Déclaration de M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, sur l'objectif de la Conférence internationale sur l'Afghanistan, Kaboul le 20 juillet 2010.

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Circonstance : Conférence internationale sur l'Afghanistan le 20 juillet 2010 à Kaboul

Texte intégral

Il est important que cette conférence se tienne, ici, à Kaboul, et c'est mon premier point.
C'est pour moi le meilleur symbole de la transition, ce fameux "Inteqal", vers la pleine souveraineté afghane. Depuis 2001, des progrès ont été accomplis grâce au talent et au dévouement de nos forces armées. Je salue la mémoire de ceux qui sont tombés et je partage la douleur de leurs familles : les familles françaises bien sûr, mais aussi toutes les autres familles des troupes alliées et les familles des victimes afghanes.
Nous savons tous que la liberté de circulation et la sécurité ne sont toujours pas assurées dans de nombreuses régions de ce pays et que la population ne profite pas encore assez des progrès réalisés. Et parfois même, qu'elle n'en profite pas du tout !
C'est un de nos impératifs : dans ce processus de transition que nous élaborons ensemble, il faudra trouver les moyens d'associer pleinement la population aux choix et au suivi des projets de développement. C'est une priorité des assistants techniques civils qui mènent des projets avec les Afghans dans la zone de Kapisa et Surobi qui nous est confiée. Nous saurons ce qui est constuit pour eux. La population afghane doit savoir quelles ressources sont affectées à quels projets et pour quels résultats.
Nous abordons aujourd'hui de front un autre sujet essentiel : celui du règlement politique du conflit, et c'est mon second point.
La France a toujours pensé et dit que la solution à la crise afghane n'était pas uniquement militaire, que l'issue était politique.
Bien sûr, nous savons mal ce que sera en détail ce futur règlement politique, mais il faut dire la vérité : nous sommes au début d'un chemin qui peut être long et qui nécessitera du courage et de l'imagination.
Ce chemin, nous allons le suivre ensemble, Afghans et alliés, alliés et Afghans vers la paix, une paix que les Afghans doivent définir eux-mêmes. Et la paix, quoiqu'on en pense, doit se faire un jour avec les ennemis d'hier.
L'histoire de toutes les nations que nous représentons ici nous l'enseigne : un conflit ne trouve une solution durable que par un règlement juste et courageux.
Juste : Il devra respecter les fondamentaux de la justice et du droit, du droit national afghan - la Constitution -, et du droit international - celui qui régit les rapports et la sécurité entre les nations et celui qui garantit les droits de la personne humaine. C'est évidemment aux droits acquis des femmes que nous pensons tous ici. Les femmes afghanes ne doivent pas faire les frais d'un règlement politique hâtif. Je n'oublie pas bien sûr la lutte contre la corruption.
Courageux : le futur règlement devra inclure ceux qui auront renoncé à la violence, rompu les liens avec Al Qaïda et accepté les principes fondamentaux de l'Etat afghan, à commencer, je le répète, par sa Constitution. Les élections législatives prévues en septembre seront un test important à cet égard.
Enfin, on ne peut ignorer la dimension régionale de la crise afghane. La signature de l'accord de transit et de commerce entre le Pakistan et l'Afghanistan il y a trois jours après quarante ans de négociations est un signe très encourageant et je salue ceux qui ont permis sa réalisation. Ne soyons pas naïfs : les choses ne s'arrangeront pas du jour au lendemain et les voisins de l'Afghanistan continueront de peser d'un poids déterminant et parfois excessif.
Amis Afghans, la France restera à vos côtés. Comme l'a affirmé le président de la République, Nicolas Sarkozy, nous serons avec vous aussi longtemps que nécessaire, aussi longtemps qu'il le faudra pour ramener la paix au peuple afghan et la stabilité à toute la région. Nous montrerons qu'il existe encore une chance pour une démocratie en Afghanistan ; une démocratie afghane.
Nous nous battons et nous continuerons de nous battre avec vous contre l'extrémisme et le terrorisme. Maintenant, nous devrons nous battre également pour la paix.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 juillet 2010