Texte intégral
Je suis très heureuse douvrir ce Colloque "2011, année des patients et de leurs droits", qui préfigure une action nationale de sensibilisation de tous les citoyens, et de lensemble des professionnels de santé. Je remercie le Conseil économique, social et environnemental de laccueillir. Car il ne pouvait se tenir dans un lieu plus symbolique que cette "Assemblée du premier mot", où sont débattues des questions essentielles. Et notamment celles qui touchent aux droits des citoyens, et aux principes fondamentaux de notre société et de notre démocratie.
Ce programme "2011, année des patients et de leurs droits" constitue dabord laboutissement dune prise de conscience collective et dune volonté de dresser le nécessaire bilan dune décennie de réflexion et defforts, pour mieux faire reconnaître les droits des patients.
Mais cest aussi lexpression dune volonté forte de dégager de nouvelles perspectives : pour que les citoyens connaissent davantage leurs droits, quils se les approprient, quils en fassent désormais meilleur usage, avec lappui et lengagement des acteurs de la santé.
Je veux rendre hommage à Roselyne Bachelot, qui a pris en 2010 linitiative de cette année des patients et de leurs droits, dont ce colloque est lillustration.
Mais cet événement sinscrit dans une histoire, mon cher Bernard, dont tu as su écrire le premier chapitre, il y a dix ans, avec la loi de 2002. Tu tes investi personnellement pour cette cause. Ton volontarisme et ta détermination ont permis de lancer, avec le concours de professionnels de santé et dassociations, un mouvement de fond qui na cessé de samplifier depuis.
Je remercie Marina CARRERE dENCAUSSE davoir accepté de présider les travaux très importants qui ont abouti à lélaboration des trois rapports sur les droits des patients que nous avons présentés officiellement le 24 février dernier.
Le premier dentre eux, ayant pour thème "faire valoir les droits des patients", a permis de dresser un tableau très complet des droits individuels et collectifs aujourdhui reconnus. Il a abouti à la formulation de 116 propositions.
Le 2ème rapport, "la bientraitance à lhôpital", avait pour tâche de contribuer à lessor de démarches de bientraitance et de qualité de service dans les établissements de santé.
Le 3ème rapport, "les nouvelles attentes des citoyens acteurs de la santé", sest penché sur les évolutions de lorganisation des soins et du développement des usages dinternet.
Ces travaux constituent un état des lieux approfondi. Ils prennent en compte les évolutions de notre système de santé et les attentes des Français. Ils donnent aujourdhui à ce colloque tous les ingrédients pour pouvoir mieux sensibiliser, interpeller, questionner : non seulement les professionnels de santé, mais aussi lensemble des acteurs du système de soins, et, bien sûr, nos concitoyens, sur les solutions nécessaires pour mieux faire respecter les droits des patients.
Je remercie lensemble des personnalités qui ont contribué à cette réflexion, et ont ainsi permis de lancer le débat ouvert et accessible à tous qui va souvrir aujourdhui : Christine dAUTUME, Christian SAOUT, Alain-Michel CERETTI, Laure ALBERTINI, Michelle BRESSAND, Michel SCHMITT, Martine CHRIQUI-REINECKE, Nicolas BRUN, Emmanuel HIRSCH et Joëlle KIVITS.
Ce premier colloque va permettre à cette réflexion dêtre poursuivie, partagée et animée par lensemble des acteurs de la santé : usagers, professionnels de santé, partenaires institutionnels et associatifs, relais médiatiques. Il sera suivi de six débats en région sur la bientraitance, pour mobiliser les professionnels.
Il anticipe le 18 avril prochain, journée européenne des droits des patients. Il va être prolongé tout au long de cette année par la valorisation dinitiatives exemplaires en faveur de la promotion des droits des patients, qui seront labellisées et récompensées lors de la deuxième édition du Prix des droits des patients en fin dannée, que préside une nouvelle fois Marina CARRERE dENCAUSSE.
(LES PROGRES DE CES DIX DERNIERES ANNEES)
Nous devons nous souvenir que les progrès sur lesquels nous pouvons nous appuyer aujourdhui sont le fruit dune volonté et dun engagement qui nont jamais fléchi tout au long de ces dernières années.
La préoccupation de défendre les droits des malades a dabord été un des combats des associations de lutte contre le VIH. Car ce sont elles qui, pour la première fois, ont interpellé les professionnels de santé sur ces questions essentielles.
Après cette prise de conscience, la préoccupation de mieux faire reconnaître ces droits a été portée sans relâche par le législateur et les pouvoirs publics : elle sest incarnée dans la loi "Droits des malades" du 4 mars 2002, que vous allez évoquer dans quelques instants, et qui constitua une avancée historique qua portée Bernard Kouchner, elle même complétée par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, et par la loi du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie.
Depuis 2009, la loi "Hôpital, Patients, Santé et Territoires" vient conforter également la démocratie sanitaire et le respect des droits des patients, puisque ceux-ci sont désormais représentés dans les conférences régionales de la santé et de lautonomie, et les conférences de territoires.
Cette loi qui, comme vous le savez, a permis la mise en place des Agences Régionales de Santé, en a fait des acteurs essentiels pour contribuer à la réduction de la maltraitance, pour promouvoir la bientraitance dans les établissements de santé et dans les établissements médico-sociaux, et pour faire progresser laccès aux soins et lautonomie des patients.
(le colloque)
Nous avons choisi darticuler cette première rencontre autour de quatre thèmes principaux. Ils constituent un potentiel dactions nouvelles qui ont toutes les chances de se concrétiser, car elles pourront pleinement profiter de ces lois importantes que je viens dévoquer.
Mais avant de parler du fond, cest votre méthode que je veux saluer, et encourager : en effet, cest à partir de léchange, du débat, de la confrontation que pourront voir le jour des pistes nouvelles de travail permettant cette évolution en faveur des patients.
Jinvite par conséquent tous les intervenants des quatre tables rondes, dans la diversité de leurs responsabilités et de leurs expériences, à innover, et je dirais même, à rêver à ce que pourrait être un droit des patients reconnu et effectif au sein de lensemble de notre système de soins, hospitalier, ambulatoire, médico-social.
(malade, citoyen et acteur de sa santé)
Les professionnels de santé doivent jouer un rôle central dans cette dynamique. Car ce sont eux dont dépendent la qualité des soins dispensés, mais aussi cette relation de confiance qui doit sétablir entre le soignant et le soigné. Mieux informer le patient, cest conforter sa liberté. Mieux assurer sa participation aux décisions qui le concernent, cest garantir son autonomie. Ce nest que comme cela quon laide à surmonter sa maladie.
Si être malade, cest être en situation de vulnérabilité, pour autant, la personne reste et demeure un citoyen et donc un acteur à part entière du système de santé : comment faire en sorte que ce principe se concrétise à léchelle individuelle dans sa prise en charge, comme à léchelle collective, à travers la démocratie sanitaire ? Il sagit dune problématique essentielle que je vous demande daborder dans lensemble des débats que vous allez avoir au cours de la journée.
(BIENTRAITANCE)
Autre thématique qui me tient particulièrement à coeur et quil conviendra daborder au cours des tables rondes : la bientraitance.
Jen ai fait une de mes priorités aux aînés dans le champ médico-social. Je veux quelle le soit également dans le champ sanitaire, car noublions pas quune société se juge à laune du sort quelle réserve aux plus faibles dentre nous.
Je serai donc particulièrement attentive aux propositions que vous formulerez en la matière, car les démarches de bientraitance, à lhôpital, sont plus que le reflet dune éthique. Elles sont également des outils pour mieux comprendre les attentes et les besoins daccompagnement des malades.
(NOUVELLES TECHNOLOGIES)
Le déploiement de plus en plus important des nouvelles technologies et des nouvelles modalités de soins est, vous le savez, une arme à double tranchant : car sil permet indéniablement au patient de se conforter dans le rôle dacteur de sa propre santé, ne peut-on pas craindre aussi un transfert insidieux de responsabilité des professionnels de santé vers le patient et ses proches, ou faire courir au patient le risque de voir diffusées sur internet des informations personnelles ?
Ces questions doivent être débattues entre les usagers, les partenaires associatifs et institutionnels, et je ne doute pas que vos réflexions sur des sujets aussi actuels et liés à notre époque vont déboucher sur des propositions novatrices.
Lessentiel est de veiller à ce que la technique nétouffe jamais lhumain. Concrètement, pour un professionnel de la santé, cela signifie clairement que les nouvelles technologies ne doivent à aucun moment compromettre la relation privilégiée entre le soignant et le malade.
(MEILLEURE LISIBILITE DE LOFFRE DE SOINS)
Nous avons par ailleurs des progrès concrets à réaliser pour une meilleure connaissance de loffre de soins. Il est vrai quaujourdhui, lusager a encore du mal à sy retrouver, en termes de disponibilité, daccessibilité des prix, de qualité et de sécurité des différents prestataires de soins sur le territoire. Linégalité dans laccès à des soins de qualité, nous le savons tous, cest dabord une inégalité dinformation entre les usagers. Jattends beaucoup de la table ronde qui est aujourdhui consacrée à ce sujet.
Enfin, quand deux tiers des Français déclarent ne pas connaître les instances auxquelles ils doivent sadresser en cas de problème de santé, force est de reconnaître que notre démocratie sanitaire nest pas encore sur les rails. Par exemple, la présence des représentants des patients au sein des instances et des établissements de santé na pas suffi pour que la démocratie sanitaire sexerce pleinement. Il faut mobiliser les acteurs concernés des établissements de santé, favoriser la démocratie de proximité, promouvoir le débat public.
Mesdames et Messieurs,
Nous avons la chance, dans notre pays, de ne pas avoir à écrire lhistoire des droits des patients sur une page blanche. Pour autant, il est essentiel de capitaliser ces acquis, et de faire en sorte que chacun puisse bien connaître ses droits pour mieux se les approprier.
Plus quun symbole, le colloque daujourdhui doit être, à un mois et demi de la Journée européenne des droits des patients, la préparation dune véritable feuille de route.
Ce qui importe, après dix ans de lutte pour une meilleure défense des droits des patients, cest désormais un exercice plein et entier des droits de nos concitoyens malades ou vulnérables.
Alors, bons travaux !
Source http://www.sante.gouv.fr, le 15 mars 2011