Texte intégral
Je voudrais à mon tour remercier Radoslaw Sikorski de son hospitalité qui permet de découvrir sa belle ville natale sous ce beau soleil polonais. C'est pour moi l'occasion de réaffirmer tout l'attachement que la France porte depuis 20 ans maintenant à ce que l'on appelle le Triangle de Weimar. Entre la France, la Pologne et l'Allemagne, il y a une profonde amitié, et surtout une très grande convergence de points de vue et d'intérêts, ce qui nous permet de jouer un rôle actif au sein de l'Union européenne.
Nous avons eu une discussion approfondie qui a fait ressortir notre entente sur toutes les questions que nous avons abordées. Et je voudrais en particulier insister sur le soutien que la France, comme l'Allemagne d'ailleurs, va apporter à la Pologne pendant l'exercice de sa Présidence de l'Union européenne. Ce sera un semestre important, avec beaucoup de questions très sensibles à l'ordre du jour, et la Pologne peut compter sur notre engagement à ses côtés pour que cette présidence soit une réussite.
Parmi les priorités qui ont été évoquées, je voudrais, sans répéter ce qui a déjà été dit, en évoquer deux ou trois.
D'abord, la rénovation de la politique européenne de voisinage dans son volet oriental. Il y aura, le 29 et le 30 septembre, un Sommet du Partenariat oriental qui va nous permettre d'avancer sur la voie de l'intégration économique et des accords d'association avec des pays qui sont engagés dans des réformes démocratiques et économiques.
Mais, bien entendu, la politique de voisinage c'est aussi le voisinage vers le Sud. Le soutien financier de l'Union européenne est absolument essentiel si nous voulons que les transitions démocratiques que traversent un certain nombre de ces pays, je pense en particulier à la Tunisie et à l'Égypte, réussissent.
Deuxième priorité que nous allons soutenir pendant la Présidence polonaise, c'est la relance de la défense européenne, de la Politique de sécurité et de défense commune. Nous avons, vous le savez, adressé à la fin de l'année dernière une lettre à Catherine Ashton que l'on a appelée la Lettre de Weimar. Il faut absolument que l'on avance sur cette voie pour doter l'Union européenne d'une capacité de planification et de conduite des opérations, pour mutualiser un certain nombre de nos capacités aussi, et pour développer la relation entre l'Union européenne et l'OTAN.
Enfin, nous avons abordé un certain nombre de crises, ou de situations difficiles. Je ne vais pas les passer toutes en revue. Juste un mot sur le processus de paix au Proche-Orient et la situation au Proche-Orient, la situation de manière générale au Sud de la Méditerranée. Comme Guido et comme Radek j'ai écouté avec beaucoup d'attention le discours du président Obama. J'ai retrouvé le message que la France adresse depuis maintenant plusieurs semaines aux pays arabes, à savoir le soutien que nous apportons à cet immense mouvement de libération des peuples, à ce qu'on appelle le «Printemps arabe». C'est une force qu'il faut saisir, quelles que soient les difficultés de la transition démocratique que j'évoquais tout à l'heure.
J'ai noté aussi ce que le président Obama a dit sur la nécessité de sortir du statu quo au Proche-Orient, entre Israéliens et Palestiniens, et j'espère que son discours incitera les protagonistes à se remettre autour de la table de négociations. Ce principe de soutien aux droits de l'Homme, à l'aspiration à la liberté, aux progrès de la démocratie, doit nous inspirer partout bien entendu.
Et je voudrais évoquer d'autres situations encore, différentes mais sur lesquelles nous sommes évidemment tombés d'accord.
D'abord, la Syrie. Il faut dénoncer le comportement inacceptable du régime syrien et j'espère que nous allons pouvoir, lundi à Bruxelles, allonger la liste des sanctions que nous avons prises à l'égard d'un certain nombre de personnalités responsables à la tête de la Syrie.
Dans un tout autre espace géographique, sur la Biélorussie, nous pensons que, là aussi, il faut être tout à fait cohérent avec nos principes et dénoncer les violations des droits de l'Homme qui se produisent dans ce pays, en ciblant les sanctions pour ne pas atteindre la population de la Biélorussie mais sanctionner le régime et toutes les entreprises qui le soutiennent. Voilà, au total nous avons abordé beaucoup d'autres sujets et je me réjouis de voir que c'est dans un esprit d'harmonie et d'unité.
Q - (à propos des candidats à la direction générale du FMI)
R - Nous n'en avons pas parlé mais peut-être y avons-nous pensé. Je crois que notre position là-dessus sera convergente. Nous pensons que l'Europe a vocation à continuer à assurer la direction générale du Fonds monétaire international, et nous avons des candidats de qualité pour occuper ce poste. Je pense qu'il serait très heureux que nous puissions nous mettre d'accord sur une proposition qui pourrait être ensuite agréée au Fonds monétaire international.
Q - (à propos de la Biélorussie et des positions des pays du Triangle de Weimar concernant la Libye.)
R - Je partage tout à fait le sentiment de mon collègue allemand. Cette question des sanctions vis-à-vis de la Biélorussie sera examinée lundi à Bruxelles à l'occasion du Conseil Affaires étrangères.
Sur la Libye, comme j'avais eu l'occasion de le dire lors ma rencontre à Berlin avec Guido Westerwelle, nous poursuivons en Europe le même but, tous. Ce but, c'est d'obtenir le départ de Kadhafi parce qu'un régime qui utilise la violence, qui réprime dans le sang des manifestations populaires, perd sa légitimité. Et là dessus nous sommes d'accord. Nous avons eu un désaccord sur les moyens à utiliser, je n'y reviens pas.
Aujourd'hui, où en sommes-nous ? Nous sommes en train d'intensifier la pression militaire pour déstabiliser le régime de Kadhafi, vous voyez l'opération actuellement en cours. Nous souhaitons renforcer aussi le Conseil national de transition et je me réjouis de voir que de plus en plus de pays reconnaissent aujourd'hui ce Conseil national de transition. Et enfin, nous recherchons les voies d'une solution politique pour mettre autour de la table toutes les parties prenantes, pour reconstruire la Libye de demain. Et je suis sûr que dans cet effort de recherche d'une solution politique, nous nous retrouverons, Allemagne, Pologne et France, pour agir dans le même sens.
Je voudrais ajouter un mot sur cette question du Proche-Orient. Il est important que l'Union européenne joue son rôle dans ce domaine parce que nos amis américains ne parviendront pas tout seuls à trouver une solution. Et nous devons donc nous engager. J'espère que nous pourrons le faire de manière très claire. En quel sens ?
D'abord, en réaffirmant que le statu quo n'est pas tenable, ni pour Israël ni pour les Palestiniens. Compte tenu de tous les changements qui viennent de se produire dans la zone, en Égypte, ceux qui sont en train de se produire en Syrie, je n'allonge pas la liste, il faut donc se remettre autour de la table de négociations.
Le deuxième message, c'est que cette négociation doit intégrer un certain nombre de paramètres de discussion, ceux du Quartet, notamment le retour aux frontières de 1967 avec des échanges mutuellement agréés de territoires, et de ce point de vue là, la déclaration du président Obama est extrêmement importante.
Et puis, troisième élément, me semble-t-il, c'est un point de vue peut-être plus français que j'exprime, je crois qu'il faut être attentif à la réconciliation inter-palestinienne pour voir de quoi elle peut être porteuse et si, en particulier, l'ensemble des responsables palestiniens accepte les conditions du Quartet. Je pense en particulier à la reconnaissance de l'État d'Israël dans des frontières sûres et garanties. Il y a là peut-être une voie à explorer pour essayer de relancer la discussion.
Q - (à propos de la direction du FMI)
R - Je voudrais juste ajouter un mot. Il est légitime que ce poste revienne à l'Europe : c'est le principal actionnaire du Fonds monétaire international. S'il y a plusieurs candidats européens, le directeur général du Fonds monétaire ne sera pas européen.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 mai 2011