Déclaration de M. Maurice Leroy, ministre de la ville, sur la rénovation urbaine, notamment dans les quartiers en difficulté et le développement du logement social, Paris le 1er juin 2011.

Prononcé le 1er juin 2011

Intervenant(s) : 

Circonstance : Présentation du bilan et des perspectives du programme national de renouvellement urbain à Paris le 1er juin 2011

Texte intégral


Permettez-moi tout d’abord de saluer l’initiative du Conseil Economique, Social et Environnemental pour le lancement d’une réflexion sur un axe majeur de la politique de la ville qu’est la rénovation urbaine.
Je remercie ici Madame Marie-Noëlle Lienemann qui a été le rapporteur de ces travaux.
Mesdames et Messieurs les conseillers, c’est pour moi un honneur que d’intervenir dans ce lieu qui incarne la République.
J’y vois également un signe puisque vous abritiez jadis le musée des travaux publics, construit par Auguste Perret, celui que l’histoire a appelé le « Poète du béton ».
Votre Assemblée est donc tout à fait appropriée pour évoquer la pierre angulaire de la politique de la ville qui est également au coeur de la cohésion sociale.
Mesdames et Messieurs, vous le savez, l’Agence Nationale pour la rénovation Urbaine a fait la démonstration qu’elle est un instrument efficace au service de la transformation de nos quartiers populaires.
Le grand chantier national lancé en 2004 par Jean-Louis Borloo, qui a eu l’occasion de s’exprimer devant votre assemblée, continue et entraîne une dynamisation économique des territoires et des créations d’emplois dans les quartiers.
Cette ambition, quelle est-elle ? C’est d’envisager la rénovation urbaine dans toute sa complexité et, donc, aussi dans toutes ses dimensions : mixité sociale, développement durable, insertion sociale et ancrage dans les préoccupations quotidiennes des habitants.
Il y a, dans ces opérations, une dimension humaine qui fait, trop souvent, défaut à l’urbanisme traditionnel puisqu’il s’agit, non seulement de changer la ville par des réhabilitations de logements ou des réaménagements de quartier, mais aussi de changer la vie.
La rénovation urbaine ce sont près de 400 conventions, 485 quartiers et plus de 3 Millions d’habitants ! C’est 12 Mds€ investis et 43 Mds€ de travaux générés !
C’est une réelle dynamique qui a été enclenchée comme en témoigne l’avancement physique aujourd’hui visible.
A la fin de l’année 2010, c’est déjà 85 000 logements qui ont été détruits, 75 000 reconstitués et 220 000 logements réhabilités !
Dans toutes mes visites de terrain, les habitants des quartiers en difficulté me disent leur satisfaction d’occuper de nouveaux logements, leur joie de vivre dans un environnement rénové, embelli et réparé.
Car vous le savez tous, la qualité du cadre de vie constitue la condition essentielle et indispensable pour redonner une dignité et une fierté à chacun des habitants des quartiers.
Les habitants des quartiers populaires me disent leur soulagement de voir revenir des écoles, des gymnases, des médiathèques ou encore des commerces !
Les habitants me disent leur satisfaction d’avoir pu bénéficier des clauses d’insertion qui sont un moteur pour l’insertion professionnelle, surtout pour ces quartiers populaires fortement touchés par la crise et le chômage. Parce qu’on ne peut pas intervenir dans les quartiers sans contribuer à l’insertion professionnelle et à la formation des habitants des quartiers, qui sont plus que jamais notre première priorité.
C’est plus de 8 millions d’heures d’insertion effectuées !
Le succès de la rénovation urbaine repose également sur la solidité de tous les partenariats et sur une méthodologie aujourd’hui reconnue.
Une méthodologie qui s’appuie sur la mise en synergie de tous les acteurs.
Le succès de l’ANRU, guichet unique, c’est aussi une contractualisation nationale et ambitieuse qui donne de la visibilité sur des engagements pluriannuels.
Je dois également rappeler le travail formidable accompli par les membres du comité national d’engagement de l’ANRU, Etat, Action Logement, Union Sociale pour l’Habitat, Caisse des Dépôts ou encore la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social qui ont étudié avec rigueur et détermination chacun des projets mis en oeuvre dans 485 quartiers.
Je pense aussi à l’investissement considérable des équipes des villes et des bailleurs sociaux sur le terrain. Sous le pilotage des maires aidés des préfets et des services déconcentrés de l’Etat, les projets se sont concrétisés.
C’est grâce à ce travail collectif que l’on a pu renforcer le lien social.
Vous en conviendrez, l’effet levier économique et social de la rénovation urbaine est donc incontestable.
Elle entraîne dans son sillage une redynamisation économique des quartiers en revalorisant le cadre de vie et la qualité des équipements.
Le dernier rapport de l’ONZUS a bien montré que le taux d’installation de nouvelles entreprises était nettement supérieur dans les Zones Franches Urbaines qui ont été réhabilitées.
La rénovation urbaine, c’est aussi la requalification commerciale, à travers l’action de l'Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA).
Alors bien sur, tout n’est pas parfait ! Il reste encore plusieurs points à améliorer, bien que la situation ne soit pas la même partout. Des limites existent mais c’est un peu le prix à payer du succès de la rénovation urbaine.
Le PNRU étant déjà un pari à l’origine aujourd’hui en passe d’être réussi, c’est pour cela que l’on en attend encore davantage !
La première question est le développement de la mixité sociale qui vous le savez tous, ne se décrète pas mais se construit, ensemble.
Vous savez à quel point il est difficile d’attirer les investisseurs et des populations nouvelles quand le quartier a longtemps été stigmatisé.
Et il faut du temps avant que celui-ci ne change d’image car l’insertion du quartier dans la ville, comme l’insertion dans la société, c’est un long processus.
La question des copropriétés dégradées reste aussi un point sensible dans certains quartiers.
L’ANRU n’était pas nécessairement outillée pour venir à bout de ces difficultés, le point d’achoppement principal étant le droit de propriété.
Je vous rappelle également que nous devons persévérer dans la mise en oeuvre de la loi SRU, avec Benoist Apparu, pour mieux répartir le logement social.
Comme je le dis souvent, pour lutter contre les ghettos de pauvres, il faut lutter contre les ghettos de riches !
Les habitants des quartiers, qui sont les premiers concernés par les opérations de rénovation urbaine doivent aussi être davantage associés, bien en amont.
Pour satisfaire cette ambition, il faut une méthode. Cette méthode, c’est celle du dialogue permanent. Ce choix répond à des raisons à la fois historique et opérationnelle.
Historique, car la rénovation urbaine est, depuis l’origine, tout sauf une opération de planification urbaine imposée d’en haut, comme l’illustrent le diagnostic partagé et le recours au mode contractuel et à la négociation sur la base d’objectifs.
Les liens avec le désenclavement ou le volet scolaire doivent être davantage recherchés car la politique de la ville, c’est la conjugaison de l’humain et de l’urbain. Cet effort urbain n’a évidemment de sens que s’il s’inscrit dans une stratégie plus globale.
Comme chacun sait, la rénovation ce n’est pas seulement les murs, c’est l’emploi, c’est l’éducation, c’est la sécurité, ce sont les infrastructures de transport !
Autant de priorités qui ont été arrêtées par le Conseil interministériel des villes du 18 février 2011 présidé par le Premier ministre et qui font l’objet d’un plan d’action sur le terrain.
Au fond, c’est toute une chaîne de développement, de socialisation, de désenclavement que nous devons progressivement retisser.
Mesdames et messieurs, la rénovation urbaine est un enjeu central pour le projet républicain et la cohésion sociale.
Elle doit également être conçue pour une gestion durable des quartiers en adéquation avec les conclusions du Grenelle de l’environnement sur le bâti, qui ont été énoncées, je vous le rappelle, après le lancement du PNRU.
Nous devrons intégrer de nouvelles préoccupations comme la Ville durable, la Ville de l’après-Copenhague et le Grenelle de l’Environnement.
Mesdames et messieurs, je sais l’attachement de votre institution à ce pilier de la politique de la ville qu’est la rénovation urbaine. J’entends vos questionnements et j’y suis particulièrement attentif.
C’est aussi la préoccupation du gouvernement qui mettra tout en oeuvre pour assurer les engagements pris au titre du programme national. C’est d’ailleurs dans cette optique que la loi de finances pour 2011 a consolidé les ressources financières de l’ANRU.
Dans le même esprit, Benoist Apparu, Secrétaire d’Etat au logement, a lancé la concertation avec Action logement pour conclure la nouvelle convention triennale pour 2012-2014. Nous serons vigilants quant à la prise en compte des besoins de la rénovation urbaine.
Les premiers projets ANRU s’achèvent. Il faut donc prévoir dès à présent la question des sorties de conventions pour garantir la pérennité des investissements réalisés. Pour cela, le Conseil Interministériel des villes du 18 février a décidé l’expérimentation sur une dizaine de sites parvenus en fin de projets.
Cette expérimentation nous conduira à définir une méthode pour maintenir un fonctionnement urbain et social de bon niveau, conforter l’attractivité nouvellement retrouvée des quartiers et renforcer l’articulation entre la rénovation urbaine et les autres dimensions de la politique de la ville.
Mais le gouvernement a souhaité aller plus loin encore. Vous savez à quel point il est nécessaire de prolonger la dynamique engagée dans les quartiers les plus prioritaires pour assurer durablement le succès de la rénovation urbaine et de terminer le travail.
François FILLON m’a confié lors du CIV du 18 février 2011 une réflexion pour définir les besoins et modalités de mise en oeuvre d’une deuxième phase du PNRU. Le premier ministre m’a mandaté pour que l’on réfléchisse, avec tous les acteurs, à la construction d’une nouvelle étape pour la rénovation urbaine, ainsi qu’au rôle et aux champs de compétence à venir de l’ANRU.
D’aucuns parlent du PNRU 2 comme d’une évidence, parce que tous les quartiers n’ont pu être traités avec le PNRU 1 et parce que dans certains d’entre eux, nous devons intensifier la rénovation pour aller jusqu’au bout.
Pour permettre un véritable retour au droit commun, sur tous les territoires de notre République, sans oublier bien sûr certains problèmes spécifiques à l’Outre-mer comme l’habitat insalubre, et où le savoir-faire de l’ANRU a toute sa place.
Je suis personnellement convaincu de l’intérêt d’un PNRU 2 qui doit aller plus loin dans les ambitions comme dans les résultats. Il devrait être plus ambitieux pour permettre le développement des activités économiques en coeur de quartiers, pour envisager la construction de logements haut de gamme et renforcer la mixité sociale.
Mesdames et Messieurs, je suis convaincu que le PNRU 2 doit être l’affaire de tous. Le travailleur social doit y avoir toute sa place, tout autant que l’architecte et l’ingénieur, car je n’ai qu’un seul objectif : assurer la cohésion sociale et urbaine de nos villes.
J’y veillerai dans les propositions que je ferai cet automne au Premier ministre.
Le CIV a aussi souhaité une articulation avec le projet du Grand Paris dont j’ai la charge. Le projet présidentiel du Grand Paris est une formidable opportunité pour les quartiers en difficulté d’Ile-de-France.
Nous allons pouvoir désenclaver de nombreux territoires, développer l’économie et construire de nouveaux logements pour que tous ces quartiers s’arriment à la dynamique métropolitaine !
Mesdames et Messieurs, vous l’aurez compris, il nous revient à tous et à vous, en particulier, acteurs déterminés et imaginatifs de la rénovation urbaine, d’impulser, d’oser, d’opérer, afin que l’égalité des chances reste une réalité dans les faits.
Je serais heureux de pouvoir m’appuyer sur vos travaux que je sais riches et sérieux pour avancer avec vous.
Je vous remercie.
Source http://www.ville.gouv.fr, le 3 juin 2011