sa réussite. Cette expérimentation doit conduire à une solution efficace pour améliorer la qualité des soins, facilement adaptable et viable économiquement.
D'ailleurs ce projet est aussi transférable au-delà des zones rurales car il constitue un modèle d'organisation qui peut être proposé indépendamment de la démographie médicale du secteur considéré. Il est aussi adaptable pour d'autres types de services locaux, sociaux notamment.
Enfin ces projets doivent préparer l'avenir en accueillant des étudiants en formation.
Les maisons de santé pluridisciplinaires et les réseaux de santé sont une voie d'avenir pour l'accès aux soins dans notre pays. Ce mode de fonctionnement peut en effet améliorer la qualité du suivi des patients, favoriser la prévention et limiter le coût de la santé, en diminuant notamment le nombre des hospitalisations. Il permet également d'organiser dans les territoires les plus reculés une professionnalisation de équipes médicales et des temps d'échanges sur des thèmes techniques ou éthiques. Soigner est désormais une activité collective, qui nécessite une réflexion collective.
C'est la voie que vous avez choisie, je tenais à saluer cette réalisation et, à nouveau à vous en féliciter.
Source http://www.datar.gouv.fr, le 5 juillet 2010