Déclaration de M. Eric Besson, ministre de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, sur les divers aspects de l'économie numérique, Paris le 25 novembre 2010.

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Circonstance : 3è édition des Assises du Numérique, à Paris le 25 novembre 2010

Texte intégral

Madame la Commissaire européenne, chère Neelie Kroes,
Mesdames, Messieurs,
C'est à la fois un honneur et un plaisir que de venir ici, aujourd'hui, devant vous, pour ouvrir cette troisième édition des Assises du Numérique.
J'avais conçu et lancé, ici même, en 2008, les premières Assises du Numérique. Permettez-moi de saluer Christophe Stener, Président d'Alliance TICS, qui en était, déjà, la cheville ouvrière. J'étais alors le premier membre d'un Gouvernement de la République à être en charge de l'ensemble de l'économie numérique, dans toutes ses composantes, et j'avais souhaité organiser cette grande réunion annuelle afin de favoriser le dialogue et la coopération entre les différents acteurs du numérique, qu'ils soient équipementiers, opérateurs de réseaux, prestataires de services, créateurs ou fournisseurs de contenus. Et je suis très fier que cette réunion soit devenue, en deux ans seulement, l'un des temps forts de la société de l'information.
Deux ans plus tard, ma conviction n'a pas changé. Elle s'est même renforcée. Les technologies de l'information constituent la première révolution industrielle, économique, sociale, culturelle, se déroulant à l'échelle de la planète. En quinze ans seulement, 5 milliards d'individus se sont dotés d'un téléphone portable, et 2 milliards d'un accès à Internet. La société de l'information est désormais mondialisée et instantanée. Ceux qui y participent y trouvent non seulement une ouverture sur le monde, mais aussi l'accès à l'éducation, à la culture, aux loisirs, ainsi que de formidables gains de compétitivité et de productivité.
Ma mission comporte trois priorités :
1. Accélérer le déploiement des réseaux numériques haut et très haut débit, fixes et mobiles, sur l'ensemble du territoire ;
2. Libérer la création de valeur et favoriser la diffusion des contenus numériques ;
3. Promouvoir la diversification et l'appropriation des usages du numérique.
Pour le déploiement des réseaux haut-débit, j'observe que les arbitrages que j'avais obtenus il y a deux ans concernant le « dividende numérique » ont bien été respectés, et que ces fréquences issues de l'extinction de la télévision analogique ont bien été réservées aux nouveaux services mobiles d'accès à Internet très haut-débit. Ces fréquences sont les plus basses, donc les plus performantes, jamais affectées aux télécommunications civiles dans l'histoire de notre pays. Il s'agit là, mesurons le bien, d'une révolution industrielle. Les réseaux qui seront déployés comporteront trois fois moins d'antennes-relais, et porteront des débits 50 fois supérieurs.
L'appel à candidature pour l'utilisation de ces fréquences, que je lancerai début 2011, répondra à trois objectifs essentiels : la couverture des territoires, l'accroissement de la concurrence, et la valorisation du patrimoine immatériel de l'Etat.
L'aménagement du territoire sera un objectif prioritaire. Je souhaite en particulier que des obligations de couverture non seulement nationale mais aussi départementale soient imposées. Il s'agira là d'une première en France.
Le deuxième objectif, la concurrence, sera lui aussi central. Il y a 3 ans, le marché mobile était atone, avec seulement 3 opérateurs. Aujourd'hui un quatrième opérateur - Free Mobile- est arrivé, et les opérateurs mobiles virtuels détiennent plus de 6% de part de marché. Je souhaite que la procédure d'attribution laisse ouverte la possibilité pour chacun des 4 opérateurs de réseaux d'accéder à cette bande de fréquences. Je privilégie donc un découpage en 4 lots, avec possibilité de cumul. Je souhaite aussi que ces lots aient des tailles relativement proches, avec deux lots de 5 MHz et deux lots de 10 MHz. L'existence d'un seul lot de 15 MHz pourrait en effet conduire un acteur à dominer durablement le marché. Je souhaite enfin que la procédure d'attribution comprenne un critère valorisant l'accueil d'opérateurs mobiles virtuels. La concurrence reste en effet le meilleur gage de justesse des prix et d'innovation, au service du consommateur de téléphonie mobile.
Le troisième objectif, celui de la valorisation du patrimoine immatériel de l'Etat, ne sera pas oublié lui non plus, ces fréquences basses étant un bien particulièrement rare.
Bien sûr, on ne peut évoquer le très haut débit sans parler de fibre optique.
La mutualisation et l'accès aux fourreaux existants restent bien entendu une priorité. La décision du régulateur de baisser de manière significative les tarifs d''accès aux fourreaux de l'opérateur historique dès le 1er janvier 2011 devrait permettre de déployer de nouveaux réseaux d''accès dans des conditions favorables, aussi bien dans les zones denses que dans les zones rurales.
Mais ce déploiement ne pourra être suffisant sans intervention publique dans les zones les moins denses. J'entends, en lien avec René Ricol, Commissaire Général à l'Investissement, tirer tous les bénéfices du grand emprunt et des investissements d'avenir, pour stimuler notre économie numérique : nous avons plus de 4 milliards d'euros pour cela, dont 2 milliards d'euros seront dédiés aux infrastructures très haut débit et à la fibre.
L'objectif est ambitieux : couvrir en très haut débit 70% de la population en 10 ans. 7 projets pilotes ont d'ores et déjà été sélectionnés, qui permettront d'évaluer les différents partenariats et modèles techniques envisageables.
Les collectivités locales auront un rôle moteur dans ces expérimentations. Les opérateurs contribueront aussi, avec leurs investissements privés, au succès de ce déploiement. Mais il faudra bien veiller à ce que la seule existence d'une initiative privée en un point d'un département ne suffise pas à bloquer notre soutien aux initiatives de couverture de l'ensemble du département.
Le dispositif des investissements d'avenir est puissant, et ne se limite pas aux infrastructures. Plus de deux milliards d'euros seront consacrés au développement des usages et des services innovants, notamment à travers le soutien d'activités de Recherche & de Développement.
Un premier appel à projets de soutien à la R&D a été lancé en septembre dernier dans le domaine de la nanoélectronique. Plusieurs appels à projets seront aussi lancés dans les jours qui viennent, dans les domaines de la numérisation des contenus et du logiciel embarqué.
Et cela ne s'arrêtera pas là : d'ici la fin de l'année, et en début d'année prochaine, d'autres appels à projets seront lancés dans les domaines de l'informatique en nuage, où se constituent nos usines numériques de demain, de l'e-santé, de l'é-éducation, ou encore des transports intelligents et de la ville numérique.
En tant que Ministre chargé de l'Economie Numérique et de l'Industrie, je veillerai à ce que ce soutien à la R&D soit tout entier tourné vers notre industrie : afin qu'il permette de consolider nos atouts et de doter notre pays de champions nationaux. Nous ne devons pas nous résoudre à ce que la France et l'Europe deviennent un lieu de consommation de services en ligne américains et d'équipements chinois.
Pour conclure, je voudrais vous redire mon enthousiasme et ma détermination à poursuivre mon action aux côtés des acteurs de l'économie numérique, et à vivre avec eux cette révolution permanente de la société de l'information.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 1er décembre 2010