Texte intégral
Bonjour
Faut-il déchoir de la nationalité française ceux qui lont acquise depuis moins de dix ans, et qui sont reconnus coupable du meurtre dun policier ou dun gendarme ? Cest ce que souhaite le président de la République, il lavait dit avec fracas à Grenoble lors dun discours prononcé le 31 juillet de lannée dernière, et cest ce qui divise aujourdhui la majorité parlementaire à lAssemblée nationale où est étudié en deuxième lecture, un projet de loi sur limmigration qui contient cette mesure de déchéance de la nationalité. 68 députés centristes - votre famille, M. Leroy - regroupés derrière J.-L. Borloo - votre ami - refusent de voter la mesure que soutiennent les fidèles du chef de lEtat, parmi lesquels C. Estrosi. Vous êtes de quel côté, ce matin ? M. Leroy : est-ce quil faut déchoir de leur nationalité les gens... ?
Je suis comme toujours du côté de ma famille. Ma famille est centriste. Je suis centriste dans ce Gouvernement. Je nai pas voté cette législation lorsquelle est venue en première lecture devant lAssemblée nationale...
Cette mesure-là, vous avez voté le projet de loi qui la contenait, mais pas cette mesure ?
Pas cette mesure. Pas cette mesure. Jai voté le projet de loi parce que lensemble de la loi allait dans le bon sens.
Mais pas cette mesure ?
Elle avançait plus de sécurité pour les Français...
Daccord. Pas cette mesure ?
... Et nous, les centristes nous sommes responsables...
Pourquoi pas cette mesure ?
Pas cette mesure, parce queffectivement je ne fais pas de distinction entre les enfants naturels et les enfants adoptifs de la République et je suis dune famille qui aime quand Ernest Renan dit que "La Nation cest un plébiscite de tous les jours". Voilà.
Et donc malgré que vous soyez devenu ministre, le 15 novembre...
Oui, quand vous devenez ministre, vous navez pas limperméable de Colombo qui vous prémunit de tout ce que vous faisiez avant -je parlais de lInspecteur Colombo, tout le monde maura compris jespère !-...
Un centriste, Colombo !
Donc, voilà, les choses sont assez simples. Si javais été à lAssemblée nationale, jaurais co-signé au côté de F. Sauvadet, des députés centristes, des 42 députés UMP qui derrière J.-L. Borloo, L. Hénart, P. Méhaignerie - je pourrais en citer dautres - les ont cités. Vous savez, on a besoin de pluralisme dans la majorité.
Et vous êtes devenu...
Et les sondages le montrent : nous avons besoin de pluralisme dans la majorité.
On va parler du sondage. Vous êtes membre du Gouvernement. Vous êtes tout de même tenu à une solidarité. Vous voulez que je vous rappelle ce que disait le président de la République, le 31 juillet : "Je prends mes responsabilités, disait-il, cétait donc à Grenoble. La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne dorigine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie dun fonctionnaire de police ou dun militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de lautorité publique. La nationalité française se mérite. Il faut pouvoir sen montrer digne."Le président de la République a tort ?
Non, le Président de la République est dans son rôle
Cest quoi son rôle ?
Ecoutez-moi, vous aurez du mal à me mettre en porte à faux avec le président de la République ; et puis ensuite
Vous vous êtes mis tout seul en opposition à lui...
Non, je ne me suis mis en opposition de rien du tout. Mais si. Jaffirme des positions, cest vrai, voilà...
... qui sont contraires à la conviction du président de la République !
Mais attendez ! Ca sappelle le pluralisme. Au Sénat, vous avez noté sans doute quil y a 182 sénateurs qui ont voté la suppression de larticle 3bis de la loi ; et jai noté que F. Fillon qui jusquà preuve du contraire, est encore le Premier ministre de la France, non, dans le Gouvernement que je siège...
Ah, cest vous qui introduisez le doute. Jusquà preuve du contraire, dites-vous !
Je vous sens en difficulté...
Moi ?
Mais on va avancer.
Oui, vous avez raison.
Cest F. Fillon, cest F. Fillon qui a dit quil respecterait que le gouvernement respecterait le vote du Sénat et notamment des sénateurs centristes. Donc, je suis exactement sur la même position que le Premier ministre de ce point de vue. Pour le reste, ne me demandez pas de ne pas être centriste dans ce gouvernement ! Cest ma famille. Je ne suis pas adhérent à lUMP, je suis adhérent du Nouveau Centre.
Est-ce que ce nest pas un problème ? Est-ce que ce nest pas ce qui explique les difficultés actuelles de voir le président de la République affirmer avec solennité un souhait et puis après, voilà ?!
Ce nest pas comme ça que ça se pose. Moi, jai soutenu - entre les deux tours des présidentielles, comme vous le savez - avec mes amis centristes du Nouveau Centre, avec H. Morin, F. Sauvadet, J.-C. Lagarde et beaucoup dautres, jai soutenu la démarche du président de la République qui était une démarche réformatrice au sens dailleurs où J. Lecanuet donnait ce mot réformateur et le contenu ; et je me réjouis de lavoir fait. Pourquoi ? Parce queffectivement, il y a des pouvoirs équilibrés...
Ah, on ne va pas faire la réélection de 2007 ! Non, non...
Non, mais on ne la refait pas. Attendez, je progresse...
Est-ce que N. Sarkozy, avec ce genre de mesures... ?
Ça veut dire que le Parlement, aujourdhui, a beaucoup plus de pouvoir quil nen avait précédemment, y compris dans les années Chirac - A. Duhamel évoquait... Donc, voilà
On va parler clairement du débat daujourdhui...
Réjouissons-nous que les parlementaires aient la liberté de voter, y compris pas toujours dans le sens du président de la République, voilà.
Est-ce quavec ce genre de proposition, le président de la République court trop, daprès vous, derrière le Front National ?
Non, je ne pense pas que le président de la République... Vous savez, le président de la République, il ne court pas après le Front National. Il est arrivé que malheureusement, ça se fasse à lUMP, ça cest autre chose.
Mais pas le président de la République
Non, pas le président de la République. Et dailleurs puisque vous voulez des confidences
Oui !
Souvent, au Nouveau Centre et chez les centristes, nous avons souvent été plus en phase avec le président de la République quavec nos propres partenaires de la majorité parlementaire. Donc, le président de la République, il est totalement en phase et dans son rôle. Par contre, effectivement, prenons garde à celles et ceux qui parfois, par panique, pensent faire une course à léchalote. Je vais vous dire une chose...
On panique à lUMP ?
... Jamais, jamais les gens ne font autre chose que choisir loriginal à la copie, toujours
Le débat sur lIslam...
... Surtout quand les copies sont pâles.
Le débat sur lIslam, cest un signe de panique, daprès vous, M. Leroy ?
Moi je ne suis pas favorable à ce débat sur lIslam. Je navais pas été favorable comme porte-parole du Nouveau Centre au débat sur la nationalité. Je trouvais queffectivement, on prenait des risques et excusez-moi, les sondages me donnent plutôt raison. Aujourdhui, il faut agir ; on doit être dans laction. Moi je suis plus efficace comme ministre de la Ville qui se bat pour conjuguer lurbain et lhumain dans les quartiers en faveur notamment des jeunes qui subissent le chômage, voilà. Et quand je suis en Loir-et-Cher, encore hier soir, en réunion publique ou sur le terrain...
Ce matin, vous êtes à Paris. Oui.
Oui, et dans mes déplacements ministériels, je vais vous dire les Français y compris les auditeurs de RTL, ils ne commentent pas la courbe des sondages, ils commentent la courbe du chômage, de lessence à la pompe ; donc parlons des réalités des Français... Parlons des Français !
On est daccord pour dire, M. Leroy, que cest le président de la République qui souhaite ce débat sur lIslam ?
Non, le président de la République...
Ah bon !
Eh bien, écoutez vous suivez lactualité quand même... Vous êtes un observateur émérite de lactualité...
Il ne souhaitait pas le débat sur lIslam ?
Vous avez observé que depuis, ça a évolué y compris devant lAssemblée nationale, il a été clairement affirmé - cétait un débat - sur la laïcité. On est plus dans un débat sur lIslam. Si lélection présidentielle avait lieu, dimanche, par exemple, vous aimeriez pouvoir voter pour qui ? N. Sarkozy ou J.-L. Borloo ? Si elle avait lieu, dimanche ?
Oui.
Au premier tour ?
Oui.
Pour J.-L. Borloo.
Daccord. Vous serez encore ministre, ce soir, M. Leroy ?
Eh bien écoutez, vous le verrez bien !
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 11 mars 2011