Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs
C'est un grand plaisir d'être à nouveau parmi vous, quasiment trois ans après la mise en place du plan triennal de lutte contre la douleur. Entre temps, il y a eu pour moi un autre défi le Kosovo.
" La douleur n'est pas une fatalité refusons la " tel était le slogan de la campagne publique d'information lancée en 1998.
1- Que de chemin a été parcouru depuis ! La lutte contre la douleur a mobilisé.
Les initiatives ont été nombreuses portées par les équipes des consultations ou des centres de lutte contre la douleur ; neuf régions ont intégré cette thématique dans leur schéma régional d'organisation sanitaire. Ces initiatives contribuent, au jour le jour, à changer profondément les mentalités, les pratiques. Les personnes qui souffrent savent mieux, aujourd'hui, que la douleur se traite et sollicitent de plus en plus les soignants pour être soulagées. En terme, de moyens le bilan est en cours : de nombreuses consultations prenant en charge la douleur ont été créées. Nous étions à 60 en 1998, j'espère que nous aurons dépassé la centaine à la fin de l'année. Les unités de lutte contre la douleur ont été en trois ans quasiment doublées. En 2001, une enveloppe supplémentaire de 155 MF fléchés soins palliatifs et douleur avait pour objectif de renforcer ou créer de nouvelles structures. Je tiens beaucoup à ce qu le plan douleur soit évalué. La société française de santé publique y travaille. Nous aurons les principaux résultats à la fin de l'année. Ils nous permettront de mesurer le chemin parcouru et le chemin qu'il reste à parcourir.
Des stratégies structurées sont aujourd'hui développées pour l'évaluation de la douleur. Les outils proposés dans les recommandations de l'ANAES pour l'évaluation de la douleur chronique chez l'adulte et la prise en charge de la douleur aiguë chez l'enfant sont validés et surtout fidèles. Ils sont essentiels pour la pratique clinique. Il convient que dorénavant chaque professionnel se les réapproprie et les utilise dans sa pratique quotidienne. Il faut, bien sûr également poursuivre les actualisations dans ce domaine, accompagner la démarche des Standards - Options - Recommandations de la FNCLCC sur douleur et cancer et probablement mettre en chantier de nouvelles recommandations sur les douleurs chroniques bénignes ou les douleurs aiguës post-opératoires.
Nous travaillons sur l'élaboration d'un guide méthodologique pour aider les hôpitaux à définir leurs objectifs et leurs actions dans le domaine de la prise en charge de la douleur et pour encore mieux intégrer cette dimension dans leur projet d'établissement et dans leur contrat d'objectif et de moyens.
En matière d'organisation, nous réfléchissons à la structuration de l'hôpital. Une circulaire d'organisation des soins définira la place et le rôle des différents acteurs, en particulier la place des centres de lutte contre la douleur (les CLUD) et les conditions de réalisation des protocoles de soins. Enfin, je souhaite que les Français aient une meilleure lisibilité du dispositif de lutte contre la douleur et que la liste de consultations et des unités douleurs soit accessible. Les nouveaux moyens de communication comme internet nous permettent, aujourd'hui, de penser que c'est un objectif facilement réalisable.
En matière de traitement l'accès aux antalgiques majeurs a été facilité. De nombreux antalgiques ont été sortis de la réserve hospitalière afin de faciliter leur usage en médecine ambulatoire. La durée de prescription a été augmentée, le carnet à souche supprimé et la prescription par les infirmières d'antalgiques majeurs est aujourd'hui possible. Enfin, l'usage des pompes à morphine devient d'un usage beaucoup plus courant. Ces avancées sont majeures et marquent la volonté politique d'accompagner les changements de comportements par des mesures concrètes supprimant les obstacles qui apparaissaient comme de véritable frein à l'utilisation d'antalgiques.
Pour autant, il reste dans ce domaine encore des chantiers importants :
- Dans le domaine du médicament : il faut inciter l'industrie pharmaceutique à solliciter des AMM pour certains médicaments au titre de la douleur et à développer des formes pédiatriques d'antalgiques (évoquer ici le cannabis) ;
- Dans le domaine de l'organisation, il faudra poursuivre la réflexion sur les ordonnances sécurisées qui du fait de leur non-généralisation apparaissent encore trop souvent comme un obstacle à la prescription d'antalgique majeur. Enfin, bien sûr, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres l'organisation en réseaux de soins de la lutte contre la douleur a toute sa place. Je souhaite que le projet de loi de modernisation de santé permette de mieux asseoir les réseaux sur le plan juridique. Un article de loi sera consacré aux réseaux de santé. La question du financement des réseaux, sa mécanique, son ampleur est évidemment déterminante pour l'avenir. Il nous faut, en effet, de toute évidence harmoniser et simplifier les financements si nous souhaitons réellement accompagner et porter le développement des réseaux
2- Nous avons incontestablement progressé dans la lutte contre la douleur. Il nous faut aujourd'hui poursuivre notre action et ne pas relâcher l'effort entrepris si l'on veut inscrire durablement dans notre culture la lutte contre la douleur. Plusieurs axes me paraissent devoir être approfondis.
La formation reste un objectif prioritaire au sein des études médicales où elle doit plus systématique et intégrée pleinement dans l'enseignement de la pharmacologie et de manière transversale dans toutes les disciplines où la douleur apparaît comme une problématique majeure. Dix à douze heures sont aujourd'hui consacrées à la lutte contre la douleur dans le deuxième cycle d'études médicales, c'est mieux ; mais c'est loin d'être suffisant - Les infirmières disposent d'un nombre d'heures plus important. J'ai noté avec beaucoup d'intérêt que le CNU thérapeutique a ouvert ses portes à des enseignants " douleur ". Nous aurons donc des médecins MCU-PH et PU-PH nommés au titre de la douleur. Cette voie me paraît intéressante car je ne suis pas sûr, tant la lutte contre la douleur est une activité transversale, qu'il faille créer une nouvelle spécialité.
En formation continue, la tâche reste grande pour diffuser les bonnes pratiques cliniques et faire évoluer les comportements. Les équipes des centres de la douleur doivent être les fers de lance de cette formation. Je suis sûr que la Société d'Etude et de Traitement de la Douleur (la SETD) aura un rôle très important à jouer dans ce domaine.
Enfin, l'information des français est, également, crucial car le préalable au soulagement de la douleur passe d'abord par son expression auprès des soignants qui, alors, mettront en uvre les moyens dont ils disposent pour la soulager. Je sais que vous souhaitez faire des Etats Généraux de la douleur et élaborer région par région un livre blanc sur la douleur. Je vous accorde bien volontiers le parrainage du ministère de la santé pour l'ensemble de ces manifestations.
Messieurs Mesdames, Messieurs, il me reste à vous encourager dans vos travaux, dans votre réflexion. J'espère d'ici la fin de l'année proposer un nouveau plan gouvernemental, une suite au premier plan triennal qui se termine fin 2001. J'ai bien compris Monsieur le Président que l'organisation de la lutte contre la douleur doit se faire de concert avec celle engagée en matière de soins palliatifs mais pas seulement : la douleur chronique rebelle relève sans aucun doute de structures pluridisciplinaires spécialisées.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 29 juin 2001)
Mesdames, Messieurs
C'est un grand plaisir d'être à nouveau parmi vous, quasiment trois ans après la mise en place du plan triennal de lutte contre la douleur. Entre temps, il y a eu pour moi un autre défi le Kosovo.
" La douleur n'est pas une fatalité refusons la " tel était le slogan de la campagne publique d'information lancée en 1998.
1- Que de chemin a été parcouru depuis ! La lutte contre la douleur a mobilisé.
Les initiatives ont été nombreuses portées par les équipes des consultations ou des centres de lutte contre la douleur ; neuf régions ont intégré cette thématique dans leur schéma régional d'organisation sanitaire. Ces initiatives contribuent, au jour le jour, à changer profondément les mentalités, les pratiques. Les personnes qui souffrent savent mieux, aujourd'hui, que la douleur se traite et sollicitent de plus en plus les soignants pour être soulagées. En terme, de moyens le bilan est en cours : de nombreuses consultations prenant en charge la douleur ont été créées. Nous étions à 60 en 1998, j'espère que nous aurons dépassé la centaine à la fin de l'année. Les unités de lutte contre la douleur ont été en trois ans quasiment doublées. En 2001, une enveloppe supplémentaire de 155 MF fléchés soins palliatifs et douleur avait pour objectif de renforcer ou créer de nouvelles structures. Je tiens beaucoup à ce qu le plan douleur soit évalué. La société française de santé publique y travaille. Nous aurons les principaux résultats à la fin de l'année. Ils nous permettront de mesurer le chemin parcouru et le chemin qu'il reste à parcourir.
Des stratégies structurées sont aujourd'hui développées pour l'évaluation de la douleur. Les outils proposés dans les recommandations de l'ANAES pour l'évaluation de la douleur chronique chez l'adulte et la prise en charge de la douleur aiguë chez l'enfant sont validés et surtout fidèles. Ils sont essentiels pour la pratique clinique. Il convient que dorénavant chaque professionnel se les réapproprie et les utilise dans sa pratique quotidienne. Il faut, bien sûr également poursuivre les actualisations dans ce domaine, accompagner la démarche des Standards - Options - Recommandations de la FNCLCC sur douleur et cancer et probablement mettre en chantier de nouvelles recommandations sur les douleurs chroniques bénignes ou les douleurs aiguës post-opératoires.
Nous travaillons sur l'élaboration d'un guide méthodologique pour aider les hôpitaux à définir leurs objectifs et leurs actions dans le domaine de la prise en charge de la douleur et pour encore mieux intégrer cette dimension dans leur projet d'établissement et dans leur contrat d'objectif et de moyens.
En matière d'organisation, nous réfléchissons à la structuration de l'hôpital. Une circulaire d'organisation des soins définira la place et le rôle des différents acteurs, en particulier la place des centres de lutte contre la douleur (les CLUD) et les conditions de réalisation des protocoles de soins. Enfin, je souhaite que les Français aient une meilleure lisibilité du dispositif de lutte contre la douleur et que la liste de consultations et des unités douleurs soit accessible. Les nouveaux moyens de communication comme internet nous permettent, aujourd'hui, de penser que c'est un objectif facilement réalisable.
En matière de traitement l'accès aux antalgiques majeurs a été facilité. De nombreux antalgiques ont été sortis de la réserve hospitalière afin de faciliter leur usage en médecine ambulatoire. La durée de prescription a été augmentée, le carnet à souche supprimé et la prescription par les infirmières d'antalgiques majeurs est aujourd'hui possible. Enfin, l'usage des pompes à morphine devient d'un usage beaucoup plus courant. Ces avancées sont majeures et marquent la volonté politique d'accompagner les changements de comportements par des mesures concrètes supprimant les obstacles qui apparaissaient comme de véritable frein à l'utilisation d'antalgiques.
Pour autant, il reste dans ce domaine encore des chantiers importants :
- Dans le domaine du médicament : il faut inciter l'industrie pharmaceutique à solliciter des AMM pour certains médicaments au titre de la douleur et à développer des formes pédiatriques d'antalgiques (évoquer ici le cannabis) ;
- Dans le domaine de l'organisation, il faudra poursuivre la réflexion sur les ordonnances sécurisées qui du fait de leur non-généralisation apparaissent encore trop souvent comme un obstacle à la prescription d'antalgique majeur. Enfin, bien sûr, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres l'organisation en réseaux de soins de la lutte contre la douleur a toute sa place. Je souhaite que le projet de loi de modernisation de santé permette de mieux asseoir les réseaux sur le plan juridique. Un article de loi sera consacré aux réseaux de santé. La question du financement des réseaux, sa mécanique, son ampleur est évidemment déterminante pour l'avenir. Il nous faut, en effet, de toute évidence harmoniser et simplifier les financements si nous souhaitons réellement accompagner et porter le développement des réseaux
2- Nous avons incontestablement progressé dans la lutte contre la douleur. Il nous faut aujourd'hui poursuivre notre action et ne pas relâcher l'effort entrepris si l'on veut inscrire durablement dans notre culture la lutte contre la douleur. Plusieurs axes me paraissent devoir être approfondis.
La formation reste un objectif prioritaire au sein des études médicales où elle doit plus systématique et intégrée pleinement dans l'enseignement de la pharmacologie et de manière transversale dans toutes les disciplines où la douleur apparaît comme une problématique majeure. Dix à douze heures sont aujourd'hui consacrées à la lutte contre la douleur dans le deuxième cycle d'études médicales, c'est mieux ; mais c'est loin d'être suffisant - Les infirmières disposent d'un nombre d'heures plus important. J'ai noté avec beaucoup d'intérêt que le CNU thérapeutique a ouvert ses portes à des enseignants " douleur ". Nous aurons donc des médecins MCU-PH et PU-PH nommés au titre de la douleur. Cette voie me paraît intéressante car je ne suis pas sûr, tant la lutte contre la douleur est une activité transversale, qu'il faille créer une nouvelle spécialité.
En formation continue, la tâche reste grande pour diffuser les bonnes pratiques cliniques et faire évoluer les comportements. Les équipes des centres de la douleur doivent être les fers de lance de cette formation. Je suis sûr que la Société d'Etude et de Traitement de la Douleur (la SETD) aura un rôle très important à jouer dans ce domaine.
Enfin, l'information des français est, également, crucial car le préalable au soulagement de la douleur passe d'abord par son expression auprès des soignants qui, alors, mettront en uvre les moyens dont ils disposent pour la soulager. Je sais que vous souhaitez faire des Etats Généraux de la douleur et élaborer région par région un livre blanc sur la douleur. Je vous accorde bien volontiers le parrainage du ministère de la santé pour l'ensemble de ces manifestations.
Messieurs Mesdames, Messieurs, il me reste à vous encourager dans vos travaux, dans votre réflexion. J'espère d'ici la fin de l'année proposer un nouveau plan gouvernemental, une suite au premier plan triennal qui se termine fin 2001. J'ai bien compris Monsieur le Président que l'organisation de la lutte contre la douleur doit se faire de concert avec celle engagée en matière de soins palliatifs mais pas seulement : la douleur chronique rebelle relève sans aucun doute de structures pluridisciplinaires spécialisées.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 29 juin 2001)