Lettre de M. Nicolas Sarkozy, candidat à l'élection présidentielle, adressée aux Mahorais, sur les efforts en faveur du département de Mayotte, le 1er avril 2012.

Prononcé le 1er avril 2012

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Mes chers compatriotes de Mayotte,

C’est la deuxième fois que je vous écris au sujet de l’avenir de Mayotte.
Lorsque je vous ai écrit pour la première fois, en 2007, j’avais pris des engagements importants pour l’avenir politique et institutionnel de votre territoire.
Je m’étais notamment engagé à transformer votre territoire en département d’outre mer, une revendication portée par toutes les générations qui se sont succédées dans l’île depuis Georges Nahouda en 1958, qui vous a été promise mais à chaque fois oubliée dès le lendemain des élections ; je m’étais engagé à vous protéger ainsi que vos biens ; à lutter contre l’immigration clandestine qui gangrène et hypothèque votre avenir ; à améliorer l’état sanitaire du territoire ; à désenclaver votre île au plan aérien par la mise en chantier de la piste longue ; à développer la politique du logement social ; à mettre en place une même justice pour tous, pour mieux garantir les droits de la femme mahoraise.
Tous ces engagements ont été tenus.
C’est ainsi que Mayotte est, depuis le 1er avril 2011, le 101e département de France ; dans le domaine de la lutte contre l’immigration et la sécurité, quatre radars sont implantés sur tout le territoire pour surveiller les côtes de l’île, et plus de 30 000 reconduites à la frontières ont été réalisées pour la seule année 2011 ; le plateau technique du Centre Hospitalier de Mayotte a été modernisé et une unité de dialyse vient d’ouvrir ses portes pour accueillir les nombreux patients originaires de l’île, jusqu’ici contraints de s’installer à la Réunion loin de leur famille ; les moyens de la justice républicaine ont été renforcés grâce à la création d’un Tribunal de Grande Instance de plein exercice à Mayotte, et au doublement du nombre de magistrats ; à l’instar de l’ensemble du territoire national, la quasi-totalité des foyers mahorais peut désormais recevoir les chaines nationales via la télévision numérique terrestre (TNT), tandis que le haut-débit internet est disponible à Mayotte depuis quelques jours.
La départementalisation s’est accompagnée de nombreuses avancées sociales pour les Mahorais : le Smig a été augmenté de 4% et sera aligné en 3 ans sur le niveau métropolitain ; le minimum vieillesse a été augmenté de 40%, passant de 2 871 € en 2009 à 4 071 € cette année ; l’allocation de rentrée scolaire a été multipliée par trois ; les allocations familiales ont été revalorisées ; le RSA a été introduit ; un système de retraite a été créé pour les travailleurs indépendants et les agriculteurs, etc.
Au total, les crédits budgétaires consacrés aux Mahorais ont augmenté de 300 millions d’euros depuis 2007.
En décidant de vous écrire à nouveau, et à la lumière de notre histoire commune, je veux vous proposer de poursuivre le rattrapage qui est nécessaire pour Mayotte dans tant de domaines. Ensemble, je souhaite que nous continuions à écrire l’avenir de Mayotte autour de quatre grandes priorités.
Ma première priorité, c’est la poursuite et la consolidation du statut politique et institutionnel de votre ile.
Le processus de départementalisation sera poursuivi avec détermination. Il est déjà bien avancé et plusieurs dispositions importantes vont encore entrer en vigueur dans les prochains jours. Je pense plus particulièrement à la revalorisation de l’allocation logement, qui permettra notamment aux Mahorais d’accéder aux logements sociaux.
En matière fiscale, l’alignement de Mayotte sur le droit applicable partout ailleurs en France s’accompagnera de toutes les mesures fiscales incitatives applicables dans les autres départements d’Outre-mer, comme les zones franches d’activité, afin de favoriser le développement des entreprises mahoraises.
L’application du plan de relance initié par l’État à Mayotte sera également accélérée, afin de permettre un véritable effet d’entraînement sur le reste de l’économie. C’est aussi l’objet du Fonds mahorais de développement, doté de 30 millions d’euros.
Je mènerai également à son terme le projet de piste longue à Mayotte, qui a déjà été très largement engagé depuis le début de mon quinquennat.
Enfin, je souhaite que nous arrivions, dès cette année, à doter Mayotte du statut de région ultrapériphérique européenne, ce qui contribuera massivement au développement de votre île. J’ai déjà signé la lettre demandant à la Commission européenne l’accès à ce nouveau statut. Les fonds européens permettront à Mayotte de rattraper nombre de ses retards en équipements publics. Les sommes sont considérables, près de 100 millions d’euros par an. Au-delà de l’enjeu financier, il s’agit aussi de permettre la reconnaissance, sur la scène internationale, de l’appartenance de Mayotte à la République française. Ce sera donc, si je suis réélu, une priorité incontournable pour mon second quinquennat.
Ma deuxième priorité, c’est le développement de l’emploi et notamment l’emploi des jeunes, sur une île dont 70 % de ses habitants sont âgés de moins de 25 ans.
C’est la raison pour laquelle je propose que les recrutements de jeunes de moins de 25 ans soient dispensés totalement de charges patronales, quel que soit le secteur d’activité concerné.
Dans le même temps, nous allons considérablement augmenter le nombre de jeunes Mahorais qui recevront une formation. Nous utiliserons l’ensemble des moyens à notre disposition : l’Agence pour la mobilité Outre-mer (LADOM), les régiments du Service militaire adapté, l’ouverture de nouveaux CFA pour les porter au moins au niveau de la moyenne nationale, le développement du service civique pour le porter à 7 500 volontaires sur l’Outre-mer.
C’est dans cet esprit que j’ai décidé sans tarder la création du Centre Universitaire et de Recherche de Mayotte implanté dans l’immédiat à l’Institut de Formation des Maitres de Dembeni dans l’attente de la construction des locaux qui lui seront proprement dédiés. L’impact de cette mesure est considérable car elle va favoriser le développement de la recherche, notamment dans le domaine maritime, et participer ainsi à la valorisation de votre lagon.
S’agissant de l’emploi, je n’oublie pas qu’une part significative de ceux qui travaillent à Mayotte relève de la fonction publique. Je souhaite proposer l’instauration d’une priorité régionale dans la fonction publique : je veux que davantage de Mahorais accèdent à des responsabilités au sein des services de l’État, pour que la haute fonction publique soit plus représentative de vos territoires.
J’ouvrirai donc des concours spécifiques sur chaque département d’Outre-mer lorsque l’État aura besoin de recruter des nouveaux agents, y compris de catégorie A. Tous les postes soumis à concours seront concernés par cette « priorité de première affectation » : éducation nationale, police, santé, préfecture… Il faudra bien entendu réussir le concours, mais, sous cette réserve, une priorité sera donnée aux Mahorais.
Je souhaite aussi permettre un retour plus facile au « pays » des fonctionnaires Mahorais en poste dans l’hexagone. Pour cela, je propose que la moitié des postes de fonctionnaires qui doivent être pourvus par mutation le soient par la CAP locale, alors que l’autre moitié continuera à l’être par la CAP nationale.
Enfin, dans le cadre de l’accession de Mayotte au statut de Région Ultrapériphérique de l’Union européenne, une politique de grands travaux sera menée sur Mayotte, ce qui permettra de donner du travail aux jeunes. Les projets ne manquent pas, qu’il s’agisse par exemple de la modernisation de la plateforme aéroportuaire de Pamandzi, de la construction du pont reliant les deux îles de votre archipel, de l’extension du Port de Longoni, de la relance des investissements touristiques, du soutien des activités agricoles et artisanales, etc. Nous ne pourrons pas tout faire, il faudra que vous choisissiez les projets qui vous paraissent prioritaires, avec l’État.
Ma troisième priorité pour Mayotte, c’est la consolidation et l’amplification des acquis sociaux dans votre département, qui s’inscrivent dans le prolongement de la politique que nous avons mise en oeuvre jusqu’ici.
De nombreuses mesures sociales ont été prises à la fin de l’année 2011. D’autres vont l’être prochainement. Cet effort de modernisation sociale sera poursuivi afin de permettre l’extension à Mayotte de l’ensemble des dispositifs sociaux en vigueur dans les autres départements sans hypothéquer le développement économique de l’île.
D’ores et déjà, nous avons fixé à 2014 l’égalité salariale entre Mayotte et la métropole, l’alignement de l’allocation de rentrée scolaire à 2015, alors que la bourse nationale sera alignée sur celle de la métropole dès cette rentrée scolaire.
L’alignement des autres minima sociaux sera poursuivi. Il concernera en priorité tout ce qui participe à la construction de l’enfant pour les besoins de son entretien et de sa formation.
Un autre sujet préoccupe de nombreux Mahorais, il s’agit des majorations de traitement pour les fonctionnaires. Je suis d’accord pour que les fonctionnaires de Mayotte puissent bénéficier de l’indexation. Je m’y engage si je suis réélu. Mais je veux aussi que chacun prenne ses responsabilités. L’État ne pourra pas payer les sur-rémunérations des agents des collectivités locales, et notamment du Conseil général. Il faudra donc que nous en discutions très en amont avec le Conseil général pour en définir les modalités et le calendrier, mais du côté de l’État, la réponse sera claire et positive.
Enfin, je m’engage à mener une action forte sur les prix : dans les six mois qui suivront mon élection, nous mettrons à plat, avec la grande distribution, l’ensemble des prix pratiqués Outre-mer. L’Autorité de la concurrence viendra vérifier que les écarts de prix correspondent bien à une réalité, comme l’éloignement, le coût du transport, les taxes locales… et pas à des marges substantiellement supérieures à ce qui est pratiqué en métropole. Si c’est le cas, les prix devront baisser. Si les entreprises ne jouent pas le jeu, alors je donnerai le pouvoir à l’Autorité de la concurrence de permettre l’arrivée d’un nouvel acteur sur le territoire. Je ne stigmatise personne, je veux simplement que les choses soient faites dans la plus grande transparence.
Ma quatrième priorité c’est de protéger les Mahorais contre toutes les insécurités.
Comme vous le savez, c’est déjà en tant que Ministre de l’Intérieur que j’ai décidé de lutter contre l’immigration clandestine à Mayotte, avec humanité et fermeté. Les résultats sont là : en 2011, on reconduit à la frontière, sur la seule île de Mayotte, presque autant d’étrangers en situation irrégulière que dans le reste de la France. Les quatre radars, dont j’ai décidé l’implantation sur tout l’archipel mahorais, et les fonctionnaires de police affectés à cette mission, y sont pour beaucoup.
Cette politique sera poursuivie avec la même détermination. C’est le meilleur moyen de vous protéger et d’assurer la paix civile dans vos villes et vos villages.
C’est pour cette raison que je m’oppose fermement au droit de vote des étrangers aux élections locales, que propose le candidat socialiste. C’est aussi ma façon de respecter la promesse que je vous ai faite de ne laisser personne décider de qui sera Français et qui ne le sera pas àMayotte. C’est ma façon d’affirmer que Mayotte, c’est la France.
Des récents faits divers dramatiques ont montré que la sécurité des personnes et des biens est un combat de tous les instants. En cette matière, rien n’est acquis définitivement. Sur ce plan, nous continuerons à mobiliser tous les moyens nécessaires pour assurer mieux encore votre sécurité, celle de vos enfants et de vos biens. En choisissant la France, vous avez choisi aussi la sécurité. L’État vous la doit. Je vous la promets.
Mes chers amis, je connais Mayotte pour y avoir séjourné en 2010 et m’être penché de très près sur tous les grands dossiers mahorais depuis près de 10 ans. Nous avons noué des liens forts tout au long de ce quinquennat. Mon déplacement à Mayotte, en janvier 2010 à l’occasion de la départementalisation, garde une place toute particulière dans mon coeur.
Depuis 2007, j’ai essayé de ne pas vous décevoir, en tenant tout simplement mes engagements et en m’investissant totalement à vos côtés lorsque c’est nécessaire. Aujourd’hui, c’est moi qui ai besoin de vous.
Vos défis sont nombreux ; ils sont aussi les miens. Je veux les relever avec vous, car c’est bien ensemble que nous les relèverons. C’est ma manière de vous respecter et, pourquoi ne pas le dire, de vous aimer.
Vive le département de Mayotte, Vive la République, et Vive la France !

Source http://www.lafranceforte.fr, le 19 avril 2012