Texte intégral
A. Kara.- Bonjour à tous. Bonjour J.-L. Borloo. Merci d'être avec nous ce matin. Vous êtes ministre de l'Ecologie, mais vous avez également les transports dans vos attributions. Alors qu'en est-il en ce moment du chassé-croisé, des millions de Français sont sur les routes, la sécurité routière est un sujet sur lequel vous avez beaucoup travaillé cette année ; est-ce qu'on peut faire un premier bilan ?
Oui, on vient d'avoir, hier, les chiffres des six premiers mois, ils sont en baisse de manière très importante, puisqu'ils sont en baisse de 10,6% sur les morts, de près de 20% sur les blessés et un peu plus encore, 24% sur les hospitalisés. Donc c'est une baisse importante. Pour avoir les chiffres en tête, il y a sept ans, on était à 8.300 morts par an, l'année dernière à 4.300, je pense que cette année on devrait être à 3.900. Vous savez que le président m'avait fixé comme objectif moins de 3.000 morts ; c'est encore énorme, c'est encore énorme, et puisque nous sommes avant le chassé-croisé, je voudrais vraiment dire aux Français : ne gâchez pas vos vacances, le drame est possible, la mort sur les routes des vacances, les blessés, les paraplégiques, c'est tellement bête. Il y a quelques mesures simples : vraiment, pas une goutte d'alcool au volant, vraiment pas une goutte d'alcool, les ceintures à l'arrière, les pneus gonflés dans de bonnes conditions, s'arrêter toutes les deux heures, il n'y a pas le feu au lac pour aller manger une glace dans un camping ou au bord de la mer. C'est une bataille que nous avons engagée, que nous mènerons de manière totale. Vous savez que maintenant, il y a des éthylotests dans les boîtes de nuit, pour l'instant encore sur la base du volontariat...
Oui, pourtant, il y a encore beaucoup de morts en sortie de boîtes...
Ça reste notre drame. Enfin, moi, tous les dimanches, vers midi, quand j'ai les résultats des accidents du samedi soir, qui touchent notamment les jeunes, à chaque fois, ça continue à me bouleverser. Alors, on fait des campagnes de prévention...
Voilà, à quoi vous attribuez cette baisse, comment vous expliquez aujourd'hui... est-ce que vraiment vous arrivez à influer, est-ce que ce sont les campagnes de communication, est-ce qu'il y a un changement de comportements, c'est quoi ?
C'est très difficile de le savoir. Il y a plusieurs facteurs, le premier, c'est évidemment des campagnes de communication qui ont été, à un moment donné, critiquées, qui ont fait débat, qui sont très, très violentes, très difficiles, très difficiles à supporter. Cela fait douze ans qu'on fait des campagnes comme ça, la dernière, elle était sur Internet, elle était franchement brutale. Le fait d'ailleurs qu'il y ait eu un débat, qu'il y ait eu un buzz a, au fond, amplifié cette campagne. Il y a des mesures de sécurité traditionnelles, c'est-à-dire des aménagements dans des zones qui sont dangereuses tout simplement, vous vous souvenez de la grande descente dans les Alpes ; il y a évidemment le changement de comportements de nos concitoyens, l'éco-conduite, c'est-à-dire le fait de conduire doucement, sans accélérer rapidement, modifie de 50% les risques d'accidents, on l'a en grandeur réelle à La Poste, vous savez que La Poste fait passer petit à petit des stages d'éco-conduite à ses conducteurs ou à ses chauffeurs. On voit une baisse des accidents considérable, une baisse de la consommation, de près de 10%, mais une baisse des accidents. C'est un rapport des Français avec la voiture qui est en train, à l'évidence, de changer...
Oui, mais J.-L. Borloo, justement...
Il y a aussi de la répression, il y a aussi la présence des policiers et des gendarmes sur les routes, il y a aussi les radars, enfin, bref, c'est tout un dispositif, mais enfin, il y a...
Mais, excusez-moi, ce n'est pas contradictoire quand, au coeur de l'été, vous signez pour 900 kilomètres d'autoroutes supplémentaires alors que vous aviez dit, en 2007, que le tout routier c'était fini.
Mais le tout routier est fini, il est fini. Le schéma des transports qui a été publié pour mettre à débat, c'est quoi ? 96% des investissements sont sur le ferroviaire, les tramways, les canaux et les ports, voilà, c'est 76% (sic). Simplement, comme il était convenu dans le Grenelle de l'Environnement, on pouvait continuer, et on continue, à faire des routes dans trois cas : la sécurité routière, des cas de sécurité routière, des endroits où manifestement, il faut améliorer les conditions de circulation, la congestion autour de certaines villes, donc on accepte qu'il y ait un débat autour de Lyon, autour de la ville de Tours, dans l'agglomération de Tours, à Rouen, ce que souhaite tout le monde. Et troisièmement, dans deux ou trois cas particuliers, d'équité territoriale, des endroits où il y a des usines et aucun accès routier, là, on peut faire sur dix, vingt ou trente kilomètres deux fois deux voies. Le schéma des transports français, c'est 96% l'alternative à la route. Mais il ne faut pas être idéologue et complètement enfermé, on est en droit de faire des routes sur des endroits de dangerosité.
Oui, mais est-ce que votre rôle aujourd'hui, en tant que ministre de l'Ecologie, ce n'est pas d'en finir justement avec le tout routier, de décider de baisser le nombre d'automobiles dans ce pays, pour justement... parce que, il y a des objectifs aujourd'hui qui sont très importants du côté de l'Union européenne, on veut réduire encore plus les émissions de CO² ; est-ce que ça ne passe pas également par-là ?
Mais c'est ce qu'on fait, c'est ce qu'on fait. Il y avait des tas de projets : le doublement de l'A1, le doublement de l'Autoroute du Sud, enfin, il y avait...
Les véhicules propres, on en est où par exemple ?
Attendez, ce qui extr... vous savez, il faut faire très attention, quand on décide de faire 95% des investissements sur l'alternative à la route, ça ne veut pas dire de manière idéologique : il est strictement interdit de faire quelques petites améliorations routières, voilà. Il n'y a plus de grands axes, les grands axes, ils sont ferroviaires. Maintenant, parlons un peu des voitures "décarbonées", puisqu'on vient d'avoir les chiffres aussi, voilà, de temps en temps, on peut se faire plaisir, la France est championne du monde de la baisse des émissions de CO² dans son parc automobile, championne du monde ! Elle est passée de 148 grammes d'émissions de CO² de son parc automobile acheté, il y a dix-huit mois, à 131 grammes, c'est-à-dire que la France baisse d'un gramme toutes les trois semaines et demie quand l'Europe baisse d'un gramme tous les ans. Un gramme tous les ans pour la moyenne européenne, un gramme toutes les trois semaines et demie pour la France. Nous avons aujourd'hui le parc automobile au monde le moins émetteur de CO². Et comme une nouvelle n'arrive jamais seule, nous avons la plus grande croissance de photovoltaïque d'Europe, plus 224%, le chiffre est tombé hier. Et vous avez vu que les deux grandes universités américaines, Yale et Columbia, ont classé les pays dans le monde en matière environnementale, la France est septième derrière le Bhoutan, un certain nombre - l'Islande - un certain nombre de pays particuliers, mais est leader mondial des pays du G20. Donc la France est un pays qui respecte le protocole de Kyoto, qui est en avance de 15% sur le protocole de Kyoto, et qui est classée, parce que c'est extraordinaire notre incapacité à regarder ce qu'on fait, il faut être à l'étranger pour regarder ce que fait la France dans ce domaine.
A vous entendre, vous avez un bilan formidable, ça veut dire quoi, que vous êtes positionné pour le changement de gouvernement en octobre...
Non, c'est la France ...
Vous voulez remplacer F. Fillon ?
Non, non, ce n'est pas un problème...
Vous êtes candidat à Matignon ?
Non, quand on voit l'explosion du bio en France, quand on voit la baisse des émissions de CO², quand on voit - et ça me navre - que nos amis américains, qui sont à 24 tonnes par habitant et par an, nous, on est à six tonnes, le président Obama n'arrive pas à faire passer sa loi sur le climat, oui, les efforts français paient et...
Vous ne m'avez pas répondu, vous êtes candidat à Matignon ?
Non, personne n'est candidat à Matignon. On a un excellent Premier ministre, je souhaite qu'il passe de très bonnes vacances pour être particulièrement en forme à la rentrée.
Merci J.-L. Borloo. Bonne journée à tous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 30 juillet 2010