Texte intégral
M. Biraben : B. Hortefeux, le ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l'Immigration, est notre invité. Logiquement dans ce ministère on n'est pas submergé par les mouvements sociaux, mais figurez-vous que ça change ! Les CRS ont accumulé grèves de la faim et arrêts de travail contre la fermeture de deux compagnies. Et face à leur colère, le ministre a fait machine arrière. B. Hortefeux, bonjour.
Bonjour.
C. Roux : Bonjour. M. Biraben : Soyez le bienvenu.
Merci.
C. Roux : Alors la question qui se pose ce matin : pourquoi avez-vous choisi de reculer à propos de la fermeture des deux compagnies de CRS à Sainte-Foy-lès-Lyon et à Marseille ?
Mais pourquoi dites-vous « reculer » ?
C. Roux : Vous avez avancé sur le sujet ?
Sur quoi vous fondez-vous ? Vous savez, pour que je renonce, il aurait fallu qu'il y ait annonce ; ça me paraît assez logique. Et à aucun moment je n'avais annoncé - je vous mets au défi de trouver une déclaration, un discours, une intervention dans lequel j'ai annoncé ou j'aurais annoncé - la fermeture. Ce qui est vrai, c'est qu'il y a eu des rumeurs. Il y a eu des rumeurs qui ont été colportées - peut-être y avez-vous d'ailleurs contribué, mais finalement c'est peut-être aussi votre rôle - de fermeture. J'ai même entendu jusqu'à huit fermetures qui auraient été programmées de Compagnies Républicaines de Sécurité. Vous savez, il faut revenir à l'essentiel. Moi j'ai une mission, une préoccupation qui est simple, qui est claire : c'est d'assurer de la meilleure manière la protection, la tranquillité, la sécurité de nos concitoyens et tout ça, c'est tout ce qui me guide.
C. Roux : Alors B. Hortefeux, ils ont fait une grève de la faim, il y a eu des arrêts de travail, les syndicats se sont mobilisés, ils ont été reçus au ministère de l'Intérieur. Ils n'avaient juste rien compris, c'est ça ?
Non. Il y a plusieurs réalités simples. D'abord les forces mobiles, c'est-à-dire en clair les CRS et les escadrons de gendarmerie, sont indispensables à notre société. Ça, c'est la première réalité. Deuxième réalité, c'est vrai que l'on a observé, pas sur une petite période, pas sur quelques mois, sur plusieurs années, très exactement sur trente ans, qu'il y avait une légère diminution des besoins en maintien de l'ordre. C'est comme cela, notre société évolue. Et parallèlement à cette diminution des besoins en maintien de l'ordre, j'ai observé - vous l'avez d'ailleurs vous-même certainement constaté au quotidien - il y a une augmentation des besoins en matière de sécurité publique, c'est-à-dire de présence permanente sur le terrain. Donc j'ai décidé d'en tirer toutes les conséquences, d'engager une concertation, un dialogue avec les organisations syndicales. Que s'est-il passé ? Le directeur général de la police a reçu hier des organisations syndicales ; je les ai reçues dans la soirée et j'ai écouté leurs arguments, la symbolique qui existait sur deux compagnies, puisque celles qui étaient le plus souvent avancées c'était celles de Marseille et de Lyon. J'ai bien entendu cela et j'ai donc décidé une chose simple : c'est qu'on affecterait l'équivalent de deux compagnies, c'est-à-dire 280 policiers, en sécurité publique mais sans prononcer la dissolution de deux compagnies spécifiques.
C. Roux : B. Hortefeux, est-ce qu'à l'avenir il y aura des fermetures de compagnies ?
Non. Il n'y aura aucune fermeture de compagnie dans l'avenir mais, comprenez-moi bien, il y a donc 280 policiers supplémentaires qui seront affectés sur la voie publique, qui sont affectés sur le terrain, 280 policiers de la sécurité publique qui seront affectés sur le terrain par un redéploiement. Qu'est-ce que ça signifie tout ça ? Ça signifie, un, que les syndicats sont écoutés ; deux, que les objectifs du Gouvernement sont respectés. Je pense que c'est une bonne méthode de dialogue, de concertation et d'efficacité parce que l'objectif, c'est de faire baisser naturellement la délinquance dans notre pays.
C. Roux : Alors ce matin sur Europe 1, on racontait qu'on vous a vu traverser à pied de la place Beauvau à l'Élysée avant de recevoir les syndicats de police. La question est toute simple : est-ce que cette décision vous avait été suggérée par l'Élysée ?
Non. C'est... Naturellement, une décision par définition qui est prise par le Gouvernement reçoit le soutien, l'accord, l'encouragement du Premier ministre bien sûr, que j'ai tenu directement informé, et naturellement du chef de l'État. Hier, le directeur général de la police, F. Péchenard, m'a rendu compte des entretiens qu'il a eus avec les syndicats ; j'en ai tiré un certain nombre de convictions, j'en ai tiré personnellement un certain nombre de convictions. Je suis allé en discuter avec le secrétaire général de l'Élysée, ce qui est une procédure tout à fait normale. De surcroît C. Guéant est ancien directeur général de la police et il y est attentif. J'ai évoqué ce qui était des convictions auprès du secrétaire général de l'Élysée qui les a parfaitement comprises et donc j'ai réuni ensuite les syndicats pour leur proposer une méthode.
C. Roux : Vous ne prenez pas vos ordres à l'Élysée, c'est ça qu'on retient.
Mais pas du tout ! Mais pas du tout ! Enfin, écoutez : soit je me suis mal exprimé, soit vous n'avez pas tout à fait tout suivi. Naturellement dans notre système, il va de soi que lorsque des décisions importantes sont prises, c'est avec le soutien, l'encouragement du chef de l'État et du Premier ministre.
C. Roux : Est-ce que vous en avez tiré des leçons sur le mode d'expression de la colère des CRS ? Est-ce que c'est normal qu'ils en arrivent jusque-là, faire des grèves de la faim, accumuler les arrêts de travail ? Est-ce que vous dites qu'à l'avenir il faut les écouter davantage ?
Mais moi, par définition et par principe, j'écoute. Je suis attentif à l'expression et je vais vous dire, j'ai été quelques temps ministre du Travail, des relations sociales. Et au ministère de l'Intérieur c'est un ministère qui a une particularité : c'est que les organisations syndicales sont puissantes et elles sont représentatives. Le taux de participation aux élections professionnelles - c'est très rare dans notre pays - est de l'ordre de 86 à 87 % ; ce qui fait que quand j'ai des interlocuteurs, je sais qu'ils sont représentatifs. Et hier, quand on s'est mis dans mon bureau autour de la table, que j'ai obtenu un accord parce qu'il y avait des avancées de part et d'autre, un accord unanime de SGPFO, d'Alliance, de l'UNSA qui sont les grandes organisations syndicales, je sais que mes interlocuteurs, lorsqu'ils s'engagent, lorsqu'ils topent, ils sont représentatifs, ils sont accompagnés, ils sont suivis. Et donc c'est pour moi non pas une leçon, mais c'est à l'évidence une méthode que je continuerai à appliquer, qui est celle du dialogue, de la concertation et de l'efficacité parce que encore une fois, l'objectif d'ailleurs aussi des organisations syndicales, c'est de faire en sorte que la police - et que la gendarmerie qui est un statut militaire - mais que la police soit la mieux organisée, soit la plus performante, soit la plus efficace pour la protection de nos concitoyens.
C. Roux : Est-ce qu'il y aura des suppressions de postes dans les compagnies de gendarmes mobiles ?
Concernant les gendarmes, il y a des escadrons qui vont bouger, mais ça c'est quelque chose qui est déjà enclenché.
C. Roux : Qui vont bouger ? Qui vont être supprimés ?
Encore une fois, il y a une organisation qui est en place et c'est vrai. On ne peut pas faire non plus, C. Roux, comme si nous étions dans une situation où il y avait une croissance majeure, qu'on pouvait repousser.
C. Roux : Il faut supprimer des postes.
Depuis 1992, on a recruté un million de fonctionnaires supplémentaires, chaque Français peut comprendre que naturellement cela a un coût, cela pèse sur la fiscalité, cela pèse sur notre économie et que chacun doit apporter sa pierre à l'édifice de l'effort, et c'est ce qui est fait.
M. Biraben : B. Hortefeux, dans l'actualité, la récidive.
C. Roux : Oui. Vous avez annoncé avec le garde des Sceaux cette mesure d'urgence dont un office de suivi des délinquants sexuels. Avant de parler de cet office et des moyens que vous mettez à disposition, est-ce que ce matin vous reconnaissez qu'il y a eu des dysfonctionnements dans la police sur cette affaire ?
D'abord moi je ne veux pas perdre de vue la première réalité, c'est celle d'un drame épouvantable, abominable. Je pense à la famille, je pense aux proches, alors que l'on ne sait pas encore très exactement ce qui s'est passé. Premier élément. Deuxième élément, et je regrette que vous passiez aussi rapidement, que vous ne l'évoquiez pas, c'est comme la famille elle-même l'a indiqué : c'est la très grande réactivité et la très grande efficacité de la police qui a interpellé quelques heures à peine après un suspect - ce n'est qu'un suspect, naturellement, à ce stade. Je rappelle aussi que dans notre pays, le nombre d'homicides, le nombre de meurtres, est en constante diminution et que surtout - surtout ! - dans plus de 9 cas sur 10 les meurtriers sont identifiés, interpellés et condamnés.
C. Roux : Alors vous nous dites que tout s'est bien passé ou vous reconnaissez qu'il y a eu des dysfonctionnements, B. Hortefeux ?
Pas du tout ! Pas du tout ! Je dis il y a un suspect qui a été interpellé. Maintenant, il n'y a effectivement pas une question et à mon avis il y en a deux. Mais la première question c'est celle que vous me posez. C'est : y a-t-il eu des dysfonctionnements ? Il semblerait que oui. Il y a eu effectivement des dysfonctionnements mais j'emploie le conditionnel pourquoi ? Parce qu'il y a des enquêtes d'inspection à la fois du ministère de la Justice et du ministère de l'Intérieur qui sont actuellement diligentées et je vous le dis très simplement, très calmement, très sereinement : s'il y a eu des dysfonctionnements, si ceux-ci sont avérés à la suite de ces enquêtes et de cette inspection, eh bien il y aura bien évidemment des sanctions administratives.
C. Roux : Vous avez annoncé la création d'un office de suivi des délinquants sexuels. On se dit, B. Hortefeux, ce matin, que c'est une nouvelle usine à gaz. On a raison ?
Non. En réalité, vous prenez ça, pardon, par le petit bout de la lorgnette.
C. Roux : Vous nous connaissez.
Mais ça ne veut pas dire que cela n'existe pas. En réalité la deuxième question que vous posez, c'est : est-ce qu'on peut améliorer ce fonctionnement pour éviter que de tels drames se reproduisent.
C. Roux : Non. La question c'est est-ce que vous avez des moyens.
Oui, mais attendez, mais précisément je vous le dis, je vous réponds oui. Et nous n'en sommes pas au stade des pistes, nous n'en sommes pas au stade des réflexions : nous avons pris des décisions. Il y a sept décisions qui ont été prises, qui concernent à la fois le ministère de la Justice et le ministère de l'Intérieur. Vous en citez un : c'est la création d'un office national. Pourquoi ? Parce qu'il faut faire travailler ensemble le ministère de l'Intérieur, le ministère de la Justice, le ministère de la Santé pour que l'on puisse repérer, anticiper, certains délinquants des plus graves et les suivre plus efficacement. Mais ce n'est pas la seule mesure. Je vous donne un exemple, une deuxième mesure très simple. Dans le cas précis, le suspect à ce stade devait, avait une obligation : c'est d'indiquer - ça tombait au mois d'août - son adresse. Il ne l'a pas fait. Pour des raisons de lourdeur en quelque sorte, il n'a ??té inscrit au fichier des personnes recherchées que très tardivement. Eh bien là nous avons décidé une mesure simple, claire, immédiate. C'est tout simplement que lorsqu'il y a un délinquant qui ne répond pas à ses obligations, il est automatiquement, et je dirais immédiatement, inscrit au fichier des personnes recherchées. Ce ne sont pas des plans sur la comète, ce sont des réalités très concrètes.
C. Roux : Justement, est-ce que vous prenez date ce matin avec nous pour revenir nous voir le jour où cet office sera effectivement en application ? disposera de moyens ? Quelle date vous vous fixez ?
Bien sûr. Il faut le faire très rapidement, mais toutes les mesures.
C. Roux : Quand ?
Le lancer le plus rapidement possible. Encore une fois, nous n'avons pas besoin de cathédrale législative. Il n'y a pas besoin de nouvelles lois. Il faut appliquer des mesures, d'ailleurs des mesures que j'ai fait voter, de la semaine dernière, en matière de fichiers, en matière de cellules départementales. Je vous le dis : notre société...
C. Roux : Vous savez que la loi du 11 mars 2010 sur la récidive n'a pas de décret d'application, vous voyez. Donc c'est...
Attendez, je vous le dis : notre société n'est pas impuissante face à des actes aussi monstrueux.
M. Biraben : Bien. On retiendra donc ce matin que pour lutter contre la récidive, il faut de l'argent et pas des textes. Merci beaucoup B. Hortefeux.
Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 4 février 2011
Bonjour.
C. Roux : Bonjour. M. Biraben : Soyez le bienvenu.
Merci.
C. Roux : Alors la question qui se pose ce matin : pourquoi avez-vous choisi de reculer à propos de la fermeture des deux compagnies de CRS à Sainte-Foy-lès-Lyon et à Marseille ?
Mais pourquoi dites-vous « reculer » ?
C. Roux : Vous avez avancé sur le sujet ?
Sur quoi vous fondez-vous ? Vous savez, pour que je renonce, il aurait fallu qu'il y ait annonce ; ça me paraît assez logique. Et à aucun moment je n'avais annoncé - je vous mets au défi de trouver une déclaration, un discours, une intervention dans lequel j'ai annoncé ou j'aurais annoncé - la fermeture. Ce qui est vrai, c'est qu'il y a eu des rumeurs. Il y a eu des rumeurs qui ont été colportées - peut-être y avez-vous d'ailleurs contribué, mais finalement c'est peut-être aussi votre rôle - de fermeture. J'ai même entendu jusqu'à huit fermetures qui auraient été programmées de Compagnies Républicaines de Sécurité. Vous savez, il faut revenir à l'essentiel. Moi j'ai une mission, une préoccupation qui est simple, qui est claire : c'est d'assurer de la meilleure manière la protection, la tranquillité, la sécurité de nos concitoyens et tout ça, c'est tout ce qui me guide.
C. Roux : Alors B. Hortefeux, ils ont fait une grève de la faim, il y a eu des arrêts de travail, les syndicats se sont mobilisés, ils ont été reçus au ministère de l'Intérieur. Ils n'avaient juste rien compris, c'est ça ?
Non. Il y a plusieurs réalités simples. D'abord les forces mobiles, c'est-à-dire en clair les CRS et les escadrons de gendarmerie, sont indispensables à notre société. Ça, c'est la première réalité. Deuxième réalité, c'est vrai que l'on a observé, pas sur une petite période, pas sur quelques mois, sur plusieurs années, très exactement sur trente ans, qu'il y avait une légère diminution des besoins en maintien de l'ordre. C'est comme cela, notre société évolue. Et parallèlement à cette diminution des besoins en maintien de l'ordre, j'ai observé - vous l'avez d'ailleurs vous-même certainement constaté au quotidien - il y a une augmentation des besoins en matière de sécurité publique, c'est-à-dire de présence permanente sur le terrain. Donc j'ai décidé d'en tirer toutes les conséquences, d'engager une concertation, un dialogue avec les organisations syndicales. Que s'est-il passé ? Le directeur général de la police a reçu hier des organisations syndicales ; je les ai reçues dans la soirée et j'ai écouté leurs arguments, la symbolique qui existait sur deux compagnies, puisque celles qui étaient le plus souvent avancées c'était celles de Marseille et de Lyon. J'ai bien entendu cela et j'ai donc décidé une chose simple : c'est qu'on affecterait l'équivalent de deux compagnies, c'est-à-dire 280 policiers, en sécurité publique mais sans prononcer la dissolution de deux compagnies spécifiques.
C. Roux : B. Hortefeux, est-ce qu'à l'avenir il y aura des fermetures de compagnies ?
Non. Il n'y aura aucune fermeture de compagnie dans l'avenir mais, comprenez-moi bien, il y a donc 280 policiers supplémentaires qui seront affectés sur la voie publique, qui sont affectés sur le terrain, 280 policiers de la sécurité publique qui seront affectés sur le terrain par un redéploiement. Qu'est-ce que ça signifie tout ça ? Ça signifie, un, que les syndicats sont écoutés ; deux, que les objectifs du Gouvernement sont respectés. Je pense que c'est une bonne méthode de dialogue, de concertation et d'efficacité parce que l'objectif, c'est de faire baisser naturellement la délinquance dans notre pays.
C. Roux : Alors ce matin sur Europe 1, on racontait qu'on vous a vu traverser à pied de la place Beauvau à l'Élysée avant de recevoir les syndicats de police. La question est toute simple : est-ce que cette décision vous avait été suggérée par l'Élysée ?
Non. C'est... Naturellement, une décision par définition qui est prise par le Gouvernement reçoit le soutien, l'accord, l'encouragement du Premier ministre bien sûr, que j'ai tenu directement informé, et naturellement du chef de l'État. Hier, le directeur général de la police, F. Péchenard, m'a rendu compte des entretiens qu'il a eus avec les syndicats ; j'en ai tiré un certain nombre de convictions, j'en ai tiré personnellement un certain nombre de convictions. Je suis allé en discuter avec le secrétaire général de l'Élysée, ce qui est une procédure tout à fait normale. De surcroît C. Guéant est ancien directeur général de la police et il y est attentif. J'ai évoqué ce qui était des convictions auprès du secrétaire général de l'Élysée qui les a parfaitement comprises et donc j'ai réuni ensuite les syndicats pour leur proposer une méthode.
C. Roux : Vous ne prenez pas vos ordres à l'Élysée, c'est ça qu'on retient.
Mais pas du tout ! Mais pas du tout ! Enfin, écoutez : soit je me suis mal exprimé, soit vous n'avez pas tout à fait tout suivi. Naturellement dans notre système, il va de soi que lorsque des décisions importantes sont prises, c'est avec le soutien, l'encouragement du chef de l'État et du Premier ministre.
C. Roux : Est-ce que vous en avez tiré des leçons sur le mode d'expression de la colère des CRS ? Est-ce que c'est normal qu'ils en arrivent jusque-là, faire des grèves de la faim, accumuler les arrêts de travail ? Est-ce que vous dites qu'à l'avenir il faut les écouter davantage ?
Mais moi, par définition et par principe, j'écoute. Je suis attentif à l'expression et je vais vous dire, j'ai été quelques temps ministre du Travail, des relations sociales. Et au ministère de l'Intérieur c'est un ministère qui a une particularité : c'est que les organisations syndicales sont puissantes et elles sont représentatives. Le taux de participation aux élections professionnelles - c'est très rare dans notre pays - est de l'ordre de 86 à 87 % ; ce qui fait que quand j'ai des interlocuteurs, je sais qu'ils sont représentatifs. Et hier, quand on s'est mis dans mon bureau autour de la table, que j'ai obtenu un accord parce qu'il y avait des avancées de part et d'autre, un accord unanime de SGPFO, d'Alliance, de l'UNSA qui sont les grandes organisations syndicales, je sais que mes interlocuteurs, lorsqu'ils s'engagent, lorsqu'ils topent, ils sont représentatifs, ils sont accompagnés, ils sont suivis. Et donc c'est pour moi non pas une leçon, mais c'est à l'évidence une méthode que je continuerai à appliquer, qui est celle du dialogue, de la concertation et de l'efficacité parce que encore une fois, l'objectif d'ailleurs aussi des organisations syndicales, c'est de faire en sorte que la police - et que la gendarmerie qui est un statut militaire - mais que la police soit la mieux organisée, soit la plus performante, soit la plus efficace pour la protection de nos concitoyens.
C. Roux : Est-ce qu'il y aura des suppressions de postes dans les compagnies de gendarmes mobiles ?
Concernant les gendarmes, il y a des escadrons qui vont bouger, mais ça c'est quelque chose qui est déjà enclenché.
C. Roux : Qui vont bouger ? Qui vont être supprimés ?
Encore une fois, il y a une organisation qui est en place et c'est vrai. On ne peut pas faire non plus, C. Roux, comme si nous étions dans une situation où il y avait une croissance majeure, qu'on pouvait repousser.
C. Roux : Il faut supprimer des postes.
Depuis 1992, on a recruté un million de fonctionnaires supplémentaires, chaque Français peut comprendre que naturellement cela a un coût, cela pèse sur la fiscalité, cela pèse sur notre économie et que chacun doit apporter sa pierre à l'édifice de l'effort, et c'est ce qui est fait.
M. Biraben : B. Hortefeux, dans l'actualité, la récidive.
C. Roux : Oui. Vous avez annoncé avec le garde des Sceaux cette mesure d'urgence dont un office de suivi des délinquants sexuels. Avant de parler de cet office et des moyens que vous mettez à disposition, est-ce que ce matin vous reconnaissez qu'il y a eu des dysfonctionnements dans la police sur cette affaire ?
D'abord moi je ne veux pas perdre de vue la première réalité, c'est celle d'un drame épouvantable, abominable. Je pense à la famille, je pense aux proches, alors que l'on ne sait pas encore très exactement ce qui s'est passé. Premier élément. Deuxième élément, et je regrette que vous passiez aussi rapidement, que vous ne l'évoquiez pas, c'est comme la famille elle-même l'a indiqué : c'est la très grande réactivité et la très grande efficacité de la police qui a interpellé quelques heures à peine après un suspect - ce n'est qu'un suspect, naturellement, à ce stade. Je rappelle aussi que dans notre pays, le nombre d'homicides, le nombre de meurtres, est en constante diminution et que surtout - surtout ! - dans plus de 9 cas sur 10 les meurtriers sont identifiés, interpellés et condamnés.
C. Roux : Alors vous nous dites que tout s'est bien passé ou vous reconnaissez qu'il y a eu des dysfonctionnements, B. Hortefeux ?
Pas du tout ! Pas du tout ! Je dis il y a un suspect qui a été interpellé. Maintenant, il n'y a effectivement pas une question et à mon avis il y en a deux. Mais la première question c'est celle que vous me posez. C'est : y a-t-il eu des dysfonctionnements ? Il semblerait que oui. Il y a eu effectivement des dysfonctionnements mais j'emploie le conditionnel pourquoi ? Parce qu'il y a des enquêtes d'inspection à la fois du ministère de la Justice et du ministère de l'Intérieur qui sont actuellement diligentées et je vous le dis très simplement, très calmement, très sereinement : s'il y a eu des dysfonctionnements, si ceux-ci sont avérés à la suite de ces enquêtes et de cette inspection, eh bien il y aura bien évidemment des sanctions administratives.
C. Roux : Vous avez annoncé la création d'un office de suivi des délinquants sexuels. On se dit, B. Hortefeux, ce matin, que c'est une nouvelle usine à gaz. On a raison ?
Non. En réalité, vous prenez ça, pardon, par le petit bout de la lorgnette.
C. Roux : Vous nous connaissez.
Mais ça ne veut pas dire que cela n'existe pas. En réalité la deuxième question que vous posez, c'est : est-ce qu'on peut améliorer ce fonctionnement pour éviter que de tels drames se reproduisent.
C. Roux : Non. La question c'est est-ce que vous avez des moyens.
Oui, mais attendez, mais précisément je vous le dis, je vous réponds oui. Et nous n'en sommes pas au stade des pistes, nous n'en sommes pas au stade des réflexions : nous avons pris des décisions. Il y a sept décisions qui ont été prises, qui concernent à la fois le ministère de la Justice et le ministère de l'Intérieur. Vous en citez un : c'est la création d'un office national. Pourquoi ? Parce qu'il faut faire travailler ensemble le ministère de l'Intérieur, le ministère de la Justice, le ministère de la Santé pour que l'on puisse repérer, anticiper, certains délinquants des plus graves et les suivre plus efficacement. Mais ce n'est pas la seule mesure. Je vous donne un exemple, une deuxième mesure très simple. Dans le cas précis, le suspect à ce stade devait, avait une obligation : c'est d'indiquer - ça tombait au mois d'août - son adresse. Il ne l'a pas fait. Pour des raisons de lourdeur en quelque sorte, il n'a ??té inscrit au fichier des personnes recherchées que très tardivement. Eh bien là nous avons décidé une mesure simple, claire, immédiate. C'est tout simplement que lorsqu'il y a un délinquant qui ne répond pas à ses obligations, il est automatiquement, et je dirais immédiatement, inscrit au fichier des personnes recherchées. Ce ne sont pas des plans sur la comète, ce sont des réalités très concrètes.
C. Roux : Justement, est-ce que vous prenez date ce matin avec nous pour revenir nous voir le jour où cet office sera effectivement en application ? disposera de moyens ? Quelle date vous vous fixez ?
Bien sûr. Il faut le faire très rapidement, mais toutes les mesures.
C. Roux : Quand ?
Le lancer le plus rapidement possible. Encore une fois, nous n'avons pas besoin de cathédrale législative. Il n'y a pas besoin de nouvelles lois. Il faut appliquer des mesures, d'ailleurs des mesures que j'ai fait voter, de la semaine dernière, en matière de fichiers, en matière de cellules départementales. Je vous le dis : notre société...
C. Roux : Vous savez que la loi du 11 mars 2010 sur la récidive n'a pas de décret d'application, vous voyez. Donc c'est...
Attendez, je vous le dis : notre société n'est pas impuissante face à des actes aussi monstrueux.
M. Biraben : Bien. On retiendra donc ce matin que pour lutter contre la récidive, il faut de l'argent et pas des textes. Merci beaucoup B. Hortefeux.
Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 4 février 2011