Déclaration de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur la gestion durable et partenariale des zones humides d'importance internationale, en Camargue le 15 novembre 2011.

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Circonstance : 3ème séminaire des animateurs de sites Ramsar au Mas de Peint en Camargue le 15 novembre 2011

Texte intégral

Monsieur le Secrétaire général de la Convention de Ramsar,
Messieurs les Vice-Présidents des Conseil Généraux du Gard et des Bouches-du-Rhône,
Madame la représentante du président du Conseil Régional,
Monsieur le Maire des Saintes-Maries-de-la-mer,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le fondateur de La Tour du Valat,
Monsieur le Directeur de la LPO,
Mesdames et messieurs les acteurs de la préservation des zones humides,
Chers amis,
40 ans déjà !
Depuis 40 ans, la Convention de Ramsar oeuvre pour la préservation des zones humides et rappelle sans cesse la nécessaire préservation de ces milieux remarquables et menacés.
Et à l'origine... un homme, un homme touché par la beauté et la fragilité de ces milieux et qui y a consacré sa vie... Merci Monsieur HOFFMAN.
En 1954, vous avez fondé la station biologique de la Tour du Valat qui est depuis devenue une référence au niveau national, européen et méditerranéen pour la préservation des zones humides et des oiseaux d'eau, mais j'y reviendrai...
Le premier appel à rédiger une convention internationale sur les zones humides date de 1962 et fut en effet lancé à l'occasion d'une conférence née de l'inquiétude suscitée par l'assèchement rapide de vastes étendues de marécages et de zones humides en Europe. Le nombre des espèces des oiseaux d'eau diminuait dangereusement.
Cette Conférence avait été organisée par vous-même, avec la participation de l'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources, du Bureau international de recherches sur les oiseaux d'eau et les zones humides, devenu Wetlands International, et du Conseil international pour la protection des oiseaux, devenu BirdLife International, non loin d'ici aux Saintes-Maries-de-la-Mer du 12 au 16 novembre 1962.
C'est donc ici, en Camargue, il y a exactement 49 ans jour pour jour que fut lancé grâce à vous, Monsieur HOFFMAN, le premier appel à rédiger une convention internationale sur les zones humides, la première et toujours la seule à ce jour, entièrement dédiée à un type d'écosystème. Cette initiative a sensibilisé la planète à la destruction généralisée des terres humides et à ses conséquences sur les oiseaux aquatiques et a permis l'adoption de la convention de Ramsar en 1971.
Monsieur le Secrétaire général de la Convention de Ramsar, c'est un honneur pour moi de vous accueillir en Camargue, dans le premier Ramsar que la France ait désigné en appui à la ratification de la convention, en 1986.
Et ce n'est que justice. Je ne veux pas faire de jaloux, mais au plan international, quand on évoque les zones humides en France, c'est la Camargue qui vient à l'esprit. La Camargue, c'est bien plus que les « moustiques antipathiques » de la chanson de Charles Trenet. La Camargue en quelques images c'est une mosaïque d'habitats naturels salés, saumâtres et d'eau douce, son incroyable population de flamants roses mais aussi ses 350 espèces d'oiseaux, ses chevaux et ses taureaux, sa culture particulière, ses paysages, ses couleurs, ...
Je me réjouis à ce sujet de la publication ce jour du décret portant création de la réserve naturelle nationale des marais de Vigueirat, qui vient renforcer le réseau de protection des milieux et espèces de l'écosystème Crau-Camargue.
A proximité immédiate du site Ramsar, cette nouvelle réserve constitue une des zones humides les plus remarquables du littoral méditerranéen français, grâce à sa diversité biologique remarquable et exceptionnelle.
Je tiens à saluer ici le travail et l'adhésion des acteurs locaux qui ont permis de mener à bien ce projet, conciliant protection du patrimoine naturel et poursuite des activités économiques. Je salue également l'excellence de la gestion de ce site par le Conservatoire du Littoral et l'association des Amis du Marais du Vigueirat.
Cette reconnaissance supplémentaire illustre l'extraordinaire richesse patrimoniale dont dispose la région PACA. Cette richesse vous confère une responsabilité particulière en matière de protection de la biodiversité et de contribution aux objectifs de la stratégie nationale de création des aires protégées.
La reconnaissance au titre de réserve naturelle nationale des marais du Vigueirat vient après celle de la Casse de la Belle Henriette en Vendée en août et le doublement de la réserve de Chérine dans l'Indre en septembre, célébrant ainsi pour les 40 ans de Ramsar un bel automne des zones humides.
Pour ajouter à cette célébration, j'ai le plaisir de vous annoncer également la désignation de 6 nouveaux sites Ramsar qui s'ajouteront au 36 déjà reconnus, dont la Camargue :
- la tourbière de Moltifao en Corse,
- la réserve naturelle nationale de Saint-Martin à Saint-Martin,
- la vasière de Badamiers à Mayotte,
- le delta de la Leyre et le marais d'Orx en Aquitaine,
- et l'immense réserve naturelle nationale d'Europa dans les Terres antarctiques et australes françaises.
Ces six sites représentent une grande diversité de zones humides d'importance internationale. Ils bénéficient de mesures de protection et de gestion durable et cette demande d'inscription résulte de la volonté des acteurs locaux de bénéficier de ce label international.
Dans l'esprit de la convention Ramsar, la France s'est toujours particulièrement investie dans la préservation et la gestion durable des zones humides. Entre 1995 et 2001 un premier plan national d'action a permis des avancées notables, en termes de protection, de connaissance, de sensibilisation,...
En 2008, au retour de la 10ème conférence Ramsar en Corée, il est apparu nécessaire de relancer une dynamique et de redonner de la visibilité à ces milieux encore méconnus.
Pendant quelque 10 mois, et dans le sillage du Grenelle de l'Environnement, le groupe national pour les zones humides réunissant l'ensemble des parties prenantes a établi un bilan partagé des actions réalisées dans le cadre du 1er plan d'action et jusqu'en 2008 et a proposé un nouveau plan national d'action.
Celui-ci vous a été présenté ce matin, je ne vais pas y revenir mais souhaite mettre en lumière une action : elle concerne la mise en place d'un dispositif de communication, sensibilisation et de formation sur les zones humides, comme cela est recommandé par la Convention de Ramsar.
Je souhaite que ce dispositif renforce l'organisation des efforts des services de l'État, des établissements publics et des différentes parties prenantes, qu'il permette un effet d'entraînement auprès de l'ensemble de la société en faveur de la protection des zones humides, et enfin qu'il crée des passerelles entre le monde de la science, celui de la gestion, de l'information, de l'éducation à l'environnement et de la formation sur les zones humides.
Ce dispositif réaffirme enfin, au sein du paysage institutionnel des zones humides, la place privilégiée des pôles-relais, qui avaient été crées en 2001.
Dans le cadre de ce plan, depuis 3 ans, le ministère appuie la rencontre annuelle des gestionnaires des sites Ramsar. Ces séminaires ont une belle ambition que je salue et encourage.
Il s'agit de développer le réseau des sites et de promouvoir la mutualisation, l'échange et la valorisation des meilleures pratiques de gestion au bénéfice de l'ensemble des gestionnaires de zones humides.
Les différents responsables de la gestion des sites Ramsar et de nombreux élus sensibles à leur patrimoine naturel ont souhaité s'organiser en association et je ne peux que m'en réjouir.
Cette association va permettre de développer la visibilité de la convention de Ramsar en France et constituer une force de proposition politique pour le développement de la gestion durable des zones humides et des activités humaines qui en bénéficient.
J'attache une importance particulière à ce que cette nouvelle association s'intègre pleinement dans le dispositif de communication, sensibilisation et de formation que je viens d'évoquer et qu'elle développe des synergies avec les acteurs existants.
Le moment et le lieu sont particulièrement adaptés pour évoquer un dernier sujet, celui du projet de parc national de zone humide. Ce projet répond à l'un des engagements du Grenelle de l'Environnement. Les neuf parcs nationaux actuels protègent déjà des écosystèmes clés : moyenne et haute montagne, forêts tropicales, milieux insulaires et côtiers, mais pas encore les zones humides.
La loi du 14 avril 2006 votée à l'unanimité, a complètement rénové les parcs nationaux notamment sur 3 points :
- Au sein du conseil d'administration les acteurs et les élus locaux ont désormais une représentation majoritaire.
- La charte, outil de gouvernance locale, fonde un « projet de territoire » partenarial entre l'État et les collectivités territoriales. Elle est élaborée avec tous les acteurs et adoptée après consultation publique.
- Les parcs nationaux comprennent désormais un « coeur » sur lequel s'applique une réglementation stricte, et « une aire d'adhésion » constituée des communes souhaitant librement contribuer à l'objectif de protection du coeur.
Comme vous pouvez le constater, on ne peut plus présenter un parc national comme la mise sous cloche d'un territoire ou comme la confiscation de sa gestion par l'État. Il s'agit d'une démarche partenariale entre l'État et les collectivités.
Je lance ainsi aujourd'hui un appel à manifestation d'intérêt à destination des collectivités territoriales pour la création d'un parc national de zone humide.
Il s'agit d'une démarche qui en surprendra plus d'un, mais qui se veut complètement dans l'esprit de la loi de 2006. L'État confirme son souhait de créer un parc national et indique la cinquantaine de zones humides suffisamment préservées pour justifier d'un tel label.
Mais c'est aux acteurs de terrains -élus, propriétaires fonciers, exploitants agricoles et forestiers, associations- de se mobiliser pour faire émerger ce projet de territoire. L'État sera présent pour expliquer, accompagner, aplanir les difficultés, donner du temps puisque les porteurs de projet auront un an pour se manifester... mais je ne souhaite pas que ce projet soit ressenti comme « imposé depuis Paris ».
En reversant la démarche hiérarchique verticale jusqu'ici utilisée pour créer les 9 -et bientôt 10 avec les Calanques- premiers parcs nationaux, je souhaite redonner toute sa chance à ce projet de parc national de zones humides.
Je compte sur vous tous pour porter ce message sur tous les territoires que vous représentez.
Pour finir, je vous donne rendez-vous à Marseille en mars prochain à l'occasion du 6ème Forum mondial de l'eau. Votre contribution y est attendue, car il ne faudra pas uniquement y discuter d'eau potable et d'assainissement, même s'il s'agit d'enjeux vitaux pour plusieurs milliards d'humains.
Je souhaite que vous puissiez y amener vos solutions et vos engagements, notamment en matière de restauration des écosystèmes ou de valorisation et de paiements des services écosystémiques liés à l'eau.
Je vous remercie.


Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 17 novembre 2011