Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, sur le rôle du Brésil sur la scène internationale, les relations entre la zone euro et le Brésil et la mise en place d'une gouvernance économique de la zone euro, à Sao Paulo le 15 décembre 2011.

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Circonstance : Voyage officiel au Brésil du 14 au 17 décembre 2011 - Discours devant la Fédération des industries de l'Etat de Sao Paulo (FIESP), le 15 décembre 2011

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais vous dire que c’est un très grand plaisir pour moi et pour les membres de mon Gouvernement qui m’accompagnent ainsi que pour la nombreuse délégation de parlementaires français de commencer notre voyage au Brésil, ici à Sao Paulo.
Je suis accompagné du ministre de l’Industrie, Eric BESSON ; chacun sait les relations très anciennes, très fortes, très puissantes et pleines de potentialité de développement qui existent entre les industries de nos deux pays. D’Henri de RAINCOURT le ministre de la Coopération et de David DOUILLET, notre formidable champion olympique qui est aussi le ministre des Sports et qui est venu notamment pour voir avec les autorités brésiliennes comment la France peut apporter son savoir-faire pour la préparation de tous les grands évènements sportifs que le Brésil va avoir à accueillir dans les prochains mois et dans les prochaines années.
Enfin, je suis accompagné de neuf parlementaires c’est-à-dire presque la totalité de l’Assemblée nationale et du Sénat français, ce qui est sans doute une des délégations parlementaires les plus nombreuses qui m’ait accompagné durant mes déplacements à l’étranger, ce qui montre à quel point le Brésil est une destination qui attire en France et qui attire les responsables politiques et économiques.
Je suis heureux de pouvoir commencer ce séjour au Brésil en rendant visite à votre fédération et je voudrais remercier Monsieur Paulo SKAF d’avoir permis cette rencontre. Je veux d’ailleurs le féliciter pour sa récente réélection à la présidence de la Fédération des Industries de l’Etat de Sao Paulo.
A travers vous, j’ai souhaité rencontrer celles et ceux qui contribuent à l’extraordinaire développement du Brésil.
Ma conviction, c’est que la France et le Brésil ont un rôle éminent à jouer pour le progrès, pour l’équilibre et pour la paix dans le monde.
Nous sommes fiers de la qualité des relations entre les secteurs privés français et brésilien.
Et à un moment où l’Europe, comme vous l’avez souligné monsieur Le Président, traverse une crise de confiance, je crois que nous devons, précisément et maintenant, savoir saisir l’immense potentiel qu’offre le partenariat stratégique entre la France et le Brésil.
Les liens et les valeurs que nous partageons depuis longtemps nous autorisent à viser haut dans les relations qui sont les nôtres.
D’abord, nous partageons depuis longtemps la même vision d’un monde multipolaire. La France comme le Brésil se sont toujours opposés à l’idée que le monde pouvait être dominé par une ou deux super puissances. Le monde est un monde multipolaire où chaque Etat doit pouvoir faire entendre sa voix, où chaque continent doit pouvoir s’organiser.
Affirmer le multilatéralisme, comme nous le faisons, c’est croire en l'esprit de responsabilité partagée.
Et c’est aussi chercher à mieux associer les peuples au premier rang desquels les pays émergents, à la recherche de solutions communes aux problèmes que rencontre notre planète.
La France et le Brésil contribuent à la stabilité internationale.
Parmi les grands pays du sud, le Brésil exerce des responsabilités de plus en plus grandes dans les affaires du monde.
Et c’est pour nous une grande satisfaction.
Je veux notamment mentionner Haïti ou le Liban, deux pays dans lesquels nous sommes particulièrement sensibles à l’action de la diplomatie brésilienne au service de pays qui connaissent de grandes difficultés et je veux remercier le Brésil pour l’engagement qui est le sien au profit du maintien de la paix.
Pour toutes ces raisons, la France, depuis longtemps et singulièrement depuis le début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, plaide sans relâche pour que le Brésil trouve sa juste place dans l’architecture internationale du 21ème siècle.
Aucun des grands enjeux mondiaux ne peut se régler sans le Brésil, et je vais même ajouter aucun des grands enjeux mondiaux ne peut se régler contre le Brésil.
Ensemble, nous pensons que la France et le Brésil parce qu’ils partagent les mêmes valeurs, la même approche historique peuvent faire bouger les lignes.
Sur la base du partenariat stratégique que nous avons conclu entre nos deux pays, nous avons la capacité de contribuer à préserver la paix, nous avons la capacité d'accorder une plus grande place à la dimension sociale de la mondialisation, de promouvoir les financements innovants en faveur du développement et de renforcer la cohérence de l'action des institutions internationales.
C’est la raison pour laquelle, je veux le dire très solennellement devant vous, nous avons besoin du leadership du Brésil et nous avons besoin du leadership de sa Présidente Dilma ROUSSEFF de ses convictions et de l’exemple que représente son parcours personnel exceptionnel.
Cela vaut pour le G20, cela vaut pour le Fonds monétaire international, mais aussi, vous le savez, pour le Conseil de Sécurité des Nations Unies où la France plaide pour un siège permanent pour votre pays, comme elle le fait d’ailleurs pour l’Allemagne, pour le Japon, pour l’Inde, sans oublier la juste place qui doit être donnée au Conseil de Sécurité des Nations Unies au continent africain.
Alors évidemment, nos intérêts ne se confondent pas toujours et pas seulement sur les stades de football.
Les discussions au Conseil de Sécurité sont parfois difficiles.
Et après tout, c’est normal compte tenu des enjeux et compte tenu des débats qui y ont cours.
Je connais les réticences qui ont été émises par les autorités brésiliennes lors de l’intervention militaire que nous avons conduite en Libye, intervention militaire qui était fondée sur la protection des populations et qui était fondée sur la défense d’un processus démocratique naissant.
Je connais l’attachement du Brésil au principe de non-ingérence et au regard de ce principe, je comprends les réticences qui étaient celles de votre pays, mais en même temps, je veux que vous compreniez les nôtres, que vous compreniez les motivations qui ont été celles de la France et de tous les pays qui l’ont suivie dans la coalition qui a permis de mettre un terme à un régime totalitaire qui s’était traduit par des violences inqualifiables contre les populations civiles. Nous nous sommes attachés à mettre un terme au massacre de populations civiles et nous sommes fiers d’avoir pu participer à la naissance, dans ce pays, de ce que nous espérons être le début d’un vrai processus démocratique, qui à l’image de ce qui est en train de se passer dans la plupart des pays, en tout cas dans une grande partie des pays du monde arabe, correspond à un mouvement historique. Un mouvement historique que vous avez connu, un mouvement historique que nous avons connu précédemment et qui ne peut se terminer, quels que soient les soubresauts passagers, que par l’établissement d’une réelle démocratie respectueuse des droits de l’homme.
A la demande de la ligue arabe, ce qui était une grande nouveauté, avec l’autorisation du Conseil de sécurité des Nations-Unies, la France est intervenue avec ses partenaires occidentaux et avec ses partenaires arabes pour donner vie au concept de «responsabilité de protéger» que les Nations Unies ont adopté en 2005.
Nous nous concentrons, maintenant, sur la reconstruction de la Libye ; une reconstruction politique, après 40 ans de dictature, mais aussi une reconstruction économique et sociale.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je connais toute l’attention que le Brésil, en tant que grand pays émergent, porte à l’Europe, et je sais, vous venez de vous en faire l’écho, les inquiétudes qui se font jour sur l’avenir du projet européen et sur la zone euro. Je voudrais devant vous tenir un langage de vérité.
D’abord je veux vous dire que jamais nous ne laisserons se défaire la zone euro. Pour nous c’est un acquis historique inestimable et je veux dire que personne ne peut parier sur l’impuissance des pays européens ou sur le déclin de la zone euro et des pays de l’Union européenne.
L’idée même d’avoir réalisé, d’abord, une Union Douanière, puis une Union Economique, puis de nous être dotés d’une monnaie commune entre des pays dont vous savez que l’histoire les a toujours opposés et qui ont été à l’origine des plus grandes guerres et des plus grandes tragédies de l’histoire mondiale, c’est déjà, en soi, extraordinaire.
Et nous devons ce résultat à des hommes exceptionnels qui ont eu la ténacité, qui ont eu le courage de surmonter les habitudes et les résistances au changement. Croyez-moi, c’était plus dur de bâtir une union franco-allemande au lendemain de la Seconde guerre mondiale que de le faire aujourd’hui pour sauver l’Union européenne.
Vous qui, au Brésil, poursuivez aussi avec d’autres pays d’Amérique Latine un projet de rapprochement commercial et économique, vous savez bien toute la détermination que l’on doit déployer pour faire aboutir une aventure de ce type.
Aujourd’hui, le succès de l’euro zone dérange beaucoup d’intérêts rivaux, et je crois évident qu’il y a une part d’idéologie, une part d’opportunisme dans les attaques qui sont menées actuellement contre la zone euro.
Le Brésil, qui a été affecté par la spéculation à la hausse sur le réal en 2010, est d’ailleurs bien placé pour savoir les excès des marchés financiers, qui ont parfois un rôle utile d’anticipation, mais qui ont aussi souvent tendance à aggraver voire même à susciter les problèmes qu’ils prévoient.
Derrière ce nuage menaçant de la crise, il faut discerner l’essentiel.
L’essentiel, c’est que l’Union Européenne c’est le plus grand marché développé au monde, avec 500 millions de consommateurs, soit 100 millions de plus qu’aux Etats-Unis !
L’abolition des obstacles aux échanges, puis la création de la monnaie unique dans 17 pays européens, ont été des facteurs de croissance pour l’ensemble de l’Union européenne. Ils ont encouragé la circulation des marchandises, ils ont mis fin au risque de change, ce qui, vous le savez, est primordial pour le développement de l’exportation, pour l’investissement et pour le tourisme.
Tout en poursuivant l'intégration européenne, nous avons créé des grands groupes industriels européens en unissant nos talents. Je pense, évidement, au consortium Airbus du groupe EADS, qui concurrence aujourd'hui Boeing avec des parts de marché mondiales qui sont équivalentes. Qui aurait pu imaginer, il y a 30 ans, que l’Europe serait capable de se doter d’une industrie aéronautique qui à certaines périodes récentes, s’est trouvée même devant Boeing, en terme de parts de marché.
D’ailleurs, plusieurs de ces grands groupes industriels européens qui sont des succès mondiaux sont présents au Brésil, je pense notamment à Eurocopter ou encore à Arianespace.
Economiquement, le Brésil a bénéficié de l’existence de l’euro pour développer ses échanges commerciaux avec l'Europe.
Et donc le Brésil a le plus grand intérêt à la stabilité de la zone euro, à la stabilité de l’Union européenne.
Grâce à l’euro, les entreprises brésiliennes peuvent investir dans un pays donné de la zone, vendre ou acheter sans aucun risque de change dans les 17 pays qui ont adopté l'euro.
Aujourd’hui, le Brésil exporte davantage vers l’Union européenne qu’aux Etats-Unis et il est naturel que vous vous interrogiez sur les effets que pourraient avoir sur votre pays, ce qu’on appelle à tort la crise de l’euro.
Je dis à tort, parce que cette crise, bien plus qu’une crise de l’euro, c’est en réalité une crise de la dette souveraine, c’est une crise de la dette des Etats, qui dépasse donc très largement la question de la zone euro et s’agissant de la zone euro, c’est une crise de la gouvernance de la zone euro. Au fond, c’est presque une crise politique, plus qu’une crise économique et financière.
L’euro c’est une monnaie jeune, puisqu’elle a seulement douze ans et c’est une monnaie qui a connu des débuts extrêmement prometteurs. L’inflation en zone euro ces dernières années a été proche de 2 %, parfaitement conforme à l’objectif assigné à la Banque centrale européenne.
Et l’euro s’est développé comme une monnaie internationale : aujourd’hui, derrière le dollar, l’euro représente plus d’un quart des réserves de change mondiales, et c’est une part qui continue à croître.
Depuis sa création, l’euro s’est aussi clairement apprécié par rapport au dollar.
Evidemment, la crise de 2009, la crise déclenchée par la faillite de la banque Lehmann Brothers aux Etats-Unis, a fragilisé les finances publiques de beaucoup d’Etats, en diminuant d’abord substantiellement leurs recettes budgétaires, puisque nous avons connu dans plusieurs de nos pays une récession ; et dans certains pays, il faut ajouter à ces difficultés les garanties que les Etats ont dû donner au secteur bancaire, et qui pour certains pays européens ont contribué à aggraver la dette publique de ces Etats.
Mais je veux dire que ce sont des problèmes qui ne sont absolument pas spécifiques à la zone euro. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Japon ont connu des situations similaires, avec une dégradation très importante de la situation de leurs finances publiques.
Je veux rappeler qu’En 2010, le solde budgétaire agrégé de la zone euro était le plus favorable de toutes les économies avancées, avec un déficit de 6,3 % du PIB, contre 10,5 % aux Etats-Unis.
La dette publique, est dans la zone euro, même si elle est trop élevée, encore contenue à 85 % du PIB ; elle est de 200 % du PIB au Japon et de 100 % aux Etats-Unis.
Il faut enfin différencier les situations selon les pays européens.
Les trois Etats les plus touchés par les problèmes de dettes souveraines, la Grèce, le Portugal et l’Irlande ne représentent que 6 % du PIB de la zone euro.
La crise actuelle, comme je l’ai dit il y a un instant, ce n’est pas seulement une crise de la dette des Etats, c’est aussi une crise de la gouvernance de la zone euro. En voulant créer une Europe unie, et compte tenu des difficultés politiques, culturelles, historiques que nous rencontrions, nous avons voulu mettre les bouchées doubles, et peut-être, comme on dit en France, la charrue avant les bœufs. Donc, nous avons créé une monnaie unique, sans mettre en place à l’avance les institutions politiques et financières qui étaient nécessaires pour avoir de façon équilibrée, une union monétaire et une union économique.
Et donc, si on veut maintenant résoudre la crise de confiance qui pèse sur la zone euro, la seule solution c’est de restaurer la crédibilité de cette zone euro, et donc de lui donner les institutions politiques et financières qui permettront de piloter la monnaie européenne, comme elle est pilotée dans les autres grands pays.
D’où l’importance des mesures que nous avons prises au cours des derniers mois pour renforcer la surveillance des déséquilibres macro-économiques et budgétaires au sein de la zone euro et pour favoriser une meilleure convergence des politiques en matière de croissance, de compétitivité et d’emploi.
Lors du dernier Conseil européen, qui s’est tenu le 9 décembre et qui a été l’aboutissement d’un long processus de concertation entre les Etats de l’Union européenne, nous avons franchi une étape absolument décisive.
Pourquoi ?
Parce que l’Europe pour la première fois, à l’occasion de cette réunion, a eu le courage d’aller au cœur de son problème, qui est son fonctionnement politique !
Et au moment même où beaucoup disaient que l’Europe était dépassée, qu’elle était tétanisée, qu’elle était flageolante, eh bien la France et l’Allemagne ont su provoquer un sursaut.
Ce sursaut a donné lieu à un accord, de 26 pays européens sur 27 ; cet accord, qui devrait être ratifié par l’ensemble de ces Etats, à l’exception du Royaume-Uni, témoigne d’une volonté très forte d’aller vers plus d’intégration pour surmonter la crise.
Les objectifs de cet accord sont très clairs.
C’est d’abord plus de gouvernance.
Nous allons mettre en place un gouvernement économique de la zone euro dans le cadre d’un accord intergouvernemental, les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro se réuniront de façon extrêmement régulière pour fixer les objectifs de politique économique, et pour fixer les objectifs de convergence fiscale, de convergence sociale, sur l’ensemble du territoire de la zone euro.
Donc, nous allons avoir enfin ce qui manquait à la zone euro, un pilotage au plus haut niveau de façon continue, et un pilotage qui est assuré par les chefs d’Etat et de gouvernement, c’est-à-dire par ceux qui ont la légitimité démocratique, ce qui évitera tout débat dogmatique sur la question du transfert de souveraineté.
Ensuite, plus de gouvernance c’est plus de discipline budgétaire. Nous savons bien que l’une des difficultés que nous avons rencontrée, a été liée au fait que les objectifs de déficit n’ont pas été respectés à l’intérieur de la zone euro. Nous avons donc décidé d’adopter une règle commune d’équilibre des finances publiques. En cas d’excès, des sanctions automatiques seront appliquées dès qu’un pays dépassera le déficit de 3 % du PIB.
Et chaque Etat de la zone euro aura l’obligation d’introduire dans sa Constitution une règle d’or qui sera ensuite surveillée par les cours constitutionnelles de chacun de nos pays.
Donc, plus de discipline, mais aussi plus de solidarité entre les pays européens.
Tout au long de la crise, les investisseurs et les marchés ont émis des doutes sur la capacité de l’Europe à agir ensemble. C’était évidemment notre point de vulnérabilité, et il est arrivé parfois, compte tenu du processus politique qui est celui de l’Union européenne, que l’on donne des arguments à ceux qui pointaient du doigt cette absence de solidarité. Eh bien, nous avons, lors du dernier Conseil européen, renforcé de façon considérable les instruments de stabilisation de la zone euro. En fait, on a mis en place un véritable Fonds monétaire européen qui entrera en vigueur dès le mois de juillet 2012, et dont l’objectif sera de venir en aide aux pays en difficultés au sein de la zone Euro.
Enfin, nous avons pris une décision absolument stratégique : nous avons décidé de renoncer à l'implication des investisseurs privés dans la restructuration des dettes des Etats. C'est une décision absolument fondamentale, qui d'ailleurs passe presque inaperçue dans les commentaires qui sont faits sur la décision du Conseil européen, et c'est pourtant pour moi la plus importante. Je suis convaincu que ce qui a déclenché la phase la plus aigüe de la crise de confiance dans la zone euro, c'est la décision d'impliquer les investisseurs privés dans la restructuration de la dette grecque. Après tout, c'est normal quand on dit à des épargnants, quels que soient ces épargnants : vous avez mis votre argent dans de la dette d'Etat, dans la zone euro, dans une des zones les plus riches du monde, et vous ne serez pas remboursés de l'argent que vous avez prêté, c'est évidemment une décision qui a provoqué une crise de confiance extrêmement sérieuse. L'Allemagne a accepté de renoncer à cette implication du secteur privé dans la restructuration des dettes d'Etat à l'avenir. C'est un point absolument fondamental.
Vous le voyez, l'Europe combat de toutes ses forces les risques de contagion, et plus que cela l'Europe a décidé de hisser son niveau d'intégration politique, économique, et budgétaire.
Alors évidemment la crise n'est pas finie, et il est probable que nous aurons encore à affronter des secousses ; les marchés, les agences de notation ont leur logique. Elles sont surtout dans l’immédiat, dans l’instantané. Mais ce qui importe, ça n’est pas leur jugement d’un jour, c’est la trajectoire politiquement structurée et budgétairement rigoureuse que l’Europe, et la France, ont décidé d’adopter.
Je dois ajouter à cela, le fait que les fondamentaux économiques de l’Europe restent extrêmement solides et que le niveau d’endettement moyen est parfaitement soutenable.
Mon message, mesdames et messieurs est donc clair : le Brésil ne doit pas douter de l’Europe. Vous ne devez pas douter de notre détermination à assurer la pérennité de la zone euro et à prendre toutes les mesures nécessaires pour en conforter la stabilité et la solidité.
L’autre message que je voudrais vous délivrer est tout aussi clair : depuis 2007, crise ou pas crise, la France a mis l’accent sur sa compétitivité et sur sa productivité.
Nous avons, sous l'autorité du président Sarkozy engagé un ensemble de réformes sans précédent, et les Français, qui sont souvent réputés pour leur conservatisme, pour leur capacité à réagir à tous les changements, ont accompagné courageusement et lucidement ce mouvement.
Nous étions connus pour nos 35 heures de travail par semaine, ce qui ne fut pas la meilleure idée française des ces dernières années. Nous en sommes progressivement sortis, notamment en favorisant les heures supplémentaires.
Nous avions des universités qui avaient un passé prestigieux, mais qui étaient en train de se faire doubler par beaucoup d'universités dans le monde, en raison de leur statut d'Etat. Nous avons donné aux universités françaises l'autonomie pour qu’elles puissent développer des partenariats, notamment avec le monde économique.
Nous avons encouragé des synergies entre l’entreprise et la recherche scientifique, technologique et industrielle, à travers des pôles de compétitivité que nous avons créés sur l'ensemble de notre territoire.
Pour que nos entreprises puissent investir davantage dans la recherche, nous avons réformé la fiscalité, à tel point que la France est devenue l’un des pays les plus attractifs des pays de l'OCDE, en matière d'investissements de recherche et pour l'implantation des centres de recherche étrangers, grâce à une mesure fiscale extrêmement puissante, qu'on appelle le crédit impôt recherche.
Enfin, l’année dernière malgré les difficultés financières, malgré le fait que nous avons entrepris de réduire les dépenses publiques, nous avons simultanément lancé un grand programme national d’investissements de 35 milliards d'euros, dans les secteurs les plus avancés de notre pays : l’enseignement supérieur, la formation, la recherche, les réacteurs nucléaires de 4ème génération, les réseaux de transmission de données à très haut débit, la voiture électrique, pour ne prendre que quelques exemples.
Avec l’effet de levier des autres financements, c'est-à-dire des financements privés qui vont venir s'adjoindre à ces 35 milliards, c’est 60 milliards d’euros que la France investit en ce moment sur les secteurs d'avenir, pour son économie.
Bref, nous jouons d’un côté la carte de la compétitivité et de l’innovation, et de l’autre, nous nous assignons une discipline budgétaire, qui c'est vrai est une rupture par rapport aux facilités du passé. Si les pays européens notamment – et on pourrait dire la même chose des Etats-Unis - sont tellement endettés, en réalité c'est parce que nous avons pendant 30 ans regardé et commenté la montée des pays émergents, sans en tirer aucune conséquence dans notre propre organisation. Au fond nous sommes, tous les pays développés, dans la situation d'un ménage qui aurait vu ses ressources croître un peu moins vite, ou même peut-être un peu baisser, mais qui n'aurait absolument rien changé à son train de vie, et qui naturellement aurait financé ce train de vie par l'endettement.
Nous avons décidé de rompre avec cette politique. Nous avons pris des engagements extrêmement précis de réduction du déficit budgétaire, le déficit budgétaire sera réduit à 5,7 % du PIB en 2011, et ce résultat est d'ores et déjà atteint. Il sera réduit à 4,5 % en 2012, à 3 % en 2013, avec un objectif d'équilibre en 2016. Il faut quand même que vous sachiez que la France n'a jamais connu l'équilibre budgétaire depuis 1975. Depuis 1975, jamais la France n'a voté un seul budget en équilibre depuis 1975. Il y avait bien un moment où tout cela allait s'arrêter.
Entre 2010 et 2011, nous avons considérablement réduit le rythme de progression des dépenses publiques.
Nous avons lancé un programme de modernisation de l’Etat, nous avons réformé son organisation en fusionnant beaucoup d’administrations, nous avons supprimé 150 000 emplois dans la fonction publique d’Etat, cela représente 7 % des effectifs, nous avons rationnalisé ce qu’on appelle notre carte militaire, pour tenir compte de la nouvelle situation stratégique, notre carte judiciaire, notre offre de soins…
Nous avons, avec toutes ces mesures, économisé déjà plus de 15 milliards en 4 ans.
Nous avons lancé une réforme très difficile de notre système de retraites, pour passer l’âge de la retraite en France à 62 ans, avec 41 annuités et demie de cotisations et 67 ans pour une retraite à taux plein, pour ceux qui n’ont pas ces 41 annuités et demie de cotisations.
C’est une réforme qui nous fait économiser plus de 26 milliards d’euros d’ici 2020.
Tout cela pour vous dire que la France est totalement décidée à revenir à une gestion saine de ses dépenses publiques, et elle y parviendra.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
En décembre 2008, un partenariat stratégique a été instauré entre la France et le Brésil par les présidents SARKOZY et LULA .
C’est un partenariat exemplaire.
Et d’ailleurs, il suffit de citer quelques chiffres : les échanges économiques ont été multipliés par deux depuis 2003 entre la France et le Brésil pour un montant de 7,5 Milliards ; 500 entreprises françaises sont présentes au Brésil, ce qui représente 500 000 emplois locaux !
En 2009, le Brésil était la première destination des Investissements directs français à l’étranger, en dehors de l’Union européenne.
Aujourd’hui, la France est le quatrième investisseur au Brésil.
Des groupes comme Renault-Nissan, comme Peugeot, comme Michelin, comme Sanofi, comme Louis-Dreyfus, comme Publicis viennent récemment d’annoncer des investissements majeurs.
Et la proportion des PME françaises, dont plusieurs d’ailleurs m’accompagnent dans ce déplacement augmente régulièrement dans la part de marché française au Brésil.
Notre coopération industrielle et technologique est de très haut niveau, je veux mentionner tout particulièrement la défense, avec la coopération dans le domaine des hélicoptères, dans le domaine des sous-marins.
J’aurai d’ailleurs l’occasion de me rendre samedi sur la base navale d’Itaguaï, dans la banlieue de Rio de Janeiro pour constater ce travail que nous avons conduit ensemble, qui est un travail de véritable coopération, d’échange de technologie, de transfert de technologie, pour permettre au Brésil de se doter d’une puissance en termes militaires qui corresponde à la défense des intérêts de cet immense pays.
Cette coopération, nous souhaitons qu’elle puisse se développer encore, naturellement dans l’aéronautique où des débats sont engagés, dans le domaine du spatial, dans le domaine des trains à grande vitesse, parce que nos relations ont clairement dépassé le stade producteur-consommateur pour atteindre celui d’un véritable partenariat équilibré.
Comment améliorer encore la relation économique bilatérale et les investissements de part et d’autre ?
C’est pour répondre à cette question qu’un groupe de haut niveau regroupant des hommes d’affaires brésiliens et français a été créé en mai 2009.
Les propositions de ce groupe de haut niveau seront officiellement remises cet après-midi, à la présidente Dilma ROUSSEFF et à moi-même.
Je sais d’ailleurs que certains de ses membres sont parmi vous, et je veux notamment saluer le travail de ses deux Présidents, MM. Carlos GRUBISICH et Gérard MESTRALLET, auquel succèdera bientôt Jean-Pierre CLAMADIEU qui est le PDG de Rhodia.
Certaines de leurs recommandations de ce rapport sont d’ailleurs déjà réalisées, je pense à la signature d’une convention bilatérale en matière de sécurité sociale, ou encore l’intensification des échanges entre l’Agence Française de Développement et la Banque Nationale de Développement Economique et social au Brésil.
A travers ses propositions, ce rapport vient appuyer les grands projets de la coopération franco-brésilienne dans l’aéronautique, dans le spatial, dans la santé, dans les liaisons ferroviaires et dans l’énergie.
Et je pense que c’est vraiment sur la base de ce rapport, que nous devons passer à la vitesse supérieure. J’ai entendu tout à l’heure avec beaucoup de plaisir le président citer les domaines d’excellence de la France, ce qui l’attire à venir visiter Paris, je veux juste lui rajouter que certes nous avons les meilleurs vins du monde, la meilleure gastronomie du monde, mais nous fabriquons aussi les meilleurs trains à grande vitesse, les meilleurs avions de combat, nous avons une compétence en matière navale reconnue.
Enfin, nos relations sont aussi très fortes sur les plans universitaire, scientifique et linguistique.
La France est la deuxième destination pour les étudiants brésiliens étrangers, et la première pour les étudiants boursiers.
Il y a actuellement plus de 4.000 étudiants brésiliens qui sont en France. C’est un chiffre que nous voulons doubler avec la participation française au programme «Sciences sans frontière» que la Présidente ROUSSEFF a lancé. Et j’aurai l’occasion d’officialiser cet engagement cet après-midi à Brasilia.
Nos coopérations scientifiques couvrent un champ de disciplines très large. Pour qu’il porte ses fruits, nous travaillons ensemble à créer une Fondation franco-brésilienne pour la science et la technologie.
Evidemment, je veux dire un mot des Alliances françaises du Brésil. Les alliances françaises du Brésil constituent le réseau le plus ancien et le plus dense du monde, avec 39 implantations et plus de 35.000 élèves.
C’est pour la France un très grand sujet de fierté.
Voilà, Mesdames et Messieurs, il y a entre nous des affinités culturelles qui sont évidentes, et qui ont d’ailleurs encore bien des richesses à révéler.
Je suis particulièrement heureux de compter dans la délégation qui m’accompagne l’administratrice de la Comédie française, cette magnifique et très ancienne institution culturelle française et qui vient ici pour développer un vrai partenariat avec le Brésil.
Entre votre nation rénovée, votre nation enthousiaste, votre nation conquérante, et entre le continent européen, dont les forces sont intactes même s’il a besoin de retrouver cet enthousiasme et cet esprit conquérant qui est le vôtre, je vois beaucoup de dynamiques.
En tout cas, tout nous invite à aller de l’avant et c’est ce message simplement d’amitié et de confiance et surtout d’espérance que je suis venu aujourd’hui partager avec vous.
Source http://www.gouvernement.fr, le 16 décembre 2011