Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Cette visite au Maroc était pour moi dune très grande importance et elle se déroule dans dexcellentes conditions. Cest pour moi loccasion de rappeler quentre la France et le Maroc cest plus que de lamitié ; je serais tenté de dire que cest de lintimité depuis bien longtemps, aujourdhui et aussi demain. Le nouveau Maroc qui émerge peut compter sur le soutien de la France.
Jai été très sensible aux égards dont jai été lobjet ici : tout dabord à laudience que Sa Majesté ma accordée hier ; à la séance de travail que jai eue avec le chef de gouvernement. Nous avons aussi beaucoup travaillé hier, au cours dun dîner de travail allié à la bonne gastronomie, et depuis ce matin avec des échanges extrêmement constructifs.
Ce qui se passe ici depuis un an est, je crois, une référence, un modèle pour ce quil est convenu dappeler les Printemps arabes : une Constitution a été adoptée avec une très large majorité ; des élections législatives ont eu lieu dans dexcellentes conditions ; un nouveau gouvernement sest constitué Nous avons apporté le soutien de la France.
Cette avancée sur le chemin de la modernisation et de la démocratisation du Maroc, je le répète, est pour nous exemplaire. La France est donc plus que désireuse de resserrer ses liens avec le Maroc.
Sur le plan bilatéral, nous avons préparé pour la seconde moitié de lannée, comme la dit M. El Othmani, une rencontre de haut niveau entre nos dirigeants politiques, et nous avons déjà commencé à réfléchir sur lordre du jour de cette réunion.
La suggestion faite par mon collègue marocain de développer la coopération triangulaire entre la France, le Maroc et certains pays africains, est une piste tout à fait intéressante. Je constate que le Maroc est lui aussi confronté aux questions dimmigration, qui se posent partout dans le monde, et nous voulons de ce point de vue rapprocher nos politiques.
Je reviendrai sur les dossiers stratégiques de la coopération politique.
Dans le domaine de la coopération économique, je me réjouis de la prochaine mission de chefs dentreprise qui vont se rendre prochainement au Maroc pour voir comment nos entreprises peuvent investir encore davantage dans ce pays.
Concernant la coopération culturelle et linguistique, une saison culturelle France-Maroc est en préparation pour les prochains mois.
Cette coopération sinscrit également dans le cadre européen. Jai assuré le Maroc de notre soutien pour que le statut avancé qui lui a déjà été reconnu puisse avancer encore plus, sur un certain nombre de questions prioritaires. Laccord agricole a été conclu. Nous pensons quil faut maintenant avancer sur laccord plus général permettant dintensifier les échanges entre le Sud et le Nord de la Méditerranée.
De ce point de vue, je voudrais remercier le Maroc de son engagement dans lUnion pour la Méditerranée, qui reste plus que jamais une idée visionnaire. M. Amrani a été pendant une période le Secrétaire général de cette institution. Il est remplacé par un nouveau Secrétaire général marocain que nous connaissons, M. Fathallah Sijilimassi, qui est quelquun dune très grande qualité. La France compte donc sur le Maroc pour relancer cette coopération autour de la Méditerranée.
Enfin, pour ne pas être trop long, je voudrais aborder un certain nombre de sujets plus stratégiques. Dabord, la question du Sahara occidental. Jai fait une déclaration, je crois, très claire sur ce point. Le Maroc a fait des efforts considérables en mettant au point un dispositif indépendant et national de suivi des questions des droits de lHomme, en souvrant sur les procédures des Nations unies sur ces questions ; la proposition dautonomie me semble, aujourdhui, la solution réaliste qui permettrait davancer. Nous souhaitons avancer là aussi parce que le statu quo nest pas une bonne solution.
La France attache beaucoup dimportance au renforcement de lUnion du Maghreb. Je pense que le renforcement de la coopération régionale maghrébine est dans lintérêt des pays du Maghreb et des pays du Nord de la Méditerranée.
Enfin, jévoquerai notre coopération au niveau du Conseil de sécurité de lONU où le Maroc siège. Il a une voix écoutée et respectée. Nous sommes en train de travailler sur le dossier syrien ; comment ne pas être bouleversé par ce qui continue de se passer ; les massacres qui se succèdent. Cest une situation scandaleuse et jai dit à plusieurs reprises que cétait une tache morale sur le Conseil de sécurité que de ne pouvoir prendre une position claire et courageuse sur le drame syrien.
Nous sommes en train de discuter en ce moment dun projet de résolution qui permettrait darrêter les violences et de faciliter laccès de laide humanitaire. Mais nous voulons que ce projet de résolution soit cohérent et solide. Cest la raison pour laquelle nous demandons que le régime syrien respecte les engagements quil a déjà pris : cessation des violences, retrait de ses troupes dans les casernes, libération de tous les prisonniers dopinion et engagement dun processus politique de transition tel que formulé dans la proposition de la Ligue arabe. Et puis, nous naccepterons pas de mettre sur le même plan la répression du régime et les actes de ceux qui essayent de se défendre. Toutes les violences doivent sarrêter. Cest au régime syrien de stopper la répression implacable dont il a fait usage à Homs et dans dautres villes.
Voilà, sur tous ces sujets, nous nous sommes trouvés en convergence et je voudrais de nouveau remercier M. El Othmani de son hospitalité et de lexcellent climat de travail qui sest instauré entre nous. Ce nest pas la première fois que nous nous rencontrons ; nous nous sommes vus à Rome, à la réunion des 5+5, à Tunis lors de la réunion des amis du peuple syrien et le contact qui sest créé entre nous est très confiant.
Q - Sur la Syrie - La France, en tant que membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies peut-elle passer du stade du verbe au stade de laction ?
R - Je viens de vous dire ce que je pensais de la situation en Syrie. Cest scandaleux, inacceptable et la responsabilité du régime est dune très grande gravité, dont il devra rendre compte. Dailleurs, le Conseil de sécurité des Nations unies a évoqué lexistence de «crimes contre lhumanité» perpétrés par le régime de Bachar El-Assad.
Notre position est donc très claire. Que faire ? Je ne cesse depuis des mois et des mois de prendre des initiatives pour essayer de sortir de ce blocage actuel et nous sommes en train de travailler sur quatre fronts.
Tout dabord, au Conseil de sécurité. Je voudrais rappeler que sil y a blocage au Conseil de sécurité, si ce Conseil est resté muet jusquà présent, cest pour une raison très précise : cest que deux pays sopposent à ladoption dune résolution. Aujourdhui, nous sommes en train de travailler à un nouveau projet de résolution ; jen ai parlé, je ny reviens pas.
Le deuxième front sur lequel nous essayons davancer, cest celui du Groupe des amis du peuple syrien. À lorigine, cest une idée du président Sarkozy qui a été reprise par la Ligue arabe. La première réunion a eu lieu à Tunis et elle a réuni plus de 60 délégations. Nous préparons la deuxième réunion qui doit se tenir en Turquie dici quelques semaines. Vous allez me dire quil faut des décisions opérationnelles immédiatement, cest vrai, mais il existe une pression internationale extrêmement forte à la fois sur le régime et sur ceux qui bloquent ladoption dune résolution au Conseil de sécurité. Nous allons donc continuer.
La troisième chose que nous essayons de faire, cest de convaincre lopposition de se réunir, de se rassembler. Ils ne réussiront pas sils continuent de rester diviser. Il faut que les opposants qui sont à lextérieur se réunissent avec les opposants qui se trouvent à lintérieur. Il faut que ce Conseil national syrien soit ouvert à toutes les communautés : il faut quil y ait des Alaouites, des Sunnites, des Chrétiens et toutes les composantes de la société syrienne dans sa diversité au sein de ce Conseil et nous sommes prêts à les aider.
Enfin, quatrième point : la mission qui a été confiée à Kofi Annan qui est à la fois le représentant du Secrétaire général des Nations unies et celui la Ligue arabe. On connaît Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations unies. Cest un homme respecté sur toute la planète ; il est tenace et intelligent. Il a commencé à nouer des contacts avec tous les partenaires et jespère quil pourra réaliser sa mission, qui est extrêmement difficile On ne va pas créer despoirs trop rapides, mais on lui fait confiance pour arriver à trouver des voies pour débloquer la situation.
Q - Sur le Sahara et limmigration ?
R - Écoutez, sur le premier point, je crois que jai déjà amplement répondu. Il faut quon trouve une solution sous légide des Nations unies. La proposition du Maroc me semble la base la plus réaliste et la plus crédible pour sortir du blocage actuel. La solution passe par un dialogue entre lAlgérie et le Maroc et je suis heureux de voir que ces relations sont en train de saméliorer et de se réchauffer.
Sur le deuxième point, il ny a pas de changement fondamental dans la politique française dimmigration. Quest-ce que nous en disons ? Pour en avoir parlé avec M. El Othmani, je me rends compte que cest aussi une préoccupation partagée au niveau marocain puisque le Maroc est devenu un pays dimmigration.
La première chose que nous disons, cest que limmigration illégale est inacceptable, que cest un fléau à la fois pour le pays de départ, quelle vide souvent de ses ressources humaines et, par ailleurs, pour le pays daccueil qui nest plus capable aujourdhui dintégrer les immigrés trop nombreux. Par ailleurs, ceux-ci sont les proies de trafiquants dêtres humains - il suffit de voir ce qui sest passé pendant toute une période dans le Détroit de Gibraltar - les réseaux de traite humaine sont de véritables fléaux.
Donc, nous combattons limmigration illégale et nous coopérons dans ce domaine avec le gouvernement marocain, notamment pour la réadmission des immigrants illégaux qui se trouvent en France.
Deuxièmement, il y a limmigration légale. Aujourdhui, nous sommes en France devant une difficulté. La France est un pays très ouvert contrairement à ce qui est dit : il y a 180.000 immigrants légaux supplémentaires. Eh bien, compte tenu de la situation difficile dans laquelle se trouve léconomie française, aujourdhui, le taux de chômage très élevé, nous avons du mal à intégrer ces immigrants. Et ce nest pas un service à leur rendre, parce que sils arrivent en France pour ne pas trouver de travail et se retrouver à la rue, eh bien ce nest pas une bonne chose. Et donc, cest la raison pour laquelle nous souhaitons mieux organiser cette immigration légale.
Puis enfin, je voudrais insister sur un point qui est celui des étudiants. Je sais quil y a eu des inquiétudes un moment donné. La France est le troisième pays au monde daccueil des étudiants étrangers. Dabord, il y a les Etats-Unis, puis la Grande-Bretagne, et enfin la France. Et la communauté des étudiants marocains en France est la plus importante de toutes nos communautés détudiants. Il y a 30.000 étudiants marocains en France, cest pratiquement la moitié de tous les étudiants étrangers et nous en accueillons chaque année ..
Nous ne sommes pas fermés, il faut tout simplement être réaliste et nous en avons parlé, et je crois que, là aussi, nous pouvons coordonner nos politiques en bonne intelligence.
Je voudrais enfin ajouter un dernier point. Cest que sur les visas de courts séjours, qui, je sais, peuvent poser problème, 90 % des demandes - cest le chiffre que ma donné lambassadeur de France, et naturellement il est vrai - sont acceptées. Nous avons amélioré, aussi bien à Casablanca quà Fès, les conditions dans lesquelles se trouvent les personnes demandeuses de visas.
Vous voyez, il ny a pas de blocage, il y a des difficultés mais je suis sûr que les autorités marocaines peuvent le comprendre et que nous pouvons en parler.
Jai enfin indiqué quavec mon collègue de lIntérieur, nous étions prêts à supprimer les visas sur les personnes ou les fonctionnaires marocains qui sont titulaires dun passeport de service pour faciliter les choses étant bien entendu que nous améliorons là aussi le dialogue sur la réadmission et sur la délivrance des certificats consulaires.
Q - Sur la question du Sahara et de lUMA.
R - La France na pas à se substituer aux partenaires, cest à eux de régler le problème sous légide des Nations unies, mais je peux vous assurer que la France fait passer les bons messages aux parties en question pour leur dire : voilà, il faut sortir du blocage actuel ; et encore une fois, la proposition marocaine dun statut dautonomie me paraît la base la plus réaliste pour trouver une solution.
Q - Sur la question syrienne et sur le TGV.
R - Premièrement, sur le premier point, loption militaire, pour nous, nest pas à lordre du jour en Syrie. Sur le second point, je ne vois pas en quoi cette controverse pourrait contrarier les relations daffaires entre la France et le Maroc. Le Maroc est pour nous un partenaire économique de premier plan et si jai bien compris ce que mont dit mes interlocuteurs marocains, le Maroc souhaite continuer à développer ces relations. Jai parlé de la mission qui doit être conduite, prochainement, par M. Fourtou.
Sagissant du TGV, je voudrais dire seulement une chose sans me mêler des choix marocains. Cest le gouvernement marocain qui a choisi de faire un TGV. Partout en France où nous avons fait un TGV - et je parle en connaissance de cause parce que je suis maire dune ville, Bordeaux desservie par le TGV -, il a été synonyme de développement économique. Cela permet de rapprocher les grandes villes. Cela sest passé à Marseille, cela sest passé à Lille il y a bien des années, cest en train de se passer à Strasbourg et à Metz.. Le TGV ce nest donc pas seulement un chemin de fer, cest un lien économique très puissant.
Q - Sur lorganisation de limmigration légale.
R - Sur le premier point là aussi brièvement. Quest-ce que cest limmigration légale en France ? Cest dabord le regroupement familial. Il y a une personne en France qui souhaite faire venir sa famille. Nous avons déjà un certain nombre de conditions : il faut quelle ait un logement, un emploi, bien sûr et là nous avons prévu de vérifier avant le départ dans les consulats ou les ambassades, et enfin que les candidats à limmigration en France maîtrisent la langue française et adhèrent aux valeurs fondamentales de notre République. Cest très exactement la procédure qui est suivie en Allemagne, en Grande-Bretagne et dans dautres pays européens.
Deuxièmement, il y a limmigration économique. Dans certains secteurs de léconomie où il y a des possibilités demplois nous encourageons un certain nombre de candidats à limmigration qui peuvent trouver du travail tout en étant utiles à léconomie française. Voilà les principes qui sont les nôtres et, je le répète, cest très exactement ce que fait depuis longtemps le Canada, les États-Unis et beaucoup de pays européens.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 mars 2012
Cette visite au Maroc était pour moi dune très grande importance et elle se déroule dans dexcellentes conditions. Cest pour moi loccasion de rappeler quentre la France et le Maroc cest plus que de lamitié ; je serais tenté de dire que cest de lintimité depuis bien longtemps, aujourdhui et aussi demain. Le nouveau Maroc qui émerge peut compter sur le soutien de la France.
Jai été très sensible aux égards dont jai été lobjet ici : tout dabord à laudience que Sa Majesté ma accordée hier ; à la séance de travail que jai eue avec le chef de gouvernement. Nous avons aussi beaucoup travaillé hier, au cours dun dîner de travail allié à la bonne gastronomie, et depuis ce matin avec des échanges extrêmement constructifs.
Ce qui se passe ici depuis un an est, je crois, une référence, un modèle pour ce quil est convenu dappeler les Printemps arabes : une Constitution a été adoptée avec une très large majorité ; des élections législatives ont eu lieu dans dexcellentes conditions ; un nouveau gouvernement sest constitué Nous avons apporté le soutien de la France.
Cette avancée sur le chemin de la modernisation et de la démocratisation du Maroc, je le répète, est pour nous exemplaire. La France est donc plus que désireuse de resserrer ses liens avec le Maroc.
Sur le plan bilatéral, nous avons préparé pour la seconde moitié de lannée, comme la dit M. El Othmani, une rencontre de haut niveau entre nos dirigeants politiques, et nous avons déjà commencé à réfléchir sur lordre du jour de cette réunion.
La suggestion faite par mon collègue marocain de développer la coopération triangulaire entre la France, le Maroc et certains pays africains, est une piste tout à fait intéressante. Je constate que le Maroc est lui aussi confronté aux questions dimmigration, qui se posent partout dans le monde, et nous voulons de ce point de vue rapprocher nos politiques.
Je reviendrai sur les dossiers stratégiques de la coopération politique.
Dans le domaine de la coopération économique, je me réjouis de la prochaine mission de chefs dentreprise qui vont se rendre prochainement au Maroc pour voir comment nos entreprises peuvent investir encore davantage dans ce pays.
Concernant la coopération culturelle et linguistique, une saison culturelle France-Maroc est en préparation pour les prochains mois.
Cette coopération sinscrit également dans le cadre européen. Jai assuré le Maroc de notre soutien pour que le statut avancé qui lui a déjà été reconnu puisse avancer encore plus, sur un certain nombre de questions prioritaires. Laccord agricole a été conclu. Nous pensons quil faut maintenant avancer sur laccord plus général permettant dintensifier les échanges entre le Sud et le Nord de la Méditerranée.
De ce point de vue, je voudrais remercier le Maroc de son engagement dans lUnion pour la Méditerranée, qui reste plus que jamais une idée visionnaire. M. Amrani a été pendant une période le Secrétaire général de cette institution. Il est remplacé par un nouveau Secrétaire général marocain que nous connaissons, M. Fathallah Sijilimassi, qui est quelquun dune très grande qualité. La France compte donc sur le Maroc pour relancer cette coopération autour de la Méditerranée.
Enfin, pour ne pas être trop long, je voudrais aborder un certain nombre de sujets plus stratégiques. Dabord, la question du Sahara occidental. Jai fait une déclaration, je crois, très claire sur ce point. Le Maroc a fait des efforts considérables en mettant au point un dispositif indépendant et national de suivi des questions des droits de lHomme, en souvrant sur les procédures des Nations unies sur ces questions ; la proposition dautonomie me semble, aujourdhui, la solution réaliste qui permettrait davancer. Nous souhaitons avancer là aussi parce que le statu quo nest pas une bonne solution.
La France attache beaucoup dimportance au renforcement de lUnion du Maghreb. Je pense que le renforcement de la coopération régionale maghrébine est dans lintérêt des pays du Maghreb et des pays du Nord de la Méditerranée.
Enfin, jévoquerai notre coopération au niveau du Conseil de sécurité de lONU où le Maroc siège. Il a une voix écoutée et respectée. Nous sommes en train de travailler sur le dossier syrien ; comment ne pas être bouleversé par ce qui continue de se passer ; les massacres qui se succèdent. Cest une situation scandaleuse et jai dit à plusieurs reprises que cétait une tache morale sur le Conseil de sécurité que de ne pouvoir prendre une position claire et courageuse sur le drame syrien.
Nous sommes en train de discuter en ce moment dun projet de résolution qui permettrait darrêter les violences et de faciliter laccès de laide humanitaire. Mais nous voulons que ce projet de résolution soit cohérent et solide. Cest la raison pour laquelle nous demandons que le régime syrien respecte les engagements quil a déjà pris : cessation des violences, retrait de ses troupes dans les casernes, libération de tous les prisonniers dopinion et engagement dun processus politique de transition tel que formulé dans la proposition de la Ligue arabe. Et puis, nous naccepterons pas de mettre sur le même plan la répression du régime et les actes de ceux qui essayent de se défendre. Toutes les violences doivent sarrêter. Cest au régime syrien de stopper la répression implacable dont il a fait usage à Homs et dans dautres villes.
Voilà, sur tous ces sujets, nous nous sommes trouvés en convergence et je voudrais de nouveau remercier M. El Othmani de son hospitalité et de lexcellent climat de travail qui sest instauré entre nous. Ce nest pas la première fois que nous nous rencontrons ; nous nous sommes vus à Rome, à la réunion des 5+5, à Tunis lors de la réunion des amis du peuple syrien et le contact qui sest créé entre nous est très confiant.
Q - Sur la Syrie - La France, en tant que membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies peut-elle passer du stade du verbe au stade de laction ?
R - Je viens de vous dire ce que je pensais de la situation en Syrie. Cest scandaleux, inacceptable et la responsabilité du régime est dune très grande gravité, dont il devra rendre compte. Dailleurs, le Conseil de sécurité des Nations unies a évoqué lexistence de «crimes contre lhumanité» perpétrés par le régime de Bachar El-Assad.
Notre position est donc très claire. Que faire ? Je ne cesse depuis des mois et des mois de prendre des initiatives pour essayer de sortir de ce blocage actuel et nous sommes en train de travailler sur quatre fronts.
Tout dabord, au Conseil de sécurité. Je voudrais rappeler que sil y a blocage au Conseil de sécurité, si ce Conseil est resté muet jusquà présent, cest pour une raison très précise : cest que deux pays sopposent à ladoption dune résolution. Aujourdhui, nous sommes en train de travailler à un nouveau projet de résolution ; jen ai parlé, je ny reviens pas.
Le deuxième front sur lequel nous essayons davancer, cest celui du Groupe des amis du peuple syrien. À lorigine, cest une idée du président Sarkozy qui a été reprise par la Ligue arabe. La première réunion a eu lieu à Tunis et elle a réuni plus de 60 délégations. Nous préparons la deuxième réunion qui doit se tenir en Turquie dici quelques semaines. Vous allez me dire quil faut des décisions opérationnelles immédiatement, cest vrai, mais il existe une pression internationale extrêmement forte à la fois sur le régime et sur ceux qui bloquent ladoption dune résolution au Conseil de sécurité. Nous allons donc continuer.
La troisième chose que nous essayons de faire, cest de convaincre lopposition de se réunir, de se rassembler. Ils ne réussiront pas sils continuent de rester diviser. Il faut que les opposants qui sont à lextérieur se réunissent avec les opposants qui se trouvent à lintérieur. Il faut que ce Conseil national syrien soit ouvert à toutes les communautés : il faut quil y ait des Alaouites, des Sunnites, des Chrétiens et toutes les composantes de la société syrienne dans sa diversité au sein de ce Conseil et nous sommes prêts à les aider.
Enfin, quatrième point : la mission qui a été confiée à Kofi Annan qui est à la fois le représentant du Secrétaire général des Nations unies et celui la Ligue arabe. On connaît Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations unies. Cest un homme respecté sur toute la planète ; il est tenace et intelligent. Il a commencé à nouer des contacts avec tous les partenaires et jespère quil pourra réaliser sa mission, qui est extrêmement difficile On ne va pas créer despoirs trop rapides, mais on lui fait confiance pour arriver à trouver des voies pour débloquer la situation.
Q - Sur le Sahara et limmigration ?
R - Écoutez, sur le premier point, je crois que jai déjà amplement répondu. Il faut quon trouve une solution sous légide des Nations unies. La proposition du Maroc me semble la base la plus réaliste et la plus crédible pour sortir du blocage actuel. La solution passe par un dialogue entre lAlgérie et le Maroc et je suis heureux de voir que ces relations sont en train de saméliorer et de se réchauffer.
Sur le deuxième point, il ny a pas de changement fondamental dans la politique française dimmigration. Quest-ce que nous en disons ? Pour en avoir parlé avec M. El Othmani, je me rends compte que cest aussi une préoccupation partagée au niveau marocain puisque le Maroc est devenu un pays dimmigration.
La première chose que nous disons, cest que limmigration illégale est inacceptable, que cest un fléau à la fois pour le pays de départ, quelle vide souvent de ses ressources humaines et, par ailleurs, pour le pays daccueil qui nest plus capable aujourdhui dintégrer les immigrés trop nombreux. Par ailleurs, ceux-ci sont les proies de trafiquants dêtres humains - il suffit de voir ce qui sest passé pendant toute une période dans le Détroit de Gibraltar - les réseaux de traite humaine sont de véritables fléaux.
Donc, nous combattons limmigration illégale et nous coopérons dans ce domaine avec le gouvernement marocain, notamment pour la réadmission des immigrants illégaux qui se trouvent en France.
Deuxièmement, il y a limmigration légale. Aujourdhui, nous sommes en France devant une difficulté. La France est un pays très ouvert contrairement à ce qui est dit : il y a 180.000 immigrants légaux supplémentaires. Eh bien, compte tenu de la situation difficile dans laquelle se trouve léconomie française, aujourdhui, le taux de chômage très élevé, nous avons du mal à intégrer ces immigrants. Et ce nest pas un service à leur rendre, parce que sils arrivent en France pour ne pas trouver de travail et se retrouver à la rue, eh bien ce nest pas une bonne chose. Et donc, cest la raison pour laquelle nous souhaitons mieux organiser cette immigration légale.
Puis enfin, je voudrais insister sur un point qui est celui des étudiants. Je sais quil y a eu des inquiétudes un moment donné. La France est le troisième pays au monde daccueil des étudiants étrangers. Dabord, il y a les Etats-Unis, puis la Grande-Bretagne, et enfin la France. Et la communauté des étudiants marocains en France est la plus importante de toutes nos communautés détudiants. Il y a 30.000 étudiants marocains en France, cest pratiquement la moitié de tous les étudiants étrangers et nous en accueillons chaque année ..
Nous ne sommes pas fermés, il faut tout simplement être réaliste et nous en avons parlé, et je crois que, là aussi, nous pouvons coordonner nos politiques en bonne intelligence.
Je voudrais enfin ajouter un dernier point. Cest que sur les visas de courts séjours, qui, je sais, peuvent poser problème, 90 % des demandes - cest le chiffre que ma donné lambassadeur de France, et naturellement il est vrai - sont acceptées. Nous avons amélioré, aussi bien à Casablanca quà Fès, les conditions dans lesquelles se trouvent les personnes demandeuses de visas.
Vous voyez, il ny a pas de blocage, il y a des difficultés mais je suis sûr que les autorités marocaines peuvent le comprendre et que nous pouvons en parler.
Jai enfin indiqué quavec mon collègue de lIntérieur, nous étions prêts à supprimer les visas sur les personnes ou les fonctionnaires marocains qui sont titulaires dun passeport de service pour faciliter les choses étant bien entendu que nous améliorons là aussi le dialogue sur la réadmission et sur la délivrance des certificats consulaires.
Q - Sur la question du Sahara et de lUMA.
R - La France na pas à se substituer aux partenaires, cest à eux de régler le problème sous légide des Nations unies, mais je peux vous assurer que la France fait passer les bons messages aux parties en question pour leur dire : voilà, il faut sortir du blocage actuel ; et encore une fois, la proposition marocaine dun statut dautonomie me paraît la base la plus réaliste pour trouver une solution.
Q - Sur la question syrienne et sur le TGV.
R - Premièrement, sur le premier point, loption militaire, pour nous, nest pas à lordre du jour en Syrie. Sur le second point, je ne vois pas en quoi cette controverse pourrait contrarier les relations daffaires entre la France et le Maroc. Le Maroc est pour nous un partenaire économique de premier plan et si jai bien compris ce que mont dit mes interlocuteurs marocains, le Maroc souhaite continuer à développer ces relations. Jai parlé de la mission qui doit être conduite, prochainement, par M. Fourtou.
Sagissant du TGV, je voudrais dire seulement une chose sans me mêler des choix marocains. Cest le gouvernement marocain qui a choisi de faire un TGV. Partout en France où nous avons fait un TGV - et je parle en connaissance de cause parce que je suis maire dune ville, Bordeaux desservie par le TGV -, il a été synonyme de développement économique. Cela permet de rapprocher les grandes villes. Cela sest passé à Marseille, cela sest passé à Lille il y a bien des années, cest en train de se passer à Strasbourg et à Metz.. Le TGV ce nest donc pas seulement un chemin de fer, cest un lien économique très puissant.
Q - Sur lorganisation de limmigration légale.
R - Sur le premier point là aussi brièvement. Quest-ce que cest limmigration légale en France ? Cest dabord le regroupement familial. Il y a une personne en France qui souhaite faire venir sa famille. Nous avons déjà un certain nombre de conditions : il faut quelle ait un logement, un emploi, bien sûr et là nous avons prévu de vérifier avant le départ dans les consulats ou les ambassades, et enfin que les candidats à limmigration en France maîtrisent la langue française et adhèrent aux valeurs fondamentales de notre République. Cest très exactement la procédure qui est suivie en Allemagne, en Grande-Bretagne et dans dautres pays européens.
Deuxièmement, il y a limmigration économique. Dans certains secteurs de léconomie où il y a des possibilités demplois nous encourageons un certain nombre de candidats à limmigration qui peuvent trouver du travail tout en étant utiles à léconomie française. Voilà les principes qui sont les nôtres et, je le répète, cest très exactement ce que fait depuis longtemps le Canada, les États-Unis et beaucoup de pays européens.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 mars 2012