Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur l'allocation personnalisée d'autonomie, au Sénat le 15 mai 2001.

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Circonstance : Présentation du projet de loi relatif à l'allocation personnalisée d'autonomie, au Sénat le 15 mai 2001

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Avant de vous présenter les dispositions du projet de loi sur la prise en charge des personnes âgées et l'allocation personnalisée d'autonomie, je crois nécessaire de remettre notre débat en perspective. Il s'inscrit en effet dans un contexte de véritable révolution démographique dont les conséquences sur le lien entre les générations, la place de la solidarité nationale, celle de la famille, sont considérables.
Ce nouveau contexte démographique, c'est bien sûr celui de l'allongement de l'espérance de vie et du vieillissement de la population. Quelques chiffres suffisent pour s'en convaincre : l'espérance de vie, passée pour les hommes depuis 1950 de 63 ans à 74 ans, et pour les femmes de 69 ans à 82 ans ; l'augmentation de la part des personnes âgées de plus de 60 ans dans la population, passée depuis 1950, de 16 % à 20 % ; celle des plus de 85 ans a quadruplé. Vous le savez, ces évolutions vont se poursuivre et s accentuer.
Cette évolution peut être une chance si nous savons relever les défis quelle nous adresse. C'est bien sûr la chance pour chacun d'entre nous de vivre plus longtemps. C'est aussi une chance pour la collectivité car les personnes âgées soutiennent de façon croissante les générations qui les suivent et ont un rôle social de plus en plus important.
Pour profiter pleinement de cette chance, il faudra savoir relever plusieurs défis. Il faut d'abord que nos régimes de retraite de base, et complémentaires, apportent aux salariés un revenu de remplacement satisfaisant. Ils y parviennent assez largement aujourd'hui grâce au système par répartition mis en place en 1945. La diminution régulière du nombre d'allocataires du minimum vieillesse nous le démontre.
Le gouvernement a par ailleurs entrepris d'apporter les réponses aux évolutions démographiques auxquelles vont être confrontées nos régimes de retraite, avec la création du fonds de réserve des retraites. L'Assemblée nationale en a adopté les dispositions la semaine dernière. Vous les examinerez très prochainement. La création du fonds de réserves devra être complétée par d'autres mesures concernant les régimes de retraites. C'est le rôle du Conseil d'orientation des retraites, que le gouvernement a installé l'année dernière, de réunir tous les acteurs concernés pour faire le point sur l'évolution des régimes.
J'entends beaucoup parler de l'allongement de la durée de cotisation. Mais quel sens cela peut-il avoir lorsque les salariés en fin de carrière sont écartés de l'emploi par les entreprises et lorsque l'on entre de plus en plus tard dans la vie active. Je ne peux donc que souligner la contradiction entre le souhait de voir allonger la durée de cotisation, soutenue par les représentants des employeurs et par l'opposition, et la mise à l'écart du marché du travail des salariés en fin de carrière que pratiquent les entreprises et que ne dénonce pas l'opposition.
C'est pour cela que la première priorité est d'abord de donner la possibilité à chacun de pouvoir travailler jusqu'à l'âge légal de la retraite. Cela nécessite de faire évoluer les mentalités, de prévenir l'usure au travail, d'adapter les emplois en fonction de l'âge des salariés, d'assurer un droit à la formation tout au long de la vie pour maintenir les compétences. Ces relations entre âge et travail sont un enjeu essentiel pour nos politiques d'emploi et pour l'avenir de notre système de retraite. Le Conseil d'orientation des retraites organisait d'ailleurs un colloque sur ce thème récemment.
Enfin, et c'est l'objet de ce projet de loi, il faut garantir aux personnes âgées la préservation de leur autonomie lorsqu'elles sont confrontées à la diminution de leur autonomie physique ou intellectuelle lorsque survient le grand âge, et que l'accomplissement sans être aidé des gestes de la vie quotidienne devient difficile, voire impossible. Il faut penser au désarroi des personnes qui ne peuvent plus manger seules, se laver seules, se déplacer seules.
Notre société n'a pas jusqu'à présent apporté les réponses adaptées à la perte d'autonomie des personnes âgées. La prestation spécifique dépendance n'a pas été à la hauteur des attentes. Son bilan est connu.
Finalement, ce sont les familles qui sont amenées à supporter l'essentiel de l'effort pour assurer la prise en charge. Je reçois régulièrement des lettres de familles, d'enfants, de conjoints, qui me disent leur désarroi face à la perte d'autonomie de leurs proches. Les difficultés financières, la détresse affective, le sentiment de culpabilité des enfants, mais aussi des personnes âgées, se mêlent pour faire de la perte d'autonomie un drame individuel et social.
Notre pays ne peut plus accepter une situation où faute de reconnaître aux personnes âgées les besoins qui sont les leurs, on se trouve réduit à l'alternative entre le maintien à l'hôpital ou la vie en établissement, faute de possibilité de prise en charge à domicile. Or, il existe des solutions. Lors d'un déplacement récent à Marseille avec Paulette Guinchard-Kunstler, les échanges que j'ai pu avoir avec les salariés d'une association d'aide à domicile et un centre gériatrique m'ont confirmé qu'il existe des initiatives qui pourraient faire école.
Il faut donc reconnaître la prise en charge de la perte d'autonomie comme un nouveau droit. Celui de choisir la vie que l'on entend mener. La mise en uvre de ce nouveau droit implique, bien évidemment de dépasser les cadres institutionnels, financiers, dans lesquels la prise en charge est actuellement inscrite. Cela veut dire concrètement rompre avec une logique d'aide sociale. Cela veut dire faire intervenir la solidarité nationale.
C'est l'objectif poursuivi par le projet de loi que je vous présente aujourd'hui et que le débat à l'Assemblée nationale a permis d'améliorer. Il constitue une avancée sociale majeure.
I-La création de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) crée un nouveau droit, à la fois universel, égal et personnalisé en fonction de la situation particulière de chaque bénéficiaire.
L'universalité signifie qu'il n'y aura pas de plafond de ressources. Toute personne dont la perte d'autonomie justifie qu'elle soit aidée pourra en bénéficier, en fonction seulement de son degré de perte d'autonomie et de ses ressources.
Ce nouveau droit sera égal et objectif. C'est une réponse à la principale insuffisance des dispositions actuellement en vigueur. Il y aura donc un barème national garantissant l'égalité du montant de l'aide sur tout le territoire à condition égale d'autonomie et de ressources.
Très concrètement, il sera étendu aux personnes moyennement dépendantes. Il s'agit des personnes qui ont conservé une certaine autonomie, pouvant se déplacer seules à l'intérieur de leur logement, s'alimentant généralement seules, mais qui ont besoin d'être aidées pour la toilette ou l'habillage. Ce sont ainsi environ 260 000 personnes, aujourd'hui exclues de la PSD, qui pourront prétendre à l'APA et que le langage technique qualifie de " GIR 4 ".
Ce barème prévoira une participation des bénéficiaires en fonction de leurs ressources. Ainsi, à domicile, une personne sans autonomie (GIR 1) dont les ressources ne dépassent pas 6 000 F / mois aura droit à 7 000 F d'allocation. Par comparaison, une personne également sans autonomie, dont les ressources dépassent 20 000 F / mois aura droit à 1 400 F d'allocation.
Pour les bénéficiaires de la prestation les plus autonomes (GIR 4), celle-ci ira de 600 F / mois pour les plus aisés à 3 000 F / mois pour ceux dont les ressources sont inférieures à 6 000 F.
Alors qu'aujourd'hui avec la PSD, 135 000 personnes sont aidées, avec l'APA en régime de croisière, ce sera près de 800 000 qui bénéficieront de cette aide.
L'allocation personnalisée d'autonomie prendra enfin en compte la situation de chaque personne. C'est le principe d'un droit personnalisé. On pourrait dire un droit " sur mesure ", aussi bien à domicile qu'en établissement.
À domicile, l'allocation d'autonomie prendra pour les bénéficiaires la forme de " plans d'aide ", qui seront un véritable droit de tirage pour les personnes âgées. Dans la limite de ce droit de tirage, elles pourront financer toutes les actions qui auront été reconnues nécessaires.
Les heures de ménage, le portage de repas, des travaux d'aménagement du logement, des transports, certaines activités de socialisation, pourront ainsi être prises en charge par l'APA. Le défi de l'APA c'est donc d'instaurer une prise en charge globale de la perte d'autonomie.
Pour les personnes accueillies dans les maisons de retraite, la nouvelle allocation constitue aussi un droit personnalisé.
Les besoins nécessaires à la prise en charge des personnes âgées seront désormais précisément mesurés dans chaque établissement et serviront de base au calcul de l'allocation. Cela permettra de tenir compte des coûts précis de l'établissement dans lequel la personne âgée est accueille, et donc, comme à domicile, de personnaliser l'allocation en fonction des dépenses réelles supportées, du fait de la perte d'autonomie.
Parallèlement au bénéfice de l'allocation personnalisée d'autonomie, les personnes accueillies dans les maisons de retraite bénéficieront aussi dans le cadre de la nouvelle tarification, d'une baisse du tarif hébergement, qui contribuera beaucoup à les solvabiliser. Elles bénéficieront aussi de la mise en place d'un important plan de médicalisation, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir, et qui permettra de renforcer considérablement l'accompagnement quotidien dans les maisons de retraite.
II-La réussite de l'allocation personnalisée d'autonomie implique d'accorder une grande attention aux modalités de mise en uvre et de financement. Il s'agit en effet de concilier une gestion de proximité, décentralisée, avec l'intervention de la solidarité nationale pour le financement.
La proximité est un impératif. Le contenu du plan d'aide sera l'objet d'un dialogue approfondi entre le bénéficiaire et les équipes médico-sociales. Celles-ci doivent aller chez la personne âgée, évaluer son niveau de perte d'autonomie, discuter avec elle des aides qui lui seraient nécessaires, afin de proposer à la personne âgée un " plan d'aide " qui répondra à des choix. Cela nécessite d'avoir des équipes de terrain, de connaître les services d'aide à domicile disponibles localement, bref, de pouvoir faire de la coordination gérontologique.
C'est pourquoi le projet de loi confirme la compétence des départements dans la mise en uvre de cette nouvelle allocation en les associant étroitement aux caisses de retraite. Les équipes médico-sociales qui examineront les plans d'aide seront composées de personnels départementaux et de personnels des caisses.
Le choix du département répond à une certaine vision de la décentralisation, selon laquelle il faut rapprocher la décision de chacun des citoyens. La décentralisation n'est pas incompatible avec l'égalité des droits. Ce qui compte vraiment, c'est l'efficacité de la mise en uvre.
L'objectif poursuivi est de généraliser les partenariats qui existent déjà dans nombre de départements, dans un souci de pragmatisme et d'efficacité. Il s'agit en effet d'assurer la mobilisation de tous les moyens existants, des différents savoir-faire.
J'en viens maintenant au financement. Il reposera sur la reconduction des moyens existants des départements et un effort supplémentaire de leur part, ainsi que sur une contribution des caisses de retraite, pour un total d'environ 11,5 MdsF. Le solde sera assuré par l'utilisation de la contribution sociale généralisée (CSG), à hauteur d'environ 5 MdsF.
J'ai entendu les préoccupations des conseils généraux sur les effets de la mise en uvre de l'APA sur les budgets des départements. Je comprends que les exécutifs départementaux y soient attentifs.
C'est vrai que la loi conduira à une dépense supplémentaire pour les départements. Celle-ci correspondra à la reconstitution de l'effort au niveau de celui de 1996, avant la mise en uvre de la PSD qui s'est traduit par une baisse des dépenses par rapport à l'allocation compensatrice tierce personne (ACTP), et à une dépense supplémentaire de 2,5 MdsF, tandis que la solidarité nationale fera un effort supplémentaire d'environ 5 MdsF avec la CSG.
Pour mesurer la portée de cet effort supplément demandé aux départements, je crois qu'il faut d'abord bien prendre conscience de l'enjeu majeur que constitue ce projet de loi pour l'institution départementale.
Il faut aussi regarder ce qu'a été la dynamique des dépenses des départements en matière d'aide aux personnes âgées sur les dernières années. D'après les données de l'Assemblée des départements de France (ADF), les dépenses d'aide sociale à l'hébergement (ASH), ont baissé de près de 1 % entre 1997 et 1999. Les dépenses d'aide ménagère à domicile ont baissé de 14,2 %. Quant on sait que les dépenses d'aide à la tierce personne ont également baissé, du fait du passage de l'ACTP à la PSD, on voit qu'il existe finalement des marges de manuvre. Au surplus convient-il de préciser que cette évolution des dépenses se rapporte à des recettes qui, elles, augmentent.
Il existe des raisons structurelles à cette baisse tendancielle des dépenses. En effet, l'aide sociale aux personnes âgées vient soutenir les plus démunies de cette population. Comme l'arrivée à maturité de nos régimes de retraite, et l'amélioration de l'emploi augmente régulièrement le niveau moyen des pensions, il est inévitable que l'aide sociale intervienne moins, et il y a tout lieu de s'en féliciter. Cette évolution va bien entendu se poursuivre.
La fraction de CSG, ainsi que la contribution des régimes de retraite, seront affectées à un nouvel établissement public, le fonds national pour le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie.
Il en redistribuera le produit aux départements, en fonction de critères de péréquation permettant de tenir compte des différences démographiques (notamment du nombre de personnes âgées) et de richesses.
Les modalités précises de cette péréquation font l'objet d'un travail que nous avons engagé avec Paulette Guinchard-Kunstler et Daniel Vaillant qui a la charge des collectivités territoriales. L'Assemblée des départements de France et le comité des finances locales seront bien entendu associés à ce travail.
Le recours à la CSG pour assurer l'équilibre du financement de l'APA correspond à la logique de solidarité nationale sur laquelle repose ce nouveau droit. La CSG en est la meilleure expression du fait de son universalité et de son assiette.
Son affectation au fonds de financement de l'APA est tout aussi logique. J'ai vu ici ou là que l'on s'interrogeait sur la création d'un nouveau fonds. Mais on ne peut pas vouloir une chose et son contraire. La création de cet établissement public national constitue une nécessité pour reconnaître, sur le plan institutionnel et politique, la perte d'autonomie comme un nouveau droit, et pour affecter une fraction de CSG au financement de la nouvelle prestation.
L'objectif du gouvernement est donc double : la reconnaissance d'un nouveau droit dans le cadre de la solidarité nationale sur le plan des principes, la recherche de l'efficacité dans un cadre local et de ce fait pragmatique pour la mise en uvre.
III-Particulièrement constructif et dépassant souvent les clivages partisans, le débat à l'Assemblée nationale a permis d'améliorer sur plusieurs points ce projet de loi.
Un large accord s'est ainsi dessiné sur la nécessité d'améliorer les modalités d'évaluation de la perte d'autonomie et des besoins qu'elle induit. L'Assemblée nationale a adopté, avec l'accord du gouvernement, un amendement prévoyant la mise en place d'un comité scientifique pour améliorer la grille sur laquelle repose l'évaluation de la perte d'autonome. En effet, tout en étant un outil utile et qui a constitué un progrès important, la grille dite " AGGIR " demeure perfectible pour mieux prendre en compte les facteurs d'environnement. Les travaux de ce comité scientifique pourront ainsi être pris en compte lors de l'élaboration du bilan de la loi en 2003.
Le gouvernement a également accepté deux amendements sur la mise en uvre de l'APA pour les personnes âgées hébergées dans les maisons de retraite. En effet, la mise en uvre de l'APA s'effectuant alors qu'une nouvelle tarification se met en uvre, il a paru nécessaire aux députés de prévoir des dispositions permettant de mieux aménager la transition entre les deux systèmes.
C'est ainsi qu'un premier amendement prévoit la possibilité pour les départements d'expérimenter le versement de l'APA sous forme de dotation globale. Le second instaure un régime transitoire permettant aux personnes de bénéficier de l'APA dans l'hypothèse où l'établissement d'accueil ne serait pas en mesure d'appliquer la nouvelle tarification au début 2002.
Le débat à l'Assemblée nationale a également permis d'améliorer la transparence sur la mise en uvre de la loi et particulièrement sur les aspects financiers.
Un premier amendement concerne l'institution d'un conseil de surveillance du fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, où siégeront des représentants des deux assemblées, des départements, des usagers, des personnalités qualifiées. L'ensemble des acteurs pourront ainsi être associés au suivi de la mise en uvre de la loi.
Le second, très important également, prévoit la transmission par le gouvernement d'un rapport au Parlement chaque année à l'automne. Le Parlement disposera ainsi de toutes les informations financières nécessaires pour l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances.
Il est enfin un sujet qui a fait l'objet de nombreux débats, c'est celui de la récupération sur les successions.
Elle pose le problème du partage entre la solidarité familiale, qu'il faut maintenir bien sûr, et la solidarité nationale. Beaucoup considèrent que la récupération sur les successions caractérise l'aide sociale.
Le gouvernement avait dans son projet assoupli les modalités de récupération sur les successions, tout en indiquant qu'il attendait du débat de la représentation nationale qu'il permette de faire émerger une position la plus largement partagée sur cette question.
Comme vous le savez à l'issue de ce débat, l'Assemblée nationale a voté à 1'unanimité -moins une voix- la suppression de la récupération sur les successions et les donations pour les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie, le gouvernement ayant choix de s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée nationale, ce dont je ne me repends pas.
Ce vote de l'Assemblée nationale se comprend, dès lors que l'allocation personnalisée d'autonomie n'est pas une prestation d'aide sociale, mais obéit à des règles nationales.
IV-Enfin la mise en uvre de ce nouveau droit doit permettre une prise en charge de qualité.
Dans cette perspective, plusieurs mesures ont déjà été annoncées. Je les rappelle ici :
1- La diffusion progressive des centres locaux d'information, de liaison et de coordination (CLIC) d'ici 2005, qu'avait suggérée Paulette Guinchard-Kusntler. Les CLIC pourront apporter plusieurs types de services aux personnes âgées et à leur famille. Installés dans les locaux d'associations, de départements, de préfectures, de conseils généraux ou encore de centres Communaux d'action sociale ou de maisons de retraite, ils sont d'abord un lieu d'information sur les droits et les possibilités de prise en charge. Les CLIC ont aussi vocation à aider les personnes dans leurs démarches avec les différentes administrations et les prestataires de services. Enfin, les CLIC pourront également assurer la coordination des différents services de prise en charge ou participer à l'évaluation des besoins.
Le réseau des CLIC maillera ainsi le territoire au niveau des bassins de vie et offrira aux personnes âgées et à leur famille une " porte d'entrée " dans le dispositif de prise en charge. Vingt-cinq sites ont démarré une expérimentation en 2000. 70 MF ont été prévus dans la loi de finances pour les étendre en 2001.
2- Un plan de médicalisation pour les établissements d'un montant de 6 MdsF sur cinq ans et de 1,2 MdsF pour les services de soins infirmiers à domicile. Il permettra ainsi de renforcer considérablement les moyens affectés à l'accompagnement quotidien des personnes hébergées.
Je souligne que ce plan représente une augmentation de près de 50 % des crédits d'assurance maladie destinés aux établissements et services pour personnes âgées.
Dans le cas des services de soins infirmiers à domicile, nous doublons l'effort annuel de créations de places, en passant de 2 000 à 4 000 places par an. Cela permettra en cinq ans d'augmenter d'environ 1/3 le nombre de places.
3- L'exonération totale de charges sociales patronales pour les salariés des services d'aide à domicile.
Je souhaite aujourd'hui apporter une attention particulière à l'aide à domicile, car les personnes âgées souhaitent le plus souvent rester chez elles. C'est grâce à l'aide à domicile que peut être évitée ou retardée l'entrée dans les établissements.
Il s'agit d'inciter les personnes âgées à recourir aux services d'aide à domicile, qui apportent généralement une meilleure qualité et plus de continuité dans la prise en charge. Il faut cependant laisser la liberté de choix aux personnes âgées et à leur famille, et penser aussi aux contraintes pratiques qui ne permettent pas toujours d'organiser une prise en charge par l'intermédiaire d'un service.
Dans cette perspective, le projet de loi prévoit que l'équipe médico-sociale proposera quel est le mode d'intervention -emploi direct ou service prestataire- qui lui paraît le plus approprié compte tenu de la situation de la personne, dans le cadre d'un dialogue avec la personne âgée et sa famille. Si celle-ci est sans autonomie, il lui sera proposé prioritairement un service d'aide à domicile, car la continuité et la professionnalisation qu'apporte un service d'aide à domicile sont déterminants dans ce cas. À cet effet, le montant de l'aide pourra également être modulé pour tenir compte des différences de qualité. Mais la personne âgée ou sa famille gardera une liberté de choix.
Il reste que pour développer ce recours aux services de professionnels, dans l'intérêt même des personnes âgées, il faut s'en donner les moyens. À cet égard, l'aide à domicile doit trouver des financements.
Le secteur a également besoin d'être modernisé. Les salariés doivent être correctement rémunérés. Ils doivent être mieux formés. Leurs conditions de travail doivent être améliorées.
La création de l'APA est bien sûr une réponse primordiale, puisqu'elle permettra une meilleure solvabilisation des personnes âgées, et donc facilitera le recours aux associations. La demande qui leur est adressée va donc s'accroître.
Pour y faire face, il faut accentuer notre soutien à une offre de qualité. Pour cela le projet de loi crée un fonds de modernisation de l'aide à domicile, dont l'objet sera de financer des actions de formations de soutien à l'encadrement, de développement des services, et de toutes mesures susceptibles de favoriser la professionnalisation du secteur. Je vais engager dès maintenant des discussions avec les professionnels de l'aide à domicile sur les modalités de fonctionnement de ce fonds.
Je crois qu'il est important de souligner la nouveauté que constitue ce fonds : pour la première fois, l'État se dote d'un outil budgétaire permettant de conduire une politique nationale dans le secteur de l'aide à domicile.
Le gouvernement entend faire en sorte que l'APA puisse être versée dès le mois de janvier 2002. Cela nécessite que les décrets d'applications soient préparés très rapidement. Je m'y engage. Le Parlement y sera bien entendu associé. Cela suppose aussi un travail de terrain pour préparer la mise en uvre pratique de la loi. Nous avons, Paulette Guinchard-Kunstler et moi-même, commencé.
* * *
C'est donc une politique ambitieuse que le gouvernement entend mettre en uvre pour apporter une réponse adaptée aux questions que pose la perte d'autonomie des personnes âgées.
C'est une tâche difficile, mais ce projet de loi permettra de surmonter ces difficultés. J'ai entendu les aspirations à la création d'un cinquième risque de sécurité sociale. Je ne pense pas utile de polémiquer sur les termes. Ce qui compte, c'est de reconnaître un droit suffisant, fondé sur le principe d'égalité, apprécié sur une base objective.
Non pas que les questions de gestion soient secondaires. Elles sont au contraire déterminantes pour assurer une mise en uvre de ce nouveau droit dans de bonnes conditions. Mais plutôt que de se reposer sur un dispositif théorique, je crois plus constructif de rechercher un objectif d'efficacité.
C'est précisément ce que réalise le projet du gouvernement. Il permet une vraie rupture au regard de l'aide sociale. L'APA n'en présente d'ailleurs aucune des caractéristiques : elle n'est pas réservée à une population de personnes sans ressources ou à très faibles revenus ; elle n'est pas subsidiaire par rapport à la mise en uvre de droits sociaux ; elle est identique et universelle pour tous, sur tout le territoire. L'APA est donc bien une prestation de solidarité nationale.
Créer ce droit à l'autonomie pour les personnes âgées, c'est refuser que la vieillesse ne soit réduite à n'être q'une catégorie dépendante socialement et économiquement pour rejoindre les pays européens les plus en avance.
C'est donc une très grande avancée sociale que nous vous proposons de réaliser avec ce projet de loi. Nous pouvons encore l'améliorer ensembles, comme nous l'avons déjà fait à l'Assemblée nationale.

(source http://www.social.gouv.fr, le 30 mai 2001)